Sortie du livre: "Ils sont infirmiers de campagne", de Fanny Cheyrou et Jeff Pourquié.
Guérir et soigner, ces deux mots naissent d'un long processus relationnel qui ne pourra jamais être mécanisé. Il a fallu à l'homme des siècles de soin pour élaborer un art de sauver la vie, l'infirmier est l'héritier de cette longue chaîne de savoirs.
Dans un village, personne n'est jamais anonyme. C'est sociologique, on n'arrête pas ce phénomène à la campagne. Si vous soignez Paul, vous soignez aussi Pierre qui est le cousin de Paul qui connaît bien Marie. Malgré l'engorgement de la ceinture de Mont-de-Marsan, Saint-Perdon n'a rien perdu du village gascon où tout le monde se connaît. L'infirmier est un pont entre des vies déjà reliées, depuis des générations. Les villageois parlent entre eux de "Max et Ludo". Mais l'infirmier, lui, n'évoquera jamais le nom d'un patient avec un autre, il donne toujours l'impression de découvrir la personne dont on lui parle, par discrétion.
Nos sociétés se sont construites de sorte que tous les hommes soient responsabies de chacun, et que chacun soit responsable de tous les hommes, c'est ce en quoi croit Ludo. Cet idéal permet encore à de grandes choses d'advenir. Mais certains savent mieux que d'autres sauver la part d'humanité d'un village, certains mieux que d'autres dressent un pont entre deux voisins, entre une famille et son aïeul. Ainsi devient-on l'homme d'un métier, l'homme d'une mission. Ainsi devient-on l'infirmier d'un village.
Personne ne peut imaginer ce que vit l'infirmier de campagne au quotidien. Tel un caméléon, il passe d'une maison à l'autre, d'un monde à l'autre. Il côtoie tous les milieux, tous les états de santé, il passe son temps à s'adapter.