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Citations de Bertrand de Jouvenel (24)


La liberté, ce n'est point notre participation plus ou moins illusoire à la Souveraineté absolue du Tout social sur les parties, mais c'est la souveraineté directe, immédiate et concrète de l'homme sur soi-même, qui lui permet et l'oblige à déployer sa personnalité, lui donne la maîtrise et la responsabilité de son destin, le rend comptable de ses actes envers le prochain doté d'un droit égal qu'il doit respecter -- ici intervient la Justice --et envers Dieu dont il remplit ou bafoue les intentions.
Ce n'est point comme élément du bonheur individuel que la liberté a été tellement vantée par les esprits les plus élevés ; mais parce qu'elle retire l'homme du rôle d'instrument où les volontés de puissance tendent toujours à le réduire, et consacre la dignité de sa personne.
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Plus les partis s'organisent, plus c'est le "drapeau" et la "machine" qui assurent l'élection, plus aussi l'élu est inféodé à la "machine", véritable maîtresse de son sège. Le Parlement n'est plus alors une assemblée souveraine où une élite d'hommes indépendants comparent des opinions libres et parviennent à une décision raisonnable. Ce n'est que la chambre de compensation où les partis mesurent l'un contre l'autre leurs paquets de votes.
Plus la "machine" est puissante, plus les votes sont disciplinés, moins la discussion a d'importance : elle n'affecte plus le scrutin. Les claquements de pupitres tiennent lieu d'arguments. Les débats parlementaires ne sont plus l'académie des citoyens mais le cirque des badauds.
La machine a commencé d'écarter les intelligences et les caractères. Maintenant ils s'écartent d'eux-mêmes. Le ton et l'allure de l'assemblée vont s'abaissant. Elle perd toute considération.
La puissance effective quitte d'ailleurs l'assemblée à mesure que les partis gagnent en consistance et en discipline. si l'un d'eux dispose d'assez de sièges pour dominer l'assemblée, elle n'est plus qu'une chambre d'enregistrement de ses décisions. Dans ces conditions aucun gouvernement n'est possible que celui voulu par le parti, que celui du parti.
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(...) il n'y a point d'institutions qui permettent de faire concourir chaque personne à l'exercice du Pouvoir, car le Pouvoir est commandement et tous ne peuvent commander. La souveraineté du peuple n'est donc qu'une fiction et c'est une fiction qui ne peut être à la longue que destructive des libertés individuelles.
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On ne peut nulle part et en aucun temps construire un Pouvoir envahissant avec des aristocrates. Le soin d'intérêts de famille, la solidarité de classe, les préjugés de l'éducation, tout les dissuade de livrer à l'Etat l'indépendance et la fortune de leurs semblables.
La démarche absolutiste, soumettant la diversité des coutumes à l'uniformité des lois, combattant les sentiments locaux pour rapporter les fidélités à l'Etat, éteignant tous les foyers de vie pour en aviver un seul, substituant enfin le gouvernement mécanique d'une administration à l'ascendant personnel des notables, est naturellement destructrice des traditions auxquelles s'attache la fierté des dynasties aristocratiques et des patronages qui font leur force.
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Si le Pouvoir tend naturellement à grandir et s'il ne peut étendre son autorité, accroître ses moyens qu'au dépens des puissants, la plèbe doit être son éternelle alliée. La passion de l'absolutisme doit nécessairement conspirer avec la passion de l'égalité.
(...)
Ainsi les progrès de la plèbe dans l'Etat et de l'Etat dans la Nation sont intimement associés.
L'Etat trouve dans les plébéiens les serviteurs qui les renforcent, les plébéiens trouvent dans l'Etat le maître qui les élèvent.
(...)
Des historiens sentimentaux ont déploré que la royauté se soit rendue absolue, tout en la félicitant d'avoir promu des plébéiens. C'est se moquer. Elle a élevé des plébéiens parce qu'elle voulait se rendre absolue, elle s'est rendue absolue parce qu'elle a élevé des plébéiens.
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Si l'on voulait bien ne pas rendre l'Histoire incompréhensible à force de la compartimenter -- politique, économique, sociale -- on s'aviserait peut-être qu'elle est essentiellement compétition de volontés autoritaires, qui se disputent par tous les moyens le matériau commun de tous leurs édifices : les forces de travail humaines.
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A quoi donc tend cette lutte renouvelée du Pouvoir contre les pouvoirs qui se forment dans la Société ? Cette voracité toujours en éveil du grand consommateur des forces humaines à l'égard de tous les rassembleurs successifs de ces forces ?
Où est le terme ? C'est la destruction de tout commandement au profit du seul commandement étatique. C'est la pleine liberté de chacun à l'égard de toutes autorités familiales et sociales, payée d'une entière soumission à l'Etat. C'est la parfaite égalité de tous les citoyens entre eux, au prix de leur égal anéantissement devant la puissance étatique, leur maîtresse absolue. C'est la disparition de toute force qui ne viennent de l'Etat, la négation de toute supériorité qui ne soit consacrée par l'Etat. C'est, en un mot, l'atomisation sociale, la rupture de tous les liens particuliers entre les hommes, qui ne sont plus tenus entre eux que par leur commun servage envers l'Etat. C'est à la fois, et par une convergence fatale, l'extrémité de l'individualisme et l'extrémité du socialisme.
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Accident aux yeux de l'homme qui vit exclusivement dans son temps, lequel peut être par bonheur pacifique, la guerre apparaît à celui qui contemple le déroulement des époques comme une activité essentielle des Etats.
