AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de François Hartog (11)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées
A la rencontre de Chronos

— Le temps, deux ou trois mouvements —



Un petit livre stimulant, initialement pensé comme une conférence, développé et par endroit rapiécé un peu vite pour faire un livre, ce qui nous vaut quelques répétitions évitables qui auront cependant une valeur de redondance pour les oublieux.



François Hartog expose brièvement le parcours intellectuel qui le conduit à la notion qu’il développe (c’est sa marque de fabrique) de « régime d’historicité ». Grossièrement : nous vivons tous dans le temps mais, quand bien même sommes-nous physiquement contemporains, nous ne vivons pas nécessairement le même temps.



C’est le brave Capitaine Cook qui triomphe à Hawaï abordée pendant la célébration du dieu de la paix Lono auquel il est identifié. Il revient illico après une avarie. Brève parenthèse pour lui et ses marins, gouffre temporel pour les indigènes puisque que c’est désormais la saison de Kû, dieu de la guerre et ennemi mortel de Lono : adieu Cook ! (Ndr : j’aurais personnellement préféré qu’il fut mangé aux îles Sandwich — mais l’histoire ne fait pas toujours bien les choses.)



Pour ses régimes, FH préfère historicité plutôt que temporalité pour bien marquer la primauté de l’expérience. Toutes les sociétés son historiques (suivez mon regard…) expliquait auparavant Levi-Strauss, et ce n’est pas leur degré d’historicité qui varie mais « la manière dont elles le ressentent ».

Ni unique ni uniforme, le temps historique se conjugue au pluriel. Il convient donc de repérer « comment, dans chaque présent, les catégories du passé et du futur ont été mises en relation. »



FH prend l’exemple de « l’Ancien régime », tourné vers le passé où il fonde sa légitimité, Ancien régime renversé par la Révolution française qui regarde à l’inverse vers le futur, adoptant même un nouveau calendrier.

Plus tard parmi les héritiers certains chanteront aussi « du passé faisons table rase ».



« "Quand le passé n'éclaire plus l'avenir, l'esprit marche dans les ténèbres." Par ces quelques mots, [Tocqueville - De la démocratie en Amérique] prend acte de la fin de l'ancien régime d'historicité (demeuré opératoire aussi longtemps que la lumière venait du passé) et donne du même coup la définition du régime moderne : il revient désormais à l'avenir d'éclairer le passé et le présent pour tracer un chemin en vue d’une action qui évite le contretemps et se garde de l’anachronisme. »



François Hartog ne se limite pas aux constats, avec les régimes d’historicité il forge un outil heuristique qu’il éprouve avec plusieurs exemples. « Aide-t-il [cet outil] à porter un diagnostic sur les expériences contemporaines du temps ? »

La ville de Berlin lui offre un remarquable champ d’observation. Il y décrit notamment les trajectoires concurrentes de l’Est et de l’Ouest qui se rejoignent dans « la crise du futur » de la fin du 20e siècle, crise du futur escortée sous l’autorité du présent par les nouveaux maîtres-mots : mémoire, patrimoine, commémoration et identité.



Après l’ancien, le moderne, voici le nouveau régime : le règne du présentisme.

Bien sûr l’histoire et ses différents régimes n’est pas un petit train où les wagons se suivent sagement, ça se croise, ça se concurrence, ça se chevauche...

FH définit les régimes d’historicité comme autant de prismes d’observation des temporalités.



En deux temps, trois mouvements, il articule ainsi la trajectoire historique de l’Occident contemporain :



« L'affaire commence avec les Grecs qui ont dédoublé le temps en chronos et kairos : le premier est le temps ordinaire, celui des saisons, celui qui passe et qu'on mesure ; le second est celui de l'inattendu, de l'occasion à saisir, du moment favorable et de l'instant décisif. »



A ce premier couple, les Grecs ajoutent le pas-de-deux kairos et krisis, du moment opportun et du moment critique. Chronos, kairos et krisis passent des Grecs à la Bible, aux juifs (kairos et krisis confondus dans l’Apocalypse), puis aux chrétiens. Dans le temps chrétien, le kairos (le Christ) devient le concept central et réduit chronos à un intervalle, une salle d’attente en attendant krisis (le Jugement dernier). « Si tout n’est pas "encore" achevé, tout est "déjà" accompli. »



La suite de l’histoire raconte comment chronos a échappé à ses gardiens pour prendre le dessus dans le régime moderne d’historicité. La science prolonge le passé qui déborde la brève chronologie biblique et le futur rêve de progrès perpétuel.



