AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Nathalie Sarraute (279)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Enfance

C'est une autobiographie d'un genre particulier et que j'ai trouvé résolument moderne et intéressant.



Dans la forme, y'a du génie. Il n'existe pas de chapitres, j'ai apprécié cette idée, car je n'ai jamais perçu la vie ou les souvenirs comme étant des chapitres. Ainsi, les très nombreux blancs séparent des « moments », des fragments que l'auteur tente de mettre en forme, on suit ses hésitations, ses interrogations, ses hypothèses...



J'ai adoré ne pas avoir de repères chronologique, ou très peu, l'on se doute qu'elle ne se souvient plus vraiment de son enfance et qu'elle se doit de faire un effort considérable pour nous faire partager ces instants.



On apprend à s'attacher à cette petite Natacha, une petite fille qui grandit peu à peu, ses « idées » parfois étranges, sa famille recomposée, tout ceci à travers des objets, des lieux, des moments, des phrases. On peut ne pas adhérer à cette forme d'écriture, et généralement, j'avoue que j'accroche peu Camus, Beauvoir et cie. Toutefois, je me suis laissée embarquer à suivre cette enfance.



L'auteur parle très fréquemment de ses premiers contacts dans le monde de la lecture et de l'écriture, ces passages sont par ailleurs mes préférés. L'évolution des personnages est palpable, notamment les attitudes de sa mère et de son père, parfois distants, tantôt passionné à l'égard de Natacha. Je l'ai souvent sentie seule. On évoque aussi ses souvenirs de classes, moins fréquemment que ceux concernant les mots ou la famille.



Un point qui peut paraitre étrange c'est la distance prise par l'auteur pour parler des personnes qui l'on entouré petite. Je parlais plus haut des parents, mais sa belle-mère Vera, sa demi-sœur Lili, sa famille, Adèle, les amies d'enfance... Tous ses personnages défilent, certains sont plus récurrents que d'autres, mais tous paraissent être à des années lumières de Natacha et de son monde. Peut-être parce que l'auteur ne se souvient pas ou peu.



D'ailleurs, fait positif, lorsque l'auteur ne se souvient pas de quelque chose, elle le dit très clairement. Ce qui me permet de parler de ces histoires de dialogues avec son double. Au début on pourrait croire que c'est agaçant, de se faire couper comme ça en plein milieu d'un récit, on peut même détester ce double au tout début du roman. L'auteur ne souhaite pas vraiment évoquer ses souvenirs d'enfance et son double se moque un peu de sa « vieillesse », c'est tout le contraire à la fin. Le double intervient, pose des questions, il est là pour pousser l'auteur à se souvenir, tant est si bien qu'il est déçu qu'elle n'aille pas plus loin à la fin. J'ai trouvé ces dialogues pertinents intéressants, comme des parenthèses dans le récit déjà coupés par les blancs.



L'écriture est fluide, rapide à lire, intéressante dans le choix des mots. On se sent pris dans l'histoire de l'auteur, son enfance nous est bien contée, les moments choisis sont touchants et intéressants. L'on ne s'ennuie pas ou alors très peu.


Lien : http://la-citadelle-des-livr..
Commenter  J’apprécie          50
Enfance

Ce que j'ai trouvé remarquable, c'est que l'auteur a rédigé ces fragments à l'âge de 83 ans, comme quoi, il n'est jamais trop tard pour se souvenir. C'est justement intéressant d'avoir un texte fragmenté, parce que quand il s'agit de souvenirs, généralement ce n'est jamais linéaire, on se souvient de quelques bribes et détails, mais jamais du souvenir dans son intégralité, encore moins quand on l'écrit 75 ans plus tard, j'imagine et c'est véritablement ce qui donne de la force à ses écrits. On découvre une petite enfant russe qui, balloté entre sa mère et son père se retrouve entre la Russie et la France principalement, mais qui, - j'en ai eu l'impression en tout cas - s'est toujours sentie chez elle à Paris.



