Un changement de perspective pour moi!
Je ne connaissais pas cet auteur ni la théorie du "pic pétrolier" qui a inspiré l'histoire. Mais je peux dire maintenant que ce qui est écrit dans ce texte m'a assez influencé pour me pousser à lire le premier livre de Scarrow (La théorie des dominos), et à aller voir sur internet de quoi relève plus précisément ce fameux pic.
Comme le dit Scarrow, le pic pétrolier évoque "ce moment où la totalité du pétrole facile d'accès aura été puisée, ne laissant en terre que la matière brute, difficile à extraire et encore plus difficile et coùteuse à traiter. De nombreux débats opposent les géologues et autres experts de l'industrie pétrolière quant aux quantités actuellement disponibles en sous-sol." (...)
Les personnages du livre, Jenny Sutherland et ses enfants, sont rescapés d'une catastrophe qui a complètement modifié le monde, qui a annihilé la manière dont leur - nôtre - monde moderne s'organisait. Survenue une dizaine d'années plus tôt (crise décrite dans La théorie des dominos), une opération de grande ampleur dont on ignore (dans ce livre, mais dont on apprend plus dans le premier tome) l'origine, a détruit en majeure partie les plus grands lieux de production pétrolière du monde, comme par exemple, les gisements d'Oman, d'Irak, d'Arabie Saoudite, du Vénézuela, etc.
En quelques jours, l'Angleterre s'est retrouvée, comme TOUS les pays occidentaux, à cours de réserve de pétrole, et donc progressivement d'essence, pour importer des produits alimentaires. L'économie, ainsi que la production économique bloquées, ce sont des millions de personnes qui n'ont plus été en capacité de subvenir à leurs besoins. L'anarchie s'est mise rapidement en place avec la disparition de la police et de ses forces d'intervention (plus d'essence). Des émeutes apocalyptiques ont éclaté un peu partout, surtout dans les grandes villes. Seuls quelques hommes et femmes ont réussi à survivre à ce désastre. Ceux qui savaient cultiver des matières premières, ou qui avaient anticipé les conséquences de la disparition du pétrole et la trop grande dépendance des pays occidentaux à cette matière.
Voilà pour le contexte. Jenny a perdu son mari dans l'histoire, mais a réussi a guider une petite communauté de quatre-cents personnes sur une plate-forme isolée au large du comté de Norfolk. Ce lieu les protège. Ils ont réussi à recréer les balbutiements de la civilisation. Ils produisent leur propres légumes, produits, et s'approvisionnent pour ce qui manque, sur la côte. Protégés des hordes dangereuses qui sévissent encore sur le continent, et dont ils ont été précédemment victimes, ils ont même réussi à recréer une production "artisanale" d'électricité, en utilisant leurs déjetions et le méthane qui s'en échappe en fermentant. Un retour aux sources, avec la ferme volonté de ne PAS refaire les mêmes erreurs qui ont mené au désastre, comme la surconsommation ou la dépendance énergétique.
Le problème survient lorsque Valéry Latoc, un autre rescapé accueilli parmi la communauté, sème le trouble parmi les occupants, en les divisant. Cet homme parvient à berner Jenny et ceux qui ont pu mettre sur pieds ce havre de paix relatif.
Une étude intéressante des rapports humains, et de notre société.
Ce livre est un thriller que l'on pourrait qualifier d'apocalyptique. On peut même rejeter d'un haussement d'épaules les théories et idées avancées par l'auteur en se disant qu'il est soit alarmiste, soit parano. Il n'empêche que cela fait froid dans le dos.
Ne sommes-nous pas les pantins gavés de biens de consommation qu'il décrit dans son livre, saturés des délices modernes d'un monde riche et abondant, mais fragile et extrêmement interdépendant? On ne peut s'empêcher de se demander, et si cela arrivait, si les noeuds de production de pétrole venaient à ne plus produire leur précieux liquide, que se passerait-il? Serions-nous en mesure de pallier cette absence, ce vide vertigineux? A l'instar d'une réflexion déjà engagée au siècle passé par Barjavel dans Ravage, qu'adviendrait-il de nous sans notre poule aux oeufs d'or, l'électricité?
Par ailleurs, Scarrow explore la finesse des rapports humains en temps de crise, la fragilité de la répartition du pouvoir au sein d'une communauté d'individus. Rien n'est simple pour celui qui prend les choses en main et décide, pour le bien de tous, de certaines décisions. Les critiques finissent toujours par remettre en cause son pouvoir, ce qui est la base de la démocratie, mais ce qui peut aussi mener au renversement de valeurs saines, comme parvient à le faire ici Latoc.
Un livre aux multiples facettes donc, agréable à lire et passionnant.
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