Le blanc matérialise et incarne de nombreux univers dont les symboliques varient au fil des siècles et selon les espaces.
L'historien des couleursMichel Pastoureau revient avec un nouveau livre Blanc. Histoire d'une couleur, publié au Seuil. Dedans, il montre que le blanc est bel et bien considéré comme une couleur dans l'histoire, loin d'être "incolore". Pourtant, il reste extrêmement difficile de circonscrire précisément ce qu'est le blanc et la couleur en général : "si l'on ouvre un dictionnaire, les auteurs ont énormément de difficultés à définir ce qu'est la couleur", nous dit Michel Pastoureau.
François Garde, ancien haut fonctionnaire devenu écrivain voyageur, raconte le blanc avec A perte de vue la mer gelée (Paulsen, 2021), histoire d'une exploration de l'Atlantique Nord où la mer glacée blanchit tout l'espace environnant. Il publiera le 12 janvier 2022 L'empire du froid, un livre indispensable pour la saison : dedans, il y abordera l'adversité du froid, mais aussi toutes les joies hivernales qu'il nous apporte.
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Vermeer est un peintre du bleu( et même du bleu et blanc, tant ces deux couleurs fonctionnent chez lui en association) . C’est surtout ce travail sur les bleus qui, chromatiquement, le distingue des autres peintres néerlandais du XVII siècle.

Les couleurs ne sont pas anodines, bien au contraire. Elles véhiculent des codes, des tabous, des préjugés auxquels nous obéissons sans le savoir, elles possèdent des sens variés qui influencent profondément notre environnement, notre langage, notre imaginaire.
Les couleurs ne sont pas immuables. Elles ont une histoire, mouvementée, qui remonte à la nuit des temps et qui a laissé des traces jusque dans notre vocabulaire : ce n’est pas par hasard si nous voyons rouge, rions jaune, devenons blanc comme un linge, verts de peur ou bleus de colère….
[…]
On verra ici comment la religion les a mises sous sa domination, comme elle l’a fait d’ailleurs pour l’amour et la vie privée. Comment la science s’en est-elle mêlée, débordant sur la philosophie – onde ou particule ? Comment la politique, aussi, s’en est emparée – les rouges et les bleus n’ont pas toujours été ceux que l’on connait. Et comment, aujourd’hui, nous sommes toujours lestés par cet étrange héritage. L’art, la peinture, la décoration, l’architecture, la publicité bien sûr, mais aussi nos produits de consommation, nos vêtements, nos voitures…. Tout ceci est régi par un code non écrit dont les couleurs ont le secret.
Avant-propos de Dominique Simonnet
On ne peut pas se passer du noir et du blanc pour décrire un monde en couleurs.
Nos ancêtres avaient d'autres conceptions et d'autres visions de couleurs que les nôtres. Ce n'est pas notre appareil sensoriel qui a changé, mais notre perception de la réalité, qui met en jeu nos connaissances, notre vocabulaire, notre imagination, et même nos sentiments, toutes choses qui ont évolué au fil du temps.
Enfin, et surtout, il faut rapprocher du bleu des romantiques allemands le "blues", forme musicale d'origine afro-américaine, probablement née dans les milieux populaires à l'horizon des années 1870 et caractérisée par un rythme lent à quatre temps, traduisant des états d'âme mélancoliques. Ce mot, anglo-américain, "blues", que de nombreuses langues ont adopté tel quel, provient de la contraction du syntagme "blues devils"; ce dernier désigne la mélancolie, la nostalgie , le cafard, tout ce que le français qualifie d'une autre couleur : "idées noires". Il fait écho à l'expression anglaise "to be blue" ou "in the blue", qui a pour équivalents allemand "alles swartz sehen", italien "vedere tutto nero", et français "broyer du noir".
Vous rappeliez que pendant longtemps la mariée était en rouge
Oui ; car jadis chez les Romains par exemple, la virginité d’une femme n’avait pas l’importance qu’on lui a donnée ensuite.
Avec l’institution définitive du mariage chrétien, au XIII ème siècle, il est devenu essentiel.
A compter de la fin du XVIII ème siècle, alors que les valeurs bourgeoises prennent le pas sur les valeurs aristocratiques, on somme les jeunes femmes d’afficher leur virginité, probablement parce que celle-ci n’allait plus de soi.
Le code nous est resté.
Regardez les vêtements des enfants à la sortie d'une école primaire : dans un quartier plutôt défavorisé, vous verrez beaucoup de couleurs. Dans un quartier chic, la palette sera moins bariolée. La richesse et le luxe s'incarnent dans la retenue.
Contrairement à une idée reçue, en effet, les affaires de sorcellerie ne concernent pas tant le Moyen-Âge que l'époque moderne [NB : l'ancien Régime] : la grande chasse aux sorcières commence à l'horizon des années 1430 et va occuper l'Europe pendant trois siècles. Une surenchère à l'orthodoxie pousse désormais l'Église à voir partout des hérétiques, des adorateurs du Diable, des déviants de toutes espèces parmi lesquels de nombreux loups-garous.
[Le petit chaperon rouge] : pourquoi rouge ? Chaque spécialité peut apporter sa réponse. Parce qu’on a eu longtemps l’habitude d’habiller les enfants de rouge (histoire). Parce que le récit se situe le jour de la pentecôte (Liturgie). Parce que la fillette est pubère et a très envie de se retrouver dans le lit avec le loup (psychanalyse). Parce qu’il s’agit d’une triade de couleurs et qu’au rouge du chaperon il faut associer le noir du loup et le blanc du petit pot de beurre (sémiologie).

Cette mise en scène d'un loup [NB : Ysengrin] qui fait rire au lieu de faire peur ne constitue peut-être pas tant un exutoire, comme on pourrait le croire au premier abord, que le reflet d'une certaine réalité. Il semble bien que l'on ait moins peur du loup dans les campagnes des XIIè et XiIIè siècles qu'avant l'an mille, du moins en Europe occidentale. La peur du loup ne sera de retour qu'à la fin du Moyen Âge et, surtout, à l'époque moderne, où elle deviendra une angoisse permanente dans la vie des campagnes. Cette peur est en effet liée au périodes de crises (climatiques, agricoles, sociales), pas aux moments de prospérité économique ni d'essor démographique. Ce n'est pas un hasard si l'histoire de la Bête du Gévaudan trouve sa place dans la France du XVIIIè siècle et non au cœur du Moyen-Âge. À l'époque féodale, dans les campagnes françaises, on a surtout peur du Diable, du dragon, de la mesnie Hellequin ou des revenants, mais on n'a plus guère peur du loup. Cette accalmie, hélas ! ne durera pas ; cette peur reviendra avec force moins de deux siècles plus tard.