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Critiques de Ilan Pappé (11)
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Le nettoyage ethnique de la Palestine

Ce livre est formidable : très bien écrit, très documenté. L'auteur tord le cou à une idée reçue (assez répandue malheureusement) selon laquelle les Palestiniens auraient en 1948 quitté de leur plein gré la Palestine. Il est démontré dans cet ouvrage, que cette idée est fausse et que israéliens se sont livrés à une véritable entreprise d'éradication des Palestiniens par la menace, l'intimidation et la violence. ce qu'ils continuent à faire encore de nos jours!! l'Etat d'Israël continue ses expropriations de terres, maison appartenant à des Palestiniens dont PERSONNE en Europe et aux USA ne prends la défense.
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Le nettoyage ethnique de la Palestine

Une précision tout d’abord, j’ai gardé les termes et la graphie, dont les majuscules, utilisés par l’auteur, quel qu’en soit mes appréciations.



l « Les sources palestiniennes montrent clairement que, plusieurs mois avant l’entrée des troupes arabes en Palestine et à une époque où les Britanniques étaient encore responsables du maintien de l’ordre dans le pays – donc avant le 15 mai – les forces juives avaient déjà réussi à expulser par la violence près de 250 000 palestiniens. »



l La création de l’Etat d’Israël est indélébilement lié à la destruction de la Palestine rurale et urbaine « inévitable produit de la volonté idéologique du sionisme d’avoir une population exclusivement juive en Palestine et une réaction à la situation sur le terrain après la décision du cabinet britannique de mettre fin au Mandat.»



l « Une fois la décision prise, il a fallu six mois pour l’appliquer. Quand tout a été fini, près de 800 000 personnes – plus de la moitié de la population indigène de Palestine – avaient été déracinées, 531 villages détruits, 11 quartiers vidés de leurs habitants. Le plan décidé le 10 mars 1948 et surtout mis en œuvre systématique au cours des mois suivants ont été un cas clair et net de ce ”nettoyage ethnique” que le droit international actuel considère comme un crime contre l’humanité. »



l « Pour les Palestiniens, outre le traumatisme, la frustration la plus profonde a été de voir constamment depuis 1948, le comportement criminel de ces hommes si radicalement nié et la souffrance palestinienne si totalement ignorée.»



Ces extraits de la préface de l’auteur, m’ont semblé nécessaire, d’autant que les mots ”nettoyage ethnique” ne prendront leur sens institutionnel que des années après les faits ici présentés. Il s’agit de faire entendre, d’inscrire au delà des souffrances, la nécessaire conclusion politique de Ilan Pappe: « Autrement dit, je veux plaider pour une refondation de la recherche historique et du débat sur 1948 : le paradigme du nettoyage ethnique doit remplacer celui de la guerre. »



Et l’auteur d’ajouter qu’il désigne les dirigeants politiques qui ont conçu le nettoyage ethnique et les généraux qui l’ont exécutés, sans oublier les terroriste de l’Irgoun et du groupe Stern, « pour humaniser les persécuteurs autant que les victimes. » De même, Ilan Pappe souligne que « le mot Nakba a été adopté, pour des raisons compréhensibles, afin de tenter de contrer le poids moral de la Shoah, l’Holocauste des Juifs. Mais, en se taisant sur l’acteur, il a peut-être contribué aussi à la persistance de la négation par le monde du nettoyage ethnique de la Palestine, en 1948 et depuis. »



L’usage d’un terme pour expliciter des évènements antérieurs à sa création ou validation internationale, reste cependant problématique. L’auteur reviendra dans le premier chapitre de son livre sur le concept de nettoyage ethnique et de sa publicité lors des guerres dans l’ex-Yougoslavie. Mais, au delà de l’anachronisme sémantique, reste une idée forte, déjà exprimée dans son précédent ouvrage (Ilan PAPPE : Une terre pour deux peuples, Histoire de la Palestine moderne, Fayard 2004) « pour qu’une initiative de paix, quelle qu’elle soit, puisse réussir, il faut refermer le chapitre de l’expropriation. »



Je partage totalement le caractère incontournable du dire, de la clarification sémantique, du jugement politique et donc des nécessaires réparations des réalités de 1948, sans préjuger, bien évidemment, de leurs modalités concrètes. La partition de la Palestine fut et reste un déni de droit en regard des attributions de l’ONU. Mais, il convient aussi de caractériser les faits, les actions et les crimes. Agir pour rendre un territoire ”ethniquement” homogène est bien un crime contre l’humanité, sans oublier les crimes de guerres que sont les massacres, les tueries ou les viols.



