« Il y a de Sixtine en chacune de nous ! Charlye Ménétrier McGrath, dans son roman le plus mordant et le plus personnel, nous encourage à la réconciliation. Un roman rock'n'roll sur la crise du milieu de vie ! », Caroline Vallat, Fnac Rosny 2
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- Tu as quatre-vingt-deux ans. Qu'est-ce que tu attends de la vie ?
- Je n'attends rien, chérie. J'ai attendu toute ma vie, justement. Je comprends seulement maintenant qu'il n'y a rien à attendre. Il faut tout aller chercher par soi-même. Tu passes ta vie à attendre que la roue tourne. Eh bien, tu sais quoi, la roue, c'est à toi de la faire tourner. C'est bête parce que moi, ça, je ne le comprends qu'aujourd'hui. (p.146)
C'était tellement agréable cette sensation d'être utile,
au coeur des choses.
Ces dernières années, je me suis sentie si souvent mise à l'écart
par ma famille.
Nous n'avons plus de temps à perdre avec les plaintes, les regrets, les hésitations. A nos âges, nous sommes libérées de toutes les contraintes qui pourrissent la vie des hommes, qui ont pourri nos propres vies pendant quatre-vingts ans. (p.58)
Il y avait ici un ingénieur, des commerçants, un dentiste, des ouvriers, des mamans, un pianiste, une étudiante en biologie sous-marine. J'ai compris à ce moment précis que, jusqu'à ma rencontre avec Lucienne, je n'aurais sans doute vu en eux que des sans domicile fixe.
« – Mamie, t’es quand même vachement moins coincée qu’avant. Ils doivent être cool, tes copains de résidence. Tu nous les présenteras un jour? À moins que tu aies honte de ta progéniture trop conventionnelle, s’est moqué Wilfried.
– Toi et ton frère, conventionnels? ai-je ri en attrapant la queue-de-cheval de Valérien et un des trucs emmêlés de Wilfried, ses sortes de gros boudins de cheveux entortillés (il faut que je pense à lui demander comment s’appellent ces cheveux dégoûtants.) »
- "Ne t'inquiète pas, la roue tourne !"
Pipeau, oui ! Elle ne tournera jamais toute seule. Il faut que tu la mettes en action, que tu agisses pour qu'elle réagisse. Bien sûr, il arrive qu'un coup de vent venu du ciel lance le mouvement, mais... pour qu'il se passe quelque chose, il faut prendre l'initiative, être à l'origine de l'impulsion. Sinon, tu restes là à regarder la roue sans qu'elle ne tourne jamais.
- Si tu veux que la roue tourne...
- Tourne-la !
Les apparences sont toujours trompeuses. Ce jeu des regrets est décidément plein de surprises et se révèle terriblement grisant.

L'année de ses 8 ans, celle du divorce de ses parents, ils lui avaient demandé, un soir, entre les devoirs et le bain, sans préambule : " alors, tu préfères habiter avec papa ou maman ?". Incapable de prendre une telle décision (et pour cause !) elle avait simplement répondu : " aucun des deux ! Je veux vivre chez grand-père et grand-mère.". Ses parents, bien que brusqués par la franchise de sa réponse, ne lui en avaient pas voulu. Ils ne pouvaient s'en prendre qu'à eux-mêmes : ils lui avaient toujours laissé le choix, l'avaient fait grandir plus vite que nécessaire et avaient considéré sa parole comme sacrée dès son plus jeune âge. Allez hop ! Dégagez, y'a plus rien à voir : Sixtine a pris sa décision. Derrière ces mots de gosse, bien sûr, se cachait l'impossibilité de choisir l'un ou l'autre de ses parents. Cela revenait à dire à l'un des deux qu'elle l'aimait moins. Elle préférait encore se priver des deux plutôt que de leur ajouter du chagrin.
A s'effacer tout le temps pour le bien des siens, on finit parfois par se faire disparaitre soi-même.
« Je m’appelle Jeanne Legaud, j’ai quatre-vingt-un ans, cinq enfants, dix petits-enfants et treize arrière-petits-enfants. J’ai consacré ma vie à ma famille et j’étais persuadée, jusqu’à peu, d’avoir été une bonne mère. Depuis que je suis ici, j’émets certains doutes. Si j’avais bien fait mon travail de maman, ces sales gosses ne m’auraient pas jetée ici. Il y en aurait eu au moins un pour s’opposer à cette hérésie familiale, non? »