AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Maurice Bellet (42)


Quand je suis hargneux, ou désobligeant, ou irritable, cela ne se passe pas entre toi et moi, mais entre moi et moi.
Commenter  J’apprécie          50
Mais comment serait-ce possible ?
Qui peut s'en aller par là sans se perdre ? Et le cœur de l'affaire est peut -être ceci : l'en-bas, il faut le traverser. Pas d'évasion, pas de sortie par en haut.
Où donc est l'issue ? Où est le je-ne-sais- quoi, le changement, la mutation, qui n'enlève rien mais qui change tout ?
Tout, ou très grande part des discours, des exposés, sert simplement à masquer, refouler l'en-bas, y compris et surtout quand on en parle.
L'en-bas est - par nature ! - en dessous de toutes les interprétations et explications. Dès qu'on explique et interprète, on est hors de lui.
Commenter  J’apprécie          50
Quelle est, quelle peut être l'attitude du prêtre envers des hommes ou des femmes en psychanalyse qui viennent le consulter ?
Il convient d'abord de préciser dans quelle perspective j'aborderai cette question : ce sera dans la perspective du prêtre lui-même. C'est pourquoi j'userai sans hésiter de références à la foi chrétienne qui, pour un prêtre, sont tout à fait normales. ce faisant, je laisse évidemment de côté une question préalable : peut-on être prêtre, ou simplement croyant, sans être enfermé dans l'illusion ? Je suppose ici que c'est possible.
Commenter  J’apprécie          40
Telle est donc la perspective à laquelle nous aboutissons : l'ouverture d'une tâche, la nécessité de plus en plus urgente d'une recherche qui n'est sans doute qu'à peine entamée ; non seulement faire la "psychanalyse de la religion" et du croyant, ou tenter une théologie de la psychanalyse, mais chercher comment la foi chrétienne peut se réexprimer, selon sens fondamental, à travers le feu de l'expérience analytique.
Commenter  J’apprécie          40
Compulsion. : le président Kennedy court les filles. «Voyons, monsieur le Président ? - Je ne peux pas m'en empêcher.»
L'obsession sexuelle, l'alcool, la drogue, la fugue, les accès de violence, et, pour le pire, viol ou meurtre. «Je ne peux pas m'en empêcher. »
Du dehors, l'inadmissible. Du dedans, une culpabilité épouvantable.
On traîne ça comme un boulet. Quelquefois, souvent, c'est invisible – avec le risque d'apparaître un beau jour en pleine lumière. La vie bascule.

Ou bien, perversion : on considère le pire comme normal, ou plutôt on se refuse à toute norme. On n'en est même plus à la douleur. On est dévoré par l'abîme.
Infernale nécessité.
Commenter  J’apprécie          40
La conscience de l’ignorance croît comme le carré du savoir.
Commenter  J’apprécie          30
Si Dieu est Dieu, il n’est rien de ce que nous mettons en sa place, y compris sous son nom. Si Dieu est Dieu, il n’est pas Dieu.
Il est beaucoup plus haut — et beaucoup plus bas. Car il y a toujours distance ou fracture entre ce qu’il est, s’il est, et ce que nous en faisons.
Et s’il est en l’homme, c’est comme une ouverture prodigieuse, vers l’impossible et l’impensable à nos vues trop humaines. (p. 7)
Commenter  J’apprécie          30
Ici, ces références ont cessé. Le vide du désert ne s'inscrit en rien. Il n'offre aucun espace à la parole. L'homme religieux peut dire : Dieu est silence ; le sage peut dire : le Sans nom est au-delà de tout. Ici, que peut dire l'être humain ? Rien. C'est le Rub al-Khali de l'Arabie, le désert du désert où tout ce qui donnerait repères, pistes, source, habitation a disparu. Et c'est comme si tout ce qui a pu se dire sur la détresse humaine prenait un degré : la déréliction est si profonde que rien ne peut l'exprimer.
Commenter  J’apprécie          30
. L'ÉTRANGE COMMUNAUTÉ

