Elle se sentait assurément plus proche de sa cadette, à présent, partager la même tente ayant contribué à renforcer les liens qui les unissait. Cependant, une tout autre raison expliquait peut-être également cet état de fait : la montagne, déjà dangereuse pour tout le monde, l'était encore un peu plus, tel un nappage supplémentaire, pour les femmes. La scène dont Cecily avait été témoin en pleine nuit le confirmait. Ce genre d'expédition réveillait les instincts primaires de l'être humain évoluant constamment entre la vie et la mort, en pleine nature, le corps gorgé d'adrénaline.
Même sur ces contreforts de la montagne, elle sentait le danger prêt à surgir à tout instant, et pas uniquement du fait des roches instables sous ses pieds susceptibles de provoquer une glissade ou une chute. La montagne avait tendance à modifier les comportements. Elle mettait les facultés de chacun à l'épreuve, l'adversité et la souffrance mettant à nu les émotions.
Même si son esprit enchaînait les sauts périlleux, elle devait au moins donner l'illusion d'avoir la tête sur les épaules.
Les prières étaient adressées non à quelque dieu mais au Manaslu, afin de lui demander la permission de se lancer sur ses flancs, de marcher sur ses épaules quelques semaines durant, pas davantage, soit une fraction de seconde au regard de sa durée de vie quasi éternelle.
On ne sait jamais à quel moment la montagne se retournera contre nous; ce n'est pas seulement ta vie que tu mets en jeu en grimpant là-haut, celle de tes équipiers dépend également en partie de toi.
Aussi acérés qu'une lame de rasoir, le sommet et le pic oriental perçaient le ciel, telle une queue de léviathan plongeant dans un océan bleuté. Qu'elle était minuscule, comparée à ce monstre, à peine un petit poisson. Elle avait toutes les peines du monde à s'imaginer là-haut.
Sous le ciel gris, la montagne retenait son souffle; un monstre sommeillait, et ils devaient tout faire pour ne pas le réveiller.
𝑪𝒉𝒂𝒒𝒖𝒆 𝒎𝒐𝒎𝒆𝒏𝒕 𝒒𝒖𝒆 𝒋𝒆 𝒑𝒂𝒔𝒔𝒆 𝒆𝒏 𝒎𝒐𝒏𝒕𝒂𝒈𝒏𝒆, 𝒄𝒉𝒂𝒒𝒖𝒆 𝒑𝒂𝒔 𝒔𝒖𝒑𝒑𝒍𝒆́𝒎𝒆𝒏𝒕𝒂𝒊𝒓𝒆, 𝒆́𝒒𝒖𝒊𝒗𝒂𝒖𝒕 𝒂̀ 𝒖𝒏𝒆 𝒗𝒊𝒄𝒕𝒐𝒊𝒓𝒆. 𝑼𝒏𝒆 𝒆́𝒏𝒐𝒓𝒎𝒆 𝒗𝒊𝒄𝒕𝒐𝒊𝒓𝒆. 𝑪𝒉𝒂𝒒𝒖𝒆 𝒋𝒐𝒖𝒓, 𝒋𝒆 𝒓𝒆𝒑𝒐𝒖𝒔𝒔𝒆 𝒎𝒆𝒔 𝒍𝒊𝒎𝒊𝒕𝒆𝒔 𝒖𝒏 𝒑𝒆𝒖 𝒑𝒍𝒖𝒔 𝒍𝒐𝒊𝒏 - 𝒑𝒉𝒚𝒔𝒊𝒒𝒖𝒆𝒎𝒆𝒏𝒕, 𝒎𝒆𝒏𝒕𝒂𝒍𝒆𝒎𝒆𝒏𝒕, 𝒆́𝒎𝒐𝒕𝒊𝒐𝒏𝒏𝒆𝒍𝒍𝒆𝒎𝒆𝒏𝒕. 𝑬𝒕 𝒋𝒆 𝒔𝒖𝒊𝒔 𝒕𝒐𝒖𝒋𝒐𝒖𝒓𝒔 𝒅𝒂𝒏𝒔 𝒍𝒂 𝒄𝒐𝒖𝒓𝒔𝒆.