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[
] comme le dira Octavio Paz (1914-1998), la poésie mexicaine ne trouvait pas sa forme propre. Chaque fois qu'elle se risquait à exprimer le meilleur et le plus secret de son être, elle ne pouvait que mettre en oeuvre une culture qui ne lui appartenait que par un acte de conquête spirituelle.
[
] Enrique González Martínez annonçait qu'il fallait tordre le cou au cygne moderniste pour pénétrer dans la réalité concrète de la vie quotidienne : Cherche dans tout chose une âme et un sens / caché ; ne te drape pas dans la vaine apparence [
] »
« Le poème tournoie sur la tête de l'homme
en cercles proches ou lointains
L'homme en le découvrant voudrait s'en emparer
mais le poème disparaît
Avec ce qu'il peut retenir
l'homme fait le poème
Et ce qui lui échappe
appartient aux hommes à venir »
(Homero Aridjis, « Le Poème », in Brûler les vaisseaux, 1975.)
0:00 - EFRAÍN BARTOLOMÉ
1:49 - MANUEL ULACIA
3:40 - VERÓNICA VOLKOW
4:36 - MARISA TREJO SIRVENT
5:41 - AURELIO ASIAÍN
6:12 - Générique
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Référence bibliographique :
Poésie mexicaine du XXe siècle, traduction de Claude Couffon et René Gouédic, Genève, Patiño, 2003.
Images d'illustration :
EFRAÍN BARTOLOMÉ : https://es.wikipedia.org/wiki/Efraín_Bartolomé#/media/Archivo:Efraín_Bartolomé_en_Berna,_1999.jpg
MANUEL ULACIA : https://www.lavenderink.org/site/books/manuel-ulacia/?v=76cb0a18730b
VERÓNICA VOLKOW : https://www.rogeliocuellar.mx/archivo/fotografia/4559/mx-rcu-esc-vovo-a-00020
MARISA TREJO SIRVENT : http://www.elem.mx/autor/datos/109900
AURELIO ASIAÍN : https://www.amazon.es/Aurelio-Asiaín/e/B001JWYBQ2/ref=dp_byline_cont_pop_book_1
Bande sonore originale : Mike Durek - The Good News Or The Bad News
The Good News Or The Bad News by Mike Durek is licensed under a CC-BY Attribution License.
Site :
https://freemusicarchive.org/music/Michael_Durek/Piano_Music_for_The_Broken_Hearted_1221/05_The_Good_News_Or_The_Bad_News/
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#PoésieMexicaineDuXXeSiècle #PoèmesMexicains #PoésieSudAméricaine
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Il se rapprocha un peu plus encore, et , prenant la fille par les épaules, il se mit à la secouer en lui parlant dans sa langue à lui et en implorant tous les dieux pour qu'elle comprenne :
- Ne me regarde pas comme ça, comme si j'étais fou, lui disait-il en espagnol. Avant de penser quelque chose de moi, laisse-moi t'emmener dans ma chambre. Que les anges permettent que je te garde tout un an près de moi, et, après, tu pourras penser ce que tu voudras, et même, détruis-moi, moque-toi, couche avec un autre dans mon lit si j'échoue, mais laisse-moi une chance de t'éblouir ; laisse-moi te montrer tout ce dont est capable, pour être et pour rêver, un simple animal affamé et sans ambitions ; je pourrai te le dire dans ta langue quand tu seras prête à m'entendre ; ne pense rien de moi pour le moment, sois pure, sois intelligente, réchauffe-toi sans paroles, fais un effort pour ne pas me disséquer et me mettre aux archives si vite ; tâche de te contenir pendant que ce silence grandit pour moi et prendre forme, parce qu'alors, oui, je serai invincible et peu m'importera que tu me détruises.
Antonio Skarmeta, Noces.
Ce n'est pas pareil. Certains aiment mal, d'autres aiment bien. Ça se sait de loin. Le chaud se marie avec le chaud et le froid avec le froid ; les chevreuils avec le chasseur, la vipère avec le crapaud, l'arbre avec l'éclair, l'or avec la vanité, l'audacieux avec la mort.
Héctor Tizón, Le lac.
