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Citations de Marcel Marnat (26)


Le siècle de Michel-Ange n’avait pas nos scrupules. Masquer, pour complaire à notre mentalité, ce qui n’alarmait guère la société des XVe et XVIe siècles entraîne une perspective psychologique fausse. Voulant « grandir » Michel-Ange en l’aseptisant, on en a fait cet intellectuel bizarre dont la contemplation mystique aboutissait à des colosses qui, vu autrement, eussent paru suspects. Tel ne fut pas Buonarroti tout à la fois le mystique que l’on nous conte et un sensuel dont on ne veut rien dire. N’est-ce pas la seule honnêteté d’évoquer ce que l’œuvre écrite comme la création plastique n’ont cessé de crier ?
Pourtant cette simple entreprise semble proscrite.
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Michel-Ange semble avoir fait la connaissance de Tommaso Cavalieri en automne 1532. Vasari commente avec objectivité :
Par-dessus tous les autres, sans comparaison, il aima Tommaso dei Cavalieri, gentilhomme romain, jeune et passionné pour l’art. Il fit sur un carton son portrait grandeur nature, le seul portrait qu’il ait dessiné car il avait horreur de copier une personne vivante à moins qu’elle ne fût d’une incomparable beauté.

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Les décors de la Sixtine ont la nudité de l’éternel … Par sa variété proliférante, la gesticulation humaine semble annoncer toutes les passions imaginables et toujours en symboles fort clairs.
Ce retour aux premiers vagissements de l’espèce explique le désarroi de tant de commentateurs trébuchant sur le fait que l’érudite théologie ici mise en images le soit sous forme de nus en apparence si païens. Mais ce sont les humanistes qui avaient faut du nu une figure païenne. Comme Della Quercia, Michel-Ange se situe avant même que cette notion de paganisme soit apparue : au moment où l’homme, encore près de Dieu, va entamer une aventure définissant toute l’espèce et dont le paganisme n’est qu’une péripétie. La beauté musculaire que Michel-Ange répand sans souci au plafond d’une église nous étonne dans la mesure où nous avons tragiquement perdu le contact avec ce qu’il y a de sacré dans cette chair primordiale.
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Erasme de Rotterdam arrivait, lui aussi, à Bologne où il restera un an, très bien vu par le pape. Si Michel-Ange avait été passionné par les discussions humanistes, il est probable qu’il se serait rapproché d’une si universelle réputation. Or, aucun texte ne mentionne la rencontre de ces deux hommes que tout aurait dû rapprocher (cf. les relations futures d’Erasme avec Dürer), si nous en croyons les thèses « humanisantes ».
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A l’époque, le « David » tranchait sur les figures plus féminines de Donatello ou de Verrocchio qui avaient précédé Michel-Ange dans le même sujet. C’est pour cette éloquence, ce naturalisme viril, que d’anciens savonaroliens vinrent le lapider. Il n’en demeure pas moins qu’oubliant un peu les rudes paysans de sa jeunesse, Michel-Ange use volontiers de la « divine proportion » afin de créer ce corps trop calme pour susciter un autre intérêt que –dirons-nous– laïque.
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Marcel Marnat
Ça se répète sans arrêt, sans avoir besoin d'y changer quoi que ce soit, sauf l'orchestre. On arrive à des prolongations psychiques, mentales, absolument terrifiantes. Il est bien connu qu'à la création, il y a une dame qui s'est levé et à crié : "Au fou!" Ça me paraît un peu trop beau pour être vrai mais il y a de ça. Et Ravel aurait répondu : "Celle-là au moins, elle a compris!".
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Ainsi, en pleine figuration chrétienne, Michel-Ange, avec une audace qui aurait pu lui valoir le bûcher, signifiait aux humains cette possibilité d’accéder au divin par l’amour humain, par le charnel. Et Michel-Ange insiste sur sa qualité d’apôtre de cette conception fracassante, se représentant lui-même en saint Barthélemy qui selon la tradition avait été écorché vif. Michel-Ange se montre entre saint Pierre et le Christ, la peau tombante présentant le visage de l’artiste. On ne s’aperçut de cette singulière effigie qu’au début de ce siècle et on n’y vit qu’un aspect du masochisme mystique qui l’avait ravagé quinze ans auparavant.
