Cette année encore, nos Petits Champions de la Lecture #In Seine-Saint-Denis ont répondu, avec talent, à l'appel de ce jeu de lecture à voix haute.
Découvrez, en vidéo, la lecture par Tom (Pantin) du titre "Traquées" de Sandrine Beau (PKJ - Pocket Jeunesse)
Pour en savoir plus sur les prochaines étapes de ce jeu de lecture à voix haute : https://slpjplus.fr/educartistique/petits-champions-de-la-lecture-2021/
Y'a un moment, je ne sais pas à quoi c'est dû, mais les adultes se croient autorisés à parler de votre corps, comme si vous étiez absent. Ou pire, comme si vous étiez une voiture qu'on observe, qu'on détaille et qu'on jauge. Sauf que je ne suis pas une voiture! Et que j'ai horreur de ça!
[pique-nique familial au bord de l'eau]
- Ben... qu'est-ce que tu fais, Mia ? Déshabille-toi.
- Non, c'est bon, j'ai pas envie de me baigner.
- On crève de chaud, viens, ça te fera du bien.
J'ai regardé ma mère, fixement, en tentant une fois de plus la transmission de pensée. « J'ai pas envie de me balader en culotte, devant ton mec qui me reluque sans arrêt. Tu comprends ça ? »
Une fois de plus, ça n'a pas fonctionné.
Elle a juste soupiré, avec un air exaspéré :
- Comme tu veux. Je ne te comprends vraiment pas !
« Ça, je confirme, Maman ! », j'avais envie de dire.
(p. 50)
- Ma mamie, elle s'est fait un tatouage trop beau !
C'est une petite libellule bleue ! On dirait qu'elle est posée sur son épaule.
- Les mamies, ça fait pas des tatouages.
Cette fois, Maman m'avait emmenée dans une crêperie. On s'était régalées et je n'avais pas arrêté de rire en l'entendant imiter une de ses collègues qui parlait avec une voix de canard.
Pendant que je mangeais ma crêpe beurre-sucre, je m'étais dit que c'était le bon moment. A chaque bouchée, je répétais dans ma tête la première phrase que j'allais dire : « Tu sais Maman, il faut que je te parle de quelque chose... » « Tu sais maman, j'ai un problème... » « Maman, Lloyd il est sympa, mais y a quand même un truc qui va pas... »
(p. 54-55)
- Ahaha ! Un papy, ça marche doucement.
Ça file pas du tout comme le vent !
Même que des fois,
ça s'appuie sur un petit chariot.
- Pas le mien.
Il aime que ça va vite.
C'est pour ça qu'il a une moto.
- Les mamies, ça comprend rien du tout aux ordinateurs.
C'est des spécialistes de la couture et du tricotage de pull !
- Ma mamie, elle est nulle en couture.
Elle sait faire que les boutons !
-Tu peux me parler, tu sais. Je peux tout entendre.
Théa s'était sentie glacée. Elle avait tiré sur ses manches un peu plus fort, pour cacher ses bras en entier.
Je suis un petit soldat. Je me débrouille toute seule.
Il ne faut rien dire. Elle le sait. Il n'a même pas eu à menacer. De toute façon, c'est impossible de parler de ces choses-là. Elle aurait honte, elle se sentirait encore plus sale. Coupable de sa pauvre et horrible petite vie. Elle ne veut pas de ça. Et puis, on ne croit pas les enfants. Alors, elle rit plus fort encore.
Quand t'es pas là, y a Lloyd qui ne se comporte pas comme il faur. J'ai peur, Maman. Je veux pas aller me coucher ce soir, si tu n'es pas à la maison...
- Eh ! Oh ! Tu ne m'as pas bien vu, là ?
Je suis un Ogre !
- Et moi, je suis une petite fille.
Enchantée !
Et la petite fille reprend son chemin.
- Non mais je rêve !
Tu n'as pas peur de moi ?
- Ben non, pourquoi ?
Toi, tu as peur de moi ?
J'ai envie de dire qu'avec le Parti, ça ne va pas s'arranger. Les vieux, ils ne sont pas en odeur de sainteté. Comme les homos, les gros, les roux, les bigleux, les chevelus, les artistes, les écolos et tous les autres qui ont le tort de dépasser un peu. Les handicapés, c'est pire. Il paraît qu'ils les parquent dans des espèces de centres "adaptés à la mesure de leurs capacités". Je pense à Simon Nogent, et mes oreilles bourdonnent. Quand il s'agit de quelqu'un qu'on connaît en vrai, ça prend une tout autre tournure qu'un nom de catégorie sur un papier.
Comment on en est arrivé là? On n'a rien vu venir...