ROUGE OU NOIRE
J'ai vécu longtemps
par pour dans
les mots
je les ai vus se rassembler
en bouquets magiques
chaque syllabe
pétale écrit
corolle ardente rouge ou noire
fleurs de bonheurs ou d'infortune
cueillies par moi par toi par nous
ou plus secrètes conservées
entre deux pages de la vie
où je les retrouve flétries
comme ces mots
que j'effeuille aujourd'hui.
p.33
La mère de l'enfant releva la tête et observa son mari ; elle avait d'immenses et beaux yeux gris que les lunettes rendaient encore plus grands ; des yeux qui ne semblaient pas vraiment regarder l'homme mais quelque chose au-delà de lui, à partir de lui: ses yeux contemplaient une image incarnée par l'homme qu'elle avait aimé.
Héctor Tizón, Le lac.
Nous ne pouvons juger de nos actes que par rapport à ce que nous avons attendu de la vie et à ce qu'elle nous a donné.
Juan José Saer, Ombres sur verre dépoli.
On sent venir les choses, on présuppose la possibilité, et cela d'autant plus que ses yeux, en réalité, je devrais dire ses grands yeux mais c'est un lieu commun du tango-ranchera, que ses grands yeux donc me giflèrent sans merci. Si cela m'arrive, je souffre toujours de la même émotion : une espèce de bouffée de chaleur chargée de honte avec érection légère. Érection légère, je répète; l'ennui c'est la bosse, malgré la légèreté de la chose, il faut la caser discrètement, comme si on se grattait le genou, sans exagérer, bien sûr... C'est ce que j'ai fait et je me suis remis à regarder. On s'est heurtés. J'ai soutenu ce regard, pas pour faire le brave, ou le gagnant, ou le tombeur, ou le bouc en rut. J'ai soutenu son regard avec des leviers et des échafaudages, avec des pinces et des crochets désespérés pour qu'il ne redescendre pas jusqu'au carrefour de mon pantalon. Je suis incontrôlable.
Enrique Medina, La rencontre.
RÊVE
Il m’arrive de rêver
que j’écris mon dernier mot
alors ma plume
lentement
sarcle les allées des syllabes
émonde les hautes consonnes
taille les feuilles des voyelles
fleurit le dernier point
et s’allonge
dans le cercueil noir du plumier.
p.29
Elle, que je voulais aimer d'un amour fou
elle, qui envoûta mon cœur de ses musiques,
elle, qui dans le bleu de mes petits matins
répandait le plus doux susurrement d'églogue,
me dit très tendrement que je dois l'oublier,
l'oublier sans haine et sans larmes.
Elle, qui m'a donné le plus d'enchantements
et de nuits d'amertume,
s'éloigne doucement
comme une voile blanche.
Et moi, qui porte en moi enterrés tant de rêves
et qui dans mon cœur compte tant de tombes,
je ne sais pourquoi je sanglote et tremble
en en creusant dans mes entrailles une nouvelle.
(Oswaldo Bazil, Petit nocturne, ni Rosiers en fleur, 1901)
Bananeraie
Bananeraie... Bananeraie... Sueur faite fruit
de cette luxuriante terre de ma terre.
Sang vert affluant sur la route noire
et sans nom qui enterre la douleur !
Hirsute plantation à couleur d'émeraude
qui ancre le Yankee têtu à notre sol.
En campements sordides la réalité
sauvagement nous écartèle et terrifie.
Pain de malheur pétri sans sel et sans levain.
Mères décimées sur le dur chemin.
Pâles larmes de l'enfance malingre !
O martyre ingrat, rosaire anonyme,
répandant après un sombre calvaire
un hurlement de gorge sèche... !
Hernan Alcerro Castro (Sang, 1950)
Dans les musées
On trouve des objets, des reliques et des effigies
D'hommes illustres
mais
Ni les crimes ni les mauvaises consciences.
Il y a là l'envol des incendies
Mais ni les charognes ni les tumulus des urubus.
Il y a là les uniformes des héros
Et leur odeur de naphtaline
mais non leurs mites,
Ni les imprécations, les affaires louches,
Les injustices de leurs possesseurs.
Il y a là les sabres
Et la voix de stentor de la politique
Mais ni l'accordéon ni le tambour ni les maracas
Des nuits de bringue,
ni les chancres honteux
Des tripes des États envahisseurs.
Et pas non plus
Les décors, les gallodromes, les alcools,
Ni les époques nourricières que vécurent
Les acteurs
Durant leurs courageux exploits, durant leurs représailles,
car
Il faut agir à son époque
Et jamais avant ni après
Si l'on veut que le souvenir et la promesse existent
En eaux dormantes, remous, trombes soudaines,
Dans le passé et dans les anticipations.
Freddy Gaton Arce (Dans les musées, in Le couchant, 1982)