Ce que j'ai aimé, c'est la sincérité dans le récit, l'auteure parle franchement de ses souvenirs dans un dialogue entre deux parties d'elle-même, sa face que j'appellerais "naïve" qui est l'enfant, et l'autre, celle qui a raisonné et grandit. De cette façon l'une des deux voix met toujours l'accent sur une chose en particulier, sur l'interprétation d'une action d'autrui, sur ses sentiments aussi ce qui rend le récit vraiment personnel. Sincère également parce qu'elle ne s'encombre pas, elle n'écrit pas pour combler les blancs, elle se souvient ou elle ne se souvient pas et quand c'est le cas, elle le dit ce qui est agréable, on n'a pas à se poser la question de savoir si on est mené en bateau. La naïveté de l'enfance est elle aussi bel et bien présente avec notamment ce passage où elle demande carrément à sa belle-mère si celle-ci la déteste.



Globalement, ma lecture m'a plu, j'ai pris du plaisir avec ce livre, c'était cool, sans être extraordinaire non plus. Le fait qu'elle ne parle que de ses 10 premières années - la période correspondant à l'enfance comme l'indique le titre - amène certains sujets assez ennuyeux, du moins pour moi - je pense par exemple aux moments où elle parle de l'école, l'importance que l'école française a eue sur elle et à quel point ça a compté dans sa vie. Toute cette partie là m'a un peu ennuyé parce que je n'ai pas du tout le même ressenti qu'elle sur la chose donc je ne me sentais pas très concerné. En revanche, les passages où elle parle de sa famille sont vraiment intéressants parce qu'on peut en apprendre plus sur la mentalité des gens à cette époque, sur son père qui ne supportait pas de parler d'amour ou de toute autre sentiment fort (comme le dégoût) ou encore sa mère qui, va savoir pourquoi décide de laisser sa fille chez son père pendant trois ans, comme ça, genre "tiens, je vais me prendre des vacances pendant trois ans, ma fille ne sera pas dans mes pattes".

Alors je m'attendais à mieux parce que j'ai énormément aimé Simone de Beauvoir comme je l'ai dit plus haut et pour le coup, bah Nathalie Sarraute n'est pas arrivée à la hauteur malgré la sincérité, malgré la forme du récit. J'ai un peu moins accroché parce que je me suis bien moins identifié, tout est question de ressenti.



Mon avis est en intégralité sur mon blog :
Lien : http://allaroundthecorner.bl..
Commenter  J’apprécie          72
Enfance

quelle magnifique autobiographie!!

moi qui ne connaissais pas Nathalie Sarraute et bien voila qui est fait !

L'originalité du dialogue réside dans les locuteurs : elle et son double.

J'ai adoré aussi les allers retours entre Paris , Moscou, Saint -Petersbourg.

Très belle réflexion sur sa vie passée, son enfance et son présent...
Commenter  J’apprécie          50
Enfance

Un vrai moment de bonheur!

La construction de ce livre le rend extrêmement vivant par l'introduction du dialogue avec son double,
Commenter  J’apprécie          60
Enfance

J'ai adoré ce livre, on me l'a donné à étudier en première littéraire et j'ai été touché par cette vague de nostalgie quelques peu amères car son double lui plaque en plein visage ses interrogations, ses erreurs.

Mais j'ai également aimé cette grande toile d'araignée qui s'étends devant nous, décrivant les différentes relation qu'à Nathalie Sarraute avec les membres de sa famille.
Commenter  J’apprécie          20
Enfance

Dans ce texte Nathalie Sarraute fait resurgir ses émotions, sensations et impressions d'enfance pour ébaucher sous un angle tout à fait particulier son auto-portrait en petite fille.

C'est assez inattendu. L'image fragmentée donne l'impression de regarder un dessin à la façon de Picasso. En début de lecture j'ai été déconcertée par ce style quasiment cubiste avec ses différents points de vue et le morcellement de la narration. Puis je me suis habituée pour finalement apprécier cette itinérance dans les souvenirs de la petite Natacha. Je l'ai découverte avec gourmandise, à petite dose, comme en grignotant une petite madeleine que l'on laisse fondre sur la langue pour bien en savourer le goût . Ce goût ineffable de l'enfance à la saveur douce-amère que l'on garde tous en bouche, qui s'estompe avec le temps mais que l'on aimerait pouvoir raviver éternellement. Un prodige que seule la littérature peut accomplir...