Ces précisions données, je voudrais sans détailler les différents chapitres de ce livre, ni la longue liste des expulsions, tueries, éradications, présenter quelques points, pour inciter à la réflexion.



Ilan PAPPE reconsidère l’idée d’un état exclusivement juif et souligne que « ce n’était pas seulement dans sa structure sociopolitique que cet Etat devait être exclusivement juif ; il devait l’être aussi dans sa composition ethnique. »



« Les Juifs, qui possédaient moins de 6% de l’ensemble de la superficie foncière de la Palestine et ne constituaient pas plus du tiers de la population, recevaient plus de la moitié du territoire ». Le plan d’expulsion des palestiniens n’est pas né de la confrontation armée, il avait commencé avant la partition et la proclamation de l’Etat d’Israël. D’ailleurs, la direction sioniste déclarait deux mois avant la fin du mandat britannique « qu’elle allait chercher à conquérir le pays et à en expulser la population indigène par la force : c’est le plan Daleth. »



Contrairement à une légende, la survie du nouvel Etat n’a jamais été sérieusement menacée par les ”armées arabes”. Grâce aux livraisons de la Tchécoslovaquie et de l’URSS, l’armée israélienne fut rapidement équipée. Le rôle du parti communiste israélien ne fut pas négligeable dans les transactions. Il convient aussi de se souvenir de cela.



Plus généralement il faut prendre en compte la nature particulière du ”mouvement ouvrier juif” y compris dans ses franges d’extrême gauche, la Histadrout fut plus une instance para-étatique du sionisme qu’un centrale syndicale ouvrière.



S’il ne faut pas occulter une illusoire composante de libération nationale (ce sujet mériterait à lui seul un débat, hors objet du livre), le désir sioniste inclue la volonté de désarabiser la Palestine. Les expulsions ne viennent pas du déroulement aveugle des événements ou des ”contraintes” de la guerre mais d’un choix idéologique. Cette logique touchera plus tard aussi les composantes orientales de la population israélienne.



Non seulement des massacres ont été organisés, mais l’amplification des événements fut assumée pour fragiliser les populations palestiniennes. « A l’époque, la direction juive a annoncé fièrement un nombre élevé de victimes afin de faire de Deir Yassin l’épicentre de la catastrophe – et d’avertir tous les Palestiniens qu’un sort semblable les attendait s’ils refusaient d’abandonner leurs maisons et de s’enfuir. » Aujourd’hui, les historiens chiffrent le nombre des massacrés à 93 personnes.



« C’est pure fabrication de prétendre qu’il y a eu des tentatives juives de persuader les Palestiniens de rester, comme l’affirment encore aujourd’hui le manuels scolaires israéliens. » Par ailleurs, il n’est pas possible de réduire l’expulsion aux seules personnes. Les villages furent détruits, rasés physiquement et éradiqués de la géographie israélienne mais pas des souvenirs des victimes.« La géographie humaine de l’ensemble de la Palestine a été transformée de force. Le caractère arabe des villes a été effacé par la destruction de zones étendues, comme le vaste parc de Jaffa et des centres communautaires à Jérusalem. Ce qui motivait cette transformation, c’est le désir d’effacer l’histoire et la culture d’une nation et de la remplacer par une version fabriquée de l’histoire d’une autre, dont toute trace de la population indigène était élidée. »



Nettoyage pour les uns, occupation pour les autres « Israël a violé des droits fondamentaux comme la liberté de circulation, d’expression et d’égalité devant la loi » : zones interdites, permis spéciaux, barrages routiers, camps de travail, couvre-feux, bouclages de territoire, évacuations de maisons, confiscations de terres et installations de colons. Je rappelle que les terres devenues terres d’état sont interdites à la vente aux « non-juifs ».



L’auteur souligne l’incapacité des israéliens à penser leurs responsabilités dans l’expulsion de 1948 et dans le statut de réfugiés de millions de palestiniens aujourd’hui. Il y a un véritable « mémoricide de la Nakba ».



Si la lecture de ce livre ne permet pas de trouver les réponses politiques émancipatrices, il souligne la nécessaire reconnaissance, de ce qu’il convient aujourd’hui d’appeler, un nettoyage ethnique.



