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Critiques de Jean-Miguel Pire (3)
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Otium

Après avoir réfléchi, avec Deny-Robert Dufour, sur les raisons et les modalités de la confiscation de l'otium par le libéralisme depuis les Lumières anglaises, je poursuis ici le cheminement avec la découverte des moments de la résistance, tout au long de notre histoire intellectuelle occidentale, qui ont permis le développement, l'épanouissement ou simplement la survie de ce concept d'émancipation individuelle. Cet essai brillant, posé, remarquablement bien écrit, se propose à la fois de poser la définition de l'otium à travers ses multiples évolutions dont la première remonte déjà à la métamorphose entre la skhôlè grecque et l'otium latin – évolutions souvent contestataires voire révolutionnaires – et de le mettre en relation avec l'art et son enseignement, son descendant exemplaire, et avec la démocratie dont il est présupposé. De plus, depuis la Renaissance française et à cause de son incompatibilité radicale avec le christianisme, l'otium doit être associé avec les politiques culturelles publiques ; cette circonstance place l'art et la culture dans des relations dialectiques complexes et changeantes avec le pouvoir royal puis républicain. En effet, avant d'être l'ennemi du productivisme et de la société mercantile, l'otium a dû lutter contre la religion, et en cela il s'est fait le compagnon de route de la laïcité (dans l'histoire de laquelle l'importance de la monarchie de Juillet m'était inconnue), mais au risque de se laisser instrumentaliser par le politique. Quant à l'art et à son enseignement, ses ennemis viennent parfois de là où on ne les attend pas, même si Dufour nous a appris à nous méfier de Mai 68 et même de Pierre Bourdieu...







Table :



Introduction



Préambule : Vita activa / Vita contemplativa -

S'arrêter et rasseoir en soi, explorer les profondeurs de l'être [Montaigne et Valéry]

L'instrumentalisation du monde [Hannah Arendt]

La vérité suprême de la vie est l'art [Heidegger et Proust]



I Archéologie de l'otium studieux -

De la Skhôlè grecque à l'otium latin [Platon et Sénèque]

Le christianisme et l'otium [Foucault]

La Renaissance de l'otium et les Académies [Marc Fumaroli]



II Une politique de l'esprit -

François Ier et la « prudence lettrée » [Budé]

Des Académies aux Sociétés de pensée révolutionnaires

Fortifier sa raison, cultiver son esprit [Condorcet]

L’État est laïque pour le salut de toutes nos libertés [François Guizot (1787-1874), personnalité centrale du volontarisme culturel sous la monarchie de Juillet]

Il faut un grand ministre de l'intelligence publique [idem – suite]



III L'éducation artistique au cœur de l'otium -

Orientation mercantile contre épanouissement individuel [Léon Laborde et le Second Empire]

L'enseignement doit surtout être scientifique [Durkheim et la IIIe République]

L'art détourne donc de la vie morale, parce qu'il détourne de la vie réelle [idem – suite]

L'éducation artistique confinée à la créativité individuelle [avant et après Mai 68]

L'histoire des arts, atelier de l'otium dans la scolarité [des arts plastiques à l'histoire des arts, depuis 2008]



IV La République, rempart contre le negotium ?

Malraux et la puissance métaphysique de l'art

L'objet d'art est l'objectivation d'une relation de distinction [relecture critique de Bourdieu]

La colonisation de nos paysages intérieurs [d'après Annie Lebrun, Ce qui n'a pas de prix..., 2018]



Conclusion
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Otium

Livre fort intéressant, au point de ne jamais pouvoir vous ennuyer. Vous comprendrez vraiment comment et pourquoi est né l' Otium dans la Grèce antique concomitante à celle de la démocratie. Vous pourrez imaginer cet espace permettant à chacun et chacune, un loisir studieux, c'est à dire un temps pour soi, afin de cultiver une intériorité féconde, une philosophie, une éthique, et à travers l'art, aussi, un art de la pensée désintéressée dont les résultats retomberont forcément sur la société en général. Ainsi, le désir d'emancipation né en vous, vous participerez à l'emancipation du monde et ce sera du coup, la votre.

Dommage, juste, un blocage dans l'analyse du comment "le negocio" a détruit l'"ocio" (révélateur en espagnol !). Une insuffisance à signaler, car l'auteur se perd dans les sphères et les méandres de l'Etat (Celui qui détient le monopole de la violence. Weber) convaicu que celui-ci aurait pu agir autrement vis á vis de l'otiom tout au long de l'histoire de la République. Il va plus loin encore puisqu'il est persuadé que l'Etat aurait pu et est le seul à pouvoir encore le développer. Pourtant il montre lui-même, comment ce dernier, a toujours freiné le processus de réhabilitaiton de l'otium. Et ce malgré des personalités fortes au sein du gouvernement, de la trempe d'un Guizot, qui ont été incapables de freiner cette imparable nécessité de former des sujets, comme outils pour les intérêts économiques qu'il promeut. Il se tourve que l'État ne peut se permettre de batiffoler avec l'otium, ce dernier favorisant la réflexion pouvant en arriver à mettre en doute son utilité, alors qu'il se doit de développer les intérêts de l'économie française face à la concurrence des autres pays, sur le marché mondial. Et c'est que le Capitalisme, qu'il ne nomme nulle part, était né en en Angleterre bien avant 1789 et le peuple vaincu par les Jacobin en 1793, "Liberté, Égalité, Fraternité", allaient se plier rapidement à son dictat.

Encore un petit effort de réflexion en se servant de l'otium pour bien analyser l'économie qui domine le monde. Alors Monsieur Pire vous constaterez que l'État, faute de s'effondrer sur lui-même, ne peut agir que comme il le fait. Il se doit en effet de garantir l´ordre capitaliste, basé sur la propriété privée des moyens de production, la soumission de ses sujets et de booster le Capital, le Marché, pour sa propre survie, même avec la Gauche du Capital au pouvoir. État et Marché constituant les deux mamelles inséparables du Capitalisme qui ne peut que "croître ou mourir".

Bonne lecture

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L'otium du peuple : À la reconquête du temps ..

Une histoire stimulante de l’idéal antique du loisir, comme temps libre pour se retourner vers son for intérieur.
Lien : https://www.lefigaro.fr/livr..
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