Nathalie Sarraute qui a découvert très tôt le pouvoir des mots, nous livre ici une émouvante démonstration de leur puissance aussi bien enchanteresse que maléfique.
Commenter  J’apprécie          320
Enfance

Enfance de Nathalie Sarraute m’avait été conseillé par ma prof de français au lycée l’année du bac et ce n’est que quelques années après que je l’ai lu. J’avais toujours eu un a priori négatif envers les autobiographies : le genre, tel que mis en avant, concernait principalement des politiciens et des candidats de télé-réalité qui auraient soi-disant le temps et le talent pour écrire leurs mémoires ! Outre le manque d’intérêt à les lire, le biais du point de vue et l’impossibilité d’être aussi exhaustif que le demande une autobiographie suffisaient à rendre ce genre contestable et factice. En bref, dans mon idée, c’étaient des livres d’opportunité qui ne méritaient même pas le temps passé à les lire. Et puis, Enfance. Nathalie Sarraute y raconte son enfance comme moi-même je me souviens de la mienne : parcellaire, biaisée par les récits qu’en fait ma famille et souvent ce qu’il en reste est inconséquent. Une révélation qui m’a réconciliée avec le genre.
Commenter  J’apprécie          40
Enfance

Alors qu'est-ce que ce livre ? Nathalie Sarraute nous raconte quelques moments de son enfance qui lui reviennent par morceaux. Le tout sous forme d'un pesudo dialogue avec elle-même. Rien de bien intéressant me direz-vous. Et je vous répondrais que en effet, rien de bien intéressant ^^.

C'est même tellement peu intéressant et il y a tellement peu à raconter que la majorité des chapitres font 2 pages! Hé oui, une fois que t'as raconté que quand t'étais petite, t'aimais bien pour ton 4 heures manger des biscottes avec de la confiture et boire un verre de jus d'orange, il n'y a plus grand chose à ajouter (je caricature bien sûr, mais ça ressemble vraiment à ça).

Ce livre, c'est finalement plein d'anecdotes comme ça, inintéressantes au possible et dont on se fout royalement ; "quand j'étais petite, je suis allée à la pêche" ; "quand j'étais petite, je suis allée au courses avec ma maman" ; et bla bla bla, et bla bla bla pendant 277 pages.

En fait, ce livre m'a rappelé mon adolescence, quand je n'aimais pas lire car je pensais que tous les livres étaient ennuyeux, tellement les profs nous donnaient à lire des livres inintéressants.

Ce livre est d'un ennui intersidéral, voire intergalactique.

Alors oui, il y a des tournures de phrases par moment que tu trouves jolies, c'est bien écrit, mais même dans ces moments là, tout est gâché par ces points de suspension qui apparaissent toutes les 2 lignes. Tu as juste envie de lui dire : "mais tu vas les finir tes putains de phrases oui ?!"

Vous aurez compris : j'ai détesté.
Commenter  J’apprécie          81
Enfance

La lecture de cette autobiographie, par l’écriture si riche de Nathalie Sarraute, a été un plaisir du début à la fin. Le dialogue entre l’autrice et ce qui semble être sa conscience est à la fois inédit tout en étant indispensable dans cette autobiographie ; un dialogue qui peut faire écho à nos propres pensées et démontre l’incroyable travail qu’est la recherche du souvenir dans toute sa vérité, notamment en recherchant avec application l’émotion exacte qui a traversée l’autrice lors d’un événement précis, en tentant de démêler des morceaux d’enfance dans le chaos qu’est le « moi ».



Par son écriture et la recherche constante de la vérité que nous fournit sa conscience, j’ai eu plusieurs fois l’impression d’être plongée dans les pensées de l’autrice, tout en ayant, comme elle, l’envie irrépressible de s’approcher au plus près de ce souvenir, de cette enfance dispatchée entre une mère absente et un père aimant vivant avec une femme dont on ne sait que penser ; entre deux cultures et deux langues : la Russie et la France ; au milieu d’une époque charnière où les adultes n’ont pas bénéficié des enseignements de la psychanalyse, commettant ainsi ce qui nous semble désormais de terribles erreurs dans l’éducation de l’enfant ; une enfance marquée par les mots : à la fois les mots cruels et destructeurs des adultes, ainsi que leur puissance et leur beauté dans les romans qui ont baigné son enfance, dans l’écriture qui semble soudain devenir si libératrice tant les mots bouleversent l’autrice et lui permettent de donner une dimension nouvelle à ses pensées.