Je voudrais enfin rendre hommage au parcours d’Ilan Pappé, ancien nouvel historien israélien. Il a su dépasser le point de vue critique israélien, rejoindre la mémoire des palestiniens, faire des victimes le centre d’une relecture de l’histoire et aujourd’hui dénoncer de la nature falsificatrice du sionisme. « Enfin cet ouvrage n’est expressément dédicacé à personne, mais je l’ai écrit d’abord et avant tout pour les Palestiniens victime du nettoyage ethnique de 1948. Beaucoup sont des amis et camarades, beaucoup d’autres sont pour moi des anonymes, mais, depuis que j’ai eu connaissance de la Nakba, je n’ai cessé de porter avec moi leur souffrance, leur perte et leurs espoirs. Ce n’est que quand ils reviendront que je sentirai enfin clos, comme nous le souhaitons tous, le chapitre de la catastrophe, ce qui nous permettra à tous de vivre dans la paix et l’harmonie en Palestine. »
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Palestine

Frank Barat, activiste, producteur et écrivain a réuni en 2014 deux penseurs pro palestiniens, Noam Chomsky et Ilan Pappé pour échanger autour de la cause palestinienne et du conflit avec Israël.

Dans la tourmente de l'actualité sur la bande de Gaza et de ses répercussions sur notre sol, j'avais besoin d'y voir plus clair car les médias donnent souvent une vision parcellaire de la situation sans aller à l'origine historique du conflit.



Autant le dire tout net, ce texte est orienté : « l'histoire de la Palestine n'a rien de très original: des colons européens s'établissent en terre étrangère puis en expulsent la population autochtone ou lui infligent un génocide ». Le régime israélien est comparé souvent à l'apartheid de l'Afrique du Sud. Pour Noam Chomsky, «  le projet d'État juif est une aberration. Une fois l'État institué, tout citoyen qui y vit est un citoyen de l'État. Tout citoyen français, quel qu'il soit, est un Français. Par conséquent, quiconque vit en Israël devrait être un citoyen israélien, et non un juif. C'est pourquoi la notion d'État juif est une aberration totale. Elle n'a pas d'analogue dans le monde moderne. Les raisons pour lesquelles on devrait la rejeter sautent aux yeux ».



Lire ce texte dix ans après son écriture montre à quel point non seulement rien n'a changé mais que la situation a empiré. Processus de paix, accords d'Oslo, Intifadas, roquettes du Hamas sur Israël, riposte sanglante de Tsahal, un même scénario se reproduit comme d'inéluctables secousses sismiques.



Quelques idées que je retiens :



- le sionisme est un colonialisme

- toute critique d'Israël, même modérée, est perçue par l'État comme relevant de l'antisémitisme.

- les auteurs ne se font aucune illusion quant à l'adoption éventuelle d'une stratégie palestinienne cohérente et unifiée

- de même qu'ils ne croient pas à un revirement de la politique d'Israël car transformer la société juive israélienne de l'intérieur nécessiterait plusieurs générations.

- Il faut donc que la pacification de la zone vienne de la communauté internationale.

- Et plus particulièrement de la politique étrangère des États-Unis.

- S'il respectait le droit international, Israël ne verrait pas sa sécurité menacée; celle-ci serait même fort probablement renforcée.



Les passages sur les solutions à un état ou à deux états m'ont un peu perdu car trop techniques.



Il n'en reste pas moins que ce fut une lecture très édifiante qui tranche assez radicalement avec la manière dont les chaînes d'info présentent ce conflit. La vie d'un enfant est précieuse, qu'il soit israélien ou palestinien.

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Le nettoyage ethnique de la Palestine

Je ne reviendrai pas sur le contenu du livre

le contributeur précédent en expose fort bien les thèses, en les approuvant, ce qui n'est pas mon cas

L'ouvrage est un tissu de contre-vérités assez ahurissant, qui vise à assimiler les fondateurs d' Israël aux Nazis en leur prêtant des comportements identiques.Cela se passe de commentaire, sinon pour dire que l'auteur pousse loin l'imagination au service de la haine de soi. Si le sujet se prêtait à la plaisanterie, je placerais ici une citation d'Audiard qui revient souvent sous ma plume. Au sujet de ces gens qui osent tout, vous savez....

Mais, plus sérieusement, on est amené à s'interroger sur les motifs réels de cet exercice d'affabulation

.Il est bien certain que les Palestiniens ont subi des injustices, cela n'autorise pas à réécrire l'histoire à des fins partisanes.

En 1948, comme dans toutes les guerres, les responsabilités étaient partagées et il y a eu des crimes de guerre des deux côtés.

