Dans la vie, il y a des livres qu’il faut avoir lu. Et bien ceux de Zola en font partie. Ce premier tome des Rougon-Macquart met en place toute la trame des volumes suivants, et pose les bases d’une famille bien bancale, maladroite, soûle et violente. Et qu’est-ce que c’est bien écrit!
Je ne me lancerai pas dans le détail des personnages car il y en a beaucoup, et je pense que vous trouverez facilement l’arbre généalogique des Rougon-Macquart sur le net. Ici il est surtout question de démarrer l’histoire. De découvrir cette famille, cette très grande famille, qui va vivre de nombreux évènements notamment lors du coup d’Etat de Napoléon le 2 décembre 1851. Malheureusement là, j’ai quelques lacunes et je suis persuadée que vous trouverez toutes les informations sur internet. Mais peut importe, pas besoin d’être une tête en histoire pour comprendre le contexte de La fortune des Rougon.
Nous découvrons donc Adélaïde Fouque, à l’origine de cette famille, puis ses enfants, Pierre Rougon, Ursule et Antoine Macquart. Et plus particulièrement la branche de Pierre Macquart, marié à Félicité, qui aura cinq enfants, Eugène, Pascal, Aristide, Sidonie et Marthe. Oui, oui, déjà ici on s’y perd un peu. Ce que je trouve très bien pensé c’est qu’Adélaïde Fouque est présente dans le premier roman, et ne mourra qu’à l’âge de 105 ans, dans le dernier volume de la saga. Parfait pour boucler la boucle. Ah Emile, tu ne cesseras donc d’être malin… 🙂
Mais je m’égare. De quoi est-il question dans ce premier volume? Et bien, avant tout, d’une jolie histoire d’amour, celle de Silvère et Miette (Miette quoi!!! Je suis tellement en amour devant ce surnom!!) deux adolescents qui vont vivre leur histoire à travers cette époque tumultueuse et cette famille alambiquée. Il s’agit aussi de la montée en puissance du pouvoir de Pierre Rougon, de ses déboires avec ses fils, de l’hypocrisie de ses soi-disants amis, de l’appât du gain chez cet homme vil et parfois cruel.
J’ai été totalement plongée dans ce roman, en ayant l’impression que Zola lui-même, me racontait l’histoire de cette famille. Je ne me suis ennuyée à aucun moment. Tout à un sens, tout est important. Et quelle joie j’ai eu, de découvrir la naissance de Gervaise, mon personnage féminin chouchou… (Je vous assure, j’étais dans le bus et j’ai fait un bruyant « han!! » quand j’ai vu son nom!!). Ce premier tome est essentiel, et même si on peut lire les Rougon-Macquart dans le désordre, La fortune des Rougon donne une parfaite approche de ce que Zola nous présentera dans les tomes suivants, j’en suis persuadée.
J’ai eu la sensation à certains moments d’être dans un film flou, bruyant, avec des personnages à moitié vivants, à moitié dessinés, un peu branlants, noyés dans leurs discours, comme si Zola voulait rendre le lecteur aussi soûl que ces héros. J’ai adoré me perdre dans Plassans, de nuit, sur le chemin de ces maisons biscornues, au milieu de ces rires qui font mal aux oreilles. Bref, je n’aurais pas assez de mots pour vous décrire ce tome fantastique…
Je voulais vous partager cette phrase de Victor Hugo lors de la sortie du premier volume des Rougon-Macquart, je la trouve très belle et très juste.
« Votre comédie est tragique. Je vous lis, mon éloquent et cher confrère, et je vous relirai. Le succès, c’est d’être lu ; le triomphe, c’est d’être relu. Vous avez le dessin ferme, la couleur franche, le relief, la vérité, la vie. Continuez ces études profondes. Je vous serre la main ! »
Je suis déjà fan du style de Zola, il n’est donc pas difficile de me convaincre avec un de ses livres, mais j’avoue que La fortune des Rougon a dépassé mes espérances. J’avais hâte de débuter cette saga, hâte de découvrir l’origine de cette famille, et bien j’ai été plus que conquise!
Il serait trop simple de résumer en détail ce tome, je vous offre donc quelques passages clés d’après moi, qui décrivent le ton du roman.
