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4.25/5 (sur 324 notes)

Nationalité : Canada
Biographie :

Priska Poirier est née à Granby. À l’âge de quinze ans, elle emménage à Drummondville où elle s’implique activement dans sa communauté à différents niveaux.

Les années qui suivent la verront d’ailleurs voyager en Amérique du Sud, en Europe et au Canada, tout en entamant des études universitaires à Sherbrooke en enseignement.

Elle attendra cependant encore quelques années pour le réaliser, se consacrant à ses élèves du primaire tout en suivant une formation en intervention psychosociale à l’université du Québec à Trois-Rivières.

L’écriture de sa série Le royaume de Lénacie, se fera au travers de son déménagement dans la ville de Candiac, de son travail d’enseignante à Chambly et de sa joie de devenir maman de trois garçons.

Malgré son emploi du temps chargé, Priska Poirier ne délaisse pas son implication communautaire et préside le conseil d’administration d’un CPE, en plus de coordonner les activités d’un organisme à but non lucratif.
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Source : /editionsdemortagne.com/
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Plongez dans cet univers fantastique sous-marin! Pour les lecteurs dès 12 ans. Écrit par Priska Poirier.


Citations et extraits (59) Voir plus Ajouter une citation
Au sommet de la gigantesque tour de bureaux abritant l’Académie de l’Envolée, Stella ferma les yeux. Elle serra entre ses doigts le médaillon de vol de sa mère, qui pendait à son cou. Elle lui transmit une dose d’énergie angélique et courba un peu le dos afin que deux magnifiques ailes blanches puissent apparaître. Immédiatement, elle se concentra pour que son corps soit dissimulé aux yeux des humains. La jeune fille déposa sa main droite sur son épaule gauche et sa main gauche sur son épaule droite. Elle replia ses grandes ailes dans son dos et se laissa tomber vers le sol. Elle adorait cette sensation. L’adrénaline se répandit dans ses veines et un grand sourire naquit sur ses lèvres. Lorsque la composition de l’air changea et que la température augmenta de quelques degrés, Stella ouvrit les yeux et déploya ses ailes. Elle redressa sa trajectoire juste à temps pour éviter de créer un courant d’air suspect dans les rues de Montréal. Elle entreprit de survoler les voitures en zigzaguant entre les édifices du centre-ville. Puis, l’adolescente contracta ses puissants muscles et remonta vers les nuages. Voler était une des choses qu’elle aimait le plus dans sa vie d’ange.
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Marguerite commençait maintenant à avoir l’estomac à
l’envers. Elle devenait de plus en plus nerveuse, comme à la veille
d’un examen. Lorsqu’ils furent arrivés au bout du corridor dans
lequel ils s’étaient engagés, un nouveau couloir offrit deux
embranchements : droite ou gauche. Gab emprunta celui de droite
et Ced celui de gauche. Marguerite n’hésita pas une seconde et
suivit de très près Gab, alors que Jack partait avec Ced. Au bout de
quelques minutes, toujours sans avoir rencontré âme qui vive à
part les « poissons-lumière », ils arrivèrent devant une nouvelle
porte d’algues. Celles-ci s’écartèrent de la même façon que les
précédentes et Marguerite se retrouva à l’entrée d’une grande
salle au bout de laquelle se tenaient deux sirènes.
La première était une très belle femme. Elle avait de longs
cheveux noirs, tirés en arrière. Elle portait une blouse vert pâle
très ample. Le jeune sirène qui se trouvait près d’elle avait aussi
de longs cheveux noirs et droits, coiffés de la même manière que
la femme. Il portait également un vêtement vert et sa queue
s’harmonisait avec ce dernier. « Sa queue est semblable à la
mienne », pensa Marguerite.
Gab se pencha alors, fit une révérence qui dura quelques
secondes, puis se retira. Marguerite comprit qu’elle était
maintenant seule devant ces inconnus. Soudainement, sa mère
Cynthia lui manqua cruellement. Marguerite dut faire un
formidable effort pour empêcher les larmes d’obstruer sa vue. La
fatigue du voyage, ajoutée à la découverte de cet univers ainsi qu’à
ses nouveaux apprentissages, eurent raison de ses forces. Pendant
une fraction de seconde, elle sentit ses jambes se dérober sous
elle. Comment, en de telles circonstances, se rappeler qu’elle
n’avait pas de jambes ?
Elle était incapable de faire un pas. Elle se trouvait dans un
monde totalement inconnu, sans aucune référence pour la
rassurer. Dans le doute, elle se remémora le comportement de Gab
et tenta d’imiter sa révérence. Le résultat fut passablement
médiocre. Il n’est déjà pas facile de faire une révérence parfaite
sur la solidité de la terre alors qu’on dispose de ses deux pieds,
alors imaginez dans l’eau avec une queue ! La sirène s’avança dans
sa direction. Pendant qu’elle avançait, Marguerite s’attarda à la
couleur de ses écailles. Bien qu’elles fussent toutes exactement de
la même teinte lilas, on aurait dit que des nuances de blanc
venaient en adoucir l’ensemble. Lorsqu’elle fut assez près,
Marguerite remarqua aussi ses yeux. Ils étaient du même vert que
les siens. Puis, dans ces yeux, elle put distinguer une interrogation,
une certaine peur aussi, mais surtout beaucoup d’amour. Alors
elle sut ! Son sang ne fit qu’un tour... Sa mère ! Elle se trouvait en
face de sa véritable mère !
Son coeur battait la chamade, et c’est alors que des lèvres de
Marguerite s’échappa un mot qu’elle ne connaissait pas :
Naquissa !
La femme ouvrit la bouche en signe de surprise. Ses yeux
s’emplirent d’eau. Tout doucement, elle ouvrit les bras et serra
Marguerite contre son coeur. Cette douceur, soudaine et
inattendue, après plusieurs jours de nervosité, de découvertes et
d’efforts pour apprendre à nager, à respirer et à s’orienter,
procura un tel sentiment de réconfort à Marguerite qu’elle rendit
son étreinte à sa mère. Alors sa tête se vida complètement et elle
prononça encore ce mot qui lui vint du fin fond de sa mémoire :
Naquissa, avec une intonation nouvelle et plus chantante.
— Ça alors ! Comment as-tu appris à dire maman dans la
langue des sirènes ? Gabriel n’avait pas le droit de t’apprendre ça.
Celui qui venait de parler était un sirène du même âge que
Marguerite. En fait, il n’avait que trois minutes de plus qu’elle et il
lui ressemblait comme deux gouttes d’eau dans l’océan.
— Salut, je m’appelle Hosh, continua-t-il, en arborant un large
sourire.
— Et moi, Marguerite.
— Ouais, je sais, on nous avait dit que c’est comme ça qu’ils
t’avaient appelée sur terre, ajouta-t-il....
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Toc toc toc ! On frappait à la porte. Gaston alla ouvrir et laissa entrer un jeune homme aux cheveux châtains bouclés dans le milieu de la trentaine. Il lui parut prévenant et d’emblée sympathique. Gabriel Beaver se tenait devant eux. Il se présenta. Marguerite, dont le cœur était à présent rempli d’espoir, s’était tue et attendait, immobile, le moment où son gardien annoncerait à ses parents qu’il l’emmènerait avec lui au fond de l’océan pour rencontrer son peuple. Gab révéla à Gaston qu’il avait fait la connaissance de Marguerite au cours de l’avant-midi. Puis, sans attendre, il énonça la raison de sa visite.