Et il est certain aussi que l'état d'Israël, quelles que soient les réserves qu'on puisse faire sur l'opportunité de sa création à l'époque, a, 75 ans après, le droit d'exister et de se défendre

Pour en revenir à Pappe, il ne manque pas d'historiens Israéliens très critiques à l'égard du sionisme, mais aucun ne partage les thèses de l'auteur, dont il convient de préciser qu'il est un soutien du Hamas

Et ses positions en évoquent d'autres, que certains défendent en France à l'heure actuelle.

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Le nettoyage ethnique de la Palestine

Ce livre d’Ilan Pappe est un livre polémique qui revisite l’histoire fondatrice de l’état d’Israël, la guerre de libération de 1948. Pour l’auteur, l’image de David combattant Goliath relève de la mythologie et ne correspond pas du tout à la réalité. Par contre, le nettoyage ethnique d’une grande partie des palestiniens est bel et bien une réalité qui a donné lieu à la déportation d’environ 800000 palestiniens hors des frontières d’Israël (un chiffre que j’ai retrouvé à pas mal d’endroits) et à des massacres et une éradication totale de centaine de villages palestiniens avec, on s’en doute, son lot d’exactions sur la population essentiellement rurale.

Le livre est un travail d’historien qui multiplie les références au Journal de Ben Gourion, à différentes mémoires d’officiers israéliens de l’époque, et aux archives déclassifiées de la FDI (Forces de défense d’Israël, devenue Tsahal), en tous cas une petite partie car la majorité reste secret d’Etat inaccessible.

La polémique qu’a provoquée la parution en 2006 cet ouvrage a été féroce, surtout dans le monde universitaire et parmi les collègues d’Ilan Pappe de l’université d’Haifa. L'auteur a quitté son pays en 2007. Pour autant, aucun procès pour diffamation ou autre n’a été intenté, ce qui me parait un indice très fort de l’authenticité des deux problèmes centraux que soulève cet ouvrage :

- la volonté en 1948 de construire un état peuplé UNIQUEMENT de juifs, et ce pour des raisons d’une part idéologiques et d’autre part pratiques, le nombre de palestiniens comparé au nombre de juifs n’étant pas trop favorable pour un état juif.

- la négation dans l’histoire officielle israélienne de cette épuration ethnique et des massacres associés au profit d’un renversement des rôles (Israël s’est vaillamment défendu contre l’ensemble du monde arabe, David contre Goliath).

Le cas du village de Tantoura (l’affaire Katz) peut être considéré comme symptomatique de ce négationnisme : en 2000, une thèse d’un étudiant (Katz) basée sur les interviews de vétérants de la brigade Alexandroni et de témoins palestiniens directs conclut à un massacre organisé. La thèse provoque un tollé et les pressions sur l’étudiant sont telles qu’il doit faire marche arrière et modifier ses conclusions. En 2022, un documentaire relance le débat avec de nouvelles interviews où certains vétérants admettent plus ou moins les faits et remets au gout du jour la thèse du massacre délibéré. Le massacre de Tantoura, affabulation vraiment ?

L’actualité depuis l’attaque du Hamas du 7 octobre a rendu ce livre très difficile à trouver. Fayard a refusé de le re-publier, les exemplaires d’occasion sur le net atteignent des prix exorbitants et j’ai même eu les pires difficultés à me le procurer dans le réseau des bibliothèques parisiennes.

J’ai quand même réussi à mettre la main sur un exemplaire pdf que je vous invite à lire pour vous faire votre propre idée https://u.pcloud.link/publink/show?code=XZSE4X0ZeEA7tegw77SaOoyTB0bQoyqQmEuV

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Le champ du possible. Dialogue sur le confl..

Les mêmes questions sont posées à l’historien israélien Ilan Pappé puis au linguiste américain Noam Chomsky au sujet du conflit israélo-palestinien. Leurs réponses se complètent plutôt qu’elles ne divergent. Dans un second entretien Noam Chomsky développe ses points de vue.

(...)

Noam Chomsky, comme toujours, avance des faits et des chiffres peu connus, puisés dans différentes archives. Il est par exemple édifiant de découvrir que parmi les 14 points rajoutés par Israël avant d’accepter la Feuille de route, figure l’exigence que les Palestiniens assurent un calme complet, créent une culture de paix, démantèlent le Hamas, tandis qu’Israël ne se verrait pas pour autant « imposer l’arrêt des violences et autres provocations envers les Palestiniens ».

Cet ouvrage propose des réflexions et des analyses extrêmement précises et dessine les quelques issues possibles.


