" Nous n’arrêtons pas de parler politique. Mais seulement de celle des pays étrangers " - me confia un jour une Chinoise en riant.
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De fait, les propos du journaliste chinois le plus connu en Occident, Hu Xijin, ancien directeur du Global Times, ne sont pas suivis à la loupe parce qu'ils sont particulièrement intelligents, mais parce qu'ils sont supposés refléter ce que pense le pouvoir. Les journalistes chinois ne représentent que des porte-parole.
Sa réalité est infiniment plus complexe que la phrase de Xi Jinping ( « le Parti dirige tout ») le laisse supposer. Non, le Parti Communiste ne dirige pas tout dans l’Empire du Milieu. Non la Chine n’est pas une vaste prison à ciel ouvert. Non, la censure n’a pas lobotisé les chinois. Si le pays doit faire face à d’immenses problèmes aussi bien politiques, économiques, démographiques qu’environnementaux, les progrès qu’il réalise depuis une trentaine d’années sont stupéfiants et sautent aux yeux, y compris au fin fond des campagnes.
On est des opprimés comme vous, par les pays occidentaux.
Si les pékinois, témoins des manifestations ou des déplacements de troupe dans la capitale, sont plus ou moins au courant, ceux qui habitent en province confient souvent, avec réticence, qu’ils croient savoir que des manifestants ont tué des militaires !
Il ne se contente pas de régenter le présent et de préparer l’avenir, il entend également maîtriser le passé.
La politique zéro Covid a renforcé la méfiance des chinois envers les étrangers. (…) Durant ces trois ans (mars 2020 à janvier 2023), l’immense majorité des chinois ont été convaincus que le virus avait été amené par les étrangers. Résultat : entre les enfants d’expatriés non admis dans un parc de jeux, ou des chinois qui mettent précipitamment leur masque à la vue d’un étranger, la plupart d’entre nous avons été témoins de comportement de crainte, de méfiance ou d’hostilité à notre égard
Mais s'il y a bien une leçon que j'ai retenue de ces cinq ans, c'est qu'il faut se garder de tout lecture univoque de la Chine. Cette inquiétude que l'on ressent dans les conversations n'empêche pas le pays d'avancer. Certes, la croissance ralentit, le chômage des jeunes augmente et l'hypothèse d'une guerre autour de Taïwan inquiète. Mais la grande majorité des Chinois ont le sentiment -fondé - de vivre dans un pays qui s'est énormément modernisé, qui offre toujours de belles opportunités de carrière de fournit des services de base (éducation, santé, transports, mais aussi loisirs et espaces verts) qui n'ont plus rien à envier aux pays développés. (p. 279)