Citations de Mathilde Monnet (38)
Discussion avec l'assistante sociale.
"Je ne comprends pas pourquoi tu fais une fixation sur les conseils de discipline. Je suis beaucoup de cas de harcèlement, et il y a très rarement des sanctions."
Un soir, un vendredi, je rentrais chez moi. Nous étions en juin. C'était la fin de l'année. L'air commençait à s'adoucir. Il faisait beau, il fait toujours beau quand on doit mourir.
Je répliquais, encore et encore. Du moins, j’essayais. Jusqu’à avoir le dernier mot. Tout cela me semblait d’une puérilité risible. À ce moment-là, je me trouvais encore belle, et de toute façon, il était évident pour moi qu’on ne pouvait juger quelqu’un sur son physique. On n’était évidemment pas sérieux.
Décidément, dans ce collège, entre l'infirmière qui me dit que tout le monde a des pulsions sadiques, l'assistante sociale que la justice n'aide pas les victimes et...
Partout, il y a l'injustice. Des adolescents sont battus sous les yeux complices des adultes. Des enfants se suicident.
Leurs mots me blessaient comme des lames de rasoir.
Le cercle vicieux avait été mis en place.
Rien de mieux que la haine pour souder un groupe.
Une fois, une seule, j'avais tenté de la dénoncer au professeur. Elle venait de s'acharner sur moi pendant deux heures. J'étais à bout de force. [...] Au début, il m'avait dévisagée, écoutant ce que je disais. Puis, soudain, il avait soupiré bruyamment et il était parti. Exactement comme si je n'existais pas.
Depuis je me suis repassée le film de chacun de ces instants censés être innocents. La trousse, les coups "pour rire". Si j'avais su...
Je ne comprends pas pourquoi tu fais une fixation sur les conseils de discipline. Je suis beaucoup de cas de harcèlement, et il y a très rarement des sanctions.
A quoi cela sert, au juste, de vivre ? Vous naissez et vous mourez. Le reste, ce n'est que souffrance. Les gens meurent. Les gens pleurent. Partout, il y a l'injustice. Des adolescents sont battus sous les yeux complices des adultes. Des enfants se suicident
Il y a des gens qui sont condamnés à se suicider. Ils n'auraient même pas dû naître, alors ils réparent cette erreur. J'en fais partie. Je dois sauter
Ce que personne ne comprit jamais, c'est que je ne pouvais lâcher Joachin, pour la simple et bonne raison que cette obsession venait de la souffrance d'être battue.
Je passais désormais les cours de sport à pleurer aux toilettes. Le professeur ne remarquait pas plus ma disparition que les coups que je recevais.
Si même les professeurs trouvaient cela normal, pourquoi est ce que cela devait me révolter ?
Cacher ce que je vivais devint un travail quotidien.
Remonter mes manches, tourner la tête, croiser les genoux, me pencher sur le côté, ou poser ma joue contre la table... Le moindre geste provoquait un flot d'insultes sans fin.
Ils ne supportaient pas non plus de me voir bouger. J'appris donc à contrôler mes mouvements.
En tout cas pour le moment, ce que je subissais relevait de l'ordinaire. Je devais m'y plier.