Et puis ça coince, c’est le présentisme : « A la fin du XXe siècle, " être de son temps " n’est plus suffisant, il est impératif de " vivre au présent " : dans un présent valorisé et désirable. […] C’est le règne du " just in time " (que traduit mal le flux tendu). »

(Dans le just in time, FH observe en particulier l’injonction paradoxale à « anticiper » pendant le temps du Covid, et l’incessant « tourniquet présentiste urgence-retard-accélération-anticipation ».)



Le présentisme, c’est le régime d’un présent auto-suffisant, « prétendant être lui-même sa propre lumière », prétendant n’éclairer du passé et de l’avenir « que ce dont il a immédiatement besoin pour se justifier lui-même. »

Mais ce n’est pas exactement le temps par exemple de Poutine, fondé sur la grandeur passée, ou celui des milliardaires de la tech qui rêvent pour leur compte au-delà de l’humain...



Ce n’est pas non plus celui de l’anthropocène, du changement du climat et de la disparition des espèces. « La question, à la fois la plus pressante et la plus compliquée, est comment tenir ensemble les temps du monde et ceux du Système de la Terre », s’interroge FH.

Et ce n’est pas facile ! « Quand l’urgence est partout se forme une sorte de nœud temporel où tout s’entremêle. »



Une nouvelle Apocalypse a commencé ; restons-nous seuls avec chronos/krisis, sans l’espoir d’un kairos ?

« Nous ne pouvons pas continuer à croire à l’ancien futur si nous voulons avoir un avenir. » (Bruno Latour, Face à Gaia)





P.-S. : Mon goût pour faire parler les livres ensemble me porte à imaginer un usage personnel et pertinent de cette notion de régime d’historicité. Le livre de FH m’a rappelé Les années d’Annie Ernaux et de ce qu’elle dit d’« elle » (personnellement de façon impersonnelle), se sentant (disons) vieille et pourtant pour l’essentiel inchangée depuis « une espèce de solidification intérieure » constituée autour de cinquante ans : « A mesure que le temps diminue objectivement devant elle, il s’étend de plus en plus, bien en deçà de sa naissance et au-delà de sa mort. » Cependant « Elle a perdu son sentiment d’avenir, cette sorte de fond illimité sur lequel se projetaient ses gestes, ses actes, une attente de choses inconnues et bonnes qui l’habitait... »

Un nouveau rapport passé / présent / futur.



Le changement de régime, elle l’éprouve également, avec l’époque cette fois, dans les années 70 quand elle dit : « Le temps des enfants remplaçait le temps des morts. »
Commenter  J’apprécie          327
Chronos

François Hartog mène depuis plusieurs années des études consacrées au temps, autour de la notion du « régime d’historicité » qui définit la manière dont une société traite de son passé, comment elle articule le passé, le présent et le futur. Le projet de Chronos est clairement posé dans le sous-titre du livre « L’occident aux prises avec le temps » : il s’agit de suivre, pendant une vingtaine de siècles la manière dont l’Occident s’est représenté le temps, avec les ruptures et continuités.



Le point de démarrage du livre est ce que François Hartog appelle le « régime chrétien d’historicité », qui se met en place au début de notre ère. Au temps des Grecs, Chronos, à la fois temps immuable, cosmique mais aussi le temps des hommes, périssable, ce nouveau régime chrétien préfère les notions de Kairos et de Krisis. Kairos, c’est le moment fatidique, l’occasion qu’il faut saisir. Surtout lorsque se produit Krisis, un moment où l’on doit juger, comme dans l’art médical, où il faut juger, décider, pour maîtriser une maladie au bon moment. Dans la représentation chrétienne, Kairos c’est la venue du Christ, qui annonce Krisis, le temps du jugement, qui mettra fin au Chronos. Kairos, le temps de la fin, et Krisis, la fin des temps à venir, font vivre l’homme dans un éternel présent, tendu dans l’attente de l’accomplissement ultime. Mais avant que cet accomplissement ne survienne, il faut que le temps quotidien vécu par les hommes y soit entièrement soumis. Par le biais du calendrier liturgique annuel : entre l’Avent, qui fait revivre la période qui précède la venue du Christ, Noël qui commèmore la Nativité, Pâques la Résurrection etc. Mais aussi en subordonnant l’âge du monde et les événements qui ont eu lieu depuis l’origine à la chronologie biblique. Le temps de l’histoire est désormais daté par rapport à la naissance du Christ (l’an 0), les chronologies grecques, perses, égyptiennes doivent rentrer dans les 6000 années canoniques depuis la Création, que ses exégètes ont cru avoir lu dans la Bible. Sans oublier de mettre en évidence l’antériorité biblique sur celles des civilisations antiques.



