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Citations de Fernand Léger (19)


Un monde d'hommes, des ombres d'hommes grouillent autour de nous; brisés, rejetés, ils n'ont pu résister aux forces négatives et destructives que toute société porte en elle-même.
Je veux rendre hommage à tous ces malheureux - ces libérés, ces abandonnés, à tous ceux qui ont voulu vivre libres, qui ont voulu crier la vérité si dangereuse à dire - ceux qui n'ont pas voulu prendre le trottoir et qui en ont été victimes. Ils ont voulu heurter de front les hypocrisies et les mensonges sur lesquels s'édifient les sociétés. Dans les prisons, dans les asiles, sous les ponts se trouvent, j'en suis sûr, des spécimens d'humanité admirables et déchus, qui n'ont pas eu la force de franchir cette ligne moyenne, raisonnable, étouffante que l'ordre bourgeois tend en travers de la vie pour les empêcher de passer.

FONCTIONS DE LA PEINTURE - La couleur et l'espace
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Le monde actuel est surtout ivre de compréhension.
Un orgueil humain né des réalisations certainement étonnantes de ces derniers siècles veut tout absorber par logique ou déduction. Pourtant il faut s'arrêter devant l'oeuvre d'art - et se rappeler que nos "instincts" sensoriels doivent là entrer en jeu.
L'oeuvre d'art reste pour les sensibles, c'est leur revanche sur les intelligents.
Il y a entre l'artiste qui crée et l'amateur qui apprécie, un lien, une atmosphère délicate qui est inexplicable, qui est le véhicule des grandes amitiés qui nous entourent. On n'explique pas cela, et c'est justement cette enveloppe assez mystérieuse qui permet la durée et l'admiration par les hommes d'autres générations.


FONCTIONS DE LA PEINTURE - Le mur, l'architecte, le peintre
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Créer le bel objet en peinture, c`est rompre avec la peinture sentimentale. Un ouvrier n'oserait livrer une pièce autrement que nette, polie, brunie. Rien n'y est éparpillé, Tout fait bloc. Le peintre doit chercher à réaliser le tableau propre possédant le fini. Les Primitifs songeaient à ces choses. Ils avaient la conscience professionnelle. La peinture est jugée au décimètre, alors que la mécanique l'est au dixième de millimètre. L'artiste met sa sensibilité au service d'un travail. Il y a des ouvriers et des ingénieurs. Rousseau est un ouvrier, Cézanne un petit ingénieur.
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Prenons notre temps.
Dans cette vie rapide et multiple qui nous bouscule, nous coupe en tranches, avoir la force de rester lents et calmes, de travailler hors des éléments dissolvants qui nous entourent.
Concevoir la vie dans son sens lent et tranquille. L'oeuvre d'art a besoin d'un climat tempéré pour se réaliser pleinement.
Dans cette vitesse accrue, qui est la loi du monde moderne, s'établir des points fixes, s'y accrocher et travailler lentement à l'oeuvre d'avenir.
Nous vivons une époque magnifiquement dangereuse où l'homme est sollicité de toutes parts.
Si l'on accepte tout, on est perdu. On doit savoir peser ses capacités et ne prendre que ce qui est utile et nécessaire.
Savoir choisir, obligation de défense, de recul, d'arrêt devant cet élan universel.

FONCTIONS DE LA PEINTURE - La couleur et l'espace
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Chaque artiste possède une arme offensive lui permettant de brutaliser la tradition. Cherchant l'éclat et l'intensité, je me suis servi de la machine, comme il arrive à d'autres d'employer le corps nu ou la nature morte. On ne doit jamais être dominé par le sujet. On est devant sa toile, et non dessus, ou derrière. Sinon on date. L'objet fabriqué est là, absolu polychrome, net et précis, beau en soi; et c'est la concurrence la plus terrible que jamais artiste aie subie. Question de vie ou de mort, situation tragique, mais combien neuve! Je ne me suis jamais amusé à copier une machine. J'invente des images de machines, comme d'autres font, d'imagination, des paysages.


FONCTIONS DE LA PEINTURE - L'esthétique de la machine
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Il y a un primitivisme moderne dans la vie intense qui nous entoure.
Les événements visuels, décoratifs, sociaux, n'ont jamais été aussi intenses, aussi receleurs de documents plastiques nouveaux. Les créations scientifiques actuelles nous ouvrent un champ illimité de formes plastiques inconnues. Le cinéma nous a mis devant le fragment humain, le gros plan émouvant d'une main, d'un oeil, d'une figure.
Le peintre contemporain doit déceler ses documents dans tout cela. Un fragment grossi cent fois nous impose un nouveau réalisme qui doit être le point de départ d'une évolution plastique moderne. Le paysage classique est révolutionné, transformé par ces pylônes métalliques qui trouvent leur contraste naturel par les nuages.
Toute cette publicité hurlante et bruyante ne peut être rejetée sous prétexte de "protection du paysage". Mais où commence le paysage? Dès qu'une maison apparaît, un poteau télégraphique, il n'y a plus de paysage naturel. Alors?
La vie moderne est tellement différente, autre que celle d'il y a cent ans, que l'art actuel doit en être l'expression totale.


