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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Vous qui aimez être dépaysé , ce roman est pour vous ! Son auteur ,chinois de la diaspora ,né à Bornéo et vivant à Taiwan nous emmène à Krokop petit village côtier au nord de Bornéo à la population mêlée , indonésien, chinois , japonais et Dayaks . Son récit couvre une trentaine d'année de la vie de cette communauté avec deux moments marquants (et qui se répondent) : l'irruption d'une immense horde de sangliers en migration et ,en 1941 , l'invasion japonaise et l'occupation qui s'en suit jusqu'en 1945. Massacres et tortures , soumission et résistance , libération et vengeance, parang contre katana ,le cycle des violences est constant et on retrouve les terribles situations propres à ce type de moment : bravoure , lâcheté , traitrise . Très étonnante la présence constante des enfants comme acteurs et victimes des combats . Outre cet épisode peu connu de la guerre du Pacifique, le roman se distingue par une écriture d'une fascinante originalité : omniprésence d'une nature luxuriante , symphonie d'évocation sensuelle par l'usage constant de métaphores , alternance de beauté exaltée et d'horreur . Les personnages nombreux sont aussi pittoresques qu'attachants .Le mélange des rêves nourris par l'opium et d'un melting-pot de références culturelles crée une ambiance onirique proche du réalisme magique de Garcia Marquez . Un très grand roman qui m'a ébloui et emporté.
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Un roman dense et envoutant, servi par une langue magnifique (bravo au traducteur), dont le cadre est celui de l'occupation japonaise à Bornéo.
Entre réalisme magique et récit de guerre, on suit le quotidien d'une galerie de personnages hauts en couleurs, les villageois et leurs enfants, bouleversé par la guerre. Avec en toile de fond la jungle, ses cris d'oiseaux, ses odeurs, sa violence, ses mystères.
La construction du roman peut d'abord sembler exigeante, avec des évocations du passé qui s'entremêlent au présent, et une frontière imprécise entre réalité et rêve, mais on se laisse rapidement emporter par ce texte flamboyant et ces personnages attachants.
Omniprésence de l'opium qui fait percevoir une autre réalité… Cruauté insoutenable des Monstres (comprenez l'occupant japonais)… La folie des hommes ne laisse espérer aucune fin heureuse.
On ne ressort pas indemne d'une telle lecture.
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« C'était juillet, l'été féroce imprimait sa morsure de chacal, poussait son hurlement de loup » : dans le Bornéo de la diaspora chinoise sous invasion japonaise en 1941, un immense roman réaliste et magique pour traquer les oppressions et les résistances quotidiennes dans les plis de la grande Histoire.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/07/12/note-de-lecture-la-traversee-des-sangliers-zhang-guixing/

Niché à l'embouchure de sa rivière descendant droit de la jungle et des montagnes de l'arrière-pays, connu pour ses eaux poissonneuses et pour les hardes qui lui valent son surnom de « Bouk aux Sangliers », Krokop, gros village de la côte nord de Bornéo, coule une vie presque paisible en ce début des années 1940. Entre une économie coloniale d'opulence et une économie de subsistance qui n'exclut pas certaines manifestations occasionnelles de solidarité, les quelques colons néerlandais ou britanniques côtoient une florissante communauté chinoise, une importante population malaise, quelques membres de la diaspora japonaise, et, de temps à autre, quelques Dayaks descendus pour quelques courses en ville de leur domaine de jungle qu'ils ne partagent qu'avec de rares chasseurs expérimentés. Dans les vapeurs régulières d'opium qui baignent une bonne partie du village presque autant que la fumée de tabac, on cultive soigneusement des amitiés bonhommes, des amours probables ou improbables, de menues crapuleries honteuses, et quelques secrets potentiellement effroyables. Rien que de très normal, en somme, dans un décor extraordinaire dans lequel « La Rescousse » de Joseph Conrad, ou ses autres romans « indonésiens » et « malais » (la rupture politique post-décolonisation n'interviendra de fait qu'en 1963), aurait muté au fil du siècle, si ce n'est peut-être que certains mythes cruels du folklore régional semblent disposer ici d'une curieuse réalité.

Alors survient le 13 décembre 1941, et l'invasion de Bornéo par l'armée impériale japonaise.

