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Citations de Jean Berthier (III) (72)


Ô que nous pourrions haïr les livres pour la part de vie réelle dont ils nous ont détournés ! Sans eux, nous nous serions davantage promenés, nous aurions davantage discuté de tout avec tous ; sans eux, notre maison aurait été plus soignée, les plantes auraient été mieux arrosées, nos habits mieux repassés ; sans eux, nous aurions fait plus assidûment le bien; sans eux nous aurions acquis plus de pouvoir, nous aurions gagné plus d'argent, nous aurions mieux dormi. Sans eux nous aurions vécu davantage. Mais que vaut la vie à n'être que ce corps-à-corps qui ne laisse sur l'aplat du présent que la trace des coups, la marque des joies, l'abrupte sensation, mais non pas suffisamment la perspective et le sens? Les livres nous révèlent ce paradoxe que l'existence est une une chose si grande qu'elle ne se suffit jamais à elle-même, car sans cesse elle s'évanouit dans le flux de nos vies mortelles, sans cesse elle s'égare dans les myriades du multiple, sans cesse elle obscurcit la ligne claire des raisons.
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Nous devrions lire pour nous quitter autant que pour nous retrouver. Dis-moi ce que tu lis et je ne te dirai rien de ce que tu es ou crois être. Connais-toi toi-même: parole de sage. Le lecteur, lui, est d'une autre nature. Déprends-toi de toi-même, telle devrait être sa maxime. (p90)
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lire est sans partage, lire est exclusif ; l'esprit est occupé, les mains sont occupées ; aucune parcelle de notre être ne peut s'évader pour porter son attention ailleurs. Il n'y a pas plus contraignant que cette activité à laquelle rien oblige (p44)
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Il y avait une part de son âme et de l'âme du monde que seuls le livre et la littérature étaient à même d'éclairer (p23)
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Il s'exprimait d'elle cette force de retrait que les non-lecteurs n'apprécient pas toujours chez les lecteurs pour le privilège de liberté qu'ils y décèlent. p33
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On sentait une bibliothèque constituée dans le mouvement de l’actualité éditoriale, la succession et le désordre des jours et des désirs, sans plan de route, à vrai dire plus intéressante à découvrir par les surprises qu’elle réserve que celle d’une intellectuelle sévère ou d’une bibliothécaire de très bon goût.
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J’avais beau me répéter qu’une bibliothèque n’offre pas de portrait de son propriétaire, qu’il est vain de penser qu’elle puisse être le chemin qui mène au lecteur, je ne parvenais pas à me résigner qu’elle ne parle pas davantage que les sucriers vides, l’argenterie noircie, les serviettes de toilette et les vases à ne plus savoir qu’en faire des pauvres humains.
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C'est à quoi servent les tombes, à nous faire croire que se réduit la distance infinie qui nous sépare du vivant disparu.
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Parmi les hommes réunis autour des flammes, l'un d'entre eux, repu de viande cuite, momentanément dégagé de l'angoisse de la chasse où il avait failli périr, ne parvenait pas à oublier cette peur, à la digérer doucement ainsi qu'il le faisait de la viande, dans la chaleur du foyer qui portait à l'endormissement. Encore fallait-il qu'il témoigne que cette viande avait un goût et un coût. On ne pouvait plus se satisfaire seulement de la manger en oubliant ce qui s'était passé avant et ce qui adviendrait après. Tu vois, Élisa, la vie a un coût, et la raconter consiste à en fixer la valeur. Le premier qui, au lieu de s'endormir paisiblement, s'est levé et a pris la parole pour décrire la peur qu'il avait eue, mais aussi la joie qu'il avait ressentie à terrasser l'animal, pour expliquer comment il s'y était pris, comment il s'y prendrait la prochaine fois, cet homme hirsute vêtu de peau de bête fut l'auteur du premier récit. Il le fit avec les moyens du bord, avec des semblants de mots, des sons, des gestes surtout, car tout son corps parlait autant que s'il chassait, et dans ses yeux passait le reflet ondulant des femmes qui s'étaient mises à danser.
