Le sentiment d'impuissance est l'une des pires expériences pour l'esprit moderne. Il contredit le modèle de l'individu gagnant, efficace, maître de lui-même et du monde, forgé par la culture occidentale. Ainsi que le montre Macy, il peut être d'autant plus difficile à assumer qu'il se double de la crainte d'apparaître soit trop pessimiste, soit trop émotionnel.
Les écopsychologues soulignent l'importance de veiller à ne pas utiliser la nature et les animaux comme de simples instruments visant à enrichir l'éventail des approches psychothérapeutiques habituelles.
Nous devenons écothérapeute quand nous ressentons cette souffrance et quand nous regardons la nature (notre nature humaine et celle du monde naturel) comme un maître et une source de guérison ; quand nous voyons que la souffrance humaine est intimement connectée à a destruction de la toile de la vie ; quand la guérison consiste à opérer de profonds changements dans la manière dont nous vivons et entrons en relation avec le monde alentour.
[Andy Fisher] L'écospychologie affirme notre amour humain profond pour la Terre et ses créatures, notre attirance érotique pour les réalités sauvages et sensuelles, notre désir inné de connaître les étoiles et les planètes, les oiseaux et les mammifères. C'est de là d'ailleurs que vient l'énergie qui pousse les écothérapeutes à quitter leur cabinet et sa dévotion à la posture assise,à sortir de leur murs pour aller danser avec le vent.
Toile de la vie : l'expression, consacrée par un livre de Fritjof Capra, désigne le monde vivant dans son ensemble et sa diversité, appréhendé comme un système complexe où tout est en interrelation et obéit à des dynamiques de réseaux.
Il s'agit de prendre conscience de la valeur précieuse de tous les êtres autres qu'humains, du rôle qu'ils jouent dans notre vie, de l'impact que leur dégradation peut avoir sur les individus et les sociétés. Cela suppose de regarder la Terre non plus simplement comme un objet d'étude, un stock de ressources ou un ensemble de paysages, mais comme l'habitat naturel de la psyché humaine. La nature est une forme de famille élargie dont nous sommes membres. Elle est une communauté biotique composée de sujets avec lesquels il est non seulement possible, mais nécessaire de développer des relations réciproques et harmonieuses.
On peut retourner le problème dans tous les sens, relativiser ce qui doit l'être, les faits n'en demeurent pas moins têtus : la planète est malade.
"La psychologie, qui se consacre tant à l'éveil de
la conscience humaine, doit s'éveiller elle-même à
l'une des plus anciennes vérités humaines nous
ne pouvons être analysés ou soignés indépendam-
ment de la planète."
James Hillman
La psyché collective et individuelle de l'Occident a été formatée par une vision du monde très dualiste et matérialiste, très "cerveau gauche" et masculin. L'être humain a réduit la Terre à un stock de ressources et à une marchandise. Ce faisant, il s'est "dé-naturé". Notre mode de développement a créé des déserts extérieurs et intérieurs. N'est-ce parce que nos cœurs sont trop froids que le climat se réchauffe ?
dans le magazine "Psychologie hors série n° 74 de décembre 2022 et janvier 2023.