L'invité du 12/13 Christel Mouchard sur RCJ
Ce qui différencie les grandes aventurières des centaines de voyageuses et des milliers de touristes, c'est la transmission de leur expérience par l'écriture.
"... Tout de même et avant le reste", aurait, semble-t-il,
affirmé Ella Maillart qui a longuement fréquenté les sommets, "le meilleur moyen de se débarasser d'un désir obsédant, c'est de le réaliser!".
Mary Kingsley : « Je l’affirme sans hésitation, dans toute l’Afrique de l’Ouest, en une semaine, vous rencontrerez le quart des ivrognes que vous rencontrez en deux heures passées dans Vauxhall Road un samedi soir ». Elle, dénonce le prétendu « fardeau de l’homme blanc » cher aux émules de Kipling. Elle reproche ouvertement aux autorités coloniales et aux missionnaires de délaisser l’approche ethnologique des populations africaines pour une politique qui repose sur « les bonnes intentions, l’ignorance et les fusils », ce qui lui vaudra d’être qualifiée par le Colonial Office de « femme la plus dangereuse du camp adverse ».
p. 115
L'exigence envers autrui est nécessairement moindre que l'exigence envers soi-même.
Combien de temps avait passé depuis son enlèvement ? Herman n'aurait pu répondre. Il avait oublié son nom, il avait oublié sa langue natale, il avait oublié ses frères et soeurs. Il avait même oublié qu'il avait eu une mère, avant. Il raffolait du foie cru, et il était le meilleur voleur de chevaux de tout le clan.
Voyager, c'est rencontrer.
- Réfléchissez... Les Texas Rangers ont des carabines Winchester 1873 à répétition. Vous n'avez que des arcs et des vieilles pétoires. Vous ne pourrez pas les vaincre. Quanah s'est battu pendant dix ans contre eux. A la bataille d'Adobe Walls, il y avait des centaines de guerriers contre vingt Visages pâles, et pourtant, en fin de compte, ce sont les Comanches qui ont dû se retirer. Si vous continuez les raids, ils envahiront les campements, détruiront les wigwams, tueront les enfants... Mais si vous acceptez de venir vivre dans les réserves, la vie des femmes et des enfants sera épargnée.
(p. 105)
Une jeune fille de quinze ans en habit de novice, seule dans un bois de châtaigniers, non loin de la ville de San Sébastian, en Espagne...
Nous sommes en 1607.
Penchée sur son ouvrage, elle coud..."sagement", dit-on souvent quand il s'agit d'une jeune fille et de couture.
Pourtant, Catalina de Erauso ne coud pas sagement.
A ce moment de sa vie, elle vient de s'enfuir du couvent où sa famille l'a placée, et confectionne en toute hâte les vêtements d'homme qui vont lui ouvrir les portes de la liberté.
- Qu'est-ce que je viens de voir ? demanda une voix atterrée. Un démon ?
- Idiot ! répondit l'autre. Tu viens de voir un Indien tout nu sur un cheval tout nu.
« Monsieur, je ne cache pas mon épouse. C’est elle qui se cache. » (p. 130)
[ St Domingue, 1776 ]
- C'est ton père, Alex, qui a fait venir ce monsieur. Il m'a vendue, comme esclave. Et vous aussi.
- Esclave ? s'écria Alex, mais tu n'es plus une esclave, Mam, tu le sais bien. Pap est venu dans les montagnes de Jérémie pour que tu sois libre, et nous aussi. Il n'y a pas d'esclave sur l'habitation Delisle.
Mam regardait son fils et, dans ses grands yeux lumineux, on pouvait voir le monde qui s'écroulait.
- Je le croyais, murmura-t-elle. J'étais une esclave quand ton père m'a rencontrée. Il m'a achetée, mais c'était pour que nous puissions vivre ensemble, avoir une famille. Et nous sommes venus ici parce que, dans ces montagnes, loin de Port-au-Prince, personne ne fait attention à la couleur des gens. Mais voilà… ton père n'a jamais signé les papiers pour m'affranchir. Il est si distrait, tu le connais.
- Distrait ? lança Rose en serrant les poings. Enfin Mam, il vient de te vendre, toi sa femme ! Et nous, ses enfants !
(p. 31-32)