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Citations de Ibn Hazm (32)


Quand on s'éprend d'un seul regard, qu'on précipite l'attachement amoureux sur le hasard d'un éclair, c'est le signe d'une inconstance qui promet un oubli rapide, et qui témoigne de légèreté et d'ennui. Car en toutes choses, les plus rapides à croître sont plus promptes à périr, les plus lentes à venir plus lentes à s'épuiser.
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Ibn Hazm
Vous pouvez bien brûler mes livres; vous ne pourrez brûler leur contenu, bien à l'abri au fond de mon coeur.
Là où m'entraîne ma monture, il me suit, faisant halte là où j'ai fait halte, et avec moi, dans ma tombe, il sera enterré.
Cessez donc de brûler parchemins et papiers, et professez plutôt votre science afin que tous voient qui est le véritable savant.
Sinon, commencez par reprendre le chemin des bibliothèques, car combien de voiles vous faudra-t-il écarter, avant d'accéder à ce que vous désirez pour l'amour de Dieu.
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191) Sache donc que dompter son âme est plus difficile que de dompter un lion, car une fois le lion emprisonné dans une des cages que les souverains leur préparent, on est à l’abri de sa nuisance. Mais l’âme, même emprisonnée, on ne peut être à l’abri de son mal. (p. 110)
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Le premier degré de la fidélité, c'est d'être fidèle à qui vous est fidèle. C'est un devoir, une loi qui s'impose à l'amant comme à l'aimé. Ceux qui la violent ont la vilenie dans le sang. Il ne leur reste ni disposition, ni aspiration au bien.
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Rien n'est pire chez les humains que la délation, c'est-à-dire la calomnie. C'est un trait qui dénonce une constitution fétide, une branche pourrie, un naturel putride, une éducation prostituée. Le calomniateur est nécessairement un menteur, puisque la calomnie est une branche du mensonge, une de ses espèces, et je n'ai jamais une seule fois aimé un menteur. Je pardonne, chez un ami, toutes les tares, mêmes graves, et je le remets entre les mains de son Créateur Tout-Puissant. Je jette le voile sur ce qui en apparaît dans son caractère, sauf quand je sais qu'il ment. Ce mensonge, pour moi, ternit tous ses mérites, lui retire toutes ses supériorités, et chasse tout ce qui vaut en lui. Je n'en espère plus, par principe, aucun bien. De toute faute, en effet, on peut se repentir, et sur tout vice jeter le voile et le rachat. Pas sur le mensonge. Il n'y a pas moyen de revenir sur un mensonge, ni de le cacher, par définition. Je n'ai jamais connu, et je ne sais pas qu'on ait jamais connu, un menteur qui ait abandonné le mensonge sans jamais y retomber. Je n'ai jamais rompu le premier avec une de mes relations, sauf quand il m'apparaissait qu'elle mentait. À partir de là, c'est moi qui vise à l'éviter, qui m'attache à m'en défaire. C'est une faille secrète que je n'ai jamais vu chez quiconque n'était pas aussi soupçonné de méchanceté dans l'âme, ou montré du doigt pour quelque difformité monstrueuse de ses fibres intimes. Que Dieu nous préserve de Son abandon.
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J'ai foulé le tapis des califes, j'ai siégé au conseil des rois. Je n'y ai jamais rien constaté qui approche la crainte révérencieuse que l'amant montre à son aimé. J'ai vu les vainqueurs tenir à leur merci la vie d'un chef ennemi, j'ai vu gouverner les ministres, j'ai partagé l'heureuse outrecuidance de ceux qui dirigent l'État ; mais je n'ai jamais observé d'exultation plus intense, de joie plus rayonnante que celle d'un amant certain du cœur de son aimé, assuré du penchant qu'on a pour lui et de l'affection qu'on lui porte. J'étais là quand on faisait paraître en présence des souverains des gens qui avaient à se disculper. J'ai eu en face de moi des hommes accusés d'avoir partagé les pires crimes avec des rebelles et des tyrans. Mais je n'ai rien vu de plus humble qu'un amant interdit devant celui qu'il aime avec égarement, quand il est irrité, aveuglé par la colère et submergé par l'injustice.

