Je ne sais plus quoi faire. L’idée me vient de m’arrêter à un endroit isolé, de le sortir de la voiture et laisser son corps être découvert par un promeneur. Mais je me heurte à une grosse difficulté : la voiture est truffée de mon ADN, et je n’ai pas arrêté de lui tripoter l’épaule, le cou, la main... il y a sûrement mes marqueurs génétiques un peu partout sur son corps, ses vêtements.
- On est arrivés, tiens bon mon gars !
Aucune réaction ne fait écho à cette bonne nouvelle. Je me tourne vers
lui, sa tête penche sur son épaule droite, menton contre la poitrine. Un
filet de sang et de salive mêlés pend de ses lèvres entrouvertes. Pivotant
sur la droite, je lui soulève doucement le menton avec ma main gauche.
Ses yeux sont mi-clos. Non, non, non pas ça...
- Je t’emmène aux urgences mon vieux, ça va bien se passer, tu vas voir.
Un borborygme et quelques gouttelettes de sang projetées par sa
bouche sur le seuil sont sa seule réponse. Les mains moites, je lui
prends l’épaule dans un geste de réconfort fraternel. Ma main ne
rencontre pas de résistance, et une exclamation étouffée sort de ses
lèvres ensanglantées. Ses deux clavicules sont cassées. Mon Dieu. Le
temps presse.