On a beaucoup parlé, et tout à fait à raison, de réalisme magique à propos des romans de Zhang Guixing (Chang Kuei-hsing en anglais et 張貴興 en chinois), Chinois de la diaspora, né au Sarawak (la partie malaisienne de l'île de Bornéo) en 1956 et installé à Taïwan (dont il a obtenu la nationalité en 1982) depuis 1976. Avec cette « Traversée des sangliers », son septième roman, datant de 2018 mais le premier traduit en français, en janvier 2022, par Pierre-Mong Lim pour les éditions Picquier, nous découvrons ainsi une manière très personnelle, et pour tout dire plutôt extraordinaire, d'insérer avec une cruauté sans fard la grande Histoire dans la microscopique, de pratiquer une sorcellerie par laquelle les sangliers semblent souvent doués de raison (le formidable rapport puissamment ambigu entre nature et culture, dès les premières pages, établissant comme une connivence secrète avec, par exemple, le « Princesse Mononoké » d'Hayao Miyazaki), les penanggalans (que les plus vieux rôlistes ici auront peut-être rencontré au détour du Fiend Folio d'AD&D 2 vers 1981-1984) évoluent librement à la nuit tombée si l'on n'y met pas bonne fin, les soldats japonais (appelés – on saura hélas vite pourquoi – les « Monstres » tout au long de l'ouvrage) peuvent continuer à pédaler quelques semaines sur leurs vélos même après que leurs têtes aient été soigneusement tranchées par les derniers résistants encore en vie.

Tissé de jungle et de magie, d'avidité et de sadisme, d'amour et de dissimulation, de poésie subtile et de mélancolie indéracinable, en un cocktail rarissime, « La traversée des sangliers » tire aussi sa force particulière d'un jeu sans pitié avec la chronologie, jeu par lequel de très nombreux flash-backs et flash-forwards, qui ne se présentent pas toujours d'emblée comme tels, établissent un réseau serré de correspondances mystérieuses, qui se dévoileront pourtant toutes in fine, entre passé, présent et futur, entre ce qui ressort de l'individu et ce qui ressort du collectif, ou entre les moments héroïques parfois ignorés et les abîmes de lâcheté bien dissimulés (tous les collaborateurs de l'occupation ne seront pas si faciles à identifier). Et c'est ainsi que l'on tient entre ses mains un roman immense, traquant avec une joie féroce les oppressions et les résistances réputées invisibles dans les plis les plus inattendus de la grande Histoire officielle.

L'excellente chronique de Sébastien Omont dans En attendant Nadeau est à lire ici, celle de Nils C. Ahl dans le Monde des Livres est ici, celle de Frédérique Fanchette dans Libération est là, et celle de Christian Desmeules dans le Devoir est là. Mentionnons aussi sans faute que la traduction de Pierre-Mong Lim (face au foisonnement d'un vocabulaire extrêmement précis de la nature déployé par l'auteur taïwanais), comme sa précieuse préface, impressionnent.

Lien : https://charybde2.wordpress...
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Que dire... adepte des commentaires plus "évocateurs" que "narratifs" (que je laisse avec bonheur à d'autres babelisants), je ne sais plus ou donner de la tête, heureuse toutefois d'avoir encore la mienne sur mon cou...

Le ton est donné: la luxuriance des descriptions de la forêt tropicale, du règne animal, de la végétation; l'abondance des personnages (près de 100, arrivée aux deux tiers du roman), leurs noms : Ko Grande Perche, Ta la Flemme, Hioh Siau-Ngo, Tsiu Kyo Kyo, Lolo Brioche, Emily (ouf!) et enfin... la collision constante du temps, retours en arrière, bons en avant, sans prévenir... et enfin enfin, ajouté à ça, l'opium qui infuse adultes et enfants tout au long du roman et dont le manque provoque de déroutantes hallucinations gentiment insérées dans le texte au même titre que la narration "objective", tout concourt à perdre le lecteur. Lequel est périodiquement et violemment tiré de sa fascination et de sa quasi rêverie par la sauvagerie extrême des "Monstres" à savoir les occupants japonais.

A lire une fois dans sa vie, pour se colleter à cette étonnante écriture qui rend palote l'expression "réalisme magique"... le "réalisme" est souvent passé au fil des sabres et des parangs (coupe-coupes) et des têtes qui roulent, la magie exacerbée par des descriptions luxuriantes et une poésie à couper le souffle.