Lien : http://bibliothequefahrenhei..
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Palestine

Dans son avant-propos, Frank Barat, souligne, entre autres, le devenir militant par les livres, la transformation par des lectures… Il revient sur ce passé, volontairement mis en silence dans « le processus de paix », la Nakba, l’exode forcé – le nettoyage ethnique – des deux tiers de la population palestinienne. Il souligne aussi l’essor de la campagne Boycott, désinvestissement et sanctions (BDS)…



Une discussion divisée en trois parties : « le passé, où nous concentrerions notre attention sur le sionisme en tant que phénomène historique, le présent, où nous nous questionnerions en particulier sur la pertinence d’appliquer le modèle de l’apartheid à Israël et sur l’efficacité de la campagne BDS en tant qu’importante stratégie de solidarité avec le peuple palestinien, et l’avenir, où nous mettrions en balance la solution à deux Etats et celle à un Etat »



Je souligne particulièrement le premier texte d’Ilan Pappé « Débats d’hier et d’aujourd’hui », sa critique de l’Etat d’Israël qui n’en reste pas aux politiques menées mais aussi à « l’idéologie qui les sous-tend et la nature même du régime ». L’auteur parle de colonialisme et de dépossession, du renouveau historiographique, de 1948 et de « décolonisation, changement de régime et solution à un Etat ». Il critique l’« orthodoxie pacifiste » et soutien la campagne BDS s’inspirant du mouvement anti-apartheid…



Il insiste, entre autres, sur l’histoire de la colonisation de peuplement, le caractère ouvertement raciste de l’Etat d’Israël, la source idéologique de l’assujettissement des populations palestiniennes à savoir le sionisme et préconise « la décolonisation de l’ensemble du territoire israélo-palestinien et la substitution de l’actuel régime israélien par la démocratie pour tous ».



Si cette approche me semble en effet la plus enrichissante politiquement, je me garderai cependant de trancher entre les « solutions » à un ou deux Etats. Seules les mobilisations concrètes, les modifications des rapports de force, la désagrégation de ce qui forge l’unité (derrière les divisions sociales) de la population « juive » israélienne, les choix politiques autonomes des populations palestiniennes… détermineront les évolutions et les ruptures, les calendriers des possibles et la forme que pourront prendre les organisations institutionnelles… En tout état de cause, seules des solutions démocratiques pour toutes et tous – Etat de toutes et tous les citoyen-ne-s, respect des droits et égalité de traitement des minorités (ce qui pourrait nécessiter des politiques de positive action), séparation du politique et du religieux, parité homme-femme, etc. – inséparables de la construction de l’égalité sociale et de politiques de réparation permettront de faire du futur un possible commun.



Ilan Pappé parle de « l’orthodoxie pacifiste », la campagne BDS, le droit au retour des réfugié-e-s palestinien-ne-s. Il analyse le sionisme sous l’angle de la colonisation de peuplement. Il conviendrait de rappeler le refus de droits collectifs pour les populations juives en Europe notamment (et les propositions des austro-marxistes ou du BUND) sur lequel a pu se construire le sionisme. L’auteur parle au présent de régime d’apartheid, du régime foncier et des procédés juridiques à l’intérieur de l’Etat israélien, des politiques juridiques, économiques et culturelles qui tendent à « devenir les mêmes des deux cotés de la ligne verte », des discriminations fondées sur l’« ethnicité », du nettoyage ethnique et des réparations, de « désarabisation » des populations juives originaires des pays « arabo-musulmans », du confinement des palestinien-ne-s et de leurs villages étranglés, de l’émergence d’une nouvelle « élite politique en Palestine », de déshumanisation et de corruption morale, « La déshumanisation es le fruit amer de la corruption morale induite par la militarisation de la société israélienne ».



Je souligne la qualité des analyses sur les effets du « processus de paix », l’histoire de la partition et de destruction de la Palestine. (Je ne partage cependant pas l’utilisation de la notion de « politiques génocidaires »), Israël comme Etat voyou, la question du droit au retour, « La Nakba s’est déroulée à l’endroit où se trouve aujourd’hui Israël, et non en Cisjordanie ou dans la bande de Gaza ». Sans oublier « l’absence de tout discours socialiste dans le débat sur la Palestine »



