Sa grâce fut les larmes qu’il vit couler, se mêlant au liquide rouge sur ses joues. Le tableau était merveilleux. Bien plus beau que dans ses rêves.
Pourtant, ce fut aussi ce qui le fit revenir à la raison. Even était inerte, immobile et avait le regard éteint. Gagné par la lucidité, il se redressa et observa ses mains pleines de sang. Les yeux fuyants, il recula de quelques pas, cherchant une solution qui ne vint pas. La peur apparut.
— Non. Tu te trompes. Je ne suis pas comme les autres, assura-t-il en prenant bien soin d’accentuer chaque syllabe. Je n’ai pas peur de toi parce que tu es le petit frère d’Isac Lauzier. Je n’ai pas peur de toi, Even. J’ai peur de dire une bêtise, comme samedi en fait, ou de faire quelque chose qui te ferait fuir, comme à l’instant. J’ai peur de tout gâcher parce que, je te l’ai dit, je veux devenir ton ami.
— Il faut que tu me fasses confiance, d’accord ? Je t’aime, Even. Je ferais n’importe quoi pour te protéger.
— Ne fais pas ça… S’il te plaît, reste avec moi… Jules et Simon, ils sont… Ils sont… Je suis tout seul, j’ai besoin de toi, acheva-t-il en sentant ses pleurs prendre de l’ampleur.
— Ça ira, Even. J’ai confiance en toi. Tout ira bien.
Une vraie amitié a forcément des disputes. C’est la façon dont on les traverse qui prouve à quel point elle est forte.
Lucas expira. Ses yeux devinrent humides. Tout arrêter ? Un rire nerveux lui échappa. Est-ce qu’ils le pouvaient vraiment ? Après toutes ces semaines à se battre l’un contre l’autre pour s’accepter ? Après s’être entraidés et avoir été complices avec ce secret ? Après s’être embrassés… ?
— Je ne fuis pas, reprit-il avec fermeté. Je ne fuis jamais. Tu as fui. Pas moi. Et je ne vais pas te laisser fuir une nouvelle fois. Est-ce qu’on est clairs ?