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Citations de Daryush Shayegan (109)


Pour la philosophie prophétique, les faits essentiels se déroulent dans une dimension transhistorique; un ailleurs qui est réversible: il peut toujours faire irruption dans le monde et révéler l'aspect eschatologique des choses. Cet ailleurs dévoile l'invisible que recèle toute Image projetée, c'est-à-dire l'Ange. le philosophe ne voit pas l'Ange mais intellige par lui dans la mesure de son effort, les Imâms l'entendent par audition, les prophètes le voient.
Quelle que soit la source de leur connaissance: révélation (wayh), Inspiration (ilhâm) ou compréhension illuminatrice de l'Intelligence agente, la connaissance est une gnose, un enlèvement du voile, une science du coeur purifiée à l'extrême, apte à réfléchir des lumières suprasensibles, mais une science qui reste essentiellement angélique.
Et pour que le rapport théophanique de toute science du coeur puisse transparaître, il lui faut un monde qui lui en assure ontologiquement le plein droit. Ce monde intermédiaire entre le sensible et l'intelligible est celui où "les corps se spiritualisent et où se corporalisent les Esprits", c'est-à-dire un monde affranchi des lois de la matière, mais non de l'étendue et possédant toute la richesse "imaginale" du monde sensible à l'état corruptible. a ce niveau éclôt la métahistoire des événements dans le Ciel": les visions des mystiques, des prophètes.
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(Prière de Chams ol'orafâ) : "Mon Dieu, si je m'incline devant vous par crainte de l'enfer, précipitez-moi en enfer ; si je vous respecte par espérance du paradis, refusez-moi l'entrée du paradis ; mais si je vous vénère à cause de vous-même, ne m'éloignez pas de l'Eternelle Beauté."

p. 119
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L'expérience mystique du prophète ou du philosophe ne peut s'effectuer que par la présence de l'Ange, son guide. Elle est le résultat d'une pédagogie angélique qui, par la rencontre avec l'Ange, provoque l'Individuation. Ce guide intérieur peut revêtir des Noms différents et variés, comme l'Archange Gabriel, l'Archange empourprée, le Maître invisible, la Nature Parfaite (Sohrawardî et la tradition hermétiste); le Partenaire Céleste (selon la tradition gnostique); le Jumeau Céleste (Mâni), Havy ibn Yaqzân (Avicenne).
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...la hiérohistoire des Evénements dans le Ciel et l'espace visionnaire du mundus imaginalis; c'est-à-dire le temps existentiel d'un monde intérieur qui, brisant la trame du temps historique, fait accéder l'âme à son propre espace où le récit devient un événement de l'âme et une individuation mystique, une rencontre avec l'Ange. Dés lors le temps n'est plus l'évolution chronologique des événements mais la remontée à l'Origine, voire le temps de l'Herméneutique spirituelle (ta'wîl).(...)
Tous ces thèmes muriront lentement en lui, croîtront au fil des années et trouveront peu à peu leur identité définitive quand, embarqué à Istambul pendant la guerre, Corbin connaîtra pendant plusieurs années les "vertus inestimables du silence" et la vocation de sa quête.
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Ce qui séduisit Corbin dans la psychologie de Jung, c'est que celle-ci osait prononcer courageusement le "mot âme et mettre l'homme à la découverte de son âme." La pensée de Jung se distingue de la phénoménologie de la conscience historique en vigueur depuis Hegel, par ce fait qu'elle ne cesse de révéler la préhistoire de l'âme, de sorte que celle-ci n'est pas dépassée dans un passé périmé mais est toujours là "au commencement". L'importance de Jung est d'avoir montré le langage symbolique de cette préhistoire, de l'avoir distingué de l'allégorie et surtout d'avoir lié le symbole aux structures de l'âme elle-même. Les symboles sont donc la cristalisation des archétypes qui sont eux-mêmes les "organes de la psyché pré-rationnelle". En soi l'archétype n'a pas de contenu, il est invisible, il peut être comparé au champ magnétique de l'aimant; et lorsqu'il se manifeste, c'est sous forme de symbole. D'où il s'ensuit que le symbole est la forme visible d'un archétype invisible. Dépouillés ainsi de leur teneur psychologique, les archétypes peuvent être comparés aux Idées divines, à l'Imagio Dei, aux "Essences fixes" (gnose islamique), en bref toutes les formes archétypiques que revêtent les théophanies de l'Esprit.
