Citations de Michelle Zink (24)
- Tu aimes beaucoup Edmund, non ?
J'acquiesce d'un signe de tête.
- En dehors de tante Virginia, il représente ce que j'ai de plus proche en matière de famille. Il a veillé sur moi...
J'inspire profondément, submergée par les souvenirs.
- Il a veillé sur moi dans de bien terribles occasions. Sa force m'a permis de croire que j'avais parfois le droit de faiblir. Cela fait tellement de bien s'appuyer sur quelqu'un pendant un petit moment.
Le soleil est un guerrier qui se bat vaillamment contre les nuages plombés qui cherchent à le dévorer.
Que nous souhaitons vivre tranquillement une vie d’épouse ou sur le devant de la scène, une existence de souveraine. A la fin, nous désirons tous la même chose : vivre.
Il pose ses lèvres sur les miennes. Un baiser très doux, mais je n'ai pas besoin de la pression de ses lèvres pour sentir l'urgence de son désir. Il recule, il tente de me protéger, de ne pas se faire insistant si peu de temps après la mort de papa. Il n'existe aucune façon convenable pour une dame de lui dire qu'il peut insister tant qu'il veut, que sa bouche et son corps contre le mien sont les seules choses qui m'empêchent de perdre le sens de cette réalité qu'avant ces derniers jours je n'avais jamais remise en question.
Mes yeux verts sont insondables, vides. Je me demande si le corps peut se retourner comme un gant, laissant la tristesse ainsi révélée s'exposer à tous les regards à travers les veines, les organes et la peau.
Mr Wigan chausse ses lunettes et nous scrutons tous cette carte, Edmund compris. Je croise son regard : j'accepte qu'il connaisse notre secret. Il était le plus vieil employé de mon père. Son plus vieil ami. Si je ne lui fait pas confiance à lui, à qui ferais-je confiance?
Elle avance vers moi, elle sourit de son vrai sourire d'Alice et je sais que c'est lui que je reverrai quand je penserai à ma sœur. Ce sourire éclatant qui pousse n'importe qui à faire presque n'importe quoi pour en sentir la chaleur. Elle pose sa main sur la colonne, à côté de la mienne, et elle se penche jusqu'à ce que nos fronts se touchent, comme nous faisions lorsque nous étions enfants.
-Eh bien, d'après ce qu'on m'a raconté, les soeurs d'une certaine lignée continuent le combat encore aujourd'hui. L'une demeure la Gardienne de la paix dans le monde matériel et l'autre la Porte que les Âmes doivent franchir.
Je me souviens de Henry qui essayait de se montrer courageux, mais qui était incapable de dissimuler ses larmes en voyant son petit bateau tanguer tant et plus sur la rivière. Je me souviens d'Alice qui ne voulait pas me voir construire ce malheureux radeau, qui refusait même de m'aider. Et je me souviens de moi, empotée et ruisselante de sueur dans ma robe chasuble, en train de clouer maladroitement les planches disparates parce qu'il était inconcevable de rester plantée là à regarder Henry pleurer alors que son jouet bien-aimé était en train de disparaître.
Les barrières sont tombées entre nous. Je ne suis pas en train de prier notre domestique de me conduire en ville. Je pose la question à Edmund, l'homme qui ressemble désormais plutôt à un père pour moi.
Elle cherche ma main et la saisit, comme elle faisait quand nous étions petites. Sa main n'est pas plus grande que la mienne et, pourtant, à une certaine époque, je me sentais toujours en sécurité quand je tenais la main d'Alice. J'ignore pourquoi elle me dit qu'elle est navrée, mais j'ai bien peur de le savoir bientôt... Ma main ne sera plus jamais en sécurité dans la sienne.
Au moment où nous nous rangeons pour le dernier cours, "le paysage dans l'art", je ne peux m'empêcher de remarquer l'expression figée du visage d'Alice et sa façon de se tenir, la tête très haute, le dos trop droit. Elle évite de croiser mon regard. Pour Alice, l'isolement est préférable à la pitié.
Sa force m'a permis de croire que j'avais parfois le droit de faiblir.
Je refuse d'entendre l'opinion de gens qui me jugent sans même me connaître.
''Je t'aime de toute façon, Lia, déclare-t-il. jusqu'au verdict du temps"
« Deux sœurs, formées dans le tangage du même océan, l’une la Gardienne, l’autre la Porte. L’une protectrice de la paix, l’autre choisissant la sorcellerie contre la foi. »
- Ne sois pas triste, Lia, me dit-il alors comme s'il devinait mes pensées. Nous nous retrouverons un jour.Le voile noir qui recouvre tout se soulève à peine et je réussis à sourire.
- Oui, Henry. Nous nous retrouverons.
Je me penche pour le prendre dans mes bras.
- Je savais que ce n'était pas toi la méchante, Lia. Je le savais.
Maintenant , je peux plonger mon regard dans ses yeux sombres. J'y vois de l'amour. De l'amour, de la vérité, de la lumière.
Toutes les valeurs pour lesquelles je me bats.
Il dit cela simplement, comme s'il m'avait cherché partout depuis toujours et qu'il me trouvait enfin dans l'endroit le plus improbable.
Apres avoir attache nos chevaux a un bosquet, nous remarquons, Luisa et moi, que Sonia est toujours perchee sur Clair de Lune.
- Edmund.
Ma voix se brise en prononçant son nom.
Il est en train d'astiquer lentement la voiture, le dos tourné à la porte. Il s'arrête en s'entendant appeler, la main encore levée au-dessus de la portière rutilante; depuis trois jours que Henry est mort, on dirait bien qu'il n'a fait que ça. Il se retourne vers moi et je le regrette, tant son regard est chargé de tristesse, accablé de chagrin. J'en ai presque le souffle coupé.