L'assiette
anglaise : émission du 28 janvier 1989
Depuis le Saint James Club de Paris,
Bernard RAPP porte un regard différent sur l'
actualité en compagnie des chroniqueurs habituels. L'invité est
HOMERIC,
journaliste et auteur du livre "
Ourasi, le roi fainéant".Au sommaire de cette émission :- L'image de la France- Les éjections- Gare perpignan/mort DALI- Serrures en prison- KOK-CHOPINOT- Publicités- Utilisation espace- Défilé Adolphe...
Le chien lape bruyamment, m'avait dit un ami, aboie sous la peur, gémit sous les coups. Le loup, lui, aspire l'eau en silence, hurle ses amours sous la lune et affronte la mort sans une plainte. Jamais il ne se laissera passer un lien autour du cou et préfèrerait mourir que négocier sa liberté.
Les jours passèrent à observer les grands troupeaux de saïgas, et les fauves qui les suivaient, scrutant à travers le mirage des brumes, l'antilope blessée, affaiblie ou trop jeune. La nuit, nous regardions les étoiles ; écoutions la brise qui glissait haut dans le ciel ; le campagnol farfouillant au seuil de ses galeries, indécis ; ou le jappement d'une hyène. Et quand la lune se montrait, nous distinguions les silhouettes prédatrices qui hachuraient de leurs pas incessant le plateau infini. Les lendemains, c'était comme si nous avions rêvé : à perte de vue, pas une ombre sur laquelle accrocher le regard. Seul le bourdonnement des mouches nous maintenait en éveil.
Tu nous agaces tel le taon sur les couilles de l'étalon.
L'étalon noir décocha quelques morsures dans le vide pour remettre un peu d'ordre parmi ses fiancées. Râblé, la crinière longue et ondulante, le toupet fourni qui s'effilochait jusqu'au bout du nez et lui cachait une partie de l’œil gauche, on supputait la petite frappe autoritaire et jalouse.
Pour parler à un cheval, il n'y a pas besoin de mots. C'est une étreinte charnelle qui alimente nos rêves.
Pour parler à un cheval, il n'y a pas besoin de mots. C'est une étreinte charnelle qui alimente nos rêve.
Dans leurs robes de soie bleue nouées d'une ceinture orange, le chapeau relevé sur le haut du front, mèche noire en contrepoint d'un sourire éclatant de loup assoiffé d'amour, l'on dirait des bouquets de soleil tombés du ciel. Lorsqu'ils chevauchent, à l'amble ou au grand galop, les Mongols sont debout. Des points d'exclamation qui volent. Et dans le vent qui tourbillonne à la suite des panaches en flèche, des refrains qui ribouldinguent, car les cavaliers chantent leurs joies, le sol, le ciel, l'amour, la beauté de leurs chevaux.
Le délié de ses reins, le charbon de ses crins, l'arc ébène et brasillant de son col hissé d'un foulard de soie pourpre, de volupté, vous faisaient fondre. Sous lui, le plancher tagadoumait de ce rythme à trois temps inversé que ses sabots administraient, quatre lames bleu nuit, maîtresses de toutes les horloges de l'univers. A l'envers, il galopait vers la nuit, s'y fondait, jetait sur nous le grand manteau de son ombre, le néant soudain, interrompu par le marteau d'un forgeron sur l'enclume!
Ses caravanes, sa musique, ses chevaux, lui donnent l'apparence du cirque, mais ici le spectacle est un rituel, la musique une vocation, et l'amour des chevaux une religion.
Un cheval, c'est malcommode au centre et dangereux aux deux extrémités. Ian Fleming.