Ça suffit maintenant, arrête de jouer au con. Vouloir appeler son fils Adolphe, au mieux c'est de l'inconscience, au pire une horrible provocation.
Alors moi (Élisabeth) je vais prendre mon aigreur, mon dégoût et ma rancune, et tous les quatre ont va aller se coucher en vous laissant la vaisselle pour une fois. Pierre, tu es sur le canapé, tu y restes. Si les enfants pleurent, c'est pour toi. Moi, je vais prendre une boîte de temesta et dormir pendant 2 jours. Allez tous vous faire foutre et bonne nuit.
C'est vrai que je t'ai supplié de me faire des enfants parce que les enfants il n'y a rien de plus beau mais que je ne m'en suis quand même jamais occupé, enfin si, le dimanche soir, parfois, ça me prend, je joue un quart d'heure avec eux, je les énerve bien en faisant le fou, là, juste avant qu'ils aillent se coucher et qu'après je te les laisse sur les bras, surexcités, trempés de sueur, avec les cartables à préparer, les histoires à raconter, les doudous à retrouver, les pipis et les cauchemars et que je vais m'enfermer dans mon bureau parce que bon, quand même les chiards ça va cinq minutes...
Elle a tellement peur de déranger que ça en devient dérangeant.
Elle a tellement peur de déranger que ça en devient dérangeant.

Pierre : Ce n’est pas un prénom, c’est une apologie de crime contre l’humanité. On ne te laissera pas appeler ton fils comme ça, tu n’auras pas le droit.
Vincent : Ah, parce que d’après toi il y a des prénoms autorisés et des prénoms interdits ?
Pierre : Bien sûr !
Vincent : Eh bien… faisons la liste (Il se lève. Il trouve un cahier et un stylo.) Je peux écrire sur le cahier de textes de Myrtille ?... Non, parce que si je dois changer, que je ne me trompe pas encore une fois. Bon, je vous écoute. (Silence.) Alors ?... Il n’y a qu’Adolf ?
Élisabeth revient.
Elisabeth : Encore ?!
Vincent : Non non. On cherche un nouveau prénom. T’as des idées ?
Élisabeth : Ah… Pourquoi pas Joseph ? C’est classique et joli.
Vincent : Ah non… Joseph c’est pas possible : Joseph Staline ! Fini Joseph. (Il note au fur et à mesure.) Je sais, c’est aussi le prénom du père de Jésus, un charpentier honnête et travailleur, mais Staline est venu après, alors tant pis pour lui. C’est bien ça la règle, Pierre, non ? Alors, au revoir Joseph… Au revoir Benito, Franco, Augusto… Au revoir Paul.
Claude : Paul ?
Vincent : Ben oui, Pol Pot. Trois millions de morts. Je sais c’était des Khmers, mais ça compte aussi, non ? Ça s’écrit pas pareil, mais c’est pareil, paraît-il. (Un temps.) Je suis désolé, Babou, mais il va falloir débaptiser ton chat.
Élisabeth : C’est Polo.
Vincent : Polo, Paul, on va pas ergoter. Est-ce que j’ai le droit à Adolpho, moi ? Non. Alors je suis désolé, mais adieu Polo… Et c’est pas fini, hein ! Il y a Pétain, aussi, qui nous tue les Philippe ; et Napoléon, Fidel, Saddam… Vous m’aidez pas beaucoup, vous devez être nuls au petit bac…
Pierre : Vincent…
Vincent : Il y a un nombre de morts limite ou pas ? Parce que sinon il y a aussi les tueurs en série : Gilles de Rais ou Francis Heaulme, plus contemporain, mais efficace, quand même.
Claude : Je crois qu’on a compris ton raisonnement, Vincent.
Vincent : Vraiment ? Parce qu’il y a Jack l’Éventreur aussi, fini Jacques. Et Carlos, dans la catégorie terroriste… et Ben Laden ! Et qui dit Ben dit Benjamin, hein… Bon, ben, en gros pour le chat de Babou et mon fils, il reste pas grand-chose en noms autorisés. (Il regarde ses notes.) J’ai Bernard et Raoul. Tu veux quoi, Babou ? À toi l’honneur, le chat est né avant.
Claude sourit.
Vous jouez avec les sujets de société comme avec des petites voitures. Avec quoi on va jouer ce soir? L'avortement, le foulard islamique, le Vélib' ou le droit de grève? Vous prenez des positions que vous pouvez interchanger.
Alors moi je vais prendre mon aigreur, mon dégoût et ma rancune, et tous les quatre on va aller se coucher en vous laissant la vaisselle pour une fois. Pierre, tu es sur le canapé, tu y restes.
Bonjour je voudrai lire ce livre peut on le lire en ligne ou le télécharger sur ce site merci d'avance