Cette restitution de l’enfance en « morceaux » est d’autant plus attrayante. J’ai eu l’impression de me retrouver au cœur des souvenirs, qui n’arrivent parfois que par bouts, marqués par des paroles, par un événement, par une émotion, faisant de cette autobiographie une écriture beaucoup plus proche de la réelle remémoration. Une démarche chronologique n’aurait certainement pas été aussi efficace, car dans « Enfance », on retrouve la réelle immersion dans le passé dispersé aux quatre coins de notre conscience. Je n’ai d’ailleurs pas pu m’empêcher d’être ébahie par la clarté des souvenirs de Nathalie Sarraute, par leur précision et par la palette d’émotions que l’autrice tente de restituer. Plongée dans ces fragments d’enfance, j’ai été touchée par cette enfant qui, des années plus tard, a ressenti le besoin de mettre les mots sur l’indicible, sur la souffrance, les blessures des paroles, mais qui décrit également la beauté des paysages, les joies, la vitalité de l’enfance, le bonheur qu’elle trouve à l’école et la naissance de l’amour pour les mots. Sous sa plume, ces souvenirs semblent prendre vie.
Commenter  J’apprécie          163
Enfance

Très honnêtement je n'ai pas du tout accroché à ce livre...

Je pense que le genre du nouveau roman n'est pas fait pour moi...

Même si suivre les pensée, les souvenirs de Nathalie Sarrault était intéressant, je me suis vite perdue dans les différents "moi" de l'autrice. J'ai même cru au début de ma lecture qu'il y avait deux personnes...c'est pour vous dire...



Sa plume est très belle, fluide et les événements racontés s’enchaînent très bien mais l'absence réel de personnage classique m'a vraiment perturbé.

En bref, ce n'est pas encore pour moi ^^'
Commenter  J’apprécie          61
Enfance

Les livres de Nathalie Sarraute (que j'ai lus) m'ont tous semblés étranges, entre un n'importe-quoi facile et insupportable, et un génie que je ne saisis pas. Ce livre-ci est forcément plus compréhensible, car son cadre est clair, une forme d'autobiographie de son enfance, sous forme d'un dialogue avec elle-même, avec le recul des années. La forme et le fond ont fonctionné pour moi, m'ont touchés par instants. Ces instants où les mots, qui ne sont jamais que tout chez elle (Sartre l'ayant précédé avec son propre autobographie enfantine 'Les Mots"... mais tout y est contenu, et contenant), viennent faire sourdre des trucs en soi, faire résonner des trucs en soi. Difficile de savoir quoi, alors on emploie le mot truc. Et on se dit qu'heureusement certains auteurs n'écrivent décidément pas comme tout le monde.
Commenter  J’apprécie          51
Enfance

Un de mes préférés de l'auteure. Nathalie Sarraute nous raconte ses souvenirs, ses joies mais aussi ses peines, elle se confie aux lecteurs de façon très touchante et originale. En plus c'est très bien écrit.
Commenter  J’apprécie          30
Enfance

Une autobiographie certes mais pas seulement..

Outre la qualité d'écriture de Sarraute qui nous fait partager son Enfance et nous emporte, l'oeuvre s'inscrit pour moi dans la modernité. Elle interpelle par sa forme peu commune, un dialogue entre Sarraute et une autre voix, et par son contenu bouleversement qui nous touche directement.

C'est plus la forme qui m'intéresse : je ne crois pas que l'autre voix soit elle-même, c'est possible mais il apparaît plus probable que ce soit le lecteur, nous. Elle nous intègre à son oeuvre, nous invite littéralement à partager son monde. Nous ne sommes plus spectateurs, lecteurs passifs et soumis à l'écriture de l'écrivain, mais interlocuteur, acteur du livre, lecteur actif. Oui, nous sommes là ! J'ai particulièrement aimé cette méthode, elle m'a emporté moi qui pensais être étouffée par cette voie ( ce lecteur ) déjà présente, je me suis laissée aller à la lecture, plus que je ne l'aurais cru.

