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Citations de Maria Zambrano (36)


Prologue de Maria Zambrano à la seconde édition (1973)
Ecrire dans la solitude, sans but, sans projet, parce que, parce que c'est comme ça, peut sembler être un acte transcendantal que nous ne pouvons appeler sacré que parce qu'il s'agit d'un acte très humain. Mais il y a quelque chose du rite, de la conjuration et, plus encore, de l'offrande, de l'acceptation : celle de l'inéluctable présent du temps, celle de passer dans le temps, d'aller à sa rencontre, comme il le fait, lui, qui ne nous abandonne pas. Et, finalement, comme le temps est mouvement, il met en mouvement l'être humain ; être en mouvement, c'est faire, faire vraiment quelque chose, tout simplement. Faire la vérité, même si c'est en écrivant.
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Vivre c'est épuiser les passions, jusqu'à les conduire à la liberté de leur mort.
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Maria Zambrano
La Cuba Secrète - extrait
     
Comme le secret d’un très vieil amour ancestral, Cuba m’a blessée de sa présence en un temps déjà un peu lointain. Cet amour est si primitif que plus encore qu’amour il conviendrait de l’appeler « attachement ». Un attachement charnel, une température et un poids correspondant à la résistance la plus intime ; une réponse physique et par conséquent sacrée à une soif longtemps contenue. Non pas l’image, non pas la vivante abstraction du palmier et de son contour, ni la manière d’être dans l’espace des personnes et des choses, mais leur ombre, leur poids secret, leur chiffre de réalité, voilà ce qui m’a fait croire que je me rappelais l’avoir déjà vécu. Mais les images ne pouvaient pas coïncider avec celles que j’avais vues lorsque j’apprenais à voir : la branche dorée du citronnier à la tombée de la nuit dans le patio familial... Aucune figure qui eût déjà été projetée dans l’espace extérieur. Peut-être un peu la douceur terreuse de la canne à sucre extraite par une bouche pas encore dessinée et l’ombre dense des arbres se confondant avec la terre, comme s’ils étaient déjà terre avant de tomber en elle. Car au bord de cette Méditerranée comme sur le rivage de cette mer de La Havane, la lumière et l’ombre tombent directement sur la terre en s’y abîmant. Mais tout cela ne suffirait pas. Puisque quelques sensations, aussi primaires soient-elles, ne peuvent pas « légaliser » l’attachement à un pays. Quelque chose de plus profond soutenait cette situation. Ainsi, je dirais que j’ai rencontré à Cuba ma patrie prénatale. L’instant de la naissance nous scelle pour toujours, il marque notre être et son destin dans le monde. Mais avant même la naissance, il doit y avoir un état de pur oubli, un pur gésir sans images ; une succincte réalité charnelle avec une loi déjà formée ; une loi qui serait celle des résistances et des appétences ultimes. Palpitation nue dans l’obscurité ; la mémoire ancestrale n’a pas encore surgi, car c’est la vie qui la réveille ; un pur sommeil de l’être seul à seul avec son chiffre. Et si la patrie de la naissance nous apporte le destin, la loi immuable de la vie personnelle qui doit aller sans trêve à son accomplissement — tout ce qui est norme, validité, histoire —, la patrie prénatale est la poésie vivante, le fondement poétique de la vie, le secret de notre être terrestre.
Et c’est ainsi que j’ai senti Cuba poétiquement, non comme qualité mais comme substance. Cuba : substance poétique visible déjà. Cuba : mon secret.
     
