AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Jean-Marie Barnaud (174)


Alors font retour
Comme des fruits blonds
Tombés dans la corbeille
Ces lieux
Où confiante
Et la tête sous son aile
La joie s'est mise en boule
Ces lieux où l'on s'est écrié
Sans plus craindre le passage des heures
Et transporté par cet oiseau de feu
Que vivre ici serait possible
Enfin
Commenter  J’apprécie          152
Jean-Marie Barnaud
Sur moi s'écoulent le velours du vent
L'ecume de l'herbe
L'ombre des grands oiseaux
Toute la chappe du ciel qui bascule

Et de moi au soleil
L'axe de la lumière
Nue
Comme un visage qui se donne

Je suis la pierre

Dit la pierre
Et le poète se recueille
Dans la pulpe du mot

(" Sous l'imperturbable clarté")
Commenter  J’apprécie          192
Ici ailleurs
Et à jamais
Demeurent les regards
Jouant dans la vie brève

Ici ailleurs
Et à jamais
Le glissement des doigts
Sur la danse des heures
Les sourires et les baisers
La pierre à feu

Les corps saufs
Commenter  J’apprécie          142
(Cette lettre a été écrite en réponse à une enquête lancée par la revue Friches en 1990 sur le thème « L’écriture et la genèse du poème ». Elle a été publiée par Cheyne éditeur en édition hors commerce le 1er mai 1991, puis reprise dans Poèmes en 1996.)

Cher ami,

Les réticences que j’ai pu montrer à l’égard de votre projet venaient, je le crois, des rapports conflictuels que j’entretiens, depuis l’origine, avec l’écriture. Évoquer ces rapports suffira peut-être à remplir ma tâche, même si ce type de confession a quelque chose d’impudique et relève, à tout le moins, de la vanité.
 
Il y a d’abord cette contradiction sans cesse vécue par moi entre cet homme que je suis et qui s’impose des heures d’immobilité à sa table de travail, écrivant, relisant à voix haute, gommant, écrivant à nouveau, relisant, etc., tantôt pris par cet exercice au point d’en « oublier l’heure et le signal convenu », tantôt impuissant à rien écrire qui vaille, occupé en quelque sorte à ne rien écrire du tout, un œil fixé sur la feuille, tandis que l’autre voit le dehors où les entreprises du corps sont plus sereines et rayonnantes, le grand air, le grand froid, la lumière ; et puis cet autre homme, que je suis toujours, passionnément engagé dans des travaux campagnards, ou encore naviguant en Méditerranée, ou marchant en montagne, et qui, tout heureux, fébrile et tout en sueur, se demande soudain s’il n’est pas en train, là où il se trouve, de démériter de l’écriture, s’il ne trahit pas le poème ou le roman en gésine, s’il ne lui faudrait pas bien vite rentrer à l’abri, verrouiller toutes les issues, et se consacrer au seul métier, au seul service nécessaire, celui qui veut que nous traquions le vrai dans la parole.
 
Je crois bien que je mourrai sans avoir pu résoudre la contradiction, n’arrivant pas tout à fait à me satisfaire de l’idée conventionnelle que le premier homme nourrit le second – et réciproquement – comme si je flairais malgré tout un piège dans l’écriture, comme si je craignais que nous autres, les poètes, n’ayons fini par céder à un « genre », étant entrés par le poids des choses dans cette confrérie-là qui, il est vrai, en vaut bien d’autres, mais entrés… faute de mieux, peut-être.
 
Et pourtant je reviens toujours à la table, certain que je me dois quand même à je ne sais quel « autre » encore qui, en ce lieu, me réclame, assuré qu’il me faut absolument donner sa chance à un chant qui m’habite en secret, et combler ce vide, ce rien, dont la feuille est le signe, comme s’il y avait une place, une « chaleur vacante » à remplir.
 
Ajoutons, pour être tout à fait honnête, que j’éprouve aussi à cet exercice, et lorsque le résultat me semble accompli, une qualité de joie irréductible à toute autre – même si, très vite, le poème ou la page achevés me deviennent étrangers et s’éloignent de moi comme fait la peau après la mue.
 
