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Citations de Emmanuelle Ferré (28)


Les flammes crépitaient, tournoyaient, se contorsionnaient autour de lui en un mouvement presque irréel. Elles finirent par l’encercler et lui barrer le passage. Terrifié, son cheval rua, se cabra. Sachairi avait perdu de vue les combattants, leurs cris lui parvinrent de loin. Le brasier perdit de l’ampleur et il discerna une silhouette qui se découpait devant lui à mesure que les flammes s’amenuisaient. Sa jument se cabrait toujours. Il sauta à terre pour calmer sa monture. Le brasier achevait de se dissiper. Lorsque les flammes eurent totalement disparu, il reconnut le jeune Alistair.
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Fascinée, Lera riva son regard sur les cinq arrivants. Une impression se dégageait d’eux et si elle avait dû la résumer en un seul mot, elle aurait dit que c’était la sagesse. Elle avait eu maintes occasions de voir des guerriers de passage à Eghenell dont l’arrivée en grande pompe était loin de produire le même effet que l’apparition solennelle des membres de la Confrérie. Lera se tourna vers la foule et constata que les villageois étaient tout aussi captivés qu’elle. De part et d’autre de la place, les commentaires allaient bon train.
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Le soleil baissait dans le ciel, les paysages se succédaient sans qu’elle parvienne à se repérer. L’épuisement la submergea et ses forces la quittèrent. Il fallait qu’elle redescende, poursuivre par la voie des airs dans cet état devenait trop dangereux. Alors qu’elle se rapprochait de la terre ferme, elle perçut une lointaine rumeur, l’écho produit par le martèlement de plusieurs chevaux.
Une lueur d’espoir l’envahit, elle amorça sa descente. Avec un peu de chance, ces personnes pourraient lui indiquer la direction à prendre pour retourner à la Base Nord. Au détour d’un pic rocheux, elle déboucha sur une large route le long de laquelle progressaient deux files interminables de cavaliers. Elle fonçait droit sur eux, elle allait beaucoup trop vite ! Des éclats de voix paniqués s’élevèrent. Malgré ses efforts pour réduire son allure, elle atteignit brusquement la terre ferme. Elle se redressa. Les cavaliers s’étaient arrêtés juste devant elle. Leurs montures s’agitaient, effrayées par son arrivée soudaine.
Lera était au bord de l’évanouissement. Elle avait la tête qui tournait, les oreilles qui bourdonnaient. Elle s’accroupit pour reprendre son souffle. Les cavaliers l’encerclèrent.
— Qui va là ? l’apostropha un homme à la voix rude.
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La nuit était tombée et les habitations lui renvoyaient une douce et rassurante lumière. Une agréable odeur de feu de bois flottait dans l’air. En temps normal elle se serait arrêtée pour profiter de la vue mais n’y prêta guère attention. Ainsi, il ne fallait qu’une semaine pour rallier Eghenell par la voie des airs…
Lera allait enjamber le muret du chemin de ronde lorsqu’une voix autoritaire la fit sursauter.
— Bonsoir, jeune fille !
Elle se retourna lentement et identifia la silhouette de l’Intendante qui se découpait dans l’obscurité.
— Bonsoir, répondit-elle d’une voix morne.
— Que fais-tu à l’extérieur, à une heure pareille ?
— J’avais besoin de prendre l’air.
Lera fit face à l’Intendante en cachant sa besace dans son dos.
— Tu ne serais pas en train de préparer une bêtise ?
— Comme quoi ?
— Comme prendre la poudre d’escampette, par exemple…
Mayris la regardait fixement. Après un court silence, elle fit quelques pas en direction de Lera.
— Je ne pense pas que tu te risquerais à faire une chose pareille. Contrairement à notre Directeur, j’ai lu avec attention les rapports de Kentigern. Lera, tu es une jeune fille intelligente. Je suis persuadée qu’il ne te viendrait pas à l’esprit de mettre ta vie en danger d’une manière aussi stupide, en sachant pertinemment que deux puissants Mages sont à ta recherche.
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À ces mots, Alistair se baissa et posa un genou à terre. Lera entoura ses épaules de ses bras et se cramponna maladroitement à lui, osant à peine resserrer son étreinte.
— Agrippe-toi bien.
— J’ai comme une légère appréhension, dit-elle d’une voix quelque peu inquiète.
— Surtout ne bouge pas tant que je ne te l’aurai pas dit. Prête ?
— Heu… non !
