Erminia leva les mains et entre elles apparurent alors la silhouette tournoyante d'une femme prise dans un tourbillon. Fabrizio resta le souffle coupé car la vision tournait gracieusement dans l'eau. La tête de la femme était rejetée en arrière et sa bouche ouverte. Soudain, un homme vêtu comme un marin tomba à la mer. La femme l'étreignit et l'entraîna plus profondément dans l'étroit entonnoir. Erminia essuya l'air du bout de ses doigts et la vision disparut.
-Madona di Cristo, bredouilla Fabrizio en se signant. Une sirène? Vous êtes une sirène?
Elle hocha lentement la tête et lui prit la main d'une poigne solide tout en formant une nouvelle vision, un labyrinthe qui s'élevait au centre d'une grande ville. Un nom était gravé sur les immenses portes en bois.
-Labirinto, lut Fabrizio à voix basse. Le labyrinthe des maudits.
Elle savait d’expérience qu'en regardant directement le labyrinthe on ne voyait que de grandes haies vertes. Mais si elle détournait les yeux, il frissonnait d'une seconde vie, à la périphérie de sa vision. Une fois, un visage la regarda par une ouverture et lui tira la langue. Un autre jour, Zizola eut le souffle coupé lorsque la tête couronnée de feu d'une manticore traversa le fourré, puis fut ramenée à l'intérieur. Elle avait vu les flèches d'une tour de marbre dépasser les murs verts durant le temps d'un soupir, puis tout aussi rapidement s'évanouir dans la brume. Et des anges ailés, armés d'arcs en argent, combattre des serpents qui soufflaient le feu et la fumée.
Il y a des merveilles cachées dans le labyrinthe. Des cités s'élèvent de la brume en une seule nuit et s'évanouissent au matin. Des forêts y poussent et les vagues d'un océan se brisent sur une plage de sable diamantin. Il est peuplé d'anciens dieux, de diables et de démons. Et même de dragons plus dignes de ton épée que ces maris outragés. On dit qu'il y coule un ruisseau si pur que ceux qui y boivent redeviennent jeunes...