J'ai éprouvé les deux situations. Dans la première, j'étais plus tranchant que le fer, plus acéré que l'épée, incapable de m'abaisser, dédaigneux de me soumettre. Dans la seconde, j'étais plus humble qu'une vieille harde, plus souple que le coton. Je me hâtais de m'humilier dans l'espoir d'un profit, et je ne manquais pas une occasion de marquer ma soumission pour y trouver davantage. Ma langue se déliait, je sondais l'obscure subtilité des mots pour m'expliquer plus clairement. Je multipliais les tons et les genres. J'allais en un mot à la rencontre de toyt ce qui pouvait me faire agréer.

Les accusations injustes sont une des faces de l'éloignement, Elles viennent au début et à la fin de l'amour ; au début, comme signe d'un amour vrai ; à la fin comme signe d'une tiédeur qui annonce déjà les lointains de l'oubli.
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L'union est un des visages de l'amour. C'est une fortune illustre et une halte ombreuse, un cercle bienheureux et une aurore joyeuse ; c'est la vie soudain neuve, l'éclat du quotidien, c'est le bonheur sans fin et une grâce immense, que Dieu nous donne. Si ce bas monde n'était une demeure d'emprunt, d'épreuves et d'incertitude, et le Paradis seul havre des récompenses que le haïssable me menace plus, je dirais que l'union avec l'aimé connaît cette même pureté sans trouble, cette jubilation sans mélange et sans tristesse, cet achèvement du désir et ces espérances comblées. J'ai fait l'expérience de tous les plaisirs, j'ai saisi toutes les fortunes, où qu'elles mènent. Ni les faveurs du pouvoir, ni les avantages de l'argent, ni même être quelque chose quand on était rien, ni le retour après l'absence, ni le salut après la peur et l'exil loin du puits de son clan, rien n'égale dans une âme l'union amoureuse, surtout quand elle est si longtemps empêchée que le feu prend, que la flamme monte et que l'espérance s'embrase. Une prairie qui s'illumine après la pluie, l'aurore d'une fleur quand les nuages nomades lèvent leur camp nocturne dans la douceur du matin, le murmure des eaux qui percent les mille couleurs des parterres, la grâce des blanches citadelles qui assiègent de verts jardins ; non, rien ne dépasse l'union avec un aimé dont la nature satisfait, dont le caractère plaît, dont les traits rivalisent avec la beauté. L'éloquence renonce à l'imiter, la clarté du discours y tourne court.
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Ibn Hazm
L'amour n'est point condamné par la religion, ni prohibé par la loi car les cœurs sont dans la main d'Allah puissant et grand.
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16) Celui qui aspire au succès dans l’au-delà ressemble aux anges. Celui qui aspire au mal ressemble aux diables. Celui qui aspire à la renommée et à la domination ressemble aux fauves. Celui qui aspire aux passions ressemble aux bestiaux. Celui qui aspire à l’argent pour la richesse et non pas pour la dépenser dans les aumônes obligatoires et les actes surérogatoires louables est plus ignoble et plus vil pour qu’il n’ait ne serait-ce qu’une part de ressemblance à l’animal, car il ressemble plutôt aux plantes qui se trouvent dans des grottes difficiles d’accès dont aucun animal ne profite, si ce n’est très peu d’oiseaux avant que le soleil et le vent ne sèchent ce qui en reste. Ainsi, sera dissipé l’argent qui n’est pas dépensé dans les actes recommandables.

Le sage ne se réjouit pas d’une qualité dans laquelle le surpasse un fauve, une bête ou un objet matériel, mais se réjouit plutôt d’une vertu par laquelle Allâh (exalté soit-Il) l’a distingué des fauves, des bêtes et des objets matériels, distinction à laquelle s’associent les anges.

