Erwin Mortier :
MarcelA l'occasion du Salon du Livre de Paris, dont les invités d'
honneur sont la Flandre et les Pays-Bas, l'émission est réalisée en Belgique. Depuis le
musée Docteur Guislain, à GAND,
Olivier BARROT présente le livre de
Erwin MORTIER "
Marcel", édité par Fayard. Un
roman traduit du néerlandais par Marie HOOGHE.Interview de
Erwin MORTIER (en néerlandais, traduction sous-titrée) par Olivier...
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D'où vient cette petite note de chagrin , apparemment inévitable , qui court derrière toute joie , de plus en plus obstinément avec le temps , tantôt juste derrière , tantôt à distance ?
Des après - midis emplis de banquise de silence , d'icebergs de silence , tandis que je pense : si je pouvais , ne serait - ce qu'une fois encore , l'entendre dire des banalités quotidiennes .
Tu veux du café ?
Tu as faim ?
Tu restes bien manger avec nous ce soir , n'est ce pas ?
Ca commence... mais quand commence une telle chose, quels signes sont les premiers ? Ca commence par le mot livre, le mot qui ne lui revient pas, un après-midi où elle se tient devant ma bibliothèque et me demande quand je ferai encore un, euh, tu sais bien, un... comment dit-on, si j'en referais bientôt un... et elle pose l'une contre l'autre ses mains aux doigts tendus et les ouvre et les ferme. Si j'allais encore faire, allons, bon, écrire... un de ces comment dit-on ? Elle donne un coup de coude à mon père. Dis-le, toi, tu le sais.
Jusqu'à quand cette pièce, cette maison signifiera-telle encore biscuit pour elle ? Ca fait si longtemps déjà que cet endroit ne signifie plus son fils, ni les chats ni Lieven.
Je serrais les cartes dans mes mains , les faisais gondoler , quand mon œil tomba sur l'horloge au - dessus du bar . Midi et demie au plus tard , avait dit ma mère . Il était déjà le quart . Ce serait de nouveau du bifteck trop cuit , sous une sauce de reproches .
L'être humain est un poème difficile qu'on doit pouvoir écouter sans toujours réclamer des éclaircissements, et que le mieux qui puisse arriver , c'est l'absolution que nous donne un bien - aimé , qui nous pardonne notre état injustifiable de créature vivante et existante et ce moi accroché à nos basques qui a été dessiné et formé par tant d'autres .
Son moi disparaît . Ce quelque chose qui rend une personne si reconnaissable . Tout le répertoire d'habitudes , de façons de parler , de dormir , de marcher , de se tenir , tout change .
Elle renversa les casseroles sur le égouttoir , s'enduisit les mains de crème à l'arnica et dénoua son tablier . Le signal que le dimanche après - midi pouvait nous envelopper de son ennui .
Personne ne se déplaçait librement dans la maison. Chacun suivait le chemin de son habitude
Quand tous les portraits avaient été époussetés , la grand - mère repliait les ailes de verre de son armoire . Elle avait de nouveau tout ravivé , ordonné et ratissé . Empilé preuve par preuve , pour et contre la mort , sa rivale mais aussi sa plus fidèle alliée . La Faucheuse lui enlevait ses proches puis les lui rendait , figés dans des attitudes qui ne se révoltaient jamais contre sa loque à poussières .