Citations de Ella Frank (52)
Et comme on dit, ce qui devait arriver arriva.
À cet instant même, les fesses nues de Jessica étaient installées sur le minuscule évier des toilettes situées au fond de l’avion Virgin America, vol 201, et… eh bien, il n’y avait absolument rien de virginal dans la façon dont sa jupe remontait sur sa taille. En vérité, Logan l’aurait plutôt crue incapable de se souvenir de la définition du mot « vierge », surtout compte tenu de ses cuisses laiteuses largement écartées et du va-et-vient de sa hampe dans son vagin glissant et humide. Et cela lui convenait parfaitement.
Furieuse d’être en retard, je me suis ruée sur la porte de la salle de cours et j’ai été choquée de me retrouver face à un homme à la place de Mme Ross. C’était un étranger. Un étranger qui ne savait rien d’Addison Lancaster et qui, en cet instant, me dévisageait avec agacement.
C’était la première fois que je voyais M. McKendrick. Il était le prof dont toutes les filles rêvaient. Celui pour qui nous avons toutes eu le béguin dès le jour de la rentrée. Avec ses longs cheveux brins striés de mèches dorées par le soleil qu’il portait attaché en petite queue au niveau de la nuque, il ne ressemblait à aucun autre professeur que nous connaissions. Et ma réaction a été aussi violente que fulgurante.
-A qui ai-je l’honneur ?
Cette voix. Elle était comme une caresse sur ma peau, et j’ai frissonné… J’étais troublée à ce point.
-Mademoiselle ?
J’ai cligné des yeux en essayant d’éclaircir mes pensées et j’ai pris conscience que, l’espace de quelques secondes, le tic-tac s’était interrompu. Mon corps avait pris le dessus sur mon esprit, un phénomène qui ne se produisait jamais chez moi.
-Mademoiselle ? Je vous parle.
Des rires se sont élevés du fond de la classe et soudain, il était de retour… Tic-tac, tic-tac.
-Tu as des origines norvégiennes ?
-Entre autres, répondit Cole sans cesser ses assauts sur son oreille, mais touché par la curiosité à son égard.
-Genre, de grands vikings blonds ? demanda-t-elle, visiblement émoustillée.
Cole se releva sur ses bras et la cloua au lit par un regard d’acier.
-On dirait que ça t’excite. Tu aimes l’idée d’être ravie par un viking ?
À quelques centimètres de moi, elle a baissé les yeux sur ma lèvre et j’ai levé le menton pour qu’elle voie précisément ce que le monstre de cette maison avait fait.
— Réponds-moi, a-t-elle exigé sans même évoquer ce qu’elle venait de découvrir.
Consciente que la meilleure cible était le cœur, j’ai orienté mon tir…
— Je suis allée voir Daniel.
… et fait mouche.
Elle a sursauté en entendant son prénom et, pour la première fois, je me suis demandé si l’une des raisons pour lesquelles je n’arrivais pas à avancer était que personne ne m’en donnait la possibilité.
— Pourquoi ne puis-je pas faire la même chose pour toi ? ai-je demandé.
— Faire quoi ?
— Faire fuir les monstres.
— C’est ce que je fais ?
Je me suis blottie contre lui et j’ai passé un bras autour de son cou avant de déposer un baiser sur sa joue.
— C’est pas grave, je comprends.
— Comment ça, c’est pas grave ? Qu’est-ce que tu comprends ?
— Que je suis ton monstre.
Il n’a ni confirmé ni infirmé mes propos. À la place, il m’a fait rouler sur les draps et j’ai préféré savourer ces moments avec mon prof d’histoire en silence, déterminée à le dévorer tout entier – comme n’importe quel monstre le ferait.
Doc essaie de me dire quelque chose et je m’efforce de comprendre. Il m’encourage à me souvenir des bons moments. Il m’invite à accepter ce que nous avons fait.
Mais pourquoi ?
Oui, il y a eu des moments de folie, mais qu’est-ce que l’amour sans un peu de folie ?
Cela n’avait rien de mal.
Non… Ils ne comprennent tout simplement pas.
Assise sur mon lit, je détache la photo en noir et blanc du mur et j’étudie Psyché.
Peut-être aurait-il été plus facile pour elle d’être enlevée par un monstre sur le long terme.
Ici, sur la table de sa salle à manger, j’ai volé en éclats dans les bras de l’homme qui m’avait offert son âme.
Addison avait débarqué dans ma vie et était en train de l’anéantir sans l’aide de personne.
J’ai observé son visage tuméfié et sa lèvre gonflée et soudain, toute la colère que j’éprouvais s’est évaporée, remplacée par ce que mon père avait prédit – l’amour.
Qu’est-ce que j’étais en train de faire ?
Alors qu’elle retournait le visage vers moi, j’ai pressé ma joue contre la sienne.
— Pourquoi voudrais-je détruire ce qui me maintient en vie ? ai-je demandé avant de poser mes lèvres sur les siennes tandis que nos corps fusionnaient.
Agacée, je repose le roman en quête d’un livre vraiment spécifique à la place. Un dictionnaire.
Je l’ouvre et je tourne les pages jusqu’à la lettre C. C pour « conte de fées ».
Alors que je parcours la définition, j’ai l’impression d’y voir plus clair.
Mes parents ne m’ont simplement pas présenté les choses de la bonne façon.
Les contes de fées regorgent de monstres en tous genres. Pourquoi ne pas dire la vérité ? Pourquoi ne pas admettre que le bonheur des héros n’est qu’un mensonge, que ces fables sont destinées à nous tromper et à nous faire croire que l’on peut avoir ce qu’on veut ?
Je n’ai pas le droit d’avoir ce que je désire.
Je ne peux pas avoir le prince… parce que je suis le monstre. Je suis la force qui rend impossible toute fin heureuse dans mon histoire. Si seulement quelqu’un avait prévenu le prince…
Tic-tac.
— Je ne veux pas que l’on ait pitié de moi pour ce que je représente à vos yeux et aux yeux de tous les parents indignés de notre communauté.
Choqué par le fait que j’aie prononcé plus de mots en quelques secondes que je ne l’ai fait depuis mon arrivée ici, il prend un moment pour rassembler ses pensées avant de demander :
— Et que crois-tu représenter à nos yeux, Addison ?
— La pauvre petite fille séduite par le grand méchant loup.
Je sais que j’ai raison. Il n’a rien à répondre et je n’ai rien à ajouter.
Ce qu’il ne comprend pas, c’est que cette pauvre petite fille n’existe pas. Il n’y a qu’un loup dissimulé sous un déguisement de brebis, caché à la vue de tous, là, juste sous ses yeux.
Qui a peur du grand méchant loup ?
Tic-tac, tic-tac.
Mes souvenirs me permettent de ne pas perdre la tête.
Il est surprenant de voir comment un souvenir bien précis peut vous pousser à vous battre pour vous en sortir. C’est ce qui vous donne le courage de poursuivre dans l’obscurité, en quête du moindre éclat de lumière.