Les dialogues entre Noam Chomsky, Ilan Pappé, les questions interventions de Frank Barat permettent d’aborder, sous des angles différents et quelques fois divergents, les liens entre passé et avenir, « Oublier le passé implique d’oublier l’avenir », l’idéologie sioniste, les effets « mentaux » de la colonisation de peuplement, la construction de l’Etat comme « processus de violence extrême », l’absence de nationalité israélienne, le sionisme (antisémite) chrétien, les lois très restrictives sur l’immigration aux Etats-unis dans les années 20, « la préséance à l’expansion sur la sécurité », les différences avec l’apartheid en Afrique du sud, les questions des classes sociales, le soutien des Etats-Unis à l’Etat d’Israël et ses conséquences, la fragmentation de la société palestinienne, la campagne BDS, le boycott culturel, l’accaparement de l’eau, le Printemps arabe et le rôle des organisations syndicales, les 45 ans d’occupation gommant la distinction entre « ici » et « là », le principe d’égalité des droits de la personne et des droits civils, la société israélienne « très endoctrinée », le Hamas et l’OLP, l’absence d’économie productive en Palestine, etc.



Des textes individuels des deux auteurs regroupés dans une partie « Reflexion » complètent les thématiques traitées, en particulier, sur les opérations militaires à Gaza, la situation en Cisjordannie, les crimes de guerre…
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Le champ du possible. Dialogue sur le confl..

Les victimes palestiniennes...euh, correction officielle : les TERRORISTES...



Il s'agit d'un recueil d'entretiens dont l'un des mérites est d'offrir un jeu de questions/réponses vif, et récent (2007/2008).

C'est un ouvrage assez court (48 pages), une invite à aller plus loin.

Si l'on est habitué aux thèses et justifications officielles, généralement pourvues par l'ensemble des médias, il n'est peut-être pas toujours aisé de comprendre ou d'admettre les idées développées par Chomsky lorsqu'il parle de manipulation, de désinformation, ou lorsqu'il propose la promotion efficace de la démocratie aux USA, comme une solution possible à ce conflit?!



Les réponses (parfois divergentes) données dans ces entrevues méritent probablement un approfondissement en lisant certains livres de ces 2 intellectuels (auxquels on peut rajouter Norman Finkelstein, évoqué sur quelques pages) et de certains autres...Je conseille notamment "la fabrication du consentement" (pour en avoir plus sur la propagande dans les médias) et "le triangle fatidique" (pour mieux connaître le conflit israélo/américano-palestinien) de Chomsky.



D'après Chomsky, derrière la façade de quelques déclarations de bonnes intentions (qui ne sont que des leurres), le projet d'Israël est maintenu depuis plus d'une trentaine d'années (depuis 1971): continuer son travail de sape (avec le soutien des USA), d'annexion, d'émiettement du territoire palestinien, jusqu'à rendre impossible la réalisation d'un état Palestinien (comment un tas de confettis dispersés pourrait-il être viable et gouvernable?).



Toute entreprise, dont ce livre, qui contribue à l'éclaircissement de la situation, à une information "réelle" sur les faits et motivations du conflit israélo-palestinien, est louable. En effet, l'un des leviers les plus retors utilisé par Israël et par les Etats-Unis CONTRE l'opinion publique mondiale, est justement la propagande. Ils utilisent la désinformation pour empêcher une prise de conscience et une réaction de réprobation, par le "peuple du monde", à l'endroit de leurs exactions. le cynisme, l'hypocrisie, la loi du plus fort règnent là-bas, loin de nos yeux. L'information qui nous parvient est filtrée, sélectionnée; c'est bien l'un des principaux problèmes !! Israël réussit, tant bien que mal, à garder "l'image d'un pays luttant pour la paix et soumis aux attaques terroristes des palestiniens qui veulent sa destruction."

Noam Chomsky (qui n'en appelle pas à la violence et n'excuse pas celle de certains Palestiniens!) s'étonne que globalement personne ne condamne jamais Israël pour agression ou n'appelle à des actions de représailles à son égard. ONU inexistante, UE molle du genou...
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Palestine

Le sionisme est une atrocité inachevée contre le peuple palestinien



La mise à disposition d’un ensemble de textes écrits par Ilan Pappé, Noam Chomsky et de divers dialogues permet de revenir sur la situation en Palestine. Il est fort possible que certain-e-s, qui ne connaissent l’historien israélien et l’intellectuel étasunien, soient frappé-e-s par la violence de leurs propos. Cependant, ceux-ci sont à la hauteur de la situation et des violations continuelles du droit international, des dénis, des crimes et des pratiques racistes institutionnalisées de l’État d’Israël.