Il arrive que des humains, hommes ou femmes, en viennent au seuil du désert.
Et d'où viennent-ils ? C'est divers. Mais ils ont en commun ce moment où se défait non seulement le sens de leur vie, mais leur vie elle-même, envahie par l'obscur et le désarroi. On savait se tenir et vers quoi l'on marchait. Il y avait une carte et des routes sur la carte. Mais maintenant, plus de carte, plus de routes. Tout ce qui faisait un monde habité, une existence à partager, semble se défaire. On dit : expérience banale de tous les moments de passage. Adolescents au seuil de la vie, vieillards au seuil de la mort. Ou bien, si la chose est trop forte, pathologie. C'est se débarrasser un peu vite de ce qui nous est signifié là.
Commenter  J’apprécie          32
Notre joie est dans les visages que nous nous donnons les uns aux autres; dans les visages, dans les voix et les paroles, et dans toute la présence qu'il est donné à notre corps de donner. Et nous nous contons des histoires. Les histoires, c'est le fond de l'homme.

À chacun sa vérité. Non pour se faire son petit jardin entouré de grillage, ou sa boutique, mais pour que le chemin que nous partageons trouve en nous le son juste. Car nous sommes l'orchestre où chaque instrument a le son qui lui est propre et la partition qui lui convient.