— Marguerite appartient à une famille qui vit sur une île privée au milieu de l’Atlantique, débuta-t-il. Cette famille forme un clan, et il est fréquent que les enfants grandissent à l’extérieur de celui-ci afin qu’ils puissent élargir leurs horizons. Lorsque vous avez adopté Marguerite, nous avons au préalable effectué une enquête sur votre famille afin de nous assurer de votre honnêteté et de vos bonnes intentions. Voici maintenant deux ans que j’attends le moment propice pour inviter Marguerite à venir rencontrer sa famille biologique.

En même temps qu’il parlait, Gab plongea son regard dans celui de Marguerite. Impossible de s’y méprendre. Il y avait dans ses yeux quelque chose qui lui demandait d’approuver ses paroles.

Au même instant, Gaston, contrarié, ouvrit la bouche.

— Écoutez, je ne sais pas qui vous êtes ni d’où vous venez, mais une chose est certaine, je ne vous laisserai pas amener Ma fille où que ce soit.

Gaston était fâché d’apprendre que Marguerite avait parlé à un inconnu. Comment savoir si ce qu’il disait était vrai ou si c’était elle qui lui avait naïvement appris qu’elle avait été adoptée. C’est parfois étonnant à quel point ce genre d’individu arrive facilement à faire parler une jeune adolescente et à recueillir une foule d’informations. Comment allait-il s’y prendre à présent pour faire sortir ce jeune blanc-bec de leur suite ?