Alistair n’attendit pas qu’elle lui donne sa réponse. Il agrippa ses jambes. En une fraction de seconde, il se releva, prit de l’élan et sauta en l’air. Lera attendait le moment où il allait retomber sur le rocher suivant mais constata avec stupéfaction qu’il continuait de s’élever dans les airs à une vitesse vertigineuse. Elle eut la sensation que ses poumons s’étaient comprimés dans sa poitrine et que son cœur tentait désespérément de s’ancrer au sol. Si au départ elle avait timidement enlacé Alistair, à ce moment-là tout sentiment de gêne s’évanouit. Elle resserra fermement ses bras autour de ses épaules et enfouit sa tête dans son cou. Elle resta pétrifiée dans cette posture, osant à peine bouger.
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— Lorsque j’ai commencé ton entraînement, je me doutais que tu passerais un jour par cet état d’esprit, dit Alistair au bout d’un moment.
— Pourquoi ? Parce que je suis une fille ? répliqua vivement Lera.
— Non, répondit-il avec un sourire, parce que tu es intelligente.
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Les prisonniers lançaient à Lera et Graham des regards dubitatifs, presque moqueurs. Ils étaient vêtus comme n’importe quel guerrier et à la différence des Sans-Visage ils paraissaient tout à fait normaux.
— Nous voilà face à une nouvelle difficulté, déclara Graham. Il faut interroger ces prisonniers, nous devons obtenir un maximum d’informations sur la manière dont ils ont reçu leurs pouvoirs.
— Je m’en charge, proposa aussitôt Karin.
À ces mots, les prisonniers se redressèrent, l’air apeuré.
— Non, pas elle ! s’écrièrent-ils d’une seule voix.
— Vous n’êtes pas en mesure de protester ! répliqua sèchement la jeune femme. Vous ferez ce qu’on vous dira de faire !
— Comme vous voudrez, lui dit Graham, mais j’ai besoin d’eux en un seul morceau…
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Yvanne regarda son cousin d’un air surpris. Avant qu’elle n’ait pu répondre quoi que ce soit, Darius fit mine de retourner vers sa monture. C’est alors qu’il remarqua la présence de Lera. Il revint sur ses pas et dévisagea la jeune fille au point d’en devenir gênant.
— Ta demoiselle de compagnie est très charmante, s’exclama-t-il.
— Voyons, mon cousin ! Lera n’est pas ma demoiselle de compagnie…
— Je me moque bien de savoir qui elle est, l’interrompit Darius. Tu lui diras qu’elle est aussi mon invitée. Vous n’aurez qu’à arriver au château en avance, mes domestiques vous aideront à vous y installer à votre aise. Et j’espère que vous avez apporté des tenues qui vous mettront plus en valeur que ces vulgaires habits de voyage !
Ce disant, Darius examina d’un œil moqueur les capes que portaient Yvanne et Lera.
— Nos uniformes ne sont pas de vulgaires habits de voyage ! se récria cette dernière.
Puis elle se tut en réalisant qu’elle venait d’employer un ton plus qu’impoli. Elle se tourna vers Yvanne qui était tout aussi embarrassée qu’elle. Contre toute attente, Darius éclata de rire.
— Elle a du tempérament, en plus de ça ! Qu’elle vienne donc à notre petite fête, j’ai hâte de faire plus ample connaissance.
Sans attendre de réponse, il s’en retourna vers son cheval et partit en trombe, ne donnant aucun ordre à ses conseillers qui prirent alors toute la mesure du travail qui les attendait. Lera était sidérée. C’était donc lui, le fameux Darius Massa ? La rencontre avec sa sœur ne lui avait pas laissé une meilleure impression. Finalement, ses compagnons n’avaient rien exagéré !
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Après quelques jours de progression, les troupes passèrent la frontière. Au-delà, une immense steppe battue par les vents se déroulait devant les cavaliers. Partout où le regard se portait, on ne voyait rien à des lieues à la ronde, aucune habitation, nulle trace de vie. Lera observa cette prairie déserte, hostile, qu’un ciel laiteux éclairait d’une pâle lumière. Après en avoir longuement entendu parler, voilà que les terres du royaume de Ceralba lui apparaissaient enfin. Alors, une sourde angoisse monta en elle. Lera ne parvint pas à en expliquer la cause même si tout autour, les troupes avançaient en silence. À voir les visages songeurs des cavaliers, elle comprit qu’elle n’était pas la seule à éprouver ce sentiment.
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Helen répondit par l’un de ses adorables sourires. Alors que Sachairi venait vers elle pour l’aider à descendre de sa monture, la jeune femme sauta lestement à terre et rejoignit les responsables de la Coalition.
— J’espère que l’imprévu qui vous a retardés était sans gravité ? lui demanda Naoise.