Mais au fur et à mesure du passage des siècles, l’horizon du jugement dernier semble de plus en plus difficile à prévoir, et une place se dessine pour le temps des hommes. Des stratégie d’accommodation se mettent en place : accomodatio (à la vie humaine d’une époque donnée), translatio (des différents empires humains, qui retrouvent une existence dans le temps), renovatio (renaissance), reformatio (réforme).



Ce qu’on appelle Renaissance va en quelque sorte détourner le renovatio et le reformatio. Le renovatio n’est plus la renaissance dans le Christ ni la capacité de l’Église à se renouveler et se réformer, mais le retour à l’Antiquité. Le renovatio des humanistes suppose une rupture avec le Moyen-Age et non pas un temps continu. C’est une fissure qui lézarde la conception chrétienne du temps. Mais de plus grands bouleversements sont à venir. Le temps de la Bible cède au temps de la Terre avec Buffon, il y a de même une histoire de la Nature vivante, comme il y a une histoire de la Terre, et les deux sont liées. Une histoire d’une longueur prodigieuse, qui remet Kronos au centre. On peut dater le début de la Terre et calculer sa fin probable, dans une démarche scientifique.



Condorcet va développer sa vision des « progrès indéfinis de l’esprit humain », projetant l’homme dans le futur, rendant possible un nouvel régime de l’historicité, le régime moderne. Dominé par l’idée de progrès, et envisageant un avenir prometteur. L’histoire devient une science majeure, le tribunal du monde. Le temps se met en marche, de plus en plus vite, et il s’agit pour l’homme de le suivre, de ne pas être à la traîne.



Mais le régime moderne et sa croyance dans un futur désirable au poids écrasant va être remis en cause par les grandes catastrophes humaines du XXe siècle : Hiroshima, Auschwitz entre autres. Le spectre de l’Apocalypse resurgit, mais non plus une Apocalypse divine, qui séparera le bon grain de l’ivraie, une fin désirable pour les justes revenus dans un monde d’avant la chute, mais une Apocalypse provoquée par les hommes eux-mêmes dans un geste d’auto-destruction. Et projette l’homme dans un présentisme sans perspectives, où le présent a cannibalisé passé et futur.



Enfin, François Hartog évoque la conception actuelle du temps, différente du présentisme de la deuxième moitié du XXe siècle. Elle se situe dans la dualité entre un temps terriblement accéléré, en particulier par le numérique, et un temps très long de l’anthropocène, qui soumet l’homme à des mutations dont il est en partie, voire en plus grande partie, responsable, et qui dessine un futur sans avenir.



C’est un livre d’une très grande densité, qui fournit des analyses très riches, et très inspirantes. Même si j’ai trouvé que les parties concernant les époques les plus anciennes étaient les plus intéressantes, plus détaillées, et permettant sans doute un recul plus grand. Le livre montre en tous les cas un besoin de donner sens, à essayer de trouver une raison, à l’histoire, au temps passé et à venir. C’est sans doute un point que l’on peut discuter, même si ce besoin semble avoir été présent à toutes les époques, y compris la nôtre.
Commenter  J’apprécie          224
A la rencontre de Chronos

Spécialiste de l'Antiquité, François Hartog a inventé la notion de "régime d'historicité". Ce petit livre d'une centaine de pages en explique les grandes lignes.

Qu'est-ce que l'historicité ? Dans une scène de l'Odyssée, Ulysse rencontre le barde des Phéaciens qui lui chante l'épisode du cheval de Troie. Alors que le héros a oublié jusqu'à son nom, la précision du récit de l'aède lui rappelle le guerrier rusé qu'il a été 10 ans auparavant. Ulysse prend alors conscience de la distance qui le sépare de celui qu'il a été. C'est cette prise de conscience "d'une irrémédiable distance de soi à soi" qui constitue l'historicité.

Le régime d'historicité est pour Hartog une manière d'engrener les catégories du passé, du présent et du futur. Ce régime varie selon les périodes, les lieux, les milieux.

Cas d'école, la Révolution française fait surgir la notion d'Ancien Régime.

A l'Ancien Régime correspond un régime d'historicité fondé sur le passé : passé d'une dynastie, d'une monarchie, de l'Eglise catholique, de la noblesse. La République prétend ouvrir une ère nouvelle, rythmée d'ailleurs par le nouveau calendrier.

La période entre 1789 et 1830 est une valse hésitation entre ces deux régimes d'historicité, illustrée par la tentative de la Restauration de rétablir l'ordre ancien.