Celui qui se réjouit de son courage qu’il n’utilise pas dans ce qu’Allâh (exalté soit-Il) lui a prescrit, qu’il sache donc que le tigre est plus audacieux que lui et que le lion, le loup et l’éléphant sont bien plus courageux que lui.

Celui qui se réjouit de sa force physique, qu’il sache donc que le mulet, le taureau et l’éléphant sont plus robustes que lui.

Celui qui se réjouit de pouvoir porter de lourdes charges, qu’il sache donc que l’âne supporte les charges mieux que lui.

Celui qui se réjouit de courir vite, qu’il sache donc que le chien et le lièvre courent plus vite que lui.

Celui qui se réjouit de sa belle voix, qu’il sache donc que de nombreux oiseaux ont une plus belle voix que la sienne, et que le son des flûtes est plus doux et plus mélodieux que sa voix.

Alors, quelle fierté et quelle joie tire-t-il de ces choses si tous ces animaux le surpassent dans ces qualités ?

En revanche, celui qui voit son discernement se renforcer, sa science s’élargir et ses actes s’améliorer, qu’il s’en réjouisse donc. Car il n’est surpassé en cela que par les anges et les hommes vertueux. (pp. 21-22)
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Sache que la fidélité incombe à l'amant, et qu'il y a plus d'obligation que l'aimé. Il y est tenu par sa condition : c'est lui qui prend l'initiative de l'attachement, lui qui s'expose à nouer le pacte, lui qui vise à raffermir la tendresse, lui qui appelle de ses vœux un commerce vrai. Il marche au premier rang dans la quête du pur amour, il se donne le premier pour but le plaisir qu'on gagne à l'amitié ; le premier il se passe le mors d'amour le plus serré qu'il peut, et la bride la plus courte. À quoi rimerait tout cela s'il se refusait à y ajouter la touche finale ? Qui lui dit de susciter la tendresse, s'il néglige d'y mettre le sceau de la fidélité à celui qu'il désire ?

L'aimé, lui, n'est qu'un pôle qui attire, une direction du désir, qui choisit de l'agréer ou de le négliger. S'il l'accepte, il comble l'espérance. S'il se refuse, il n'est pas juste de l'en blâmer. Se proposer l'union, insister pour l'obtenir, travailler à accorder les caractères, à étendre la complicité au temps de l'absence comme à celui de la présence, de fidélité dans tout cela, point. Car c'est sa propre fortune qu'on cherche, c'est à sa propre joie qu'on s'efforce, c'est pour soi qu'on ramasse ce bois. L'amour appelle sur ses traces, et pousse en avant qu'on le veuille ou non. En vérité, on ne peut se louer d'être fidèle quand on est incapable de ne pas l'être.
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68) Aie confiance dans le religieux – fut-il d’une religion autre que la tienne – et ne fais pas confiance à l’insouciant même s’il laisse apparaître qu’il est de ta religion. (p. 38)
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Un coup d’œil en coin, une seule fois, veut dire « non » ; un battement de paupières, « j’accepte » ; prolonger le regard, « je souffre », « je suis malheureux ». Fermer les yeux un instant se lit « joie ». Montrer du doigt ses paupières indique la menace ; tourner la pupille dans une direction, puis la ramener rapidement met en garde contre ce qu’on aura ainsi désigné ; deux prunelles voilées au coin de l’œil interrogent ; ramener rapidement la pupille vers le coin intérieur témoigne d’une opposition ; tonner des deux prunelles, du milieu de l’œil veut dire « interdiction absolue », etc.
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Le second degré de la fidélité, c'est de la maintenir à qui vous trahit. C'est le fait des amants, et non des aimés, dont ce n'est pas la manière, et que rien n'engage. Il y faut, en outre, une résolution que seuls peuvent soutenir les plus durs à la peine, les cœurs larges, les âmes libres, les vastes générosités, les citadelles de l'intelligence, les natures nobles, les intentions sans taches. Qui oppose la trahison à la trahison ne mérite pas d'être blâmé ; mais celui qui y répond comme nous le disions le surpasse de la tête et des épaules. La fin de cette fidélité, c'est de renoncer à rendre injure pour injure, d'écarter d'une main ferme tout ce qui ressemble à la guerre, en paroles ou en actes, de contenir autant qu'on peut ces violences qui déracinent l'amitié, de continuer à mettre son espoir dans l'affection et d'aspirer à en être un peu payé de retour, tant qu'un petit nuage promet une goutte de réconciliation, ou un éclair au loin, ou un grondement à peine audible… Même quand le désespoir tombe, quand la colère affermit son règne, il y a de la douceur à épargner celui qui l'a trahi, à protéger celui qui fait mal, à sauver celui qui blesse, quand le souvenir de ce qui fut oppose encore sa tendresse au ressentiment pour ce qui est. Respecter la protection qu'on a offert est une loi intangible pour l'homme intelligent. Vivre sa nostalgie, ne pas oublier ce qui n'est plus, ce dont le vrai temps est consommé, est un des signes les plus sûrs d'une vraie fidélité. C'est un très beau trait, qu'il convient de cultiver dans toutes les nuances du commerce des hommes, en toute circonstance.
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L’un des aspects de l’amour est l’union des amants. C’est une haute jouissance, un stade exquis, un degré élevé. Que dis-je ! C’est comme une vie renouvelée, une joie durable et une immense grâce venant de Dieu.