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Quittant la cour des Médicis, il se fait apprécier du prieur de San Spirito, lequel lui procurera des corps abandonnés que l’artiste étudiera jusqu’à ce que leur putréfaction l’oblige à renoncer. De ces études serait né un »Crucifix » en bois, grandeur nature, aujourd’hui perdu. Il avait auparavant produit un grand « Hercule » qui devait disparaître en France après avoir été acheminé à Fontainebleau dans les collections de François 1er.
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Quelle intelligence serait assez inculte pour ne pas voir que le pied de l’homme a plus de noblesse que son soulier, que sa peau est plus noble que ses vêtements ?
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Un pape doit savoir que c’est sur des hommes libres qu’il exerce son autorité.
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Ami de Machiavel, Francesco Guicciardini (que nous nommons Guichardin, 1483-1540) allait dans ses Souvenirs, donner le témoignage le plus exact de ces malaises : ayant été au service de Léon X puis de Clément VII, il devait pourtant renchérir sur les accusations strictement politiques de Machiavel en écrivant :
« Je ne sais à qui pourrait déplaire plus qu’à moi l’ambition, l’avarice et la mollesse des prêtres : à la fois parce que chacun de ces vices est odieux en soi et parce que chacun ou tous ensemble conviennent mal à qui fait profession de vivre dans la dépendance de Dieu… Néanmoins, les relations que j’ai eues avec plusieurs pontifes m’ont obligé, à aimer leur grandeur et n’eût été ce respect j’aurais aimé Martin Luther autant que moi-même : non pour échapper aux lois prescrites par la religion chrétienne, mais pour voir réduire cette foule de scélérats dans la condition qui leur convient, c’est-à-dire à rester soit sans vices soit sans autorité ».
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Michel-Ange aime plier, pourvu que la force adverse soit réellement grande : il s’agit alors d’un hommage à la force en général plutôt que d’une soumission personnelle.
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Bientôt Michel-Ange s’acharne à faire acquérir de nouveaux terrains à toute la famille et sa rapacité ne manque pas de cynisme :
« Il faut par-dessus tout chercher une bonne terre. Que ce soit où elle voudra, peu m’importe : du moment qu’elle vous plaît, elle me plaira aussi. Ayez soin d’acheter à quelqu’un dans le besoin afin qu’on puisse marchander. » (Lettre à son frère, quatre mois avant l’achèvement de la Sixtine).
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« On peint en Flandres pour tromper la vue. Cette peinture n’est composée que de rubans, de vieilles maisons, de végétations champêtres, d’ombres, d’arbres, de ponts et de ruisseaux qu’on appelle paysages, avec quelques silhouettes humaines par-ci par-là. Toutes ces peintures, quand bien même elles pourraient plaire à certains yeux, sont faites réellement sans raisons ni art, sans symétrie ni proportions, sans discernement, sans choix ni certitudes, en somme sans subsistance et sans nerfs. » (Michel-Ange à Francisco de Hollanda)

Ce qui revient à dire que la nature n’a pas, comme l’humain, un destin englouti dans sa matière.
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Vers 1540, Michel-Ange ayant oublié ses dégoûts, va confier à Francisco de Hollande :
« La belle peinture est pieuse en elle-même car l’âme s’élève par l’effort qu’il lui faut fournir pour atteindre la perfection et se confondre avec Dieu. La belle peinture participe de cette perfection divine, elle est une ombre du pinceau de Dieu. C’est une musique, une mélodie : seules les très hautes intelligences parviennent à la pénétrer. »