Et tout est à reprendre ; et tout recommence…
 
L’inconfort de ma pratique m’a toutefois imposé quelques règles de déontologie à usage interne, et auxquelles je crois n’avoir jusqu’à présent jamais dérogé, dont la plus grave est de ne jamais écrire par jeu ou sur commande, l’écriture devant toujours pour moi se refuser, sauf à trahir l’essentiel, aux prouesses des savoir-faire, et ne tenant sa légitimité que de cette évidence : la parole engage (d’où la nécessité où je suis quelquefois de refuser des inédits, que je n’ai pas, ayant déserté pendant des mois parfois l’écriture de poésie, sans avoir pour autant, je crois, abandonné l’état de poésie…).
Mais, puisque vous me demandez de réfléchir sur un exemple précis, je vous propose celui-ci :
Dans Sous l’écorce des pierres (Cheyne éditeur, 1983), on peut lire ce « quintil » :

Dans la faille du temps
Irons-nous à la mort
Comme de bons marcheurs
À grandes foulées vers l’incendie
Sourds aux écorces qui pourrissent

Ce poème pose la question : irons-nous à la mort comme de bons marcheurs. Mais j’avais d’abord écrit : nous irons à la mort comme de bons marcheurs, dans une sorte d’enthousiasme, ou alors c’était un exorcisme, et en conclusion d’un poème que j’avais longtemps porté en moi comme une espèce de blessure, et dont l’achèvement m’avait en quelque sorte libéré.
 
Cependant, une fois l’émotion de la création évanouie, la forme affirmative me parut d’une grande hauteur, d’une pauvre prétention ; et, des exemples cruels autour de moi m’ayant aussi rappelé à la réalité des choses, je me suis rendu compte que la vie pouvait bien me réserver un jour la mauvaise surprise de me mettre dans l’incapacité d’assumer jusqu’au bout cette parole, même si la relecture du poème me confirmait toujours dans le sentiment que l’affirmation semblait esthétiquement pertinente.
 
J’ai balancé, je m’en souviens, de longues semaines entre l’une et l’autre formule, et je ressens encore le soulagement que fut, en fin de compte, la décision de choisir l’interrogation, les préoccupations esthétiques ayant dû se soumettre aux impératifs d’une voix qui me disait que, sur cette question, je ne pouvais rien affirmer sans me mentir à moi-même, et par là, sans risquer d’ôter à mon poème la seule valeur à laquelle il devait prétendre.
 
Et je pense aujourd’hui que cette exigence de fidélité est sans doute l’une des rares choses qui justifient l’activité poétique devant les malheurs du temps.
 
Croyez à mes sentiments très amicaux.
 
J.-M. B.
Commenter  J’apprécie          00
Les jours sont à présent trop brefs
et les années
On se perdra l’un l’autre
s’étant aimés
s’aimant
de cette perte même
Déjà nos corps trébuchent
un fil encore se tend
les mains qui le tressent
se touchent à distance
Commenter  J’apprécie          10
Alors tu t’étais perdue
Les chemins pour te rejoindre
avaient sombré
Tu t’éloignais toujours plus
dans cette campagne vive
Tu me hélais de là-bas
sans me voir
Et dans ce rêve dont j’étais le naufragé
je te voyais qui te penchais souvent
pour une poignée d’asperges sauvages
Commenter  J’apprécie          00
(on porte sur ses épaules
le poids des poèmes incertains
incapable de jeter aux orties
encore
la guirlande sous sa cloche de verre
avec le bouquet des noces
et les dentelles
 
la vie déborde le fardeau
qui vous plie sur la feuille
on sait quels cris quelle fureur
quelle audace
écornent les pages des livres
 
on cherche les mots qui font le guet
les rythmes de la lisière)
Commenter  J’apprécie          00
Une bouche approche
dans la pénombre
la distance est un fruit
pour les doigts qui jouent
dans la lumière
inventée
La distance est une joie
 
Le monde entier repose
dans une main ouverte
 
Monde tenu
dans sa main
Commenter  J’apprécie          00
Ils sont ainsi les morts
légers et fidèles
Ne pèsent rien
moins que l’air que tu respires
moins que les mots qui se souviennent
 
Eux ne parlent pas
pas plus que la lumière ou l’ombre
 
Ne pèsent rien
moins qu’une aile
 
Le poids juste de l’âme
sourire et geste d’effacement
Commenter  J’apprécie          00
Là-haut
Brille un silence désarmé
C’est comme une maison secrète
Où se confie un voyageur
Aux pierres aux yeux clos
Il a laissé ouvertes les fenêtres
Pour cette nuit de halte
Et se tient coi
Près de sa belle et calme marcheuse
Aux cheveux déliés
Et qui rend à la nuit
Comme une terre gorgée d’eau
Son souffle égal
Commenter  J’apprécie          10
L’OISEAU FANTASQUE
Elle est toujours absente des mots
Qui la fardent
La sans-visage
 
Elle n’est peut-être que
La fin
Quelque chose se brise
Simplement
Comme une branche déjà sèche
 