Si ce bas-monde n’était autre chose qu’une demeure passagère, pleine d’épreuves et d’ennuis, et si le Paradis n’était le Séjour de la récompense et de l’abri contre les adversités, nous dirions que l’union avec l’aimé, c’est le bonheur sans mélange, la joie que rien ne vient troubler et qui ne s’accompagne point de tristesse, l’accomplissement des souhaits et le comble des espoirs.

J’ai expérimenté les jouissances de toutes sortes, savouré les plaisirs les plus divers : l’intimité des princes, la fortune qu’on acquiert, la possession après la privation, le retour après une longue absence, la sécurité après le danger et l’expatriation loin de la famille, mais rien de tout cela n’agit si profondément sur l’âme que l’union avec l’objet aimé. Cela est d’autant plus vrai quand celui-ci s’est longtemps refusé à l’amant, si bien que la passion brûle en lui, que la flemme de son désir s’allume et que le feu de ses espoirs s’embrase.

La poussée des feuilles après la pluie, l’éclat des fleurs après la disparition des nuages nocturnes à la saison printanière, le murmure des eaux parmi les fleurs de toute sorte, l’élégance des blancs alcazars entourés de jardins verdoyants, ne sont pas plus beau que l’union avec un aimé de naturel agréable, de caractère louable, et dont les qualités s’harmonisent dans la beauté. En vérité, les langues les plus éloquentes sont impuissantes à décrire cette joie et à en exprimer les délices. (p. 106)
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J’ai foulé le tapis des califes, j’ai siégé au conseil des rois. Je n’y ai jamais rien constaté qui approche la crainte révérencieuse que l’amant montre à son aimé. J’ai vu les vainqueurs tenir à leur merci la vie d’un chef ennemi, j’ai vu gouverner les ministres, j’ai partagé l’heureuse outrecuidance de ceux qui dirigent l’État ; mais je n’ai jamais observé d’exultation plus intense, de joie plus rayonnante que celle d’un amant certain du cœur de son aimé, assuré du penchant qu’on a pour lui et de l’affection qu’on lui porte. J’étais là quand on faisait paraître en présence des souverains des gens qui avaient à se disculper. J’ai eu en face de moi des hommes accusés d’avoir partagé les pires crimes avec des rebelles et des tyrans. Mais je n’ai rien vu de plus humble qu’un amant interdit devant celui qu’il aime avec égarement, quand il est irrité, aveuglé par la colère et submergé par l’injustice.