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L'Histoire est lutte de pouvoirs.
Partout et toujours l'homme s'empare de l'homme pour le plier à sa volonté, le faire servir à ses desseins ; de sorte que la Société est une constellation de pouvoirs qui sans cesse s'élèvent, s'accroissent et se combattent.
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Rêvant un ordre trop simple et trop rigide, voulant le réaliser trop vite par des mesures trop impératives et trop radicales, la Pensée se trouve conspirer perpétuellement en faveur du Pouvoir : n'importe si elle combat les détenteurs de l'autorité, elle travaille à élargir la fonction. Car elle jette dans la Société des visions qui ne sauraient prendre d'existence concrète que par un immense effort en sens inverse du cours naturel des choses, effort dont le Pouvoir seul, et un Pouvoir très grand, est capable. De sorte qu'enfin elle fournit au Pouvoir la plus efficace justification de sa croissance.
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Le Pouvoir emprunte sa vie à ceux qui l'exercent, il se réchauffe et se ranime sans cesse par les jouissances qu'il leur procure. (...) Les festins que nous peignent les chroniqueurs de Bourgogne, les cortèges d'apparat, tout le faste dont s'entourait un Charles le Téméraire, un Jules II, un Laurent de Médicis, un François 1er, un Louis XIV, ces grandes flambées de richesses, voilà ce que le public reproche. Heureuses prodigalités pourtant, auxquelles nous devons des Van Eyck, des Michel-Ange, des Vinci, la Sixtine et Versailles : le gaspillage des princes a constitué le plus précieux capital de l'Humanité.
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(...) le Pouvoir va prenant dans la Société une place toujours plus large, que les conjonctures l'invitent à remplir en même temps que son appétit le porte à se gonfler. Ainsi l'on assiste à une croissance indéfinie du Pouvoir, servie par une apparence de plus en plus altruiste, quoique toujours animée par le même génie dominateur.
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Le roi emploie une part considérable des tributs en largesses, (...), à ceux dont l'appui consolide, dont la défection menacerait son autorité. Or ne voit-on pas aussi les gouvernements modernes faire bénéficier des deniers publics des groupes sociaux, des classes, dont ils veulent s'assurer les votes ?
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Nous avions d'abord supposé un Pouvoir d'essence égoïste ; nous l'avions vu acquérir une nature sociale. Voici maintenant que, supposant un Pouvoir d'essence sociale, nous le voyons acquérir une nature égoïste.
(...) dans la complexion du Pouvoir réel, les deux natures sont nécessairement associées. De quelque manière et dans quelque esprit qu'il ait été institué, il n'est ni ange ni bête, mais c'est un composé qui, à l'image de l'homme, réunit en lui deux natures contradictoires.
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Comment les dirigeants, forts d'une compétence et de dossiers qui leur permettent de confondre leurs contradicteurs, ne se convaincraient-ils pas qu'ils sont supérieurs, que les intérêts sociaux ne sauraient être sauvegardés que par eux, que la société enfin n'a pas de plus grand intérêt que de conserver et faire prospérer son corps dirigeant !
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Je n'ai prétendu retracer ici l'évolution historique du Pouvoir, mais démontrer par une démarche logique, qu'en supposant un Pouvoir de pure force et de pure exploitation, il tendrait nécessairement à composer avec ses sujets, s'approprierait à leurs besoins et à leurs aspirations, qu'animé d'un pur égïsme et se prenant lui-même pour fin, il en viendrait néanmoins, par un processus fatal, à favoriser des intérêtes collectifs et à poursuivre des fins sociales. En durant, il se "socialise" ; il doit se socialiser pour durer.
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(...) le Pouvoir commence sa carrière en abaissant ce qui est élevé, et en élevant ce qui est abaissé.
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C'est une singulière illusion que la loi de la majorité ne fonctionne qu'en démocratie. Le roi, un homme tout seul, a plus qu'aucun gouvernement besoin que la majeure partie des forces sociales penche en sa faveur.
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Un homme seul peut gouverner une masse immense parce qu'il a forgé des instruments lui permettant d'être paradoxalement "le plus fort" à l'égard de quiconque : c'est l'appareil d'Etat.
L'ensemble soumis constitue un "bien" dont vit le monarque, au moyen duquel il soutient son luxe, alimente sa force, récompense les fidélités, et poursuit les fins que lui propose son ambition.
Mais on peut dire avec autant de raison que ce commandement doit son établissement à ce qu'il a protégé les vaincus ; doit sa force à ce qu'il a su s'attacher des serviteurs et créer une disposition générale à l'obéissance ; doit enfin les ressources qu'il tire du peuple de la prospérité qu'il fait régner.
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Telle est la dépendance du Pouvoir à l'égard de la Nation, telle la conformité de son activité aux nécessités sociales, qu'il vient presque forcément à l'esprit que les organes de commandement ont été élaborés consciemment, ou inconsciemment secrétés, par la Société, pour son service. De la vient que les juristes identifient l'Etat avec la Nation : l'Etat est la nation personnifiée, organisée comme elle doit l'être pour se régir et traiter avec d'autres.
Cette vue est très belle : malheureusement elle ne rend pas compte d'un phénomène qui n'est que trop fréquemment observable : la saisie de l'appareil d'Etat par une volonté particulière qui use de lui pour dominer la Société et l'exploiter à des fins égoïstes.
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