Citations de Anne Rehbinder (24)
Les parents, ils voudraient qu'on voie des psys alors que la plupart du temps c'est eux le problème.
Il y a eu du brouhaha, et le maire, plus personne n'entendait ce qu'il disait. Il est devenu tout rouge et il a fini par réclamer le silence, " bordel de merde". ça a calmé tout le monde.
( p 30 )
Vous n'avez pas honte ? Vous pensez à ce qu'ils ont traversé ? Juste une seconde, vous y avez pensé ? Vous pensez qu'ils sautent au plafond, les réfugiés, à l'idée de se retrouver à des milliers de kilomètres de chez eux, dans notre petit village paumé ? Vous ne pensez pas qu'ils préféreraient rester chez eux, près de leurs familles ? Comme nous, en fait. Ils sont exactement comme nous ! Vous pensez qu'ils se sont levés tranquillement un matin et qu'ils se sont dit : « tiens, si on allait envahir un village breton, si on allait prendre leur travail, violer leurs femmes et manger leurs enfants ? Et on va construire des mosquées géantes sur les places de leurs églises. » vous croyez que c'est comme ça ?
La Miette nous a laissés tomber. Elle a pris la tangente, elle est partie voir ailleurs, pas de petit frère en vue. Elle a dû penser qu’on ne valait pas le détour, comme famille. Sale lâcheuse ! Elle s’est barrée en douce.
Et puis papa lui a dit ce dont il était sûr. Si dans une autre vie, c'est nous qui étions arrivés chez eux, en Afghanistan, Ekhma et son père nous auraient accueillis. Ils nous auraient aidés à trouver une maison et même du travail. Ils nous auraient au moins aidés à faire un petit Noël avec les moyens du bord, pour nous donner du réconfort. (p.111)
Après l’école, c’est pareil. Parce que le plus souvent, on a mis l’âme à rude épreuve. On passe nos journées à entendre parler de la guillotine, des gens qui ont faim, des multiplications et de la peste noire.
Faut pas croire non plus que ça ne nous fait rien du tout.
Nous n'héritons pas la terre de nos ancêtres, nous l'empruntons à nos enfants.
Clément CM2
Comme si c'était le seul à croire encore en l'avenir, le mois d'avril a mis de la douceur dans nos récréations, et des fleurs sur les arbres.
Comme la première fois qu'il avait dit mon prénom. Des fées dansaient la rumba dans ses yeux.
Il y avait juste leurs coeurs éparpillés comme les miettes brillantes d'un verre à champagne qui aurait explosé contre le sol au milieu de la fête.
Camélia, elle a des cheveux tellement dorés qu'on dirait la fille de Raiponce et de la Reine des neiges qui auraient fait le mariage pour tous.
Le mercredi, quand Ekhma est arrivé, j e lui ai tout expliquer . Et
il a grogné. ça ne se lui plaisait pas beaucoup, cette histoire. Je
lui ai dit de me faire confiance et qu'il n'avait
qu'a lires des BD en attendant. Quand je lui ai montrerai mon
plan, obligé il serais d'accord.
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Vous pensez qu'ils sautent au plafond, les réfugiés, à l'idée de se retrouver à des milliers de kilomètres de chez eux, dans notre petit village paumé? Vous ne pensez pas qu'ils préfèreraient rester chez eux près de leur familles? Comme nous en fait. Il sont exactement comme nous.
Finalement, j’aimerais bien retourner à Paris, mais cette fois avec Ekhma. Pour voir comment il sautiller et frétille, comment il pousse des cris de joie.
Pour voir comme le monde qui me fait peur est beau, quand c’est lui qui le regarde.
Le monde n’était plus un gouffre de menaces. Le monde, c’était Mathilde, Marcia et Didier, et la promesse de plein de jours meilleurs et de tous nos malheurs réparés. Ils avaient cet air d’adultes qui nous veulent du bien avec leurs regards qui nous prenaient dans les bras.
Je me suis assise sur les sièges bleus de la salle d’attente et j’ai réalisé qu’Ekhma était à côté de moi parce qu’il m’a pris la main. C’est là que j’ai commencé à pleurer sans plus pouvoir m’arrêter, puisque de toute évidence, je venais de tuer mon frère. Et qu’entre ça et la mort de tout l’univers, il n’y avait pas beaucoup de différence
Des fois, il se mettait à rire, rire comme un lionceau qui s’étouffe. Et moi je me demandais comment il faisait pour avoir ce rire-là à l’intérieur de lui en même temps que les milliers de morts sans ses yeux
Le matin avant de partir, je suis allée chercher les feuilles d’endives pour Pissenlit dans le frigo, et j’ai écrit quelques mots dessus. Les pires mots de mes pires rêves de la nuit. J’espérais qu’en rentrant, Pissenlit aurait tout mangé, et que ces rêves-là, je ne m’en souviendrais plus jamais.
C’est la voix d’Ekhma qui m’a sorti du cauchemar. Avec ses
grands yeux gourmands, il a levé son verre vers moi, en disant
« tchin-tchin », comme papa lui avait appris. J’ai
répondu machinalement « kha sehat walary ». Comme il me
le faisait répéter depuis des jours en riant comme un ouistiti,
parce que mon pachtou était très comique, apparemment. J’avais la
bouche sèche, et je crois que mon sourire n’était pas très
crédible. L’expression a changé sur le visage d’Ekhma, et
l’interrogation soudaine dans ses yeux m’a fendu le cœur. Il ne
se doutait de rien. C’est là que j’ai aperçu maman qui courait
à travers la place. Tout essoufflée, elle nous a arrachés à nos
boissons avec tellement de force que la table a vacillé.
Venez, venez. C’est bon, je les ai trouvés.
On
s’est frayé un chemin à travers la foule grouillante. Tourné au
coin de la rue, virage à gauche, couru encore, et puis, enfin, on
l’a vu.
Il
était là, flambloyant, dans le coin d’une placette, qui avait
l’air d’exister juste pour qu’il y prenne place.
Maël
et Azmaray avaient même pu sortir les trois tables et les chaises
pliantes le week-end précédent, en en mettant partout sur la
pelouse. Toute les tables étaient prises, et des gens dévoraient
leurs beignets joyeusement. D’autres faisaient la queue, et de la
musique sortait des enceintes. Les papas avaient des sourires ravis
et s’agitaient dans tous les sens pour servir les gens le mieux
possible. Le monde était merveilleux.
Citation
choisie par Charlie
Le monde qui me fait peur est beau…