— Malheureusement, si. Mon frère se remet difficilement d’une fracture de la jambe, il ne pourra pas se joindre à la Coalition.
Les responsables se turent et échangèrent un regard inquiet.
— J’espère qu’il se remettra bien vite, reprit Sachairi.
— Cela prendra plus de temps que prévu, mais il finira par se rétablir, le rassura Helen.
— Cela signifie qu’un autre Administrateur a été nommé pour le remplacer ? demanda à nouveau Naoise.
— C’est exact, s’exclama Helen, et vous l’avez en face de vous.
Les responsables de la Coalition restèrent muets de stupeur. Sachairi fut le premier à réaliser ce qu’il se passait et fit un pas vers Helen en lui tendant la main.
— Je suis heureux que vous ayez pu faire face aussi rapidement, dit-il, et je vous souhaite la bienvenue parmi nous.
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La porte s’ouvrit avec fracas. À l’intérieur, tous sursautèrent. Lera avait la vue brouillée par la colère et remarqua à peine le visage ensanglanté de Murdag, ainsi que la stupéfaction de ses bourreaux. Instantanément, son regard se posa sur Jock qui l’observait en retour, la bouche grande ouverte. Alors, Lera perdit totalement le contrôle d’elle-même. Elle se rua sur Jock et l’empoigna par le pan de sa cape.
— Vas-tu me dire ce que je t’ai fait à la fin ! lui hurla-t-elle à la figure.
Elle le plaqua rudement contre le mur du fond.
— Pourquoi as-tu décidé de me pourrir la vie depuis mon arrivée à la Base Nord ! Que tu le veuilles ou non, je fais main-tenant partie de la Confrérie !
Jock était frappé de stupeur mais en entendant cela, il retrouva soudainement son calme.
— Plus pour longtemps ! Nous avons réuni suffisamment de preuves pour que tu croupisses dans cette prison pour le restant de tes jours !
— Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez toi ? Tu n’en as pas assez de ces fichues suspicions ?
Il tenta de se dégager. Lera n’aurait su dire si c’étaient ses pouvoirs ou bien sa colère qui lui donnaient autant de force. Lorsque l’un des hommes du Régisseur s’approcha pour libérer Jock, elle le repoussa sans aucune difficulté. Jock en profita pour déguerpir et quitta la pièce sans demander son reste. Lera bouscula les hommes du Régisseur et le prit en chasse.
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Les falaises environnantes étaient entièrement tapissées d’une roche noire à l’aspect vitreux qui ressemblait à une pierre précieuse. Lera n’avait encore jamais vu un minéral d’une beauté aussi rare, cependant c’est un tout autre détail qui l’interpella. Elle se baissa, ramassa un fragment qui traînait à ses pieds et l’examina attentivement. La roche noire, irisée de cercles verts et violacés, émettait une sorte d’aura semblable à celle que possédaient les Mages. Elle était formée de liens qui s’entrelaçaient et Lera décela ce même flux caractéristique qui parcourait les liens spirituels de ses confrères. Elle releva la tête, embrassa les falaises du regard et se rendit compte que l’ensemble du gisement qui se trouvait dans la dépression rocheuse semblait pourvu d’une aura spirituelle. Il n’y avait donc pas de Mage en ces lieux, pourtant Lera était encore fascinée par sa découverte au moment où Graham la rejoignit.
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Lera se laissait conduire par la gouvernante lorsqu’une ombre furtive qui glissait sur le sol attira son attention. Elle la suivit des yeux et sentit son cœur s’affoler au moment où l’ombre s’arrêta à sa hauteur. Lera étouffa un cri de surprise. Une forme indistincte se trouvait juste au-dessus d’elle, déformant la toile du chariot. La bâche se fendit en longueur et ils apparurent. Plusieurs individus vêtus de longues capes sombres sautèrent sur le plancher. Dans la confusion, Aileen tomba au sol. Lera eut à peine le temps de reculer. L’un d’eux la retint par le pan de son uniforme, le regarda comme pour vérifier quelque chose et l’empoigna rudement. Yvanne poussa un cri de terreur. Lera se débattit et tenta d’utiliser son bouclier, l’intrus projeta lui-même une barrière protectrice.