Et quel plaisir !
Commenter  J’apprécie          40
Enfance

Depuis quelques jours, je suis plongée dans un livre que j’aime beaucoup et que je relis régulièrement : Enfance de Nathalie Sarraute. Dire que c’est une œuvre qui me parle est un euphémisme : je crois que j’en goûte chaque phrase, chaque mot, chaque silence. J’ai l’impression certainement inexacte d’ailleurs d’en saisir précisément le sens, la nuance, le sous-entendu. Aucune œuvre, peut-être, ne me donne à ce point le sentiment d’être en phase avec elle au point que tout me fait signe, le moindre pronom, la plus petite virgule… Bien sûr, c’est une œuvre qui m’est familière mais elle porte dans son écriture, dans les mots qui sont les siens, ses silences, d’autres mots qui me mènent sur d’autres voies que l’auteur a entrouvertes et dans lesquelles je me glisse. Je me dis que pour aimer autant cette œuvre, je dois y lire des bribes de ma propre histoire, oui, c’est certainement cela, un écho, une résonance, sans quoi, il ne pourrait en être ainsi…

Pour comprendre Enfance, il faut avoir à l’esprit Tropismes, texte qui est quasiment passé inaperçu lors de sa sortie en 1939. Il sera réédité plus tard chez Minuit et deviendra l’œuvre fondatrice d’un mouvement littéraire : le Nouveau Roman. Sarraute emprunte le terme tropisme au vocabulaire de la biologie : il s’agit d’un « mouvement d’approche ou de recul provoqué par une excitation extérieure comme la lumière ou la chaleur sur les animaux ou les plantes. » Le plus bel exemple, c’est l’héliotrope qui tourne inlassablement sa tête vers le soleil. Eh bien, Nathalie Sarraute s’attache dans son autobiographie à décrire ses tropismes d’enfance, autrement dit à exprimer le plus exactement possible les sensations qu’elle a pu ressentir et le tropisme qui est à l’origine même de sa réaction. En effet, ce qui intéresse l’auteur, c’est d’observer les mouvements réflexes, instinctifs, irréfléchis et complètement indépendants de notre volonté qui gouvernent cependant notre être soumis ainsi à des phénomènes extérieurs : une parole, un regard, un mouvement… Tropismes à saisir « avant qu’ils disparaissent », titre proposé initialement par Nathalie Sarraute pour Enfance.

Elle se lance donc dans une entreprise difficile : évoquer ses souvenirs d’enfance. Mais ayant refusé en tant qu’auteur et théoricienne du Nouveau Roman, les notions de personnage, d’histoire et de chronologie présentes dans le roman classique, elle porte naturellement sur le genre autobiographique un soupçon difficilement compatible avec l’entreprise dans laquelle elle se lance. En effet, comment écrire son enfance sans être tenté de la reconstruire, de l’embellir, d’y introduire à tout prix de la cohérence, enfin de bâtir de toutes pièces une histoire qui ne serait pas la sienne ? Comment éviter de plaquer sur le « je » enfant le « je » adulte ?

« Toutes les autobiographies sont fausses » déclare celle qui se lance dans une entreprise bien périlleuse. Tout cela explique cette espèce de difficulté de Nathalie Sarraute à passer à l’acte au début de l’œuvre, cette retenue, cette crainte et… l’idée absolument géniale d’une espèce de dialogue ou de « monologue à deux voix », un deuxième « je », un double, sa conscience peut-être, qui va, tout au long de l’œuvre, sans cesse l’interroger, la pousser à aller plus loin dans les profondeurs de son être, émettant parfois des réserves pour mieux relancer l’auteur sur le chemin de la vérité. Une deuxième voix à la fois garante et au service même de cette vérité… L’écriture fragmentaire viendra restituer la fugacité des instants et le surgissement involontaire de la mémoire, refusant par là même de trouver à toute force une continuité narrative et temporelle qui risquerait de flirter avec le romanesque. Un texte « en morceaux », soixante-dix unités autonomes, qui expriment le chaos de la mémoire et une représentation éclatée car devenue problématique du moi.

Son texte est beau, poétique, il touche à l’essence même de l’être comme aucun autre texte qu’il m’a été donné de lire et c’est peut-être de là qu’il tire toute sa force.

Une enfance passée entre une mère fascinante mais absente, un père attentif et aimant et une belle-mère difficile à cerner tant elle oscille constamment entre des moments de complicité et de rejet, une enfance entourée d’adultes qui n’ont pas baigné comme les générations suivantes dans les enseignements que l’on a pu tirer de la psychanalyse et qui commettent ce qui nous semble à présent des erreurs terribles dans l’éducation de l’enfant, une enfance enfin partagée entre deux pays, la France et la Russie, deux cultures et deux langues.

Une œuvre puissante écrite par une femme âgée qui à mon avis a senti la nécessité de dire l’indicible, le terrible, la souffrance qu’elle a portée en elle toute sa vie. Elle a voulu retrouver le pouvoir destructeur des mots entendus enfant et avec lesquels il a fallu vivre, mots si violents et si cruels qu’ils peuvent même conduire à la folie.