De peur que son père ne s’oppose carrément au projet qu’elle commençait à faire sien, Marguerite lui demanda d’écouter au moins ce que M. Beaver avait à dire. Mais tandis qu’elle parlait, ses deux parents entendirent pour la énième fois, derrière les paroles de Marguerite, le satané même refrain qu’ils avaient enduré tout l’avant-midi. Découragés, ils prirent d’un commun accord le parti de s’asseoir et ils écoutèrent, pendant près d’une heure, ce que Gabriel avait à leur dire sur la fameuse île où vivait la prétendue famille biologique de leur fille.

Gab n’y alla pas par quatre chemins. Il leur rappela qu’ils avaient accepté le jour de l’adoption de Marguerite de la laisser partir lorsqu’elle serait en âge de découvrir sa famille. Il leur montra même un papier qu’ils avaient signé à ce moment-là. Gab savait cependant qu’il ne pourrait rien faire sans leur accord, car Marguerite était mineure et qu’aux yeux de la loi, elle était leur fille. Il entreprit donc, pour la première fois de sa carrière, ce qui faisait la hantise de tout gardien : réussir à convaincre des parents aimants et responsables de laisser partir leur enfant avec un parfait inconnu pendant deux mois. Gab n’arrivait cependant pas les mains vides. Depuis des siècles, des syrmains faisaient ce travail et ils étaient parfaitement organisés. L’île existait vraiment. Des gens à tous les niveaux du gouvernement pouvaient répondre de ses paroles.

Malgré leurs craintes initiales, les parents de Marguerite durent admettre que cet endroit paraissait vraiment sécuritaire. Tout semblait avoir été pensé pour le transport, le logement et le bien-être de leur fille. Gab était même prêt à leur fournir des références ministérielles et policières s’ils le souhaitaient. Tout au long de son discours, M. Beaver prenait bien soin d’insérer les phrases du refrain entre deux commentaires. Lorsqu’il décrivait les lieux, il disait, par exemple : Il est temps qu’elle sache, qu’elle connaisse ses origines. Ou encore, lorsqu’il parlait des membres de sa famille, il mentionnait qu’ils veilleraient sur Marguerite. Finalement, après l’avoir écouté attentivement, M. et Mme Duguay conclurent qu’ils y réfléchiraient jusqu’au lendemain. Lors de l’adoption, ils avaient donné leur parole, mais aujourd’hui, treize ans plus tard, étaient-ils tenus de la respecter ? Laisser partir leur fille de quatorze ans avec un étranger n’était pas une décision aisée à prendre.

À partir de cet instant, l’éternel refrain résonna dans leur tête sans arrêt et ce fut ainsi toute la nuit… Au petit matin, au moment où enfin la musique cessa, ils entendirent, dans la pièce d’à côté, Marguerite chantonner innocemment le même air. Ils se regardèrent alors, stupéfaits, et abdiquèrent. M. Duguay expliqua à Marguerite que si vraiment c’était sa volonté, elle pouvait aller passer l’été là-bas. Seulement, avant, il désirait vérifier les références et les papiers ministériels que M. Gabriel Beaver leur avait laissés.

Lorsque, le lendemain, Gabriel Beaver se présenta dans le hall de l’hôtel, Marguerite était déjà prête. Après avoir eu confirmation qu’elle serait de retour au plus tard la veille de la rentrée scolaire, les parents de Marguerite la regardèrent tristement partir aux côtés de cet inconnu. Ils avaient l’impression que, malgré son jeune âge, leur fille venait de passer la barrière invisible qui la séparait du monde adulte.

— Où allons-nous maintenant ? demanda Marguerite mi-excitée, mi-inquiète.

— Nous nous rendons au port, où nous attend un grand voilier qui nous mènera jusqu’aux Bermudes. Là, tu suivras tes premières leçons de nage et, dans une semaine, nous partirons pour le royaume de Lénacie.

Après environ trente minutes de route, ils arrivèrent effectivement devant un grand voilier. C’était un très beau bâtiment. Marguerite trouva qu’il ressemblait à celui du capitaine Crochet dans Peter Pan, le livre préféré de sa sœur Justine. Il était entièrement construit en bois. Environ aux deux tiers du bateau, vers la poupe, se trouvait un second étage ceinturé d’une balustrade. Marguerite, qui avait vu quelques films, dont une partie de l’intrigue se déroulait sur un bateau, se dit que ce devait être à cet endroit que se trouvait la cabine du capitaine. À l’extérieur, sur le pont supérieur, on voyait nettement l’imposant gouvernail. Le voilier avait également deux grands mâts et un plus petit. Les voiles, pour l’instant, étaient retenues par de robustes cordages. Sur le devant du trois-mâts, une magnifique sirène était sculptée à même la proue. Elle paraissait si réelle qu’on aurait dit qu’elle allait leur parler.

