Le gros point commun de tous les grands 10, c'est qu'ils auraient pu jouer à n'importe quelle époque.
De la rue [En tant que numéro dix, d'où venait votre créativité ?]. J'ai appris à jouer dans la rue. Comme tous les Brésiliens, j'étais très libre, créatif. Mais en même temps, avec ma mentalité et mon type d'intelligence de jeu, j'ai toujours assumé un rôle de "maestro", de meneur de jeu. Je n'avais donc pas le doit d'être complètement libre, parce que j'ai toujours été capitaine. J'étais créatif, avec ce don naturel qui m'a fait joueur au haut niveau mais à un moment j'ai dû choisir : être plus libre dans le jeu ou être le meneur de jeu et le capitaine... Dans des équipes brésiliennes qui avaient beaucoup de talent, c'est souvent moi qui devais remettre de l'ordre.
Raí (ancien numéro 10 du PSG et du Brésil), p. 19
Les pédants qui rabaissent le foot au rang de sport grotesque où l'on pousse une baballe avec son pied ne voient même pas qu'ils prennent de haut ce qui, justement, est le génie de ce sport, qu'aucun autre n'a l'audace d'envisager. Notre outil naturel pour manipuler les choses, c'est en effet (comme le mot "manipuler" l'indique) la main, bien pratique pour attraper, tenir, lancer, toucher, tripoter (une balle directement, ou un objet pour taper dedans indirectement) avec son pouce en opposition des autres doigts. Mais le pied ? Contrôler quelque chose avec son pied, c'est contre nature, c'est un acquis merveilleux et rare de la culture. Parce que le football est le sport le plus populaire, on croit que c'est banal. On devrait plutôt remarquer que le foot est le seul à l'exiger à ce degré de perfection. Parce que c'est commun autour de soi et à la télé, on a vite fait d'oublier la discipline merveilleuse exigée pour ne plus taper dans un ballon simplement du bout du pied, n'importe comment, mais en utilisant toutes ses parties, en sachant que chacune a sa spécificité, et en choisissant la plus adéquate à une situation donnée, en pivotant son bassin avec grâce, pour négocier jusqu'à la courbe de la trajectoire que l'on donnera à la balle, pour qu'elle aille où l'on veut qu'elle aille. Et il est aussi difficile, et particulièrement méritant, de vouloir qu'elle reste collée au pied lorsqu'on court, de vouloir qu'elle atterrisse pile là-bas, à 60 mètres, dans la course du partenaire, que d'espérer qu'elle nettoie cette lucarne, l'endroit de la cage le plus éloigné du gardien et le plus précieux, parce qu'à un centimètre ou à un poteau carré près, il n'y aura pas but.
Parmi toutes les qualités géniales qui en font indiscutablement, en toute honnêteté et objectivité, le sport-roi, de loin supérieur à tous les autres, le football a la particularité suivante : une équipe nettement plus faible sur le papier a de réelles chances d'obtenir un match nul, voire de l'emporter face aux équipes en tête du classement (beaucoup plus de chances qu'au tennis ou à la pétanque, par exemple).
Lorsque l'on regarde des matchs d'il y a trente ou quarante ans, on est ébahi devant la latitude laissée à la plupart des joueurs, qui peuvent trottiner tranquillement ballon au pied sur 10 mètres sans être attaqués. Comme d'autres sports, le football a vu son rythme augmenter de manière drastique. On frappe plus fort au tennis, on a les épaules plus musclées au basket-ball, on court plus vite et surtout plus souvent et intensément, donc, en football. Les moments calmes se font rares. La professionnalisation a amélioré les corps, développé l'endurance, rendant ainsi les transitions capitales parce qu'elles offrent de rares secondes où temps et espace s'étirent et permettent d'attaquer un peu plus librement.
9 juin - La fan zone ultra-sécurisée du Champ-de-Mars subit un concert de David Guetta en guise de coup d'envoi de la compétition.
Nous sommes des acteurs politiques, qu'on le veuille ou non. Cela fait partie de la vie, surtout pour des gens comme moi qui sont suivis par d'autres personnes. Nous avons un rôle à jouer. Certains l'utilisent pour des causes, d'autres non. Tout le monde est un acteur politique, ne serait-ce que de la manière dont on se comporte dans la vie. Et quand on est une personne publique, ce rôle est amplifié.
Raí (ancien numéro 10 du PSG et du Brésil), p. 16