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Citations de Jamal Mahjoub (195)


La police, dont la présence était le plus souvent limitée, ne se donnait pas beaucoup de mal pour découvrir les coupables.
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À côté de ceux pour qui l’ange était une présence bienveillante, un témoignage de la protection divine, d’autres, tout aussi nombreux, y voyaient un mauvais présage. Pourquoi s’était-il manifesté au moment où débutait cette série de meurtres ? Existait-il un lien entre les deux événements ?
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Chaque fois que l’ange était repéré quelque part, la nouvelle se répandait en quelques minutes et des chrétiens s’attroupaient, mains jointes, chapelets aux lèvres, indifférents aux lazzis, aux obscénités et aux légumes pourris qu’on leur jetait à la face. Les télévisions, à leur tour, s’intéressèrent à l’affaire et, bientôt, dans les talk-shows comme dans les J.T., on parla de l’Ange d’Imbaba.
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La vision de l’ange était perçue comme un prodige, la preuve que Dieu ne les avait pas abandonnés. Quelques adeptes, formant une petite secte assidue, se retrouvaient tous les soirs pour une veillée aux chandelles, agenouillés devant l’église, les mains jointes en un geste de prière, implorant un miracle. Pendant leur attente, ils guettaient du regard le moindre mouvement au-dessus de leurs têtes. Naturellement, les témoignages variaient. Selon les uns, la silhouette était menue ; d’autres la disaient immense. Certains affirmaient qu’elle était raide comme une statue, d’autres juraient qu’elle avait des ailes scintillantes, d’or ou d’argent. Elle irradiait comme si elle était en feu.

« C’est un signe, murmurait-on. Les choses vont bientôt changer. »

« Le bien prévaudra. Nos souffrances prendront fin. »