J’ai éprouvé les deux situations. Dans la première, j’étais plus tranchant que le fer, plus acéré que l’épée, incapable de m’abaisser, dédaigneux de me soumettre. Dans la seconde, j’étais plus humble qu’une vieille harde, plus souple que le coton. Je me hâtais de m’humilier dans l’espoir d’un profit, et je ne manquais pas une occasion de marquer ma soumission pour y trouver avantage. Ma langue se déliait, je sondais l’obscure subtilité des mots pour expliquer plus clairement. Je multipliais les tons et les genres. J’allais en un mot à la rencontre de tout ce qui pouvait me faire agréer.

Les accusations injustes sont une des faces de l’éloignement. Elles viennent au début et à la fin de l’amour ; au début, comme signe d’un amour vrai ; à la fin, comme signe d’une tiédeur qui annonce déjà les lointains de l’oubli.
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La plupart du temps, pour communiquer avec ceux qu’ils aiment, les amants leur envoient un obscur, qu’on ne remarque pas, et dont on ne prendra pas la précaution de se garder à cause de sa jeunesse, de son costume râpé, de la saleté de son aspect ; ou au contraire un haut personnage que son âge avancé ou sa piété démontrée mettent au-dessus de tout soupçon ; et plus souvent encore une femme, surtout de ces femmes à bâtons ferrés, en habits rouges doublés, qui passent leur temps à louer Dieu. Je me rappelle qu’à Cordoue, on avait mis en garde les femmes cachées aux regards, où qu’elles les voient, contre ces gens qu’on leur avait décrits. On envoie aussi celles que leur métier autorise à approcher seul à seul :les marchandes ambulantes, les revendeuses, les coiffeuses, les pleureuses, les chanteuses, les diseuses de bonne aventure, celles qui enseignent aux esclaves, les servantes, les fileuses, les tisseuses et tout ce qui y ressemble ; ou enfin les proches de celui qu’il faut atteindre, dont on évite ainsi de déchirer l’écran de la parenté. Que d’interdits sans remède n’a-t-on pas ainsi levés, que de difficultés facilitées, que de lointains approchés, que d’opiniâtres résistances rendues à volonté. Que de désastres ont aussi frappé les voiles vierges les rideaux épais, les réduits gardés, les barrières scellées, par la faute de ces maîtres du genre.
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Il est donc vrai que l’amour est une séduction spirituelle, une fusion d’âmes. Mais on dira : s’il en était ainsi, l’amour serait toujours également partagé entre deux êtres, puisque ces deux parcelles d’âmes seraient également jointes, et que leur sort ne serait plus qu’un. C’est juste. Mais l’âme de celui qui n’aime pas son amant est cernée de toutes parts de circonstances contraires qui l’aveuglent, d’un voile de conditions terrestres qui l’enferment. Elle ne sent pas cette autre parcelle dont l’union lui était destinée avant sa halte en ce monde. Si elle se libérait, toutes deux s’uniraient, et s’aimeraient à égalité. L’âme de l’amant est libre, elle. Elle sait la place qu’elle partage avec l’autre ; elle vise à son voisinage, y tend, la recherche, désire l’aborder, l’attirer si elle pouvait, comme l’aimant attire le fer.
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167) Il est un devoir de prendre comme exemple le Prophète (paix sur lui) dans l’exhortation des gens de l’ignorance, des désobéissances et des vilénies. Celui qui exhorte sèchement et brutalement les gens se trompe, s’éloigne de la voie du Prophète et incite l’exhorté, dans la plupart des cas, à persister dans son obstination et son irritation, d’où l’exaspération de ce rude prédicateur. Par une telle exhortation, celui-ci fera beaucoup plus de mal que de bien.

Celui qui exhorte avec gentillesse, douceur et en souriant comme s’il donnait un simple avis ou informait sur quelqu’un d’autre que l’exhorté de ce dont est blâmable l’exhorté, aura suivi la meilleure méthode et l’exhortation la plus efficace.