Autre exemple, le Berlin de la guerre froide voit coexister deux régimes d'historicité opposés. Le régime d'historicité communiste est futuriste : le rôle du présent est de se sacrifier pour un avenir plus radieux, une société sans classe ; la RFA s'inscrit dans un régime présentiste, celui du "Miracle" pour aujourd'hui.

Le régime d'historicité du christianisme s'insère entre deux bornes, l'Incarnation du Christ et le Jugement. "Il faut se convertir et se tenir prêt pour l'imminence de la fin". Hartog parle de présentisme apocalyptique.

Mais à la fin du XVIIIe siècle, avec les réflexions des Lumières, les 6000 ans traditionnels de la Bible entre Adam et Jésus ne sont plus tenables.

Le régime d'historicité de la Bible entre dans la fable. Ne reste plus que le présent, qui cannibalise le passé et le futur.

Mais tandis que le numérique, les GAFAM, les livraisons rapides, le juste à temps, le désir tout de suite satisfait, semblaient consacrer le présent comme un horizon indépassable, l'urgence climatique bouscule les trois catégories du passé, du présent et du futur. Le futur devient menaçant car il est celui d'une possible "sixième extinction". Le passé doit être revisité pour pointer les occasions manquées qui nous ont mené là où nous sommes.

Dans la dernière partie du livre, la moins convaincante, François Hartog analyse la crise du Covid et la guerre en Ukraine à l'aune de ces régimes d'historicité. Il n'en reste pas moins que cette notion est intéressante dans la mesure où elle permet d'appréhender la façon dont les sociétés questionnent chacune différemment les catégories du temps.

Commenter  J’apprécie          100
L'histoire à venir

Le festival « L’Histoire à venir » a lieu, depuis deux ans maintenant, à Toulouse. On retrouve dans cet ouvrage, une conférence donnée par les historiens Patrick Boucheron (qu’on ne présente plus) et François Hartog en mai 2017. Que dire sinon que c’est magnifiquement écrit, pleins de réflexions intéressantes, une mine d’or pour qui souhaite réfléchir sur l’histoire. Je me suis surpris à préférer l’intervention de François Hartog qui est très claire et didactique. On soulève ainsi de nombreuses questions et autant de recherches à mener pour le lecteur qui souhaiterait, par la suite, prolonger sa soif de découverte. Seul petit bémol, le prix de l’ouvrage 13 euro pour seulement 78 pages mais les éditions Anacharsis ont bien fait les choses avec une jolie couverture. Le prix à payer pour deux interventions passionnantes.
Lien : https://thedude524.com/2018/..
Commenter  J’apprécie          30
Confrontations avec l’histoire

François Hartog nous propose un livre intéressant présentant des concepts clefs pour questionner l'histoire et la manière dont on la raconte, et mettre en lumière les différents courants philosophiques qui sous-tendent son étude.



On ne coupe pas à un exposé sur Hérodote, soulignant l'affrontement entre historiens "primitifs" et prophètes ; ainsi qu'à une minutieuse dissection du concept de mémoire où s'opposent évocation et représentation d'un évènement passé. L'auteur pose même la question de la compatibilité entre histoire et mémoire, cette dernière prenant toujours plus de place, et s'arrogeant notamment le droit de "faire de l'espace public le lieu des mémoires".



Les Confrontations avec l'histoire se poursuivent sur une série de chapitres portant chacun sur un concept : simultanéité du non-simultané (où l'on retrouve le récit de l'Odyssée ainsi que le récit de la découverte du Nouveau monde), l'accélération du temps, concept théorisé par Hartmut Rosa et lié ici à l'apocalypse, la notion bien connue d'altérité (Grec contre Barbare, Païen contre Chrétien, Ancien contre moderne) et son évolution jusqu'à notre société moderne qui consacre désormais le "droit à la différence" ; François Hartog évoque également la transmission, et pour finir l'anthropologie historique, une espèce de chaos indescriptible dans lequel viennent se mélanger histoire, anthropologie, psychologie et sociologie.



Enfin, la dernière partie de l'ouvrage est consacrée à ce que l'auteur appelle des outsiders, ou des sommités qui ont contribué à l'histoire bien qu'ils ne soient pas historiens : philosophes, anthropologues, écrivains s'y côtoient dans un joyeux mélange théorique et conceptuel.