» Grand, terriblement barbu, la face maigre, Macquart était la terreur des bonnes femmes du faubourg; elles l’accusaient de manger des petits enfants tout crus. À peine âgé de trente ans, il paraissait en avoir cinquante. Sous les broussailles de sa barbe et les mèches de ses cheveux, qui lui couvraient le visage, pareilles aux touffes de poils d’un caniche, on ne distinguait que le luisant de ses yeux bruns, le regard furtif et triste d’un homme aux instincts vagabonds, que le vin et une vie de paria ont rendu mauvais. »
» Selon l’opinion commune, les Rougon-Macquart chassaient de race en se dévorant entre eux ; la galerie, au lieu de les séparer, les aurait plutôt exciter à se mordre. »
Et c’est tellement vrai. Cette famille se déchire pour l’argent, le vice, l’alcool. C’est dramatique et en même temps sûrement assez représentatif de l’époque, une époque sombre et dure pour les Français moyen, victime de mauvais coups politiques.
Zola nous peint le tableau d’une famille qui, on le sait à l’avance, va connaître malheur sur malheur.
« Et il songeait à ces poussées d’une famille, d’une souche qui jette des branches diverses, et dont la sève âcre charrie les mêmes germes dans les tiges les plus lointaines, différemment tordues, selon les milieux d’ombre et de soleil. Il crut entrevoir un instant, comme au milieu d’un éclair, l’avenir des Rougon-Macquart, une meute d’appétits lâchés assouvis, dans un flamboiement d’or et de sang. »
Voilà. À elle seule, cette dernière phrase résume parfaitement le livre, et toute la saga.
Le tome, débutant sur l’histoire de Miette et Silvère, donnera à ce livre, une touche de poésie. Malgré toute l’histoire que ce tome raconte, Pierre Rougon qui sera capable des pires atrocités, Félicité sa femme, de mensonges, ses fils et sa famille. mais ne croyez pas que Zola ne puisse écrire que du tragique, du dur et du sombre…
« Quand les amoureux s’embrassent sur les joues, c’est qu’ils tâtonnent et cherchent les lèvres. Un baiser fait des amants. Ce fut par cette noire et froide nuit de décembre, aux lamentations aigres du tocsin, que Miette et Silvère échangèrent un de ces baisers qui appellent à la bouche tout le sang du coeur. »
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Je n'ai jamais, lors de mes études, lu et étudié les écrits de Zola, j'ai donc décidé de découvrir sa plume en lisant ce premier roman du cycle des Rougon-Macquart. Je n'ai pas cherché à en savoir plus sur cette histoire avant de commencer le roman, je partais donc sans aucun a priori si ce n'est la crainte de trop longue description.
Cette oeuvre est tout autant un roman sur les moeurs, un roman social qu'un roman historique. Zola nous décrit un microcosme, la ville de Plassans et la famille des Rougon-Macquart, qui vibre et résonne à l'écoute de la chute de la République qui se joue à Paris. L'auteur décrit avec beaucoup de minutie et avec un certain cynisme ses personnages et les lieux de leurs interactions. Il ne cherche en aucun cas à enjoliver son histoire, la nature humaine nous y est présentée dans son plus simple appareil, dans tout ce qu'elle a de plus sombre, mais aussi dans tout ce qu'elle a de plus naïf.
Mon avis sur ce roman, à l'image de ma lecture, est assez paradoxal, j'ai apprécié ce livre alors même que j'ai eu beaucoup de mal à le finir.
Le narrateur omniscient qu'est Zola ne cherche pas à faire monter un quelconque suspens puisqu'il prévient de manière subtile son lecteur de l'avenir de ses personnages au moment où il décrit leur vie et leur caractère. Cette annonce des bonheurs et malheurs de chacun a ralenti considérablement ma lecture puisque je ne voulais pas voir la chute des plus innocents, car oui ici ce n'est pas les « gentils » qui gagnent toujours à la fin, cette histoire est réaliste jusqu'au bout.
Les descriptions, les analepses ou encore les divagations des personnages sur leur destin n'ont pas été un obstacle, bien au contraire. Ces passages m'ont paru les plus intéressants (heureusement puisqu'ils représentent les trois quarts du livre), peut-être parce qu'ils m'éloignaient du dénouement que je soupçonnais sanglant dès le premier chapitre.
Je vais laisser passer un peu de temps avant de me plonger dans la suite de la vie de cette famille pour éviter que cette histoire ne me lasse et ne m'écoeure, il me reste après tout dix-neuf romans.
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Roman dur correspondant bien à l'époque. Une image de l'insurrection du Var. On ne peut plus juste. A lire, les varois apprécieront. le travail de Noël Blache est bien mis en valeur.
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