-
La Cuba Secreta
     
Como un secreto de un viejísimo amor, ancestral amor, me hirió Cuba con su presencia secreta en fecha ya un poco alejada. Amor tan primitivo que aun más convendría llamar ’’apego’’. Carnal apego, temperarura, peso, correspondiente a la más íntima resistencia ; respuesta física y por tanto sagrada contenida. No la imagen, no la viviente abstracción de la palma y su contorno, ni el modo de estar en el espacio de las personas y las cosas, sino su sombra, du peso secreto, du cifra de realidad, fue lo que me hizo creer recordar que la había ya vivido. Mas, las imágenes no podían coincidir con aquellas vistas mientras aprendía a ver : la rama dorada del limonero a la caída de la tarde en el patio familiar... Ninguna figura ya proyectada en el espacio exterior. Quizá un poco el terroso dulzor de la caña de azúcar extraída por una boca sin dibujo aun y la densa sombra de los árboles fundiéndose con la tierra, tierra ya antes de caer en ella. Pues al lado de aquel Mediterráneo, como en las orillas de este mar de la Habana, la luz y la sombra caen literalmente sobre la tierra hundiéndose. Pero todo eso no bastaría. Pues sólo unas cuantas sensaciones por primarias que sean, no pueden "legalizar" la situación de estar apegada a un país. Algo más hondo ha estado sosteniéndola y así, yo diría que encontré en Cuba mi patria pre-natal. El instante del nacimiento nos sella para siempre, marca nuestro ser y su destino en el mundo. Mas, anterior al nacimiento ha de haber un estado de puro olvido, de puro estar yacente sin imágenes ; escueta realidad carnal con una ley ya formada ; ley que llamaría de las resistencias y apetencias últimas. Desnudo palpitar en la oscuridad ; la memoria ancestral no ha surgido todavía, pues es la vida quien la va despertando ; puro sueño del ser a solas con su cifra. Y si la patria del nacimiento nos trae el destino, la ley inmutable de la vida personal, que ha de apurarse sin descanso — todo lo que es norma, vigencia, historia —, la patria pre-natal es la poesía viviente, el fundamento poético de la vida, el secreto de nuestro ser terrenal.
Y así, sentí a Cuba poéticamente, no como cualidad sino como substancia misma. Cuba : substancia poética visible ya. Cuba: mi secreto.
     
     
Revista Orígenes (Año V) Núm. 20, Invierno 1948, La Habana. pp. 3-9.
     
Traduit de l’espagnol par Jean-Baptiste Para, pour la Revue Europe no 1027-1028: Maria Zambrano. Nov/déc. 2014. (p. 106)
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Discours de réception du prix Cervantès. (extraits)
     
Pour sortir du labyrinthe de la perplexité et de l’étonnement, pour me faire visible et même reconnaissable, permettez qu’une fois de plus, je recoure à la parole lumineuse de l’offrande : « merci ».
     
… « Ce devait être l’aube », dit Cervantès au moment où Don Quichotte sort de la campagne. « Ce devait », dit-il, avec cette incertitude propre à l’aube, l’aube qui, lorsqu’on la regarde et la suit, est un « se faire jour ». Non pas un état de la lumière, une heure fixe du jour, comme le sont les autres heures de la journée ou même celles du crépuscule quand il est long. Les heures, quand elles viennent de l’aube, ne cessent de gagner du temps. L’aube, on dirait qu’elle n’a pas de temps ; que c’est de l’ordre de son « se faire jour » de ne pas en porter, de ne pas le gaspiller ni le consumer ; que c’est son apparition, qu’en ce qui concerne le temps elle ne peut mieux se donner qu’ainsi, en une espèce de labilité comme l’eau sur le point de se répandre. Comme si l’océan du temps et de la lumière-temps – se montrait de part en part sur le point de déborder et de se retirer. Voilà pourquoi, aussi claire soit-elle, l’aube est toujours indécise.
     
L’aube donne la certitude du temps et de la lumière, et l’incertitude quant à ce que la lumière et le temps vont apporter. C’est la représentation la plus adéquate que l’homme puisse avoir de sa propre vie, de son être dans la vie, puisque l’être de l’homme aussi toujours se fait jour. Devant l’aube, l’homme se rencontre lui-même et face à soi, il découvre cette façon qu’il a de se déborder lui-même et de s’occulter, dans cette indécise liberté à demi rêvée. Et devant l’aube, la sienne, celle du jour, il s’éveille, s’en allant à sa rencontre. C’est sa primaire, sa première et transcendantale action.
     
