Recueil très intéressant, bien équilibré entre les textes traduits du malais et ceux traduits de l'anglais. Nous avons une vision globale du peuple multiethnique présent en Malaisie, que ce soit à la campagne comme à la ville, dans cette société de consommation où tout va trop vite. Certaines tensions sont mises en lumière et nous donne un regard un peu différent de celui que j'avais pu avoir dans "La somme de nos folies" où j'avais eu l'impression que tout le monde s'entendait à merveille.
Les éditions Magellan font un magnifique travail et nous permettent de découvrir de nombreux auteurs étrangers. J'ai particulièrement apprécié ici que la parole soit donnée à des personnes d'ethnies différentes : malaise, chinoise, tamoule etc. Nous avons les visions de chacun.
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Six nouvelles qui donnent chacune à voir un pan de la culture malaise, riche et influencée de toute part par les origines tantôt chinoise, indonésienne ou tamoule de ses habitants.
J'ai beaucoup aimé me plonger dans ces courts textes, qui soulignent tour à tour la fracassante entrée dans la modernité au détriment de l'agriculture traditionnelle, le spectre de la crise de 1997 et l'attirance pour les entreprises étrangères, les conflits entre ethnies où les Chinois sont accusés de dominer tout le commerce, et se plaignent en retour d'être écrasés par les impôts des politiques malais, ou encore une querelle de trottoirs entre vendeurs de streetfood qui voient leur lucratif business s'évaporer lorsqu'une indonésienne se met à cuisiner des spécialités malaises et chinoises.
L'humour n'est jamais bien loin, et permet de supporter le poids de la tradition ou des héritages respectifs des protagonistes ; j'ai particulièrement apprécié le petit prologue qui rappelle les grandes lignes de la littérature en Malaisie, où écrivains d'expressions malaise, anglaise, chinoise ou tamoule cohabitent dans un fourmillement attendrissant.
Une belle découverte, et un recueil très équilibré à mon sens !
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Excellent petit recueil de Nouvelles écrites par des auteurs Malaisiens. Les nouvelles sont de longueurs égales. Elles sont intelligentes et intéressantes, bien construites.
Les deux premières nouvelles abordent de façon bien ciblée le problème de la modernité, avec l'abandon des rizières, la construction d'usines et de gratte-ciel, l'arrivée des Burgers et des KFC. Les deux suivantes, très amusantes, abordent le problème du racisme entre Malais et Chinois. La dernière s'intéresse au problème de l'immigration et de la souffrance maternelle suite au décès d'un jeune dans le bidonville.
Ce livre m'a beaucoup plu, je le recommande.
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Le récit d'Et c'est le soir toute la journée débute en 1980. Et c'est la fin de l'histoire. La déchéance d'une bonne à tout faire, la mort d'une vieille dame, le départ vers l'Amérique d'une jeune fille. Trois personnages féminins, auxquels il faut ajouter ceux d'une mère de famille au bord de la crise de nerfs et d'une fillette de 6 ans névrosée, qui sont au coeur du roman de Preeta Samurasan, les hommes n'y jouant qu'un rôle subalterne. Habilement, la romancière va revenir en arrière, tisser la toile du temps à l'envers, et expliquer pourquoi on en est arrivé là. L'histoire est avant tout celle d'une famille indienne en Malaisie, plutôt aisée, mais souffrant du complexe des minorités de ce pays, à l'instar de la communauté chinoise, qui semble plus que dubitative (comme l'auteure, sans aucun doute) quant à l'harmonie multiraciale dont se vantent les autorités de ce pays musulman et, en principe, démocratique et sans discrimination d'aucune sorte. Ceci, c'est l'arrière plan, car plus on remonte dans le temps au fil du roman, plus le noeud de vipères que constitue la cellule familiale devient patent, nourri de rancoeurs et de jalousie recuites. La belle-mère hait sa bru qui le lui rend bien, la fille cadette essaie de ressembler à l'aînée, sans y parvenir, se rapproche de la servante tamoule, avant de la trahir. Quant au père, sans doute lassé par cet atmosphère vicié, il s'est construit un autre foyer, avec une femme chinoise. Samarasan raconte les petits et grands événements de cette maison indienne, avec un luxe de détails et de descriptions inouïs, une cruauté insensée, et un style luxuriant qui demande une attention de tous les instants. Ce roman, entre Proust, Balzac et Mauriac, toutes proportions gardées, est très exigeant et parfois aride, et d'une lenteur languissante. Il n'en reste pas moins un véritable tour de force, écrit dans une langue superbe, riche en portraits psychologiques, d'une effarante précision. Il y a un grand souffle à l'intérieur, le même qui est nécessaire pour en venir à bout.
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Un roman « familial ». Une description âpre des liens familiaux, des restes de la colonisation britannique, de la corruption, des constructions asymétriques entre « peuples » en Malaisie. Un regard sans complaisance sur les assignations « ethniques », les inégalités entre femmes et hommes, les domestiques et les maîtres, les relations avec la maladie et la vieillesse. Les histoires construites et celles inventées des enfants, leurs nécessaires fantômes.
Des personnes plus que des personnages, en particulier Aasha, Chellam et Uma.
On entre dans ces tranches de vies et, au fil des pages, se dessine un monde si familier dans ces différences, une proximité des situations, des rancœurs, des incapacités.
Le propre des vrais romans n’est pas de dépayser mais grâce à l’ancrage, à l’inscription dans des réalités locales de nous montrer l’universel et les similitudes de « la condition humaine »
Un roman à savourer, un kaléidoscope, et une belle langue.
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Par une triste journée de septembre 1980, une jeune servante tamoul, Chellam, est chassée de la "Grande Maison" de Kingfisher Lane qui abrite les Rajasekharan, une famille de notables indiens de la ville d'Ipoh, en Malaisie. Peu à peu le mystère se lève sur les raisons de ce congédiement et sur l'histoire de cette famille...
"Peu à peu" mais ô combien lentement...
L'auteur a un style à couper le souffle, et elle sait en jouer pour créer une atmosphère particulière, envoûtante et mystérieuse. Mais ses mots lyriques m'ont malheureusement plus ennuyée que fascinée, je me suis perdue dans les méandres de cette histoire centrée sur quelques personnages seulement. Je me suis sentie étouffée par cette atmosphère confinée, lourde de secrets et de non-dits.
C'est un roman qui demande disponibilité et concentration, un roman dense qui ne se laisse pas appréhender facilement...
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