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C'est animé de l'esprit de synthèse de Corbin que pendant deux ans nous fîmes avec le shayk Tabâtabâ î, qui entre temps était devenu un ami très proche, une expérience unique en Iran, à savoir l'étude comparative des différentes religions du monde sous la direction d'un shayk shî'ite traditionnel. Nous y lûmes tour à tour les traductions des Evangiles, la version persanne des Upanishads, traduites par Dârâ Shokûh, les Sûtras du Bouddhisme, et le Tao Te Ching; livre que Nasr et moi-même traduisîmes en toute hâte et en fîmes la lecture avec le Shaykh. Celui-ci commentait les textes avec la perpicacité d'un maître spirituel se sentant à l'aise aussi bien dans la pensée hindoue que dans le monde bouddhique et chinois. Jamais il ne vit d'opposition de fond à l'esprit de la gnose islamique telle qu'il l'avait connu et pratiquée. Partout il voyait les grands moments de l'Esprit et lorsqu'il acheva la lecture de la pensée vertigineuse et si prodigieusement paradoxale de Lao tseu, il nous fit remarquer que de tous les textes que nous avions lus avec lui, celui-ci était de beaucoup le plus profond, le plus pur.
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...nous avons affaire là à un phénomène de philosophia perennis. (...)
Shorawardî devient lui-même le foyer créateur d'une rencontre entre iranisme et héllénisme dans la tradition de l'Ishrâq. Ces deux versants, complémentaires l'un de l'autre, constituent essentiellement la doctrine théosophique du Shaykh al-Ishrâq: la volonté d'intégrer la tradition du prophétisme iranien à la tradition abrahamique de la Bible et du Qorân et d'un autre côté, reconduire Platon et la tradition platonicienne à la théosophie iranienne de la lumière.
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Pour la conscience shî'ite, le douzième Imâm est ainsi l'achèvement ésotérique de la mission prophétique du Prophète de l'Islam. (...)
Un halo de récits surnaturels auréole pour ainsi dire le personnage mystérieux de ce dernier Imâm: ils nous font penser à la naissance du Bouddha, né d'une façon surnaturelle, à celle du Christ, à l'Immaculée Conception. D'autre part dans les récits relatifs à la naissance miraculeuse du dernier Imâm, il y a un effort manifeste à marier dans le Ciel le christianisme et l'Islam. Car l'Islam, notamment dans sa version sh'î'ite, n'est-il pas tout compte fait l'aboutissement de tout le cycle des Révélations commencé à partir d'Adam? Et le dernier Imâm n'est-il pas aussi le Sauveur qui au terme de notre Aiôn reconduira tous les lettres de la Révélation à leur source originelle? Les récits nous apprennent que la future mère du douzième Imâm est une princesse byzantine, donc chrétienne, la princesse Narkès (Narcisse) dont la mère est une descendante des a^pôtres du Christ. Sa lignée remontant à Sha'mûn (Simon-Pierre, héritier spirituel du Seigneur Christ.
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L'expression qorânique de Ahl al-Kitâb, littéralement les "Gens du Livre",désigne une communauté religieuse qui, tout d'abord, possède un Livre saint et en pratique constamment le lecture à plusieurs niveaux; (...)
La tâche première qui incombe aux "Gens du Livre" est celle de la compréhension. Comment comprendre, sans se leurrer, le fond d'un Livre révélé au Prophète dans un langage hermétique et codé?
"Ainsi est fondée la légitimité de la technique du ta'wîl, dit Corbin, "reconduire" la lettre de toutes les Révélations à leur sens ésotérique." Parce que le Livre n'est pas constitué seulement de papier et d'encre mais comporte aussi un sens et parce que ce sens se déploie à plusieurs niveaux proportionnellement à la pureté de l'âme, à l'expérience spirituelle de celui qui en fait la lecture, et parce qu'à l'origine tout Livre sacré est l'apparence visible (zâhir) d'un sens invisible et intérieur (bâtin), il est donc nécessaire de reconduire l'apparent à son "archétype éternel", partant à la "Mère du Livre" (Omm al-Kitâb), car la Mère du Livre est précisément le Verbe divin caché sous l'enveloppe extérieure.