Un fil
Disait-on
Rompu si loin là-bas
Que l’on ne sait au juste qui manie
Le tranchoir
Commenter  J’apprécie          00
Belle eau
Ma demeurante
Belle eau du lac
Qui feins l’en aller
Sous la pale du vent semeur
D’aigrettes
Belle eau
En contrepoint d’azur
Qui cicatrises la blessure des sources
Tu t’ouvres simplement à la pesée
Du monde
Commenter  J’apprécie          00
Fermant tes paupières
N’appelle plus les visages absents
Mais plonge tes deux mains
Dans la fraîcheur à ciel ouvert
 
Arc-bouté sur toutes les margelles
Tire
À pierre fendre
Sur les chaînes
Et fais tinter l’eau vive
Par ici
Commenter  J’apprécie          00
Sur moi s’écoulent le velours du vent
L’écume de l’herbe
L’ombre des grands oiseaux
Toute la chape du ciel qui bascule
 
Et de moi au soleil
L’axe de la lumière
Nue
Comme un visage qui se donne
 
Je suis la pierre
 
Dit la pierre
Et le poète se recueille
Dans la pulpe du mot
Commenter  J’apprécie          00
Dans la faille du temps
Irons-nous à la mort
Comme de bons marcheurs
À grandes foulées vers l’incendie
Sourds aux écorces qui pourrissent
Commenter  J’apprécie          00
Aurons-nous en ces temps
Assez de regard pour tout embrasser
Une dernière fois
Assez de clairvoyance
Pour présider à l’ordonnance du départ
Comme un voyageur qui met la clé
Sous la porte
Et se retourne sur les restes d’un feu
Qu’un peu de vent affole
 
Que je vous dise comme je crains
La départie
Car bien avant que nous soyons dépariés
On verra ici et là des craquelures
Dans les paysages
Et sur la neige
Inattendus
Des coulures
Des cratères d’eau pitoyables
Des fêlures grisâtres dans le blanc
Commenter  J’apprécie          00
On peut bien
En passant
Célébrer le passage
Avec des mots qui font signe
Comme un vol d’oiseaux
Uniques
Et confondus
 
(sait-on où vont les oiseaux
et pourquoi ils se dispersent
comme des flammes
dans le tremblé d’un cœur
qui se déchire)
Commenter  J’apprécie          00
LE DIT D’OLIVIER DE SERRES

Il faudra bien un jour percer ce brouillard
Sur les choses
Nous
Devenus si myopes
À présent que la hache
De l’aube
Ne siffle plus à nos épaules
Le même éclair tout à fait
 
Cependant les heures sont comptées
Commenter  J’apprécie          00
LANGUE RÉVULSÉE

«  Je connais la tentation d’une langue révulsée
Mais comment s’y prendre


Si dure est la corne à mes talons
D’avoir tant foulé
Les mêmes traces

Tout mon corps est calleux
Et pas seulement la main
La fidèle la naïve
Elle qui va toute seule aux mêmes comptoirs
Ramasser la récolte du jour
Quand par derrière
L’oreille entend rire les audacieux
Et trembler le sol sous leurs cavalcades


Ah! —— Ils crient tous ensemble
Et leurs paroles chargées d’embruns
Sabrent l’horizon ——


Jette aux orties ta pauvre maîtrise
Cours au désert oublie qui tu es
Arrache un à un les masques !

«  Viens dans l’ouvert ami ! » .
Commenter  J’apprécie          30
«  On crie : tu es là?
Mais il n’y a personne


Tel est dorénavant le monde :
Effrangé dans sa distance
Méconnaissable


Parfois aussi c’est le tout proche
Qui s’abîme
L’ovale d’un visage aux yeux perdus
On parle alors au jugé
À ce masque sans regard
Qui se déforme
Et se refuse
Aux yeux qui le cherchent


Parfois encore ce miracle :
Comme apparaît
Le bleu du ciel en taches fugitives
Entre les feuilles de la treille
Cette douceur dans l’été


C’est de là que vient la lumière
Inchangée depuis tout ce temps


Sauvées
La couleur du ciel
Et celle des yeux
Qui font retour
Quand on désespérait de les revoir


Suffit que dans l’extrême chaleur
Une brise soudaine écarte les feuilles
Et vous enveloppe » .
Commenter  J’apprécie          90



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jean-Marie Barnaud (54)Voir plus

Quiz Voir plus

Quiz Sur Le Royaume de Kensuké

A quelle personne le livre est-il écrit ?

1ere personne
3eme personne

13 questions
1296 lecteurs ont répondu
Thème : Le royaume de Kensuké de Michael MorpurgoCréer un quiz sur cet auteur

{* *}