Amy K. Green

Ce qu'il y a de drôle avec la mort, c'est de voir à quel point tout le monde essaie de continuer à vivre normalement quand elle survient. Comme si cette douleur atroce allait disparaître en faisant mine de rien.

Dingue, cette capacité qu'ont les humains à identifier tous leur points faibles, toutes leurs angoisses, sans pour autant être capables de remédier à quoi que ce soit.

A Wrenton, tout le monde connaissait tout sur tout le monde, ou essayait, du moins. Le temps de passer à la caisse, à la pompe à essence, j'avais déjà appris six ou sept ragots sur mes voisins. Ce qui se passait aux quatre coins du globe n'avait aucun intérêt. Les histoires qui valaient le coup étaient celles qu'il fallait murmurer de peur que la personne dont vous parliez ne se trouve à quelques mètres de vous.

Vouloir être aimé par quelqu’un corps et âme, même si cette personne ne vous aime pas, même si elle ne vous aimera jamais, même si cette personne est ce qu’il y a de plus néfaste pour vous est un besoin humain, incontrôlable.

Être constamment comparée à Virginia l’écœurait, être jugée comme si toutes les erreurs commises par sa sœur allaient devenir les siennes. Tout le monde parlait de la pression que les aînés, dans les familles, subissaient ; personne en revanche ne disait jamais à quel point il était dur d’être le second.

" On commence par où ?" j 'ai dit.
Au lieu de me répondre, Brandon [ inspecteur de police ] est parti en direction de la chambre principale. Le lit avait été fait, aucune trace de départ précipité. Il a sorti de sa poche un gant en latex et l'a enfilé. Cette vision m'a instantanément excitée ; impossible de ne pas se croire dans une série télé. Il a ensuite sorti un deuxième gant et me l'a donné. Tous mes rêves étaient en train de devenir réalité.

Six jours sur sept, je combattais mes démons ; un soir par semaine, je m'accordais une pause. Mon écart de la semaine. Un stratagème qu'emploient des milliers de femmes au régime dans le monde entier, sauf que moi, je n'avais pas envie de brownies , mais de médocs et de vodka.

De toute façon j'habite à côté.
- Tout est toujours à côté de tout dans cette ville. "

Brandon m'a amenée jusqu'à une petite salle pourvue d' une fenêtre. A l'intérieur, une table en bois et trois chaises, toutes pareilles. Les codes esthétiques de la police étaient assez clairs. Métal pour les interrogatoires, bois pour les visites.

- " Qu'est-ce-que tu fais ici ?
- Qui êtes vous ?
- Je suis Charlie", (...)

Brett était une sorte de videur sans liste. Il choisissait qui entrait dans l'église, à la tête du client. J'étais en quatrième position dans la file, une file, une vraie, dans laquelle j'étais obligée d'attendre patiemment mon tour pour pouvoir assister à l'enterrement de ma propre soeur. C'était mon choix. Je ne méritais aucun traitement de faveur. Je n'avais pas été une soeur digne de ce nom.

Les gens mentent. Tout le temps.

 Le nombre de meurtres que j'avais résolus n'avait pas décollé depuis le jour où j'étais partie de chez Mark comme une furie. J'avais regardé trois épisodes de "New York, Unité spéciale" - sans résultat. Il y avait désormais une question à laquelle je devais accepter de faire face : si Mark n'était pour rien dans le meurtre de Jenny, serais-je toujours aussi motivée pour trouver l'assassin ? 

Je déteste reconnaître que j'aime bien cette ville. Faut quand même être sacrément naze pour se plaire ici. Je pourrais au moins avoir envie de partir en Europe, de rencontrer un mec à moustache ou bien de vivre dans une ville qui bouge, où tu peux héler des taxis, les cheveux dans le vent. Mais non.

Le tueur avait une chance monstrueuse que Jenny se soit retrouvée entourée par un si grand nombre de malades.

Se montrer vulnérable, sensible était devenu quelque chose de dangereux.

Le problème, quand on habite un studio, c’est qu’il est impossible de s’éclipser dans un moment gênant. Dans un appartement normal, la  préparation du thé aurait été un prétexte bienvenu pour s’isoler un instant.

Il  y en a qui restent les mêmes toute leur vie, mais la plupart des gens changent et c’est bien normal. Tu ne dois pas avoir peur de changer, même si ça ne plaît pas autour de toi.

Ma mère est devenue complètement parano. Elle était persuadée que mon père la trompait. J’en doutais. Ce n’était pas un homme de passion. Ma mère s’est transformée en hystérique, en ivrogne.

C’était une plaisanterie. Je n’aurais probablement pas dû. On ne plaisante pas à un enterrement.