« Nous serons délivrés de cette épreuve. »
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Ce n’était pas un bon moment pour les phénomènes sortant de l’ordinaire. Les gens avaient les nerfs à vif, s’emportaient facilement. L’apparition de cet « ange » coïncidait avec le meurtre de plusieurs garçons du quartier. Qui donc pouvait tuer un enfant, se demandait-on, et où était la police quand on avait besoin d’elle ? Trois cadavres avaient été découverts jusqu’à présent, et ce nombre menaçait chaque jour d’augmenter.
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La mystérieuse silhouette se montrait rarement plus d’une fois au même endroit. Elle se matérialisait sur le toit d’un immeuble ou sur la balustrade d’un balcon enténébré, sans qu’on puisse expliquer d’où elle sortait ni où elle se volatilisait ensuite. « Malaika ! » cria une femme. Un ange ! Elle tomba à genoux, au grand amusement des badauds rassemblés sur les trottoirs de la rue encombrée. Des hommes, goguenards, s’esclaffèrent. Mais un autre passant pointa l’index et, bientôt, une véritable foule se mit à scruter les ombres impénétrables des murs enchevêtrés, essayant de distinguer la forme en équilibre là-haut, entre ciel et terre.
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Adolescent, il avait dirigé une petite bande de voyous. Ils dévalisaient les marchands et s’introduisaient par effraction dans les entrepôts. Si on voulait faire tabasser – ou même assassiner – un rival, ils s’en occupaient pour un bon prix. Hanafi, disait-on, ne s’était jamais fait prendre parce qu’il s’assurait la loyauté du peuple. Il redistribuait son argent mal acquis aux plus nécessiteux, en échange de quoi les habitants de ces quartiers le considéraient comme un héros et le défendaient jusqu’à la mort.
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Il existait une version plus sombre de ce conte de fées, dans laquelle Hanafi faisait figure de vulgaire bultagi, de truand, mais cette légende elle-même avait été déformée, enjolivée à force d’être répétée. Il volait aux riches pour donner aux pauvres, disait-on.
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D’après les journaux, la vie du personnage lui-même s’apparentait à un conte de fées.
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Le gorille le dévisagea, impassible. Soit il n’avait pas compris, soit il n’aimait pas qu’on lui dicte sa conduite. Ses sourcils broussailleux se froncèrent de colère et il parut en proie à un profond dilemme métaphysique. Son expression était tellement alarmante que Makana se brûla les doigts avec l’allumette qu’il venait de frotter. À voir ses poings étroitement serrés, le malabar était manifestement du genre à recourir aux mots uniquement quand la violence était exclue. Avant que l’un ou l’autre ait pu bouger ou ouvrir la bouche, un nouveau personnage fit son entrée.
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Makana se sentait encore étranger au Caire. Le fleuve qu’il avait sous les yeux créait un lien ténu avec Khartoum, loin en amont, cette ville qu’il considérait comme son home bien qu’il l’eût fuie sept ans auparavant et qu’il n’eût pas le projet d’y retourner de sitôt. En l’occurrence, il n’avait pas eu le choix. Soit il partait, soit il mourait.
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Makana était un solitaire. Ses rares amis appartenaient à la communauté de ses compatriotes en exil : écrivains, peintres, musiciens, hommes et femmes contraints de quitter leur pays pour échapper à un régime répressif. Il avait beau ne pas les voir souvent, il attachait du prix à leur compagnie – et eux, en retour, semblaient apprécier sa présence sporadique
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Peu de gens seraient capables de dormir à poings fermés, nuit après nuit, à bord d’un aussi frêle esquif, sans savoir s’ils verront le jour suivant, s’ils se réveilleront en train de nager, ou encore (mieux ou pire ?) s’ils se noieront tout bonnement dans leur sommeil.
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Doté d’un tempérament plutôt optimiste, Makana trouvait que c’était une bonne façon de démarrer la journée que de découvrir le matin, en se réveillant, qu’il était toujours à flot. L’un des petits plaisirs de la vie sur une awama. Il la considérait comme un bateau, même si ce n’en était pas vraiment un – juste une fragile construction en contreplaqué clouée n’importe comment sur un ponton flottant rongé par la rouille. Néanmoins, c’était une pensée agréable. Un réconfort de se dire que, s’il le souhaitait, il pourrait un jour larguer les amarres et prendre la mer, naviguer autour du monde. La vérité, c’était que son habitation coulerait probablement comme une pierre. Ce n’était jamais qu’un radeau muni de cloisons pour s’isoler du monde extérieur. Un rêve. Une vue de l’esprit. Mais, se répétait-il souvent, ce sont les petites choses qui nous permettent d’avancer dans la vie.
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La boutique ne devait pas être si grande, mais il sembla à Liz que la distance entre la porte et le coin où il siégeait, en attente, s’étirait devant elle à l’infini, comme si, à chacun de ses pas, elle rapetissait tandis que la pièce s’allongeait. Dans la pénombre, derrière lui, elle perçut un vague mouvement. Deux voyous, la figure patibulaire, traînaient près d’un comptoir sur la gauche. Liz, qui connaissait ce genre d’individus, ne fut pas particulièrement effrayée. Elle entrevit au passage son reflet dans un miroir et put constater qu’elle avait une mine affreuse : cheveux raides et ternes, visage en sueur, encrassé par la saleté des rues qui, tous les soirs, noircissait les serviettes de sa chambre d’hôtel. Ses yeux, cernés de rouge, saillaient comme des œufs. Il lui fit signe de s’asseoir et elle obéit, Alice collée contre elle. Le visage repoussant du brocanteur se plissa en un sourire qui la glaça.