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Mais franchi ce seuil il se fait une sorte d'inversion de temps et d'espace: ce qui était caché sous les apparences, se révèle soudainement, s'ouvre et enveloppe ce qui était jusqu'alors extérieur. L'invisible se fait visible. Désormais c'est l'esprit qui enveloppe et contient la matière. La réalité spirituelle n'est plus dans le où. C'est en revanche le "où" qui est en elle. Elle est, dit Corbin, elle-même le "où" de toutes choses. "Son lieu (son âbâd) par rapport à celui-ci, c'est Nâ-kojâ (non-où), parce que son ubi par rapport à ce qui est dans l'espace sensible est un ubique (partout).
Ce lieu n'est pas "situé mais situatif". En d'autres termes c'est l'espace privilégié de l'âme qui se révèle à elle-même, qui montre son propre paysage (le Xvarnah) transfigurant en données symboliques les Figures censées reproduire les réalités spirituelles. On n'y accéde que par une ruprture soudaine avec les coordonnées géographiques.En fait on inverse son regard: on y voit à présent toutes les choses avec les yeux de l'âme. Y pénétrer est donc un extasis, un déplacement furtif souvent inconscient et un changement d'état. Souvent le pélerin ne s'en aperçoit qu'avec émerveillement ou une inquiétude qui lui communique un goût étrange de dépaysement. "On se met en route; à un moment donné se produit la rupture avec les coordonnées géographiques repérables sur nos cartes. Seulement, le voyageur n'en a pas conscience au moment précis; il ne s'en aperçoit, avec inquiétude ou avec émerveillement, qu'après coup (...). Or il ne peut que décrire là où il fut; il ne peut montrer la route à personne."
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Dans le récit intitulé Le bruissement des ailes de Gabriel de Sohrawardî apparaît une figure qui, chez Avicenne, se nommait Havy Ibn Yaqzân (Vivant, fils du Veilleur) mais qui chez Sohrawardî s'appelle l'Archange Empourprée ('aql-e sorkh). A la question du pèlerin qui se retrouve déjà à un autre niveau de l'être, la réponse de l'Archange est celle-ci: "Je viens de Nâ-kojâ-âbâd".
Ce terme ne figure guère dans le dictionnaire persan et a été forgé par Sohrawardî lui-même. Littéralement, il signifie le pays (âbâd) du Non-où (Nâ-Kojâ), c'est-à-dire une localité mystérieuse se trouvant en quelque sorte "au-delà" de la montagne psycho-cosmique Qâf. l'au-delà de Qâf n'est point repérable sur nos cartes tout comme les cités mythiques de Jâbalqâ, Jâbarsâ et Hûrqalyâ.. Topographiquement, cette région commence " à la surface convexe" de la IXe Sphère, la Sphère des Sphères, celle qui englobe l'ensemble du cosmos. Elle éclôt ainsi à l'endroit où on sort des coordonnées de notre monde et de la sphère à laquelle se réfèrent les point cardinaux. Ayant franchi cette limite-là, la question où, (kojâ) perd tout son sens. D'où le nom Nâ-kojâ-âbâd. Un lieu hors du lieu, un "lieu" qui n'est pas contenu dans un lieu, dans un topos.
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Si l'Image est la matière subtile de l'Ange, c'est qu'elle est un Intermonde entre l'Intelligible et le sensible, bénéficiant d'une existence autonome et d'une puissance transfiguratrice propre. Ce monde intermédiaire assure en premier lieu la continuité et la progression aux niveaux ontologiquements supérieurs; il est le situs des événements de l'âme, des récits visionnaires si importants dans les états contemplatifs de la mystique; il rend possible l'articulation d'un langage symbolique puisque les images se transmuent en ce lieu mi-spirituel, mi-sensible dans lequel les impressions subliminales de l'âme paraissent sous formes symbolisées, -et ceci aussi bien au niveau de l'anticipation eschatologique qu'au niveau posthume du devenir de l'âme (corps subtil de résurrection).