Dans le premier texte, Ilan Papé décrypte « les dix mythes d’Israël », cette base de la mythologie d’Israël et du sionisme. Il commence par le mythe de la « terre sans peuple » pour un « peuple sans terre » pour finir sur celui d’une « solution proche ».



Le second texte est consacré aux « champs de mort à Gaza » de 2004 à 2009



Comme dans ces précédents livres, Ilan Pappé relie les politiques actuelles des dirigeants sionistes à celles du passé et, en particulier, à ce qu’il convient, en regard du vocabulaire actuel, de nommer l’épuration ethnique commencée en 1848. L’auteur montre aussi le caractère non-démocratique de l’État d’Israël, ses politiques de discriminations, cet « apartheid » construit pour isoler les populations palestiniennes (Voir le récent livre de Michel Bôle-Richard : Israël le nouvel apartheid, note de lecture).

Noam Chomsky revient lui aussi sur Gaza, le terrorisme massif contre les populations gazaouies civiles, sur les aides étasuniennes et les silences de soutien, en Europe, aux politiques illégales de l’État d’Israël, les rhétoriques racistes. L’auteur cite Uri Avnery « ce qui aura marqué la conscience du monde, c’est l’image d’un Israël couvert de sang, prêt à commettre à chaque instant des crimes de guerre et à ne se soumettre à aucune contrainte moral. Ceci aura de graves conséquences pour notre futur, pour notre place dans le monde, pour notre espoir en la paix et notre sérénité. Finalement, cette guerre est aussi un crime contre-nous mêmes, un crime contre l’État d’Israël ».



Noam Chomsky et Ilan Papé partagent leurs analyses sur la « Ghettoïsation de la Palestine » et présentent, entre autres, leurs positions sur les solutions à un ou deux États. Ils soutiennent les campagnes de Boycott Désinvestissement Sanctions (BDS). (Voir le livre d’Omar Barghouti : Boycott Désinvestissement Sanctions. BDS contre l’apartheid et l’occupation de la Palestine).

Ils discutent aussi de la notion d’apartheid, des actes de piraterie de l’État d’Israël (Voir Thomas Sommer-Houdeville : La flottille. Solidarité internationale et piraterie d’état au large de Gaza).

Ilan Pappé présente l’histoire troublée du « projet pour un État unique », puis « L’État du déni : la Nakba dans l’histoire israélienne et aujourd’hui ». Sur ce sujet il montre que les politiques colonialistes des sionistes furent et sont similaires aux autres politiques coloniales (expulsion, massacre, destruction, viols, etc.). Le sionisme est inséparable de la volonté de « judaiciser » l’ensemble des territoires, par ailleurs à un périmètre non défini. L’auteur montre aussi dans un autre texte pourquoi Israël n’est pas une démocratie. Le titre de la note est extrait de cette partie. Il insiste particulièrement sur la ré-instauration des termes « colonialisme », « anticolonialisme », « nettoyage ethniques », etc.



D’autres textes et dialogues complètent ce livre nécessaire pour contrer les propagandes et les dénis de l’État d’Israël et d’organisations comme le CRIF en France, souvent dans le silence des organisations se réclamant de l’émancipation.
Lien : http://entreleslignesentrele..
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Une terre pour deux peuples : Histoire de l..

Il ne s’agit pas en quelques lignes de résumer un livre riche de 350 pages mais de souligner que loin des mythes et des simplifications politiques, l’ouvrage de Ilan PAPPE (L’auteur fait partie de ceux que l’on nomme souvent les nouveaux historiens israéliens) présente, non une combinaison des histoires vues par les palestiniens et les israéliens mais une unique histoire, celle d’une seule terre devenue Israël et Palestine.



A l’encontre des historiens qui confondent l’histoire de la terre et celle de leur nationalisme respectif, l’auteur nous parle des changements de la société « subalterne » et non seulement de celles des élites. Ne faisant pas dériver la construction du présent du passé, exposé par d’autres, trop souvent sous un jour romantique, il peut, sans manichéisme évoquer les violences, les destructions, les coercitions, les outils de pouvoirs utilisés par les israéliens sur le palestiniens, par les israéliens sur d’autres israéliens, par des palestinien sur d’autres palestiniens.



Il ne place pas le conflit au centre de son analyse mais l’inscrit dans les réalités des hommes et des femmes de Palestine et d’Israël.



Pour se faire, l’historien assume « une approche subjective, il prends souvent – mais pas toujours – le parti des vaincus contre les vainqueurs».