Amoureux de la chronologie, passez votre chemin, ainsi que ceux qui trouvaient qu'il y avait trop de personnages dans les romans fleuves russes. Mais si on se cramponne, on en apprend aussi beaucoup sur Bornéo, la colonisation occidentale et l'occupation japonaise. Et les sangliers! On y rencontre des portraits attachants, enfants, adultes, hommes, femmes. On se prend à les aimer, même si on les perd souvent, mais on les retrouve parfois au gré des caprices du narrateur.

La violence atteint toutefois parfois l'insoutenable, et j'ai du me cramponner. C'est à ma passion de lectrice, et à un bizarre respect pour certains auteurs, et à des mots mystifiants comme "apotropaïque", que je dois d'avoir continué la lecture. J'ai bien fait, essayez, vous verrez!

Le traducteur fait un travail magnifique et on l'oublie, comme dans les grands chefs d'oeuvres, on croit savoir lire la langue d'un Chinois de Bornéo qui écrit désormais depuis Taiwan. Sa préface est très utile pour mieux comprendre le contexte tant historique et que les migrations en Mer de chine.
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Bornéo, une île de l'Asie du Sud-Est, avec une forêt primaire exceptionnelle. Dans les années quarante, elle héberge des immigrés chinois, ainsi que des ouvriers javanais pour l'extraction du pétrole. L'auteur a choisi de relater son roman dans un petit village côtier de pêcheurs du nord-ouest, avec une communauté vivant en harmonie, usant d'entraide, certes parfois des animosités et évidemment maniant des secrets plus ou moins sordides, avec dès lors des conséquences tragiques. Bref, l'on pourrait dire que : tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Une belle image, mais nous savons tous qu'il en existe, toujours, un côté négatif. En apparence, car en effet, en décembre 1941, après l'attaque de Pearl Harbor, des milliers de japonais, décident d'envahir le village de Kropkop autrement dit le Bouk aux sangliers – auparavant les villageois ont dû se battre contre des hordes sangliers sous l'emprise de l'amok –, dont l'objectif était la mainmise sur la production de pétrole (le nerf de la guerre).

Et la foudre tombe dans ce microcosme, pour faire régner l'enfer que subissent tous les villageois : subir en permanence l'humiliation, les exécutions sommaires, les vols et les viols qui deviennent monnaie courante ; et dans ce contexte, le sabre virevolte en permanence dont son fil est rouge du sang de la barbarie. Cependant ; la résistance s'organise, beaucoup s'enfuient dans la jungle, leur terrain nécessaire de repli. Nécessité fait loi, en conséquence, une guérilla aveugle et sans règles, de scènes d'horreurs, une mise en exergue de la lutte incessante contre les Monstres, avec les différentes ethnies subissant le joug de cette occupation. C'est ainsi que ce conflit durera plus de trois ans, et laissera les stigmates habituels de la guerre, non pas , mais certainement ceux de la barbarie.

Une oeuvre splendide, aussi bien dans les détails fournis par l'auteur, tel que : la description de la faune et de la flore, les sentiments des autochtones face à l'inconnu, la consommation effrénée de l'opium avec ses effets néfastes ; mais encore un voyage dans le temps qui serait agréable, en imaginant l'efflorescence des hibiscus et des bougainvilliers, le vol des éperviers bleus en chasse ; si ce n'est qu'il faut quitter les nuages des rêves pour l'immense cruauté des hommes sans frontière.

La richesse du roman « La traversée des sangliers » ne peut se concevoir, sans bien sûr les digressions sur l'exubérance et la luxuriance de l'île de Bornéo, ni la poésie du bonheur lexical entachée de la vanité et de la bestialité humaines, indiquées par de nombreuses métaphores. « Guixing Zhang » délivre ce récit avec une richesse d'un langage soutenu, et nous enivre de ses descriptions, mais ne nous cache pas que la vie ne tient souvent qu'à un fil.

Lien : https://bookslaurent.home.bl..
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Accrochez-vous sérieusement car ce roman n'est pas facile à lire, mais quel univers fabuleux ! quelle écriture magnifique ! Tout est étonnant : les temporalités, les personnages, le background folklorique, la manière d'envisager le réel. Les descriptions deviennent digressions, métaphores, changent de fil narratif, se font symboliques et nous ramènent au cours du récit, un peu étourdi, mais enchanté du voyage.
Pour ce qui est de l'histoire, je vous laisse consulter d'autres présentations plus attachées au contenu historique et narratif.
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