Ce monde, étant un dévoilement intérieur, est une inversion du temps et de l'espace: ce qui était caché sous les apparences se révèle soudainement pour envelopper ce qui était jusqu'alors extérieur; l'invisible se fait ainsi visible; il est donc situatif et non situé. Le passage à ce monde exige un revirement du temps des horizons en temps de l'âme, donc une herméneutique spirituelle (ta'wîl). Finalement, ce monde projette, en raision de sa faculté de métamorphose, une géographie visionnaire avec ses cités fabuleuses, ses montagnes, ses sources et ses fleuves.
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Le monde iranien, situé géographiquement entre le sous-continent indien et le monde arabe était le pays de Zoroastre et de Sohrawardî, de Ruzbehân et de Hafez. Empire du milieu et "médian et médiateur", il avait assisté à toutes les synthèses invraisemblables, marié le prophète Zoroastre avec le Sage Platon et les avaient unis tous les deux à la Niche aux Lumières prophétiques de la tradition abrahamique. Il avait converti la religion de Zoroastre en un Ordre de chevalerie spirituelle, transformée l'épopée héroique des anciens héros de l'Iran en épopée mystique des récits visionnaires de la période islamique. Il avait poussé la vision de l'Ange et de l'angélophanie à des dimensions vertigineuses et traduit les Idées platoniciennes en termes d'angélologie zoroastrienne. Il avait donné à l'Imagination une telle puissance d'évocation que la réalité quotidienne paraissait pâle et fictive par rapport à sa réalité magique et créatrice. Il avait poussé le culte de la Beauté jusqu'à l'extase et fait de l'Amour, la religion de l'Eternel féminin. Il avait converti le cycle de la prophétie en un cycle de l'Initiation et transformé le temps de notre monde en l'entre-les-temps de l'Attente eschatologique. Il avait identifié le futur sauveur zoroastrien Saoshyant au miracle de l'occultation de l'Imâm caché et crée avec les douze imâms la forme configuratrice du Temple de la Prophétie éternelle. Il avait pris en charge cette philosophie qui, avec Averroes, se perdait dans les sables et, en restaurant l'antique sagesse iranienne de l'Orient de Lumière, sauvé la gnose, faisant ainsi de la philosophie une expérience mystique et de celle-ci une philosophie de salut. Il avait enfin valorisé ce continent auquel aboutissait l'itinéraire de Corbin, c'est-à-dire le mundus imaginalis, ce monde intermédiaire entre le monde sensible et l'intelligible., Terre de visions qui, à partir du paradis de Yima dans l'Avesta jusqu'aux cités fabuleuses de Hûrqalya, Jâbarsâ dans la gnose irano-islamique, symbolisait la Terre pure de l'Ange et des Lumières infinies- cette Lumière-de-Gloire (Xvarnah) qui auréolait autrefois les sages et les souverains de l'ancienne Perse.
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Toutes les idées essentielles de Corbin, disions-nous, trouvèrent en quelque sorte leur situs et leur lieu propre dans l'espace visionnaire du monde iranien. (...)
(...); le monde du symbole trouvait son espace réel dans le situs imaginal où l'Ange spatialisait en quelque sorte son propre corps de lumière.
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Le ta'wîl était lié à la fonction théophanique du monde; il n'y aurait pas eu de ta'wîl si le monde n'était tissé d'un réseau de symboles, s'il n'était aussi un miroir réfléchissant les Images provenant d'ailleurs et si ce même ta'wîl, nous transmuant à un autre niveau d'être, ne nous permettait de percevoir le monde avec les sens transfigurés: c'est-à-dire avec les yeux de l'âme. Car le ta'wîl n'était-il pas un passage de l'apparent à l'occulte, de l'exotérique à l'ésotérique, voire le "dévoilement du caché". Cette herméneutique que Corbin cherchait depuis sa jeunesse se concrétisait finalement dans cette conception primordiale de la gnose irano-islamique: le dévoilement du caché.
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(...) l'oeuvre de Corbin fut une révélation, non seulement elle traduisait les grands moments privilégiés de la pensée iranienne dans un langage clair et conceptuel, mais, ce faisant, les vieilles idées apparaissaient revêtues d'une robe neuve et éclatante: les séquences s'enchaînaient, des perles rares jaillissaient du fatras d'un monde scolastique vermoulu, l'univers iranien se ressuscitait paradoxalement dans le langage clair de Descartes; et, se transmuant en un français élégant, ces idées se modernisaient presque. Ainsi un Pèlerin de l'Occident venait en iran révéler aux jeunes Persans en français, les merveilles qu'avaient accumulées leurs illustres ancêtres. (...)