Un travail insensé, ce dont témoignent des brouillons très chargés, pour traduire précisément les sensations ressenties des décennies plus tôt, les sentir battre sous la plume et trouver les mots justes ou s’approchant au plus près de ce qui a été vécu à ce moment-là afin de retrouver intacte l’émotion.

Un très grand texte.


Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
Commenter  J’apprécie          593
Enfance

Un dialogue quelque peu original et qui peut perturber au début. Mais on s'y fait. On a l'impression par ce dialogue entre Nathalite Sarraute et son double d'être dans ses propres pensées, et de chercher avec elle, les souvenirs de son enfance. La recherche de souvenirs y est d'ailleurs parfaitement mené, de la joie à la tristesse en passant par la honte, elle nous délivre tous ses ressentis quasi intacts de petite fille. D'une grande honnêteté avec elle-même (et donc avec nous lecteur), elle avoue ses trous noirs, ses incompréhensions à se souvenir de telle personne, de tel lieu, et pas d'un autre et même ses difficultés à mettre un mot sur certains souvenirs.



Un retour en arrière de la petite fille qui petit à petit s'amusera des mots, des langues, à la femme écrivaine.
Lien : http://huitiemedecouverture...
Commenter  J’apprécie          60
Enfance

Quelle étonnante découverte !

Je n'ai jamais rien lu de Nathalie Sarraute, l'associant à Marguerite Yourcenar que je trouve parfaitement hermétique (enfin, c'est mon avis).

Or là, surprise, une écriture fluide et vivante.

L'auteur raconte son enfance sous forme d'un dialogue avec elle-même, la poussant à aller de plus en plus loin dans la précision de ses souvenirs.

C'est parfaitement bien mené. Aucune lassitude en lisant, juste de l'admiration pour se souvenir aussi bien de son enfance, moi qui en ai tant oublié.

Elle décrit superbement les joies, la vitalité de l'enfance, mais aussi ses désespoirs, l'impact que peuvent avoir certaines paroles prononcées par les adultes, les blessures qu'elles engendrent, la confiance trahie, la solitude quand on ne sait plus à qui se confier.

A l'école, elle trouve sa place, hors de sa mère qui l'abandonne plus au moins et de sa belle-mère si froide et indifférente.

On sent naître son amour pour les langues et les mots, la naissance inconsciente de sa future vie d'écrivaine.

Nul doute que je vais lire ses romans.

Commenter  J’apprécie          918
Enfance

Retour en enfance avec les souvenirs de Nathalie Sarraute. Ce livre autobiographique regroupe les souvenirs de l'auteur de son enfance.

On la retrouve enfant essayant de se faire place parmi une vie un peu compliquée, et où elle ne se sent pas forcément aimée.

Commenter  J’apprécie          10
Enfance

J'ai apprécié ce livre , l'auteur exprime bien ses émotions sur ce qu'il a vécu . L'écriture est fluide , on comprend facilement les évènements néanmoins il y a certains passages qui étaient assez long .
Commenter  J’apprécie          00
Enfance

Bon j'avais 16 ans et j'étais forcée de le lire pour les cours ! Ça joue peut-être un peu...mais j'en garde tout de même un très mauvais souvenir.

Long....plein de descriptions.... Tout ce que je n'aime pas !



J'essayerai (peut-être) un jour de le relire. Et cette fois sans me forcer un dimanche aprem pour le lundi matin !
Commenter  J’apprécie          20
Enfance

Je me suis réconcilié avec Nathalie Sarraute avec ce roman-ci.

Un véritable coup de coeur pour cette oeuvre !

Un dialogue avec sa conscience qui nous emmène au coeur d'un problème bien connu, le souvenir. Comment l'évoquer ? Est-on fidèle à notre mémoire, notre mémoire nous est-elle fidèle ? J'ai donné 5 étoiles.
Commenter  J’apprécie          80




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Nathalie Sarraute Voir plus

Quiz Voir plus

Nathalie Sarraute et son œuvre

Dans quel pays est née Nathalie Sarraute ?

France
Royaume-Uni
Pologne
Russie

10 questions
41 lecteurs ont répondu
Thème : Nathalie SarrauteCréer un quiz sur cet auteur

{* *}