Il s’agit d’une histoire moderne, l’exposé commence par une étude sur la fin du XIXème siècle, présentant la société palestinienne à la fin de la période ottomane pour se terminer dans les réalités de l’après OSLO.



Le chapitre IV, central tant dans la géographie du livre que dans le sens de l’argumentation, s’intitule : « Entre Nakba et indépendance : La guerre de 1948 » Ilan PAPPE y décrit, sur la bases des archives et des témoignages, entre autres la purification ethnique.



Ces faits, toujours niés par beaucoup d’israéliens, sont d’une importance capitale car aux yeux de l’historien « pour qu’une initiative de paix, quelle qu’elle soit, puisse réussir, il faut refermer le chapitre de l’expropriation. »



Ce travail historique renvoie aussi à la sédimentation rapide d’une nation (Je préfère utiliser le terme nation à celle de peuple, cette notion me semble s’inscrire plus directement dans la temporalité historique israélienne), phénomène pas toujours compris par certains palestiniens, ni par certaines organisations combinant le soutien à la lutte des palestiniens à la négation du fait israélien (ce qui ne vaux, bien sûr, pas approbation des politiques menées).



Ce livre remarquable tant par son érudition que par la méthodologie utilisée est d’une lecture facile. Il prend parti et fait sens sans gommer les aspérités, sans simplification des réalités historiques et politiques.
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Le nettoyage ethnique de la Palestine

Ilan Pappé, historien israélien renommé et critique fervent de la politique israélienne vis-à-vis des Palestiniens, présente dans "Le Nettoyage ethnique de la Palestine" une analyse détaillée et rigoureuse de la Nakba, terme arabe désignant la catastrophe subie par les Palestiniens en 1948 lors de la création de l'État d'Israël. Pappé, connu pour son approche critique de l'histoire israélienne et son plaidoyer pour une réévaluation des récits historiques dominants, s'appuie sur une vaste gamme de sources, incluant des archives israéliennes, des témoignages de première main et des recherches académiques approfondies, pour déconstruire le mythe d'une guerre d'indépendance et exposer les actes délibérés de nettoyage ethnique.

Le livre se distingue par son refus de masquer la brutalité de ces événements : expulsions massives, massacres et destruction de villages palestiniens sont documentés avec une précision qui ne laisse place ni à l'ambiguïté ni à la minimisation des faits. Pappé illustre comment ces actions étaient enracinées dans une stratégie préconçue visant à assurer une majorité juive dans le nouvel État, révélant un aspect souvent omis ou atténué dans les narrations traditionnelles.

Dans le contexte actuel de 2024, les observations de Pappé résonnent avec une acuité particulière. La colonisation israélienne continue de s'étendre en Cisjordanie et à Gaza, malgré les condamnations internationales et les appels à une solution équitable au conflit israélo-palestinien. Le processus de colonisation et l'oppression systématique des Palestiniens, que Pappé avait minutieusement détaillés dans le cadre historique de 1948, semblent se perpétuer, soulignant un cycle de violence et d'exclusion qui n'a pas été rompu.

L'importance du travail de Pappé réside dans sa capacité à mettre en lumière les racines profondes de la crise actuelle, rappelant que les événements d'aujourd'hui sont directement liés aux politiques et aux actions entreprises lors de la fondation d'Israël. Par son examen exhaustif et sans concession, Pappé force le lecteur à reconnaître que la paix durable ne peut être atteinte sans une compréhension honnête et une reconnaissance des injustices passées.

Sur le plan littéraire, l'ouvrage se distingue par sa narration accessible et engageante, qui, tout en étant ancrée dans une recherche académique rigoureuse, ne perd jamais de vue l'humanité des individus affectés par les événements historiques. Pappé réussit à rendre vivantes les statistiques et les faits historiques en les reliant aux histoires personnelles de ceux qui ont vécu la Nakba, créant ainsi une œuvre à la fois informative et émotionnellement puissante.

En définitive, "Le Nettoyage ethnique de la Palestine" est une œuvre capitale qui non seulement enrichit notre compréhension du passé mais interpelle également sur les conditions nécessaires à une paix durable au Moyen-Orient. Ilan Pappé offre une contribution essentielle au débat historique, politique et moral entourant la création d'Israël et le sort des Palestiniens. Son travail incite à une réflexion critique sur la manière dont les récits historiques sont construits et mobilisés dans les conflits contemporains, rappelant que la reconnaissance des injustices passées est un préalable indispensable à la réconciliation et à la coexistence pacifique.
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