D'autre part Corbin outre le fait qu'il était Français, c'est-à-dire un Européen (...), possédait à merveille tout l'appareil de la philosophie médiévale et moderne de l'Occident. Il avait ressenti dans sa chair les cassures de la foi et du savoir, de la théologie et de la philosophie ; il avait vécu les affres de la sécularisation, essuyé le drame de la "mort de Dieu" et c'est pour retrouver la Parole de la divinité à partir du temps de la détresse qu'il s'était fait pèlerin de l'Occident. D'où l'accent moderne de sa voix, le pathos de sa Quête qui touchait directement tout être soucieux de se mettre à l'écoute des impératifs de l'Esprit.
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Comme je viens de le dire déjà, Corbin était extrêmement sensible à la topographie de l'Iran, il y voyait comme le forme terrestre et sensible du Mindus Imaginalis.(...)
Les lieux qu'on découvrait avec lui n'étaient plus les mêmes, les objets que l'on revoyait avec son regard transparaissaient dans l'aura d'une nouvelle présence: tout se métamorphosait par son regard, s'élevait à un registre supérieur de l'être.Ceci m'incita à le décrire dans un petit article que je lui conscrai, comme "l'homme à la lampe magique".
"Ceci est le phénomène du miroir, avancez la main dans ce vide et vous n'y toucherez pas la forme; car la forme n'est pas là: elle est ailleurs, ailleurs..." (...)
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A la chute de l'âme jusqu'à la Matière ultime (réceptivité pure), s'oppose un immense élan de l'être qui, s'élevant depuis les profondeurs inorganiques, monte graduellement jusqu'à l'éclosion de la forme humaine, c'est-à-dire le régne de l'homme. De là franchissant le seuil de la mort, elle parvient au Malakût, puis une troisième croissance spirituelle marquera le devenir posthume de l'âme et sa remontée dans les Intermondes. La mobilité de l'univers de Mollâ Sadrâ n'est pas celle "d'un monde en évolution, mais celle d'un monde en ascension. L'orientation de ce monde dans le sens vertical, en style gothique, pourrait-on dire, correspond à l'idée de Mabdâ et Ma'ad, l'Origine et le Retour, par lesquels la métahistoire fait irruption dans notre monde".
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En Occident, échec de l'avicennisme latin périssant sous les attaques de Guilaume d'Auvergne, puis succés de l'averroisme aboutissant à l'école de Padoue. En Iran, une nouvelle destinée qui "inspira à l'avicennisme la sève du néo-platonisme de Sohrawardî" et des renaissances successives qui en assument la continuité jusqu'à nos jours. La philosophie, devenant de ce fait de plus en plus mystique, parcourt le chemin inverse de la sécularisation: elle reste à l'abri des scissions de la foi et du savoir, de la religion et du savoir.
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Pour conclure, nous pourrions dire que le monde de l'imaginal embrasse dans toute son ampleur l'histoire de l'âme: entre une préhistoire qui est l'histoire de sa descente dans le monde et une posthistoire qui est l'histoire de son retour à Dieu, se situe la hiérohistoire des événements de l'âme; il est donc de ce fait la clef qui nous ouvre à la fois la "phénoménologie de la conscience angélique" et l'histoire post-mortem du devenir de l'âme dans son chemin du retour vers Dieu.
Pour tout ce qui est de la géographie visionnaire de ce monde intermédiaire et de son rapport avec les archétypes de la cosmologie mazdéenne comme le Xvarnah, l'Eranvej, et du symbolisme des cités d'emeraude: Jâbalqâ, Hûrqalyâ, situées au-delà de la montagne psychocosmique de Qâf, nous renvoyons le lecteur à un des ouvrages les plus intéressants de Corbin: Corps spirituel et Terre céleste. (...)
Quant aux conséquences de la perte de ce monde qui fut "exilé du schéma de l'Etre" en Occident et dont la perte catastrophique réduisit la réalité à la seule dimension des faits empiriques, provoquant ainsi la "rationalisation de l'Esprit", nous en reparlerons plus loin à la conclusion de ce livre, lorsque nous traiterons de l'actualité de la pensée d'Henry Corbin.
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