Si celle-ci n’est pas acceptée, qu’il provoque donc un sentiment de honte chez l’exhorté dans un lieu isolé. Si cela ne réussit pas non plus, qu’il le fasse alors en présence des personnes pour lesquelles l’exhorté a un grand respect.

Tel est en effet le bon comportement auquel nous invite Allâh (exalté soit-Il) dans Son ordre consistant de parler gentiment aux gens. En outre, le Prophète n’exhortait pas les gens de manière directe, mais il disait : « qu’ont-ils, les gens, à faire ceci ? ». Par ailleurs, il a – prière et salut sur lui – loué la douceur, ordonné de faciliter les choses et condamné le fait d’effaroucher les gens. Il choisissait aussi les moments propices pour exhorter les gens de peur qu’ils s’en lassent. Allâh a dit :

« Mais si tu étais rude, au cœur dur, ils se seraient enfuis de ton entourage… » (Al-Imrân : 159)

Cependant, on doit faire preuve de dureté et de sévérité quand il est question d’un des châtiments d’Allâh où il n’y a point de douceur qui tienne notamment pour celui qui est capable de le mettre à exécution. (pp. 92-93)
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Après les insinuations du langage, quand on est déjà accepté et complice, viennent les indications du regard. Ils tiennent, dans le code de l'amour, un rôle admirable, et réalisant d'étonnantes prouesses. On peut s'y rompre ou s'y unir, y promettre ou s'y menacer, y saisir au collet ou y apaiser, ordonner ou interdire, y conclure des engagements, y alerter contre l'œil hostile, y éclater de rire ou y pleurer de tristesse, poser des questions et y répondre, y défendre et y accorder. Chacune de ces significations correspond à une disposition du regard qu'aucune définition ne circonscrit, aucune image, aucune description, ou très mal. Il faut voir pour savoir. De ce code, je ne donnerai donc ici qu'une idée sommaire.

Un coup d'œil en coin, une seule fois, veut dire "non" ; un battement de paupière, "j'accepte" ; prolonger le regard, "je souffre", "je suis malheureux". Fermer les yeux un instant se lit "joie". Montrer du doigt ses paupières indique la menace ; tourner la pupille dans une direction, puis la ramener rapidement met en garde contre ce qu'on aura ainsi désigné ; deux prunelles voilées au coin de l'œil interrogent ; ramener la pupille vers le coin inférieur témoigne d'une opposition ; tonner des deux prunelles, du milieu de l'œil veut dire "interdiction absolue", etc. Mais pour bien comprendre, il faut que l'œil soit présent.

Sache que l'œil supplée aux messages, qu'il fait saisir les intentions. Les quatre autres sens sont les portes du cœur et les percées de l'âme. L'œil en est le guide le plus sûr pour le chemin le plus long, celui dont le travail mérite toute confiance. C'est l'éclaireur sincère de l'âme, celui qui la conduit droit au but, son miroir poli où se reflètent les réalités, où elle saisit les essences et comprend le sensible. On a dit : "Aucun enseignement ne remplace ce qu'on voit."
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C'est cette conjonction qui explique en tout cas le charme étrange du Tawq, ce livre d'amour fils d'une guerre civile. Pourquoi lui avoir choisi le thème de l'amour en effet si, comme je le laisse entendre, les malheurs de la Communauté l'ont inspiré ? Ibn Hazm répond dès les premiers chapitres. L'amour y est d'abord défini comme une fitna, une sédition, une guerre civile. Aimer, c'est choisir, contre tous les autres, un seul qu'on en distingue, et qui vous en distingue par l'amour même qu'on lui porte ; c'est donner, quand il est en cause, un sens singulier aux gestes, aux signes et aux mots que les hommes ont ordinaire en commun. L'amant est un étranger au pays du partage, un barbare travesti dans la cité, toujours sourdement hostile à ses usages et à ses lois.
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