Les deux sorts s’entrechoquèrent en produisant un son métallique. Lera bascula en arrière et se retrouva étendue sur le plancher. C’est alors que l’individu se rua sur elle et lui plaqua les poignets au sol. Au même moment, la garde du Roi fit irruption dans le chariot. Lera ne vit aucun de ses confrères. D’autres intrus surgirent par la brèche et un à un, les gardes s’effondrèrent, comme abattus par une force mystérieuse. Lera ne céda pas à la panique. Graham verrait bien si elle n’était pas prête ! Elle se préparait à lancer un sort de création des éléments pour repousser son assaillant quand soudain ce-lui-ci se pencha vers elle et lui dit d’une voix à peine audible, marquée d’un fort accent :
— Aidez-nous, vous seule avez ce pouvoir…
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Tous les regards convergèrent vers l’ivrogne et les clients assis à côté de lui s’esclaffèrent. Un homme au visage émacié installé tout au bout du comptoir le considéra d’un air méprisant puis se détourna. Le tavernier interpella un client qu’il venait de servir.
— Il est encore ivre mort ! Va lui faire prendre l’air, ça lui éclaircira les idées.
L’individu se leva en maugréant, agrippa le dénommé Corey comme un vulgaire sac à provisions et l’entraîna à l’extérieur. Lera se replaça devant le comptoir. Elle allait saisir son godet d’hydromel lorsqu’elle vit que le tavernier la regardait de travers. Avait-il aperçu son visage au moment où l’ivrogne avait failli tomber ? Il s’accouda au comptoir, se pencha vers elle et planta ses yeux dans les siens.
— Un conseil, chuchota-t-il. Tu l’auras sûrement compris, mon établissement n’est pas un endroit convenable. Alors dépêche-toi de repartir vite fait avant que mon aimable clientèle ne remarque ta présence.
Lera ne cilla pas.
— Je suis venue ici car je cherche quelqu’un qui a ses habitudes dans votre taverne. Il s’agit d’un certain Steafan Sionnak. J’ai un service à lui demander.
Une expression de surprise passa dans le regard du tavernier.
— Quel genre de service ?
Lera hésita.
— J’ai besoin de ses compétences de serrurier, pour une affaire particulière.
— Tout le monde cherche Steafan pour une affaire particulière. Malheureusement, je ne l’ai pas vu ce soir. Tu ferais mieux de t’en aller, je ne veux pas d’histoires.
Lera se leva en soupirant. Elle lui murmura quelques mots de remerciement et se dirigea vers la sortie. Le tavernier la suivit des yeux. Soudain, l’homme au visage émacié prit la place de Lera et s’assit devant lui.
— Que voulait-elle ?
— Tes services.
— Pourquoi lui as-tu répondu que je n’étais pas là ?
— Il faudrait savoir ce que tu veux ! C’est ce que tu m’as demandé de répondre à tous ceux qui te réclament !
— Ça dépend de qui fait la demande, et pour quelle raison.
— Eh bien si tu veux tant le savoir, tu ferais mieux de te dépêcher, répondit le tavernier d’un ton narquois. Tu n’es pas le seul à être intéressé, on dirait.
Il désigna du menton trois de ses clients qui avaient vu Lera quitter les lieux et qui se hâtaient de la suivre. L’homme au visage émacié lança un regard furibond au tavernier puis sortit à son tour.
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Ses compagnons s’écartèrent et Lera avança de quelques pas.
— Je m’appelle Mayris Sinel, lui dit l’Intendante. Je suis chargée de la gestion de nos finances et de veiller au bon fonctionnement de notre organisation. À qui ai-je l’honneur ?
— Lera Correnaigh, je suis originaire de la contrée des Bocages Mauves.
Mayris examina la jeune fille de la tête aux pieds.
— Elle est très jeune, dit-elle. De plus, c’est la première fois que nous accueillons une fille parmi nos élèves.
Lera fronça les sourcils et releva subitement la tête vers l’Intendante. Sa réponse fusa avant qu’elle n’ait eu le temps de réfléchir.
— Je ne vois pas en quoi cela pose problème.
Ses compagnons retinrent leur souffle. Outrée, l’Intendante lui lança un regard inquisiteur.
— Et c’est une impertinente en plus de ça ! clama-t-elle avec humeur.
— Ne vous méprenez pas. Je constate seulement que cela ne vous a pas posé le moindre problème à vous, d’être une femme.
Mayris fixa la jeune fille un instant puis reporta son attention sur les membres de l’équipe.
— Graham, l’un de vous s’est-il chargé de son instruction ? demanda-t-elle d’une voix radoucie.
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Elle appliqua un nouveau sort de contrôle des déplacements d’air et dévia le sens du courant pour se projeter en hauteur. Ses tympans se rétractèrent au creux de ses oreilles, un vent cinglant lui coupa le souffle. Lera regarda à nouveau en dessous d’elle. Cette fois, les lacs n’étaient pas plus gros que de petites flaques demeurant au sol après une averse.
— Nous sommes montés suffisamment haut, l’informa Alistair. Il serait dangereux d’aller plus loin. Nous allons rester à cette altitude.
