Abandonnée de sa famille et louée à des kidnappeurs sans scrupule, quelques goulées d'eau à vingt degrés de moins que la fournaise ambiante font comprendre à Lia la captive à quel point elle tient encore à la vie.
"C'est un des premiers jours de ma vie; je n'ai pas encore de nom. Ma mère me donne le sein dans la cour, à l'ombre du manguier. Ses bras se crispent autour de moi. Ma tante vient de sortir de la maison; elle fouille la cour des yeux, les paupières plissées sous le soleil cru du printemps.
Ma mère implore en pensée la déesse du Foyer: "Durga, ne la laisse pas s'approcher !"
Mais la grande femme sèche se dirige déjà vers nous. Sans se donner la peine de s'accroupir, elle crie à sa belle-sœur :
- Femme de Meyyan !
Ces mots sonnent avec dédain. Ma tante, exprès, n'appelle jamais ma mère "petite sœur", comme c'est l'usage.
- Femme de Meyyan, qu'est-ce que tu es en train de faire ?
Elle siffle entre ses dents :
- Tu sais pourtant qu'il faut la laisser mourir de faim, cette merde que tu as pondue !" (Médium/L'école des loisirs - p.11)
"Et soudain, chaque matin, je me retrouve dans le noir, plongée dans l'émerveillement! Certains films sont en tamoul, d'autres en hindi. Pour la première fois, j'entends d'autres femmes parler la langue de ma mère. Et quelles femmes! Toutes des beautés, en sari de soie aux couleurs exquises, subtilement maquillées, couvertes de bijoux étincelants. Elles chantent et dansent à ravir - de façon souvent provocante, il faut l'avouer - et séduisent des hommes taillés dans la même étoffe de lumière. J'en ai le souffle coupé! (Médium/L'école des loisirs - p.91)