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Citations de Akli Tadjer (336)


Tarik. Il avait refusé de servir sous le drapeau parce que son père, l’imam de Fnaya, dont la sagesse avait franchi nos plaines et nos montagnes, lui avait enseigné que l’islam est une religion d’abord du respect d’autrui – n’importe lequel – ; en conséquence, Allah avait interdit de tuer la personne humaine, car il l’avait déclarée sacrée.
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Nos silences, nos soupirs, nos rires complices étaient plus éloquents que nos conversations. Nous ne parlions de rien pour ne pas s’avouer qu’on était bien tous les deux. J’aimerais rester longtemps tout contre lui à écouter le murmure des ruisseaux, le souffle du vent dans les branches des chênes-lièges et les chants heureux des bergères dans la vallée, mais une gamine me sort de mes songes. Un cheik arrivé de Fnaya demande à me parler. Elle me prend la main et je la suis jusqu’au portail de la maison. Elle me désigne un homme de dos, grand, trapu, enveloppé dans un burnous noir dont le capuchon est rabattu sur la tête. Les jeunes hommes autour de lui le saluent avec déférence. La gamine tire sur sa manche, il se retourne et je reste interdit : Tarik Benyounes.
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Lorsqu’on n’a rien à vendre, à louer, à troquer, on vient aux renseignements. Savoir si un colon embaucherait pour des travaux agricoles, de maçonnerie, de métairie. On chuchote dans mon dos que j’ai bien changé. Avec mon costume et mon beau chapeau, j’ai l’allure et le port de tête hautain des mannequins pour automobiles qu’on voit sur les photos des magazines de mode.
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Chaque olivier, chaque haie de figuiers de Barbarie, chaque gourbi, chaque eucalyptus de cette route de montagne n’a aucun secret pour moi. Plus la pente est raide, plus j’ai le cœur serré. Non parce que j’ai de la peine d’avoir perdu tante Safia – elle n’avait plus d’âge –, mais chaque pas me rappelle combien j’ai aimé Zina et combien de jours heureux nous avons vécus à l’ombre de ces grands arbres. Elle vit désormais dans cette villa de tuiles vertes bordée des terres les plus riches de la vallée.
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Besoin de marcher. Respirer l’odeur de mon pays. Écouter le chant des cigales. M’attarder sur la couleur des maisons et ce petit monde qui m’est familier.
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Lorsque les Allemands occupaient la moitié de la France, on aurait crié à l'horreur, au scandale, à l'outrage, s'ils avaient obligé les petits écoliers français à apprendre leur langue, leur culture, leur géographie et l'histoire de leurs gloires nationales. Et que dire si en plus, ils avaient changé les noms des villes et des villages pour les replacer par des noms teutons. C'est pourtant ce qui s'était passé chez nous, et c'est cela que j'appelais un génocide.
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Ce dimanche-là, donc, j'avais décidé que nous débattrions du génocide identitaire qui avait fait de nous des hommes ni tout à fait français, ni tout à fait kabyles, ni tout à fat arabes. de mon point de vue nous étions une sorte de peuple hybride qui avait fini par développer un complexe d'infériorité.
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Tu as vingt ans Adam, tu parles comme si tu avais vécu cent ans.

Avoir vingt ans, ça n'existe pas chez nous. Je suis vieux de toutes les humiliations dont j'ai souffert depuis l'enfance.
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Dans vos réunions, cher Adam, combien de fois ai-je entendu parler d'audace et de liberté ? Ou est l'audace, où est la liberté quand aucune autre femme que moi n'est autorisée à participer au dialogue? Avez-vous peur de nous? Que savez-vous de l'Algérie dont rêvent vos femmes, vos filles, mes soeurs? Evidemment rien. L'Algérie de demain se fera avec nous ou elle ne se fera pas.
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Dans vos réunions, cher Adam, combien de fois ai-je entendu parler d’audace et de liberté ? Où est l’audace, où est la liberté quand aucune autre femme que moi n’est autorisée à participer au dialogue ? Avez-vous peur de nous ? Que savezvous de l’Algérie dont rêventvos femmes, vos filles, mes sœurs ? Évidemment rien. L’Algérie de demain se fera avec nous ou elle ne se sera pas.
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Nous ne voulons plus quémander l’égalité des droits. Nous ne voulons plus être endormis par de belles promesses d’égalité et de fraternité.Nous voulons être maîtres de notre destin. Nous voulons être libres. Libres comme des Français.
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— Il faut tout lire pour arriver à la liberté.
— Oui, il faut tout lire, tout savoir, pour être libre, Mohamed.
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L’autre soir, je me suis surpris à déclamer en pointant avec un coupepapier un ennemi imaginaire : « … Il nous faut de l’audace, toujours de l’audace, encore de l’audace, et nous sortirons de la longue nuit coloniale.