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J'avais largement le temps de flâner en me dirigeant vers l'école d’Élisa, pour arriver à l'heure de la sortie des classes. C'est toujours un moment fascinant pour un parent. On assiste, patelin, à l'écoulement du troupeau ; les chevelures ondulent comme le dos laineux des moutons ; on reconnaît certains enfants, on en découvre d'autres. On en voit de rieurs, de somnolents, de fatigués ; et le regard n'est pas le même chez ceux qui se savent attendus et cherchent un visage, et chez ceux qui reviennent seuls à la maison. Soudain, dans cette marée tout juste contenue par la porte principale, une expression, une boucle de cheveux, un rictus nous fait saisir le détail avant l'ensemble. Nous sommes alors pris d'un immense soulagement car nous commencions à être impatients et même inquiets tant ce flot d'enfants semblait recouvrir le nôtre ; mais non, il est là, notre enfant est vivant, ils sont cent mais il est le seul.
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Première allée à droite, deuxième allée à gauche, je regarde les tombes jusqu'à "la" tombe. Je n'ai pas connu ces gens, mais je finis par les connaître. Les morts vont à l'essentiel : leur curriculum vitae tient en deux dates.
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Je suis lecteur pour la télévision. Je lis des scénarios, parfois des romans, et aussi des textes informes et inclassables. Ce sont les plus douloureux à lire. On sait qu'on tirera de ce fatras un avis négatif, mais il faut persévérer, rester dans le sillon quatre cents pages durant, coûte que coûte. Lire dans ces conditions est une école de vie : on s'ennuie au début, on s'ennuie par la suite, et on finit en s'ennuyant. Mais on tient bon. Tant de devoir, de patience et de douleur peut mener à la sagesse.
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Ainsi se nourrit une bibliothèque, comme un fleuve de ses affluents.
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Comme on a peu lu quand on a beaucoup lu ! Arpenter la bibliothèque d'un autre, c'est traverser un pays dont on connaît la langue mais dont l'étrangeté grandit à mesure qu'on y pénètre.
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Cette remarque et quelques autres sur cette opération me valurent de m'y occuper qu'une position discrète, quoiqu'utile, puisque c'est auprès de moi que Christine Meyer vint glaner des informations au sujet des deux écrivains invités. Ponctuel conseiller de l'ombre, j'assurais surtout l'activité de base de la bibliothèque, le service du prêt. Il faut bien qu'un seul continue de diriger le paquebot quand les autres dansent.
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Sans savoir encore quel métier j'exercerais, de cela cependant j'étais sûr : je ferai ma vie parmi les livres. L'enseignement aurait pu m'offrir une voie, mais il eût fallu vivre aussi parmi les élèves. La librairie aurait pu me convenir, mais il eût fallu vivre aussi parmi les chiffres. L'édition, enfin, je n'y pensais même pas, trop mystérieuse et inaccessible. Le métier de bibliothécaire me tendant les bras.
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Autrefois la douleur - toute douleur -, on y mettait un mouchoir dessus, après quoi on le mettait en boule pour le tenir dans son poing fermé et y retenir ses larmes. Aujourd'hui, les incitations sont incessantes qui nous enjoignent d'agiter le mouchoir pour que s'échappe cette parole dont on nous dit qu'elle est une colombe.
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Le travail de prêt me convient. Quoiqu'il soit exposé aux yeux du public, et assujetti à sa discrète surveillance, il offre aussi des moments d'inactivité propices à la lecture.
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On croit que les impôts nous prennent de l'argent. En réalité, nous nous offrons à nous-mêmes nos routes, nos écoles, nos hôpitaux...
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Les romans et les essais dominaient ; très peu de livres d'histoire ; encore moins de théâtre ; pas de poésie ; aucun livre pratique qui vous apprend à cuisiner, jardiner ou prendre soin de votre corps. Était notable l'absence complète d'auteurs classiques. Pas un ouvrage qui pût évoquer ne fût-ce que la trace d'une lecture scolaire ou simplement adolescente. On avait l'impression d'une bibliothèque entièrement constituée à l'âge adulte, et tout à fait ignorante du passé littéraire. Cette absence pouvait dessiner le portrait d'une femme qui n'avait pas fait d'études ; mais dans cette hypothèse, elle se distinguait absolument de ces autodidactes qui se penchent avec grand sérieux et méthodes sur les chefs-d'oeuvre du passé et en font les piliers de leur bibliothèque. Elle appartenait à un temps, à une époque, elle lisait les livres de ce temps, de cette époque. Était-elle de ces personnes qui enfants ont appris à lire, adolescents ont oublié de lire, et adultes retrouvent le chemin délaissé ?
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