Alec Krynn

Si tu n'es pas certain du sol sur lequel tu évolues, retires tes chaussures. Tu y gagneras en équilibre

Peut-être le vice est-il bien dans ma nature après tout.

Elle entrouvrit ses lèvres, laissant apparaitre des crocs aiguisés sur lesquels elle passa une langue gourmande. Ses longs cheveux d'un noir d'encre cascadaient sur ces épaules, ne dissimulant aucunement la paire de cornes ténébreuse recourbées ornant son front.

D'expérience, je sais que le réveil est une phase compliquée. Critique serait un terme plus adéquat mais son côté dramatique me laisse dubitatif.

La flamme de son existence a brûlé si fort qu'il s'est consumé

Balayer mon revers de fortune sous le tapis et passer à autre chose, voilà qui est bien plus commode.

Peut-être trouvé-je une certaine satisfaction dans la souffrance ? Après tout, il est bien trop humain que de laisser filer son bonheur entre ses doigts pour pouvoir ensuite se complaire dans son malheur.

- Je ne pense pas qu'il me déteste. Vu son attitude, j'ai plutôt l'impression qu'il me méprise. Pourtant, je fais de mon mieux pour être agréable, mais il trouve toujours à redire.

Ce mec est un véritable tyran. Voilà des heures qu'il me regarde trimer sans jamais me venir en aide. Il n'a aucune parole d'encouragement à mon égard, uniquement des réflexions acerbes vantant l'inefficacité abyssale de mes mouvements ou ma prétendue fainéantise à la tâche.

Même si j'envisage de lui hurler que je me contrefiche de son foutu pognon, je ressens toutefois de l'affection pour le lieu. La possibilité qu'il puisse finir aux mains de quelqu'un d'autre m'épouvante, bien que jamais je ne lui dirais en face, cela lui procurerait bien trop de satisfaction.

Parfois, un fils doit savoir se sacrifier. Je ne connais pas meilleure cause qu'assurer le bonheur de sa trop douce mère pour cela.

En mon for intérieur, je ne peux m'empêcher d'avoir l'impression de revenir m'enterrer dans un trou paumé dans lequel je connais déjà tout par coeur.

Ce n'est certes pas la première fois que je considère qu'un mec puisse être séduisant, presque à mon goût, bien que je me sois toujours revendiqué comme un hétéro. Savoir reconnaître la beauté, qu'importe là où elle se trouve, est pour moi aussi vital que respirer.

Par bien des aspects, ce fusil m'évoque mon père. Froid, borné, avec un seul et unique but. Abattre sa cible.

Cette ambivalence en lui me fascine. Un instant froid et insensible, à l'instar d'une statue d'airain. Il peut néanmoins faire preuve d'un accès de chaleur et d'empathie le suivant.

Je dois avouer que j'aime bien les emmerdeurs dans ton genre. Je ne vois pas le moindre inconvénient à ce que tu continues d'en être un, tant que tu es prêt à en assumer les conséquences.

Je pensais que le fils du grand Bruce Baker serait un type équilibré, un peu à l'image de son père, un véritable roc celui-là. Mais je me rends compte que c'est l'inverse. Putain, t'es presque aussi fracassé que moi.

Le succès est toutefois une maîtresse bien capricieuse dont l'autre face est la jalousie.

Il regrettait tellement d'avoir plongé son ami dans son addiction. Lui, qui n'avait souhaité que lui offrir une échappatoire au quotidien sanglant qui émaillait les journées au sein de la confrérie, n'avait finalement réussi qu'à l'enfermer dans son propre esprit.

Le sens de la camaraderie était une qualité tout à fait secondaire et non encouragée dans la profession de mercenaire. Chacun pour sa pomme, et si l'un d'eux trépassait, il n'y aurait que plus de butin pour les autres.