Gérard Lefort - Le commun des mortels
Michel était coutumier de ces éclairs de lucidité propres aux grands alcooliques, quand son coma se déchirait en vraies certitudes. C'est sûr, Jean-Luc était un con certifié qui, une fois de plus, venait de lui griller sa sensation. Jean-Luc aurait dû être CRS à Redon ou matelot à bord de la Marie-Connasse. Eh bien même pas, le destin en avait causé à sa vieille copine Fatalitas, et Jean-Luc était simplement Jean-Luc, la trentaine agonisante, plus large que haut, le visage teinté de ce mauve sacerdotal qui n'est pas sans évoquer, à condition d'être complètement bourré, la couleur des bruyères au printemps.
La maman dit, a toujours dit, "le jardin c'est mon domaine", mais en fait elle s'en occupe à tort et à travers, "comme un manche", dit le papa (...).
Le Poulpe avait toujours eu un petit faible pour les bunkers du mur de I'Atlantique. Surtout sur les plages de dunes où le travail de l'érosion les basculait dans des positions de monstres cassés. Il aimait bien cette revanche de la nature, cette patience à phagocyter les chancres de la barbarie, à les fondre dans le paysage, à les rendre, à la longue, indigènes. Mais là, non. Ça empestait la vieille pisse et la baise furtive. Sous ses pieds quelques cadavres de capotes en témoignaient.
- Il me prend que vous me faites tous chier, au-delà du réel, toi et ta compagnie de farfadets des bruyères. Je me casse, voilà ce qui se passe ! Mais je te préviens, marquise de Kercouilles, et tu peux faire passer le message, ça va saigner! Un Poulpe sur le sentier de la guerre, I'attaque de Fort-Apache à côté, c'était une partie de jokari.
On remarque surtout, accaparant sa mise, une veste voyante à petits carreaux. Montand voulait-il ainsi signifier de visu qu'il allait désormais se tenir à carreaux ? Simone l'attend et on peut supposer que les explications seront houleuses, même si Signoret très classe aurait déclaré : "Si Marilyn est amoureuse de mon mari, c'est la preuve qu'elle a bon goût".
Aux aguets perpétuels, je suis tout ce que je vois et pas seulement les autres lorsque, l’oreille plaquée au tronc d’un arbre par grand vent, j’entends des craquements, des gémissements, des douleurs, preuve qu’il souffre comme n’importe qui.
"Aux aguets perpétuels, je suis tout ce que je vois et pas seulement les autres lorsque, l'oreille plaquée au tronc d'un arbre par grand vent, j'entends ses craquements, des gémissements, des douleurs, preuve qu'il souffre comme n'importe qui .Et même la forêt dans sa totalité, et le ciel, les nuages, les pierres, les rochers, et les galets au bord de la mer, leur endurance à l'usure, leur durée malgré tout ,leur indifférence..........."
Écoute-moi bien, petit guignol, le régionalisme en chaleur. le culte des racines, la religion des traditions et toute cette sorte d'enculeries en sabots de bois, c'est comme les écolos margino-sincères, ça m'a toujours paru flirter avec les vilaines manières de papy Pétain. À part ça, je sais pas si t'as noté, mais, question racines profondes, le français, c'est un truc dément qui fait que le connard de Basque peut discuter avec l'andouille de Guéménée qui lui-même peut s'empailler avec le taré d'Ajaccio. Alors, question patrimoine, tu me lâches la bombarde et on se cause entre adultes consentants.
Le fait divers
Dans la nuit de jeudi à vendredi, près de Pont-Croix (Sud Finistère), au lieu-dit Trémaria, Michel Gourlaouen, 38 ans, célibataire, ouvrier électricien domicilié à Beuzec, a été assassiné au volant de sa voiturette électrique par un tir d'arme lourde non encore identifiée.
Ouest-France
"Non, un gusse qui se fait éparpiller à l'arme lourde sur une vicinale du bout du diable, ça n'est pas une navrante affaire, c'est au mieux, un coup très pourri."
Aux aguets perpétuels, je suis tout ce que je vois et pas seulement les autres lorsque, l’oreille plaquée au tronc d’un arbre par grand vent, j’entends des craquements, des gémissements, des douleurs, preuve qu’il souffre comme n’importe qui.