FONCTIONS DE LA PEINTURE - Le problème de la liberté en art
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Les premiers peintres ont peut-être commencé à peindre le ciel, puis des nuages, puis des arbres, puis des maisons, puis le dessin de la première route, puis le poteau télégraphique et la voiture sur cette route. Pourquoi voudrait-on à un moment donné de l'évolution humaine, crier halte-là à un homme qui utilise l'élément mécanique? Pourquoi? Que signifie ce geste? C'est absurde. L'art est subjectif, c'est entendu, mais une subjectivité contrôlée, appuyée sur une matière première objective.
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Quelle est la fonction de l’art au sein d’un monde en perpétuelle évolution et qui n’a pas encore achevé sa révolution machiniste ?
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L'énorme erreur des soi-disant peintres de la Renaissance, des officiels, de l'école des Beaux-Arts, c'est de courir après le "beau sujet". Là est l'erreur capitale qui continue encore et contre laquelle surtout, nous les modernes, nous réagissons. Si un objet, un sujet est beau, il n'est plus matière première, il est valeur plastique, donc inutilisable; on n'a plus qu'à regarder et admirer, il n'est même pas "copiable". L'expérience en est faite. Mettez cinquante copistes devant le même modèle dans le même éclairage et regardez l’exécution, aucune n'est pareille. Philosophiquement, on en déduit que rien n'existe en soi, que tout est relatif. Le beau sujet est donc condamné irrémédiablement. Ce n'est que matière première.
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Le beau est partout, dans l’ordre d’une batterie de casseroles sur le mur blanc d’une cuisine, aussi bien que dans un musée.
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Fernand Léger
Ce que je voudrais, c'est pouvoir débrouiller les ressorts qui maintiennent tous ces hommes dans un métier dont ils ont tous par dessus la tête [...] Mais pourquoi marchent-ils ? C'est bougrement compliqué. Je veux espérer pour eux qu'il y a là-dessous une conscience très obscure, quelque chose d'instinctif, pas réfléchi du tout, qui les fait rester là et obéir par devoir. Je pense qu'il y a de cela, qu'il n'y a pas que la crainte. La crainte ne serait pas suffisante. Il y a aussi l'amour-propre beaucoup. Et puis finalement, c'est des "Prussiens" qu'ils ont devant eux. [...] Il y a cela sûrement, autrement c'est inexplicable.

Lettre à Louis Poughon, printemps 1917.
Cité par Stéphane Audouin-Rouzeau dans "C'est la guerre" (2020)
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La beauté de New York, le soir, est faite de ces innombrables points lumineux et du jeu infini de la publicité mobile.
La rigueur des architectures est brisée par la fantaisie sans limites des feux colorés. Le grand spectacle commence lorsqu'on s'élève et cette vision radieuse a ceci de particulier qu'aucun artiste, le plus génial soit-il, n'y a mis la main, aucun metteur en scène n'y a contribué.
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Les débris humains commencent à apparaître aussitôt que l’on quitte la zone où il y a encore un chemin. J’ai vu des choses excessivement curieuses. Des têtes d’hommes presque momifiées émergeant de la boue. C’est tout petit dans cette mer de terre […]. Les mains surtout sont extraordinaires […]. Plusieurs ont les doigts dans la bouche, les doigts sont coupés par les dents. J’avais déjà vu cela […] en Argonne, un type qui souffre trop se bouffe les mains
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Fernand Léger
La demande de Beau est considérable, les trois quarts de gestes et aspirations journaliers sont inquiets de ce désir. Là aussi, la loi de l’offre et de la demande fonctionne.
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Vraiment la guerre est une chose bien bizarre […]. Ces 18 mois passés ici ont été très durs […]. Je le sens par tout, par mes lettres qui sont de plus en plus longues à ceux que j’écris. C’est formidable ce que j’aurai écrit pendant cette guerre. Heureusement que j’avais cette diversion. J’y serais crevé sans cela […]. Jane a de moi 30 lettres par mois, des lettres quelquefois de six pages. Toi, tu en as pas mal. Mare quelques-unes aussi et d’autres à des étrangers […]. J’ai un très grand plaisir à écrire. C’est le seul que j’aie […]. Ça me donne de l’air, comprends-tu, je respire mieux. […] J’ai besoin de cela. Il faut que je le fasse
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Considérons donc uniquement le point de vue visuel. Où en est-on ?

A ceci : 80% des éléments et objets qui nous aident à vivre ne sont qu'aperçus par nous dans la vie courante, tandis que 20% sont vus. J'en déduis que le cinématographe fait cette révolution de nous faire voir tout ce qui n'a été qu'aperçu. Projetez ces éléments tout neufs, et vous avez vos drames, vos comédies dans un plan uniquement visuel et cinématographique. Le chien qui passe dans la rue n'est qu'aperçu. Projeté à l'écran, il est vu, tellement que toute la salle réagit comme si elle découvrait le chien.
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La matière première utilisable est partout autour de nous, il s'agit de tomber juste.
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Michel-Ange sculpteur est le prototype de l'erreur la plus grossière en cherchant le Beau dans la copie de l'ordre musculaire humain. Un pauvre Christ déformé du XIII° siècle est infiniment plus émouvant et plus beau par la sensibilité qui y est contenue que la jambe d'une statue de Michel-Ange où le muscle de gauche est régulièrement à sa place anatomique. Il a beau gonfler ces muscles pour faire puissant, il ne fait rien du tout.
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Les époques qui ont précédé la Renaissance italienne sont libres du point de vue d'imitation. Elles ont inventé la forme (gothique, roman chinois, indochinois, égyptien, aztèque, etc...). Ces époques, au lieu d'être inférieures au XV° siècle, lui sont infiniment supérieures par l’exécution plastique.
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