Alice Scarling

Ma cigarette finie, je me relève pour retourner à mes quartiers sans bien savoir ce que je vais y faire. Je croyais qu'en venant vivre ici j'aurais une famille, des amis, une vie normale parmi mes semblables mais ma place n'est nulle part.
(ed. poche, p. 361)

Je crois que chacun d'entre nous a un point de rupture. Une ligne rouge à ne pas dépasser. Un seuil au-delà duquel il ne peut plus encaisser et finit par céder. Je crois que je viens d'atteindre le mien.
Je pensais avoir déjà touché le fond mais malgré tout, j'ai pu continuer à avancer, à faire avec et à me relever. Cette fois, le fond est là. Je peux le toucher. Et si je suivais la métaphore consacrée, je pourrais donner un coup de pied et finir par remonter à la surface. Sauf que quand on atteint le fond, c'est parce qu'on y a été entraîné, et il ne suffit pas de donner un coup de pied quand on a les jambes coulées dans le béton.
(ed. poche, p. 371)

S'il vous plaît, est-ce que les monstres pourraient redevenir comme dans les histoires ? Moches et identifiables au premier coup d’œil ?
(p. 207)

J'aimerais pouvoir m'abandonner à cette sensation. Croire un moment que j'ai quelqu'un à appeler "papa". Quelqu'un pour me protéger. Sur qui je peux me reposer.
(p. 266)

Parce que j'y ai cru. Je refusais de me laisser avoir. Pourtant, à un moment donné, sans même m'en rendre compte, j'ai fini par céder. Je me suis mise à espérer. Un père, une famille, une vie - presque - normale. Quelle idiote je fais.
(p. 286)

Dans les films, quand le méchant se lance dans un monologue, les gentils trouvent le moyen de se libérer et de le vaincre. Dans les films.

Il se relève à ces paroles, me rejoint sur le lit et s’allume une cigarette également. Puis, de sa main libre, il attrape la mienne et des flammes jaillissent de nos doigts entremêlés.

Je ne discerne plus rien hormis cette sensation d'être parfaitement comblée, entière. Comme si toute ma vie, il m'avait manqué quelque chose et que c'était enfin là.

On cherche la dernière Bouche de l’Enfer depuis des semaines et on n’a toujours rien ! Alors retrouver le fils de Dieu et la Bouche de l’Enfer… … autant signer l’arrêt de mort de l’humanité tout de suite. Elle se lève prestement, attrape le paquet de Post- it sur la table avec un stylo, griffonne quelque chose dessus et me le tend. Je l’observe sans comprendre, baisse les yeux sur le papier, le lis une fois, deux fois. — Kevin Josefson, Club Underworld ? je lis à haute voix. Elle ne se départ pas de son sérieux. — Le fils de Dieu s’appelle Kevin ? j’insiste. Kevin Josefson ? C’est une blague ?

Je prends une profonde inspiration. Il faut que je me reprenne. Tout faire brûler ne m’avancera à rien. Je calme l’incendie intérieur qui nourrit le feu sur mes mains et m’effondre contre le mur. Toute ma vie, je me suis adaptée à ce que mon entourage attendait de moi et au final j’ignore qui je suis réellement. Orpheline, nonne, salope, marginale, princesse cassée, héraut de l’Apocalypse.

Après une course effrénée – et plutôt excitante – à travers les rues de Paris avec mon nouveau compagnon à poils, nous finissons par arriver au portail. Je m’y reprends à trois fois pour allumer les bougies parce que le loup bat tellement vite de la queue qu’il les éteint avant qu’on puisse se téléporter.

Ça fait des heures que je m’entraîne. Je suis fatiguée, j’ai mal partout et j’aurais aimé me reposer un peu sur mes lauriers après le succès de notre dernière mission, mais Zekiel en a décidé autrement, et il a alourdi le programme. Des jours à exercer mes différents pouvoirs des heures durant, sans faire de pause, sans manger, sans boire et sans vraiment comprendre ses instructions toutes plus délirantes les unes que les autres. Tout ça sans aucun égard non plus pour les gueules de bois, les migraines – ainsi que mon envie de baiser tout ce qui passe –, qu’implique l’utilisation à outrance de mes capacités.

L’enfer, le paradis… ne sont pas exactement tels qu’on vous les présente à vous humains. Il n’y a pas d’un côté le bien et de l’autre le mal. Nous nous battons parce que nous n’avons pas les mêmes idéaux et que chaque parti veut imposer les siens à l’humanité. Mais crois- moi, il vaudrait mieux pour les hommes que ce soit l’enfer qui gagne. Les anges sont des pisse- froid qui interdisent tout ce qui leur déplaît. Et tout leur déplaît ! Les émotions, l’amour, le sexe, les rires… Si les anges gagnent, les hommes vivront dans un monde aseptisé, bien ordonné, où le moindre écart de conduite sera considéré comme un péché mortel. » Les démons sont pour la liberté. La liberté d’action, la liberté de pensée… C’est un peu chaotique peut- être mais tellement plus… jouissif. J’aime l’amour, j’aime le sexe, j’aime tout ce que ce monde a à nous offrir…

Puis ils se placent autour de moi, sur la ligne extérieure du dessin. Ils récitent un truc en latin ou quelque chose du genre. J’en ai un peu marre de ce cliché pourri. Tous les abrutis vaguement branchés surnaturel se tapent un délire en latin à un moment ou à un autre semble- t- il. J’en sais quelque chose : j’ai eu ma dose d’allumés ces derniers jours.

Les boîtes de nuit bondées offrent l’anonymat de la foule, des clients bien éméchés aux poches remplies de liquide et plein de coins sombres où se cacher. L’inconvénient, c’est que les gens y vont rarement seuls. Même s’ils sont là pour draguer, ils viennent toujours avec des amis. Cela dit, les amis, ça va aux toilettes, ou danser, ou lever de la cruche semi- consentante.

"Comme tous ceux qui vivent des heures sombres, mais ce n'est pas eux de décider. Tout ce que tu peux décider c'est quoi faire du temps qui t'es imparti." P 198

mais l'ex-général démon est occupé à trifouiller son téléphone. S'il est en train de jouer à Candy Crush, je jure que je vais lui éclater la tête.

On à tous des noms de scène !

- c'est quoi le tien ?

Il met les bras en croix, laisse retomber un peu sa tête.

-Le Christ ? je demande sans y croire.

Il acquiesce.

-Buvez c'est mon sang, mangez c'est mon corps, touchez c'est mon cul !

On ne choisit pas les épreuves qu'on subit, simplement la façon dont on les affronte.

Un cri rauque s'élève de ma gorge lorsque mon corps explose en milliers de petites particules de plaisir, qui flottent détachées du temps et de l'espace avant de revenir à leur place dans mon corps tendu comme un arc contre le torse de [...]