Don Quichotte se met en chemin à l’heure de l’aube. Il ne pourrait en aller autrement pour ce personnage qui souffre de manière exemplaire le rêve de la liberté, ce rêve qui, en une certaine heure si incertaine, se déchaîne dans l’homme.
Tout le Quichotte est une révélation humaine, mais pas trop humaine, en ceci que le roman et le protagoniste coïncident avec le lieu et le moment de l’aube, de l’aube permanente que n’a pas encore dépassé le roman de la liberté humaine. L’aube au-devant de laquelle l’homme parfois se fatigue d’aller. …
     
Et tout ce qui en lui était endormi s’éveilla, commença à vivre selon sa loi. Il ne lui était plus nécessaire de s’oublier ni de renier ses œuvres déjà écrites, elles étaient ses filles qui s’ébattaient un peu plus loin et à présent elles le réjouissaient ; tout désormais lui servait, jusqu’à Aldonza la réelle, et toutes ces femmes, ses sœurs, qui lui a avaient servi de bonnes et d’autre chose. Et une étrange compassion se répandit sur elles et sur lui-même. ...
     
Son coeur jeûna sans effort. Il écrivit à l’aube, avec cette lumière qui précède celle du soleil, avec son silence. Il ne revint jamais sur ce qu’il avait écrit. Il n’eut rien à corriger. Sauf une phrase dans laquelle il mentionnait un village dans la Mancha – résumé de l’Espagne ou du monde entier – dont il ne voulait pas se rappeler le nom. Un point obscur, un oubli rancunier qui dénonçait le fait, sous son propre poids, qu’il était encore en train d’habiter la terre.
     
Forte de cet oubli, je n’ai pas voulu pour ma part oublier cette ville belle et lointaine : Morelia. Pour ne pas renier ce qui a été l’effort de toute une vie. Pour me souvenir avec cette parole en blanc chez Cervantès, des présents et des absents, de ce qui connurent l’échec et persévérèrent dans l’erreur.
     
Et souhaitons qu’en cette même heure, qui pourrait bien être celle de l’aube, quelqu’un continue de parler – ici ou là, n’importe où – de la naissance de l’idée de liberté.
Pendant ce temps, et une fois prononcée la parole de l’offrande – merci – je vais essayer de continuer à chercher la parole perdue, la parole unique, secret de l’amour divino-humain. La parole peut-être signalée par ces autres mots privilégiés, à peine audibles, presque un murmure de colombe :
     
Vous direz que je me suis perdue,
qu’amoureuse, je suis allée
me perdre et que j’ai été gagnée.
     
(1988)
     
Traduction de Jean-Marc Sourdillon, avec la collaboration de Jean-Maurice Teurlay | pp. 93-95, 100-103.
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Quelques poètes lucides (...) ont su que la nostalgie qui les dévore non seulement se rapportait à l'enfance, mais à un temps antérieur à tout temps déterminable. Et ils savent que leur passion de la parole a pour but de lui rendre son innocence perdue grâce à laquelle la leur serait retrouvée ; en vérité atteinte.
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La raie de l'Aurore
  
La nuit et le jour, l'été et l'hiver, le sommeil et la veille se conjuguent, et il n'y a ni déclin ni coucher. Notre grammaire ne devrait pas avoir recours à ce cas circonstanciel qu'est l'ablatif, où l'être irrémédiablement décline, où il s'embrouille et où le temps se pétrifie : ce cas qui ferme au lieu d'ouvrir. L'Aurore n'avait donc rien d'une raie. La lumière blessait seulement celui qui n'accomplissait pas le voyage, qui désormais ne comporterait plus de sacrifice. La raie qui devint ensuite ostensible est surtout le signe ineffaçable de la transcendance abandonnée ; implacable aurore sanglante, elle ne prendrait pas la suite des plus pures aubes. Et ce qui fut un résultat serait interprété comme un prophétie. C'est le danger de toute histoire. Sans l'erreur qui consiste à interpréter un abandon, une infidélité, comme une prophétie, l'histoire existerait-elle, ou du moins cette histoire qui est la nôtre ? Et dans les aurores sanglantes; s'il y en avait, l'effigie de l'homme n'apparaissait pas.
  
*
  
La nuit de l'Aurore, la source
  
Nuit et source qui donne à sentir qu'elle reviendra, mais, désormais pour toujours. Déjà à l'intérieur de l'être, dans l'être même, et non son phénomène ou son altération. Le temps aurait-il enfin cessé d'être séparation ? Aurait-on atteint l'éternel retour dans sa totale perfection ? C'est-à-dire quand il n'aurait plus à renaître, parce qu'il est né tout à fait, et sans le savoir.
  