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Il faudra vous en prendre à la guerre, celle qui tue les frères et fait saigner le cœur des grandes sœurs.
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La bouteille vidée, Elvire a rapatrié un litre de calva du salon. J'ai fait un non énergique avec le doigt.
— Avec le cidre, Allah fermera peut-être les yeux, mais avec le calva, il ne me le pardonnera jamais.
Elle a ri par hoquets, puis elle a bu une gorgée, une deuxième, et elle a dit :
— C'est à lui de te demander pardon. Regarde où tu es, Adam. À des milliers de kilomètres de celle que tu aimes, et c'est toi qui devrais t'excuser de boire pour oublier que demain, nous ne serons peut-être plus là ? Sois sérieux, Adam, bois.
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— Tu as vingt ans, Adam, tu parles comme si tu avais vécu cent ans.
— Avoir vingt ans, ça n'existe pas chez nous. Je suis vieux de toutes les humiliations dont j'ai souffert depuis l'enfance.
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-Jacques, tu le sais bien toi aussi que tout notre malheur c'est la faute des francs-maçons et de la juiverie internationale. Vous êtes citoyens français comme nous. [...] Mais vous, les youpins, vous ne serez jamais comme nous. Ce n'est par par attachement à nos valeurs que vous avez sollicité la nationalité, c'est par intérêt. [...]
En payant mon café, j'ai demandé au patron s'il savait ce qu'étaient des francs-maçons. Évidemment qu'il savait, il avait eu affaire à eux bon nombre de fois avant la guerre. C'était des ouvriers du bâtiment. Avec eux, pas d'entourloupe, les devis étaient respectés au centime près? d'où l'expression "franc-maçon". Je ne voyait pas le rapport entre ces ouvriers du bâtiment et les juifs. Il y avait tant de choses que j'ignorais.
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-Quand je regarde derrière moi, je ne vois que le corps de mon père mutilé, pourri par la gangrène et l'ingratitude de l'armée française. Quand je nous regarde aujourd'hui, je nous vois otages de la barbarie des uns et des autres. Ce que j'ai appris des allemands, je l'ai subi tous les jours au frontstalag. Nous vivions comme des animaux...je ne leur ferais jamais confiance pour nous libérer. Vainqueurs avec la France ou vaincu avec l'Allemagne, nous les Algériens serons toujours perdants. Si nous devons être de notre destin, nous ne le devrons qu'à nous même.
Fodil et Tarik ont éclaté d'un rire complice, heureux de penser que j'étais un sacré naïf, tandis que les autres se sont moqué de moi en me crachant leur fumée de cigarette à la figure. L'un d'eux, ivre d'anisette, m'a bousculé et à hurlé que seul Hadj Adolf Hitler nous délivrerait de l'empire de l'empire colonial
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Combien étions-nous dans ce frontstalag ? Plus d'un millier, certainement. A la vérité, il était vain et impossible de le savoir car il en arrivait et il en mourrait tous les jours, des soldats des colonies. Ici aussi, on ne se mélangeait pas. C'était comme une loi naturelle. Il n'y a que dans les romans que des soldats vaincus fraternisent pour mieux supporter la douleur des défaites amères. On s'était regroupés en fonction de nos origines, de nos langues, de nos cultures, de nos religions. Même entre coreligionnaires d'Afrique du Nord, c'était chacun dans son coin. Les marocains étaient dans des baraquements près des abreuvoirs, les Tunisiens avaient préférés vivre comme dans le désert, sous des guitounes façonnés avec des bâches en plastique. Nous, les algériens, nous avions ajouté de la division à la division. Les Arabes et les juifs arabophones s'étaient accaparé les baraquements côté droit de l'enclos, quelques roumis qui avaient refusé de collaborer avec les allemands avaient étendu leur matelas avec des juifs francophiles dans un petit local près du bureau de l'administration et nous, les Kabyle et les juifs de notre région avions pris la partie ouest du camp qui, selon Tarik, était dirigé vers la Mecque.
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-tu a déjà fais la chose, Adam ?
-Non, jamais
- Pourtant j'ai entendu beaucoup de garçons de ton âge au village dire qu'ils l'avaient déjà faite.
Elle avait vu son frère Mourad entreprendre Farida, sa chèvre, dans la bergerie familiale. Elle avait surpris l'ainé des fils d'Alilou amadouer la mule de Mr Grandjean à coups de bouquets de genêts pour obtenir ses faveurs. D'autres gars du village se soulageait la veille de leur mariage sur leurs génisses ou leur brebis pour s'exercer aux mouvements saccadés du bassin.
Imaginer Mourad, le fils d'Alilou et toute cette clique de puceaux, le sarouel en accordéon sur les chevilles, baisant à la sauvette ces pauvres bêtes m'a fait sourire.
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