À chacun sa vérité, dans l'histoire qu'il peut conter et qui peut prendre toute forme. Ainsi aurons-nous entre nous la grâce de la conversation, et quelquefois ou souvent, à deux, dans telle relation opportune, où la parole vient à et défait les liens infernaux.
Commenter  J’apprécie          20
Le divin peut se dissimuler là où l’on n’y songeait pas et s’y montrer particulièrement ravageur. (p. 10)
Commenter  J’apprécie          20
Un passé irréparable, qui vous poursuit sans pitié, une douleur d'amour qui déchire encore et encore, un vice - la bouteille, la drogue, les petits garçons - ou tout bonnement, tout purement l'infernale tristesse qui défait tout, qui pourrit tout, et dont la source noire est introuvable.
Commenter  J’apprécie          20
Que Dieu existe ou pas n'est pas notre question.
Ce qui est sûr, en revanche, c'est qu'il y a du "Dieu" dans l'histoire humaine et dans l'actuel de notre société. Impossible de l'ôter de là, il y tient trop de place. De toute façon, il est dans mon passé, car il est dans le passé de l'humanité.
Commenter  J’apprécie          10
La rude exigence et l’âpreté du propos renvoient à leur néant les moqueries convenues qui, au sujet du sexe, accompagnent toute évocation médiatique de la "morale judéo-chrétienne".
Commenter  J’apprécie          10
"...C'est pourquoi cette voie qui est la simplicité absolue est aussi la tâche complexe et toujours à reprendre, selon le triple mouvement évoqué ici : du lieu clos à l'entier de l'homme; de toutes choses humaines en amour ; de tout ce qui met à part et sépare en service de l'insaisissable unité."
Commenter  J’apprécie          10
Argumenter avec la bêtise, c’est labourer avec le ciment
Commenter  J’apprécie          10
Maurice Bellet
Si Dieu disparaît, l’homme prend sa place !
Tel est le grand moment de l’athéisme d’Occident. Il est d’abord euphorique : c’est une libération, Dieu ne pèse plus, raison, désir, politique, tout se déploie sans que Dieu vienne limiter ou contredire.
Mais cette euphorie peut être trompeuse. Et Nietzsche, par exemple, annonçait lui-même une crise redoutable. C’est que, dans un temps second, c’est une responsabilité écrasante qui va peser sur l’homme. Dieu avait, si l’on ose dire, une fonction capitale, dont l’ampleur va paradoxalement se montrer dans la disparition de Dieu.
La fonction en question n’a pas de nom, parce qu’elle est en amont de tout ce qui pourrait la définir. Elle assure en l’être humain ce qui lui permet d’assumer sa condition humaine. La dire raison est à la fois trop étroit et équivoque ; la référer au langage est méconnaître qu’elle est parole inaugurale, autorisant l’être humain à parler. Cette fonction est ce par quoi l’ordre tient, c’est-à-dire ce qui fait que l’être humain peut se supporter d’être, bienheureusement séparé des peurs et fureurs primor-diales, de l’abîme de violence infinie où se déferaient même les violences ordinaires — où tout ne se-rait que cette nuit fulgurante et glacée, dont seuls quelques poètes ont pu, au plus grand péril d’eux-mêmes, approcher la parole.
Tant que Dieu est nommé en cette place, il peut en quelque sorte masquer l’urgence de la fonction ; la lutte même contre Dieu se nourrit de lui, l’ennemi à combattre peut servir de raison de vivre et de point d’appui. Mais on n’y tient pas indéfiniment. Il faut que la place soit prise. (p. 31-32)
Commenter  J’apprécie          10
Maurice Bellet
Mais il est un autre symptôme de l’effondrement de Dieu apparemment si paradoxal qu’il peut être invisible ou même prêter à contresens.
Car c’est un certain retour du religieux. Apparemment, en effet, il signifie que Dieu perdure et re-vient.
Croyance, prière, ferveur, mœurs saintes (au moins désirées), rituels et prédications enflam-mées… Mais Dieu, si j’ose dire, n’est plus en sa place de Dieu. Le Dieu n’est plus au cœur de ce qui fait la substance de la vie ; il prend place dans le grand jeu universel, il est la forme que revêt, pour cer-tains, devant l’angoisse qui menace de déferler, l’intense besoin de s’en protéger par la fixation sur des objets rassurants – et de surmonter la solitude meurtrière par le grand échauffement collectif. Le signe, cette fois, est que c’est une religion de l’immédiat, qui croit fermer la parenthèse des tristes années de doute et de questionnement. Elle est sans questions, c’est-à-dire sans pensée. Elle corres-pond assez exactement à ce qu’attend d’elle le monde de la consommation à outrance ; elle en a le style : satisfaction immédiate, euphorie, marketing.
En fait, cette religiosité vérifie l’athéisme : elle produit un Dieu qui est projection du désir et de l’angoisse. Elle rétrécit prodigieusement ce qui était l’espace divin. Elle anémie à fond ce qui en faisait la gravité et même le tragique. Elle défait Dieu. (p. 26-27 ; = retour du religieux ; = athéisme)
En ce cas, ce qui disparaît ici, ce n’est plus seulement telle ou telle croyance en Dieu, ou même l’idée de Dieu, ou même le mot ou tout mot semblable ; ce qui disparaît, c’est la région même où Dieu était nommé, j’entends : Dieu comme Dieu, dans sa puissance et sa présence (car il reste « inévitable », comme simple objet du passé).
C’est comme si Dieu avait été, au milieu de l’océan des détresses humaines, une île de sauvegarde. L’île a explosé. Il ne reste plus à sa place qu’une mer, lisse ou agitée, mais où l’île est oubliée. (p. 29)
Commenter  J’apprécie          10
Maurice Bellet
Le divin peut se dissimuler là où l’on n’y songeait pas et s’y montrer particulièrement ravageur. (p. 10)
Commenter  J’apprécie          10
Faudrait-il alors songer à l'expérience extrême des mystiques ou des grands initiateurs des voies de la sagesse ? Expérience rare, cette fois, réservée à peu de gens. Non, il s'agit d'autre chose, d'une expérience à la fois banale et extrême. En quoi, extrême ? Le mystique ou le sage peuvent connaître la ténèbre, mais c'est à l'intérieur d'un espace, d'un monde où il y a place, langage, chemins tracés ; où, en tout cas, l'épreuve la plus rude trouve ce qui la rend vivable, humaine et finalement pensable, fût-ce par une critique aiguë de toute prétention de la pensée. «Pour le juste il n'est pas de chemin», dit Jean de la Croix. Mais c'est au sommet du mont Carmel. Pour y monter, le chemin est précis et rigoureux.
Commenter  J’apprécie          10



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Maurice Bellet (98)Voir plus

Quiz Voir plus

Quel animal ?

L'homme qui murmurait à l'oreille des ... - Nicolas Evans

loup
lièvre
ours
serpent
mouches
homard
poissons
cerf
Rhinocéros
chevaux

10 questions
4 lecteurs ont répondu
Thèmes : animaux , titres , rapiditéCréer un quiz sur cet auteur

{* *} .._..