Une lecture peu aisée donc, très universitaire, qui demande toute la concentration du lecteur et une bonne dose d'intérêt pour non seulement L Histoire mais aussi la pratique de la science humaine de l'histoire et de la manière dont elle fut et dont elle est traitée aujourd'hui par les chercheurs. J'ai été soulagée en arrivant au terme de la lecture, mais je me réserve tout de même une probable relecture future qui sera peut-être plus limpide.
Commenter  J’apprécie          20
A la rencontre de Chronos

Une autre autobiographie de chercheur spécialiste de la Grèce antique ?! et en plus c'est un hasard, ce livre m'est tombé entre les mains à la bibliothèque. Je connaissais cependant la théorie des régimes d'historicité de François Hartog et du "présentisme", ici brillamment résumée en quelques pages, dans un mode qui la replace dans la déroulé de la carrière de l'historien. Sa rencontre avec Chronos passe par des lieux emblématiques (les îles avec Claude Lévi-Strauss, Berlin après la chute du Mur) mais aussi des événements (la prise de Troie, la Révolution Française), et des lectures, car il se définit comme "historien-lecteur".



François Hartog nous propose d'envisager le rapport au temps comme clef de compréhension des sociétés humaines : "l'ancien régime" est celui où l'avenir est "éclairé par les lumières du passé", alors qu'après la Révolution, le nouveau monde à inventer est guidé par l'urgence d'aboutir à un futur désiré.

Le présentisme caractérise une époque où aucune de ces deux forces ne nous motive plus, où face à l'accélération des technologies, nous sommes bloqués dans un présent qui ne vit que pour lui-même, ne croit plus au futur et consomme le passé en tant que patrimoine pour se sentir présent à lui-même.

Les dernières pages sont consacrées à confronter ce constat avec les grandes crises du XXIe siècle et l'entrée dans l'anthropocène, un âge où l'humain a un impact géologique sur la planète. "Quand l'urgence est partout, se forme une sorte de nœud temporel où tout s'entremêle. Ce n'est plus un impensé du temps, mais un temps qu'on ne sait pas comment penser : impensable."



Une pensée lumineuse, couchée en quelques pages, avec une puissance et une facilité géniales. Si vous avez 1h devant vous, lisez-le !
Commenter  J’apprécie          10
L'histoire à venir

Deux conférences données par d'éminents historiens français, lors d'une conférence en mai 2017 à Toulouse, exposant clairement ce que l'étude du passé peut apporter à l'ère perturbatrice dans laquelle nous nous trouvons. L'essai de Patrick Boucheron en particulier creuse profondément : il montre que l'histoire n'est jamais enregistrée, mais toujours ouverte à de nouvelles questions, de nouveaux angles, et en ce sens inépuisable. Il plaide pour une étude de l'histoire du point de vue d'un passé comme succession de possibilités. François Hartog en profite pour proposer une nouvelle fois sa théorie du présentisme omniprésent, source de tous les maux. Son plaidoyer pour rouvrir le passé, afin de rendre possible un nouvel avenir, est séduisant, mais malheureusement il n’élabore pas.
Commenter  J’apprécie          10
Régimes d'historicité : Présentisme et expériences ..

Cet ouvrage traite de la perception du temps au cours de l'histoire et des relations entres passé, présent et futur. Le livre est complexe, très abstrait, obscur parfois. Seuls le dernier chapitre et la conclusion sont plus facilement accessible. Cette lecture n'est pas grand public mais bien pour les spécialistes de l'histoire et de la sociologie.
Commenter  J’apprécie          10
La nation, la religion, l'avenir

Voici un petit livre sur lequel il faut se précipiter en ce moment précis où la France semble courir vers ce que Renan appelait dès le XIXe siècle «l'américanisme».
Lien : http://www.lefigaro.fr/livre..
Commenter  J’apprécie          00
La nation, la religion, l'avenir

Invitation à la redécouverte d’un brillant esprit, écrivain et historien né il y a près de deux siècles, dont les écrits résonnent aujourd’hui.
Lien : http://www.la-croix.com/Cult..
Commenter  J’apprécie          00
Croire en l'histoire

Un essai passionnant qui s'interroge sur les différents rôles attribués à l'Histoire comme sur le brouillage entre passé, présent et futur, que l'ère contemporaine cultive.
Lien : http://www.telerama.fr/criti..
Commenter  J’apprécie          00


Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de François Hartog (80)Voir plus

Quiz Voir plus

Littérature espagnole contemporaine

1) Parmi ces Prix Nobel, lequel n'est pas espagnol? Juán Ramón Jiménez José Saramago Vicente Aleixandre Jacinto Benavente

Juán Ramón JiménezJ
josé saramago
Vicente Aleixandre
Jacinto Benavente

12 questions
4 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}