— En quoi est-ce dangereux ? demanda Lera en criant presque pour couvrir le mugissement du vent.
— Il est plus difficile de respirer et la température de l’air est vraiment glaciale. Notre corps ne supporterait pas ces conditions.
Lera leva les yeux en hauteur. Ils ne se trouvaient plus très loin d’une couche de nuages moutonneux. Elle avait même l’impression qu’il lui suffirait de parcourir quelques mètres de plus pour pouvoir les toucher.
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À travers cette ouverture, les astres lui apparurent, d’abord lointains, puis avec un réalisme troublant. Leurs trajectoires entrecroisées, le passage d’une pluie de corps célestes, l’apparition soudaine dans son champ de vision de constellations dont elle ignorait jusqu’alors l’existence… Cet univers à la fois figé et sans cesse en mouvement lui donna le vertige. Elle fut littéralement happée par de multiples forces gravitationnelles, aussi sûrement que les vents contraires empêchent de suivre une route. Son corps ne reposait sur rien, ne pesait rien, ne représentait rien face à cette immensité vaporeuse se déployant à l’infini. Elle n’avait pourtant pas bougé d’un pouce, toujours plantée face à Alistair, au milieu des champs d’amandiers.
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Les gardes acquiescèrent d’un signe de tête. Ils nouèrent les bouts de tissu sur le bas de leur visage et la suivirent dans la salle souterraine. La poussière s’y déployait en denses volutes. Elle brûlait les yeux, s’infiltrait partout. Cette atmosphère oppressante lui rappela les terres sauvages des landes, les fumées se dégageant des incendies ravageurs qui emportaient des hectares et des hectares de végétation. À la différence de cet air suffoquant capable de tuer un homme en moins d’une minute, la poussière qui avait envahi la salle souterraine était froide, glaciale même. Helen était transie, une sueur moite coulait le long de sa nuque. Elle se fit violence pour avancer. Rien n’était visible devant elle. En étendant les bras, même ses mains disparaissaient, comme happées par le nuage de poussière. Elle continua cette pénible progression et distingua une forme inerte allongée au sol. C’était le Mage. Elle fit signe aux gardes, souleva le corps et constata avec soulagement que la poussière était moins dense près du sol. Il aurait peut-être une chance de s’en tirer. Les gardes l’aidèrent à le hisser à l’extérieur. Ils ressortirent, jetèrent au sol les bouts de tissu maintenant noirs comme de la suie. L’un d’eux se pencha sur le Mage.
— Il respire !
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L’ignorant toujours, Karin attrapa une flasque qu’elle porta à ses lèvres. L’intendante, qui venait seulement de remarquer la présence de cet objet, ouvrit tout grand les yeux.
— Mais qu’est-ce que vous faites ?
— C’est juste un remontant pour m’aider à supporter cet infâme fourbi de mots !
— Un remontant ? Il y a des endroits pour ça ! Vous voulez que je vous indique leur emplacement, peut-être ?
— Ce n’est pas nécessaire. Je peux même vous recommander quelques adresses. Cela ne vous ferait pas de mal de prendre un peu de bon temps, ma chère !
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Maintenant qu’il était arrivé, Lera ne pouvait se défaire de ses craintes, pas plus qu’elle ne savait comment les lui confier.
— Je ne suis pas sûre de mériter toutes ces attentions, répondit-elle.
— Eh bien, donne-moi un argument qui le justifierait.
Des arguments, elle en avait des dizaines en tête. Elle n’était pas de sang royal. Elle avait certes grandi dans une famille honorable, elle ne connaissait que très peu ses défunts parents. Bien souvent elle n’en faisait qu’à sa tête et se plier à des traditions rigides l’insupportait. Respecterait-elle les convenances, le formalisme, les règles de bon usage ?
— Je ne vous demanderai pas de vivre autrement que ce que vous avez fait jusqu’à aujourd’hui, poursuivit Edme. De l’autorité royale, je suis le seul représentant. Mon frère mène sa vie comme il l’entend et je n’ai pas le moindre reproche à lui faire en ce sens. Je sais depuis longtemps que régner n’est pas sa destinée.
— Des reproches ? C’est plutôt à moi que vous devriez en faire !
— Je suis curieux de savoir pourquoi.
— Il y a quelques mois, j’ai été… en prison.
Lera se sentait si nerveuse que ces paroles fusèrent. Quelle idiote elle faisait ! Edme paraissait sur le point de rire.
— Et je regrette que cela ait pu se produire.
Elle examina son visage calme, serein. Lui arrivait-il de se départir de son flegme, de perdre patience, d’avoir un mot plus haut que l’autre ?
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