 
« De la Aurora », 1987.
(Deuxième & quatrième partie – extraits | éd. L'éclat, poche, 2017 – pp. 69 & 155)
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Maria Zambrano
     
... Toute « culture » est la réalisation, ou plutôt la tentative de réalisation, d’un rêve. D’un de ces rêves qui poursuivent l’homme de façon inexorable, et dont l’homme ne peut se défaire. Car ces rêves naissent du fond indestructible de l’espérance, qui cherche un étai mental et tout aussi bien sa réalisation. Tous les rêves ne cherchent pas à se réaliser, mais il en est qui sont plus exigeants, qui ne laissent nul repos à la conscience qu’ils habitent, et qui lancent l’homme vers toutes les aventures. La réalisation est toujours une frustration. En ce sens, toute l’histoire, même la plus splendide, est un échec. Un échec qui porte en lui-même son triomphe : la renaissance incessante de l’espérance humaine, symbolisée par le lierre. Le lierre, métaphore de la vie qui naît de la mort, du dépassement qui vient après tout achèvement. S’il a été loin dans l’espérance. Quand Calderón dit que « bien oeuvrer », même en rêve ne se perd », peut-être faut-il comprendre que ce qui demeurera de toute réalité, c’est son rêve. Car bien rêver, même dans la mort ne se perd.
     
     
« Una metáfora de la esperanza : las ruinas », Lyceum, La Havane, 1951, repris dans Islas, édition de Jorge Luis Arcos, Editorial Verbum, 2007.
     
Traduit de l’espagnol par Laurence Breysse-Chanet, pour la Revue Europe N° 1027-1028: Maria Zambrano, Novembre-décembre 2014. (p. 55)
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Quand on ajoute à l’idéalisme de l’enfance l’idéalisme érigé en dogme d’une culture, il est quasiment impossible d’accéder à la maturité de la condition d’homme dans sa plénitude. Alors l’idéalisme fonctionne surtout dans la bourgeoisie intellectuelle, de façon dogmatique, sans cette audace vertigineuse des philosophes qui se sont totalement abandonnés à son risque. ...
     
L’idéalisme, donc, en arrive à fonctionner comme une barrière, c’est-à-dire comme quelque chose de négatif ; d’une part, il empêche l’homme de vivre intégralement une expérience totale de la vie, en ne reconnaissant pas la réalité, et de l’autre il offre un masque derrière lequel se cacher, sauvant encore les apparences avec une certaine facilité. Une profonde insatisfaction surgit qui dans les consciences les plus exigeantes finit par se transformer en inimitié à l’égard de la vie. …
     
Le fascisme est incompatible avec la confiance en la vie ; c’est pourquoi il est profondément athée : il nie la vie par incapacité d’union amoureuse avec elle, et dans son désespoir il ne reconnaît que lui-même.
Il existe – encore ! – la terrible équivoque de tout ce que suggère le mot « esprit ». On utilise un nom aussi vague pour désigner les réalités les plus diverses et les moins définies. Du grand idéalisme européen subsiste, pâle résidu, ce culte mystifié à l’« esprit » sous lequel se cache des égoïsmes si raffinés, des élans si élémentaires. La première mission de l’intelligence serait de démasquer ce qui se cache sous une telle spiritualité. On l’a tenté et on y a même réussit comme il faut, mais il manque quelque chose que l’intelligence seule ne pouvait donner : une intuition de l’homme, un projet de maturité humaine qui n’eût pas été un projet pensé, obtenu par l’idéalisation, justement, de tout de qui est déjà résidu. Cet homme en projet, cette intuition nouvelle de l’homme devait être cela : une intuition, et l’intelligence seule ne pouvait l’offrir.
     
