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EAN : 9782715219601
128 pages
Le Mercure de France (12/04/1996)
4.5/5   2 notes
Résumé :
Enfant sensible, ardente, jouet, ainsi que son frère, des ambitions matrimoniales contradictoires du roi de Prusse, son père, et de la reine, la future margrave de Bayreuth déchire le vernis de la vie de cour, en révèle l'envers infernal. Elle aime pourtant «à la passion» ses parents terribles et ne peut se déprendre de la cour où ils règnent, de cet espace, shakespearien, de fureur et de délire.

Extrait des«Mémoires»de Frédérique-Sophie Wilhelmine (... >Voir plus
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Epouse de l’héritier de Bayreuth (qu’on écrit alors Bareith), la future margrave arrive dans sa nouvelle capitale en 1732. Elle décrit la réception qui lui est faite et l’appartement qui sera désormais le sien.

« J’y arrivai enfin le 22. de Janvier [1732] à six heures du soir. On sera peut-être curieux de savoir mon entrée ; la voici. A une portée de fusil de la ville, je fus haranguée de la part du Margrave par Mr. De Dobenek, grand-bailli de Bareith. C’était une grande figure tout d’une venue, affectant de parler un allemand épuré et possédant l’art déclamatoire des comédiens germaniques, d’ailleurs très-bon et honnête homme. Nous entrâmes peu après en ville au bruit d’une triple décharge de canon. Le carosse où étoient les Messieurs commença la marche ; puis suivoit le mien, attelé de six haridelles de poste ; ensuite mes dames ; après les gens de la chambre et enfin six ou sept chariots de bagages fermoient la marche. Je fus un peu piquée de cette réception, mais je n’en fis rien remarquer. Le Margrave et les deux princesses ses filles me reçurent au bas de l’escalier avec la cour ; il me conduisit d’abord à mon appartement. Il étoit si beau, qu’il mérite bien que je m’y arrête un moment. J’y fus introduite par un long corridor tapissé de toiles d’araignées et si crasseux, que cela faisoit mal au cœur. J’entrai dans une grande chambre, dont le plafond, quoique antique, faisoit le plus grand ornement ; la hautelice qui y étoit, avoit été, à ce que je crois, fort belle de son temps, pour lors elle étoit si vieille et si ternie, qu’on ne pouvoit deviner ce qu’elle représentoit qu’avec l’aide d’un microscope ; les figures en étoient en grand et les visages si troués et passés, qu’il sembloit que ce fussent des spectres. Le cabinet prochain étoit meublé d’une brocatelle couleur de crasse ; à côté de celui-ci on en trouvoit un second, dont l’ameublement de damas vert piqué faisoit un effet admirable ; je dis piqué, car il étoit en lambeaux, la toile paroissant partout. J’entrai dans ma chambre de lit, dont tout l’assortiment étoit de damas vert avec des aigles d’or éraillés. Mon lit était si beau et si neuf, qu’en quinze jours de temps il n’avoit plus de rideaux, car dès qu’on y touchoit ils se déchiroient. Cette magnificence à laquelle je nétois pas accoutumée, me surprit extrêmement.
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Wilhelmine, soeur de Frédéric II de Prusse, raconte dans ses Mémoires les multiples violences exercées par son père sur le futur roi.


"Mon frère commençait de même de recevoir ses caresses accoutumées de coups de canne et de poing. Nous cachions nos souffrances à la reine. Mon frère s'impatientait de plus en plus, et me disait qu'il était résolu de s'enfuir et qu'il n'en attendait que l'occasion. Son esprit était si aigri, qu'il n'écoutait plus mes exhortations et s'emportait même souvent contre moi. Un jour, que j'employais tous mes efforts pour l'apaiser, il me dit : "vous me prêchez toujours la patience, mais vous ne voulez jamais me mettre en ma place ; je suis le plus malheureux des hommes, environné depuis le matin jusqu'au soir d'espions, qui donnent des interprétations malignes à toutes mes paroles et actions; on me défend les récréations les plus innocentes : je n'ose lire, la musique m'est interdite, et je ne jouis de ces plaisirs qu'à ma dérobée et en tremblant. Mais ce qui a achevé de me désespérer est l'aventure qui m'est arrivée en dernier lieu à Potsdam, que je n'ai point voulu dire à la reine pour ne pas l'inquiéter. Comme j'entrai le matin dans la chambre du roi, il me saisit d'abord par les cheveux et me jeta par terre où, après avoir exercé la vigueur de ses bras sur mon pauvre corps, il me traîna malgré toute ma résistance, à une fenêtre prochaine ; (...) prenant la corde qui attachait le rideau, il me la passa autour du cou. J'avais eu par bonheur pour moi le temps de me relever, je lui saisis les deux mains et me mis à crier. Un valet de chambre vint aussitôt à mon secours et m'arracha de ses mains."
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[Dans les lignes qui suivent, la future Margrave fait le portrait des notables qu’on lui présente.]

Je fus très-mal édifiée de cette cour, et encore plus de la mauvaise chère que nous fîmes ce soir-là ; c’étoient des ragoûts à la diable, assaisonnés de vin aigre, de gros raisins et d’ognons. Je me trouvai mal à la fin du repas et fut obligée de me retirer. On n’avoit pas eu les moindres attentions pour moi, mes appartemens n’avoient pas été chauffés, les fenêtres y étoient en pièces, ce qui causoit un froid insoutenable. Je fus malade à mourir toute la nuit, que je passai en souffrances et à faire de tristes réflexions sur ma situation. Je me trouvai dans un nouveau monde avec des gens plus semblables à des villageois qu’à des courtisans ; la pauvreté régnoit partout ; j’avois beau chercher ces richesses qu’on m’avoit tant vantées, je n’en voyois pas la moindre apparence. Le prince s’efforçoit de me consoler ; je l’aimois passionnément ; la conformité d’humeur et de caractère lie les cœurs ; elle se trouvoit en nous, et c’étoit l’unique soulagement que je trouvasse à mes peines.
Je tins appartement le lendemain. Je trouvai les dames aussi désagréables que les hommes. »
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