Lila ne s’est jamais franchement sentie fille. Pas même garçon manqué. Plutôt garçon tout court. Si pendant l’enfance, la différence ne se fait pas encore trop sentir, les choses se compliquent à l’adolescence, entre hormones et éveil et seins qui poussent, qui la mettent au pied du mur face à son identité. Car il ne s’agit pas juste de fuir les robes légères et de préférer le foot à la danse, Catherine Castro et Quentin Zuttion nous parlent bien de dysphorie de genre.
Le sujet était glissant et il est assez bluffant de lire ce cheminement que l’on imagine très difficile, raconté ici très simplement et sans fausse pudeur. Un peu trop simplement pourrait-on d’ailleurs se dire, tant la transformation semble rapide et sans trop d’embûches. Le récit est basé sur une histoire vraie, témoignant ainsi très justement des préoccupations liées à l’identité qui peuvent se bousculer, notamment à l’adolescence.
Cette BD est celle qui manquait pour faire comprendre le profond malaise qui étreint celles et ceux coincés dans une enveloppe corporelle qui ne leur correspond pas. Nous ne sommes pas dans du récit militant ni dans la caricature ou le spectacle. Nous sommes dans de la chronique intime, sociale, témoignant de ce qu’est être transgenre, et comment, concrètement, on peut envisager changer de sexe, les doutes, les embûches, les démarches, le regard des autres. Le dessin de Quentin Zuttion laisse la place aux silences, donnent leur importance aux regards, qui se perdent, soutiennent, s’affranchissent. Un dessin moderne et doux, avec une colorisation à l’aquarelle qui accompagne les difficultés et souligne les échanges.
Par le regard de Lila qui deviendra Nathan, celui de sa famille, de ses amis, des voisins, des gens de passage, les auteurs décrivent avec beaucoup de justesse cette difficile quête d’identité, loin d’être nouvelle et pourtant encore bien malmenée. Un must à faire circuler.
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