(Les intellectuels dans le drame de l’Espagne, pp. 40-45).
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La poésie ne s'offre pas comme une récompense à ceux qui méthodiquement la poursuivent, mais vient s'offrir à ceux qui ne l'ont jamais désirée ; elle se donne à tous, elle est indifférente à chacun. Elle est certainement immorale.
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La beauté fait le vide ─ elle le crée ─ comme si cet aspect que prend toute chose qui en est baignée venait d'un lointain néant et devait y retourner, laissant la cendre de sa face en héritage à la condition terrestre, à cet être qui participe à la beauté ; et lui demande toujours un corps, sa juste image, dont par une espèce de miséricorde elle lui laisse quelquefois la trace: cendre ou poussière. Au lieu du néant, un vide qualitatif, pur et marqué à la fois, l'ombre du visage de la beauté lorsqu'elle se retire. Mais la beauté qui crée ce vide, ensuite, le fait sien, car il lui appartient, il est son auréole, l'espace sacré où elle demeure intangible. Où il est impossible à l'être humain de s'installer, mais qui le pousse à sortir de lui-même, qui amène l'être caché, âme accompagnée des sens, à sortir de soi ; qui entraîne avec lui l'existence corporelle et l'enveloppe, l'unifie. Et sur le seuil même du vide que crée la beauté, l'être terrestre, corporel, existant, capitule ; il livre ses sens, qui ne font plus qu'un avec son âme. Evénement qu'on a nommé contemplation et oubli de tout souci.
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Il y a dans la peinture, dans le tableau, si réussi soit-il, un état toujours en train de se faire.

Un tableau montre un événement qui est arrivé à quelqu'un, et qui arrive à qui le regarde.


Même quand l'objet contemplé subjugue, c'est le temps de la contemplation qui permet répit, liberté, liberté toujours.


Il faut apprendre à être mûs par la lumière.


Seulement dans la mélodie, il peut y avoir révélation, la mélodie est créatrice, imprévisible.


pp. 125, 97, 205 & 147
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La quête d'une chose perdue implique la persistance d'un obstacle qui barre le futur: l'étroitesse de "l'espace" temporel et par conséquent la difficulté de respirer dans le torrent du temps ; l'arrêt de vivre alors qu'on reste dans la vie.
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Dionysos, en pénétrant l'âme humaine, la sort d'elle-même, la fait danser dans une métamorphose libératrice ; il lui donne, en somme, le don de l'expression, de l'ivresse -- furie et oubli -- pour qu'elle ose s'exprimer. Telle est la vertu curative de Dionysos et l'origine sacrée de la médecine la plus humaine, de celle qui aujourd'hui tombe sous l'empire de la psychiatrie, comme à d'autres époques sous celui de la magie et de l'exorcisme religieux ; la guérison radicale de toutes les perturbations qui affectent un être humain à cause de ce qu'on appelle aujourd'hui ses "inhibitions" et, en d'autres temps, la possession démoniaque. p 72
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Si l'amour, non seulement pour s'exprimer mais aussi pour exister, a besoin de liberté, l'adoration, elle, repose seulement sur l'esclavage.
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Devient perplexe non celui qui ne pense pas mais celui qui ne voit pas. La pensée ne guérit pas ; elle peut au contraire, par sa propre richesse, produire elle-même de la perplexité. La vision, la vision de la vie elle-même, dans l'unité avec le reste, c'est là que guérit la perplexité.
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Danse et extase sont des états de l'âme où coïncident le plein mouvement et la pleine quiétude. L'âme recueillie en elle-même est dans beaucoup de lieux à la fois, elle voyage, transite, connaît.
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L'être n'est pas une question, il est une réponse. Et ce qui palpite, tant soit peu caché, dans cette nécessité d'aller qu'éprouve l'homme, c'est sa transcendance.
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Incorporelle, la clarté du matin danse. Comment ne pas voir dans la clarté du matin, dans sa danse parfaite qui est métamorphose, une pluralité de formes qui, tissées et détissées, ne prennent pas corps, se transforment inlassablement ? Elles naissent et se défont ; elles s'enlacent et se retirent ; elles se cachent pour réapparaître, comme le fait l'homme quand il est enfant et qu'il joue, ou quand il joue à ces jeux où s'éternise l'enfance : la musique, la poésie. p 60
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Un secret est toujours un secret d'amour.

La poésie demeure dans le sacré et pour cela requiert, exige, un état de sacrifice permanent.
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On dirait que la beauté tout entière est le voile de la vérité, que la vie même qui nous est donnée est le voile de l'être. Que, tant qu'il vit, l'être du vivant se dissimule à ses propres yeux, pour ne se déployer que dans le total abandon.
Et qu'un être divin n'en finit pas de mourir. Et de naître. Un être divin ; feu qui se rallume dans sa seule lumière.
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