Cette activité créatrice assimilée à la prière n’est pas une conception tardive : elle effleurait déjà dans l’extase créatrice qui avait donné naissance aussi bien au Combat des Centaures qu’à la Bataille de Cascina, mais indexée de manière plus claire à l’extase sensuelle.
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On admet aujourd’hui que la plafond de la Sixtine n’a pas été conçu « en soi » mais adroitement mis en harmonie – spirituelle sinon stylistique – avec les fresques qui étaient déjà peintes sur les murs inférieurs, lesquelles content la vie de Moïse (à gauche) et celle du Christ (à droite). Dès lors Michel-Ange chapeaute l’ensemble en réutilisant le principe médiéval de l’« arbre de Jessé » qui, depuis Isaïe (II,1-3) symbolise la chaîne des générations bibliques, des origines à la venue du Christ. Ainsi Tolnay conclut-il que la chapelle tout entière nous conte l’histoire de l’humanité selon la Grâce (vie du Christ), selon la Règle (vie de Moïse), enfin avant toute loi (scènes de la Genèse, œuvre de Michel-Ange). Ce plafond s’articule aux registres inférieurs par quatre scènes de l’histoire d’Israël et par la figuration régulière des prophètes hébraïques et des sibylles grecques qui, selon la pensée des premiers humanistes, s’inscrivent (avec Platon, non figuré) parmi les annonciateurs ou les ancêtres du Christ.
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Contrairement aux humanistes purs, il n’est pas un intellectuel devenant actif, tel Léonard, mais un manuel virant au contemplatif.
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« J’entends par sculpture celle que l’on fait en ôtant (sculpture sur pierre). Celle que l’on fait en ajoutant (modelage pour une sculpture en bronze) est semblable à la peinture ».
Ce qui, chez ce sensuel pourtant, est l’équivalent d’une condamnation puisque, pour lui, « la peinture n’est bonne que lorsqu’elle fait penser au relief ». Cette façon de n’exister que par la seule illusion du regard est à ses yeux condamnables puisqu’elle n’atteint quelque présence, quelque chair, qu’avec l’intervention de notre imagination(1).
(1)Ici encore le relent satanique accolé à la cérébralité.

(…)

C’est un art à ses yeux total, seul capable de satisfaire à la fois l’esprit et la curiosité des sens. Mais Michel-Ange garde en tout une attitude érotico-mystique, face à la chose révélée : fouaillant le block il prétend aussi bien créer, sexuellement, la statue qu’il met à jour que la dégager d’un chaos élémentaire, avant lui en désordre. C’est pourquoi il se désintéresse de la sculpture modelée qui ne fait qu’élever sans risque matériel un volume dans l’espace vide.
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Ici une parenthèse un peu folle bien digne de l’époque : la Sublime Porte entretenait toujours avec Florence d’excellentes relations commerciales, la République n’ayant pas rompu l’entente si bruyamment inaugurée par Laurent le Magnifique. Comment le Grand Turc connut-il la gloire de Michel-Ange, comment s’y intéressa-t-il et sut-il seulement son différend avec le pape ? Il demeure que par l’intermédiaire du prieur de la communauté franciscaine installée sur les rives de Galata, Bajazet II fait savoir à Michel-Ange, sculpteur et peintre, qu’on souhaite lui faire construire un pont barrant la Corne d’Or et reliant ainsi l’ancienne Constantinople, devenue Stanbul, et l’actuel Beyoglu (...)
Mais Hayreddin venait d’achever, en cinq ans, la Mosquée de Bajazet qui allait fournir le modèle de toutes les mosquées à coupole, savant compromis entre le principe de Sainte-Sophie et les exigences de la pratique musulmane. On s’étonne dans ces conditions que Bajazet II ait tenu à faire venir un sculpteur en fuite (capable d’aviver encore la rivalité traditionnelle entre l’Eglise et le Turc) pour construire un pont destiné à poser, à un apprenti architecte, des problèmes insurmontable. (…)
Malgré ses sentiments chrétiens, Michel-Ange voulu pourtant accepter ce qui, à l’époque, eût passé pour une trahison suprême.
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« Au pape Jules II. »

Seigneur, s’il est proverbe antique qui soit vérité,
C’est bien celui qui dit «qui peut, jamais ne veut ».
Tu as cru à des fables, à des paraboles,
Tu as récompensé l’ennemi du vrai.

Je suis et fus de longtemps Ton serviteur fidèle
A toi je fus donné comme rayons au soleil
Mais de mes jours tu n’as ni souci ni pitié
Et plus je m’efforce et moins je te plais.

Jadis j’espérais m’élever par ta propre hauteur
Fort du poids de justice et de la puissante épée
Et pas seulement de la voix d’Écho.

Mais qui s’attache à la vertu qu’on trouve en ce monde
Le Ciel le méprise, tel celui qui s’en va cueillant
Des fruits aux branches d’un arbre sec.
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