Citations sur Les marches de l'Amérique (70)
Instinctivement, les hommes se redressaient et rectifiaient leur tenue, déglutissant, la gorge serrée, tandis que des fantasmes de chair et de possession, débridés et honteux, montaient des entrailles des plus vertueux, et que les autres, plus prosaïques, s’empressaient de comparer les fonds dont ils pouvaient disposer au prix qu’ils imaginaient être celui de cette fille.
Tom et Pigsmeat entrèrent dans la salle dans une explosion de lumière qui s’estompa aussitôt quand ils refermèrent la porte derrière eux. Un homme était étendu face contre terre, près d’un mur. Ils entendirent les mouches qui l’exploraient, et la pièce empestait la sueur, l’alcool et le tabac, ainsi que l’odeur âcre et brûlante des murs qui cuisaient sous le soleil.
Le soir, il marchait en suivant le soleil qui s'enfonçait dans d'étranges horizons.Ils voyait des ciels rouges, des ciels jaunes et puis des ciels si bleus dans le long crépuscule qu'ils en devenaient violets et fantastiques, rehaussés par le scintillement d'étoiles froides chaperonnées par la comète qui plongeait vers l'ouest.
Les deux hommes puaient l’alcool, la sueur, la fumée et la viande grillée. Flora se tenait toujours près du lit, les doigts inextricablement entortillés, faisant de ses mains un étrange nœud qui ne pouvait être défait que par la violence.
La vie, ce n'est que ça, dit-il à Pigsmeat,une absence de but en dehors de la nourriture, d'un abri et d'un peu de chaleur. Ils finissent tous paumés, poursuivit-il, ceux qui cherchent à donner un but à leur vie...
Le matin, l'herbe était couverte de perles de rosée et tendue de toiles d'araignée argentées, et tout résonnait de chants d'oiseaux. Le vent aplatissait l'herbe dans un sens, puis dans l'autre.
Quand il leur arrivait de se parler, c'étaient des grognements et des bouts de phrases qui raccourcissaient tout mais pas ce qu'ils voulaient dire- la façon de communiquer des gens qui s'aiment ou de ceux qui se connaissent bien et qui partagent un language bien à eux.
Bon, alors, qu'est-ce que la Mort, sinon une vaste fraternité fourmillante où nous devons tous nous retrouver un jour ? Où nous serons tous réunis le moment venu, hommes et femmes. Et les enfants, et les animaux familiers et toute créature sur terre. Alors, la Mort n'est pas du tout la Mort, mais quelque chose d'autre que nous sommes incapables de concevoir. Mais je vous dis ceci. Si la Mort n'est rien d'autre qu'un grand rassemblement, alors ce que j'ai connu de la vie est son contraire. La vie, c'est la solitude, et rien d'autre.
- Si ce n'est pas l'Amérique, alors qu'est ce que c'est ?
- Rien dont je me souvienne lui rétorque Pigsmeat. Regarde un peu. Qui aurait envie de vivre là-bas, à part les sauvages et les fous ?
S'attarder sur quelque chose qui pourrait éventuellement tourner mal ne sert à rien, à part nous rendre malheureux.