La guerre de 1914 qui entraîne le départ d'Arï est pour Odilon Redon une ultime souffrance qu'il dut ressentir comme cruellement inutile. Les lettres n'arrivent plus ; la peine est immense. Redon meurt durant l'été 1916, le 6 juillet. Son histoire se termine sur un dernier et douloureux chagrin, sans doute le plus amer. Pourtant, malgré cet ultime mauvais tour que lui joue le destin, Redon s'en va libéré, vainqueur de ses ombres. La victoire qu'il aura remportée sur lui-même est de celles qui font les grands créateurs. Ou les grands mystiques.
Redon ne datait pas ses oeuvres, mais consignait, de façon fort détaillée semble-t-il, les étapes de son travail dans un livre de raison. Jusqu'en 2002, le manuscrit demeure sous scellés à la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet de Paris. Ce qui, par définition, interdit sa consultation, encore plus sa publication, ou du moins l'utilisation qui pourrait en être faite dans toute étude concernant Redon et son oeuvre.
Ces noires visions que Redon a conçues pour la plupart dans sa terre de Peyrelebade qui fut pour lui le refuge qu'il n'aura jamais pu trouver auprès de sa propre mère, vont peu à peu s'estomper dans son oeuvre. Les forces de l'ombre qui jusqu'alors semblent avoir dominé sa vie perdent lentement de leur pouvoir.