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Et puis, la veille dans l’après-midi, un homme s’était dirigé droit sur Liz. Sans hésitation. L’avait-il suivie ? « Je vais vous aider. » Il l’avait conduite jusqu’à une porte étroite donnant sur un intérieur ténébreux. Des traits de lumière filtraient par des fentes en hauteur dans les murs, allumant des reflets sur les cuivres polis et les miroirs ternis. L’échoppe était déserte, à part un homme assis dans le fond. Ses traits épais, cabossés, lui rappelèrent une grenouille-taureau qu’elle avait disséquée en cours de biologie, des années auparavant. Ses yeux, semblables à des rivets noirs, disparaissaient presque dans le visage bouffi. Ses cheveux, lissés en arrière, étaient enduits d’huile parfumée et son corps dégageait une senteur aromatique. Il faisait penser à un antique roi oriental. Sur la table, devant lui, trônait une pile de mandarines sur un énorme plateau rond en bronze évoquant le disque de Rê, le dieu soleil, dans sa course vers l’ouest à travers le ciel.
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Lorsque, de retour en Angleterre, Liz se découvrit enceinte, elle prit de bonnes résolutions pour la première fois depuis des années. Pas d’alcool, pas d’héroïne. Une vie saine. Elle avait vu suffisamment d’horreurs – des enfants nés sans doigts – pour refuser de courir le moindre risque. Cela ne dura pas, mais c’était déjà un début, la preuve qu’elle pouvait y parvenir avec de la volonté. Alice était la meilleure chose qui lui fût arrivée. Malgré les difficultés de s’occuper d’un petit enfant – les colères, les demandes incessantes –, Liz voulait s’améliorer, devenir une bonne mère. Mais ça, c’était impossible à Londres. Trop de tentations, trop de portes ouvertes. Alors l’idée lui était venue, tel un rai de lumière trouant l’obscurité. Le Caire. Une nouvelle existence. Pourquoi pas ? « Si tu as besoin de quoi que ce soit, Liz, viens me trouver », lui avait-il dit.
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Il s’était montré si charmant, si sûr de lui. Pendant trois semaines, ils avaient été inséparables. Ç’aurait dû être la fin de l’histoire, mais non. Liz avait été imprudente. Ne l’avait-elle pas toujours été ? Sa vie n’était qu’une longue suite d’impulsions irréfléchies. Il l’avait emmenée un peu partout dans la ville, elle s’en souvenait, et les portes s’ouvraient devant eux comme s’ils étaient importants, comme si elle était quelqu’un. Ils entraient dans un café ou dans un restaurant bondés – et, aussitôt, une table se libérait pour eux. Sur leur passage, les gens inclinaient la tête avec respect. En plus, il n’avait aucune difficulté à se procurer de la drogue : à l’époque, c’était un élément à prendre en considération. Leur aventure remontait à cinq ans et n’était pas destinée à durer. Le cours de sa vie n’aurait pas dû en être changé – et pourtant, ce fut le cas.
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Depuis son arrivée au Caire, rien ne s’était passé conformément à ses prévisions. Dès sa descente d’avion, elle avait été écrasée par la chaleur oppressante, ses vêtements lui collant instantanément à la peau. C’était la fin septembre, bon sang, et on se serait cru en juillet sous le soleil d’Espagne ! Sur le moment, pourtant, l’idée lui avait paru judicieuse : fuir Londres, ses mauvaises habitudes, ses éternels complices. Une occasion de se ressourcer, de commencer une nouvelle vie. Mais que savait-elle de lui, en réalité ? Lorsqu’elle avait rencontré le futur père d’Alice, ce n’était qu’un de ces jeunes hommes désœuvrés qui traînaient autour des boutiques de bijoux fantaisie du souk. Lui et son ami les avaient suivies, Sylvia et elle, en les apostrophant. Elles avaient d’abord trouvé leur manège irritant, puis c’était devenu un jeu, un défi. Sylvia était toujours prête à relever un défi. Et où était-elle, à présent ? Morte. Emportée en ambulance, dans la clameur d’une sirène bleutée, jusque dans l’impasse d’un couloir froid, impersonnel, du service des urgences. Liz ne voulait pas terminer ainsi.
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Le Caire, 1981
La vive lumière l’atteignit en plein dans les yeux et elle fut un instant aveuglée, comme frappée par une antique malédiction. Liz Markham se cabra, stoppée net par la marée humaine qui lui faisait face. Le cœur affolé, elle se mit à courir. Son enfant était là, quelque part, égarée dans ce tourbillon.

Elle trébucha. Dans son dos, un homme lança une remarque qu’elle ne comprit pas. Des rires fusèrent. Tous les regards semblaient rivés sur elle, la cerner de tous côtés. Elle accéléra l’allure pour leur échapper. Convaincue d’être suivie, elle s’éloigna de l’hôtel, écartant impatiemment la foule de touristes et de jeunes serveurs de thé, jouant des coudes, renversant des tables, envoyant valser verres et plateaux, indifférente aux cris et aux imprécations. Tout ce qui lui importait, c’était Alice.
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