— Ce voilier appartient à M. Jeff. C’est un syrmain qui a décidé de faire sa vie sur terre, expliqua Gab. Il se promène d’un port à l’autre. Lorsque nous avons besoin de lui, il s’occupe de nous amener dans des eaux calmes et peu fréquentées afin de nous permettre de redevenir sirène et de retrouver notre peuple en toute discrétion. Son équipage est entièrement composé de syrmains.

Ils montèrent à bord et c’est M. Jeff lui-même qui vint les accueillir. Avec ses larges épaules, sa barbe et ses yeux rieurs, il fut d’emblée sympathique à la jeune fille. Il lui serra la main et lui dit :

— J’m’appelle Jeff, mais s’il cœur vous en dit, vous pouvez m’appeler Cap’tain comme tout le monde. Quant à moé, chu très content d’vous rencontrer. Même si ça fait ben douze ans que chu pas allé la voir, j’me souviens ben de vot’ belle maman.

— Enchantée, je m’appelle Marguerite. Vous avez un très beau bateau.

— C’est un voilier, mam’zelle ! Le plus beau voilier de c’côté-ci du globe, vous pouvez m’croire !

Sur ce, Cap’tain Jeff s’empara des bagages de Marguerite et se fit un devoir de lui faire faire le tour du « plus beau voilier de c’côté-ci du globe » ! Il y avait huit chambrettes, une salle à manger, une cuisine et une toute petite salle de bains. Marguerite profita de cette journée pour poser toutes les questions possibles et imaginables sur le fonctionnement du voilier. Content qu’elle s’y intéresse, Cap’tain Jeff l’instruisit avec plaisir. Gab avait déjà informé Marguerite qu’ils attendaient deux autres syrmains et elle avait très hâte de les rencontrer. Elle devrait cependant attendre au lendemain, car le soir tombant rapidement, il devint évident que leurs compagnons de voyage n’arriveraient pas le jour prévu.

Le lendemain matin, alors qu’ils se trouvaient tous sur le pont, ils virent arriver un homme d’une quarantaine d’années et un garçon du même âge environ que Marguerite. Le premier marchait en tête, d’un pas sûr et vif, tandis que le second traînait derrière. Il ne semblait pas du tout apprécier le fait d’avoir été tiré du lit de si bonne heure et paraissait de fort mauvaise humeur. Gab présenta l’homme à Marguerite.

— Marguerite, je te présente Ced, l’un des gardiens de Jack. Jack est le fils d’Usi, ton oncle, et de ce fait, il est ton cousin. Ced, Jack, je vous présente Marguerite, fille d’Una.

Marguerite, voyant qu’elle rencontrait pour la toute première fois un membre de sa famille biologique, afficha un grand sourire engageant et tendit la main aux deux nouveaux arrivants. Jack regarda sa main avec mépris, mais décida finalement, après plusieurs secondes d’hésitation, de la serrer froidement. Ced, quant à lui, ne se donna même pas la peine de jeter un œil dans sa direction. Il reprit les bagages et se dirigea vers les cabines, suivi de près par Jack.

Marguerite resta figée sur place. Le regard de profond mépris que lui avait lancé Jack l’avait sidérée. De plus, il lui avait serré la main tellement fort que ses doigts en étaient encore meurtris. Ce qui avait retenu cependant son attention, c’était le visage de Ced. Contrairement à Gab, qui était avenant avec tout le monde, Ced avait un visage fermé et dur. « Semblable à une lame de couteau », se dit Marguerite. Non seulement le visage de Ced était-il, comme toute sa personne d’ailleurs, fin, mince et anguleux, mais encore,
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— Qu’attends-tu ? Dépêche-toi !

— Qui… Qui parle ? demanda Marguerite, légèrement paniquée

— Je m’appelle Gabriel. Suis-moi !

— Suis-moi, suis-moi… Je ne te vois même pas !

Avec appréhension, Marguerite se glissa néanmoins silencieusement hors de son lit. Elle enfila sa robe de chambre et, avec l’intention de seulement voir qui parlait, elle fit un pas. Les autres se firent tout seuls. Elle n’avait plus la maîtrise de ses jambes. Elle maîtrisait tout le reste, mais pas ses deux membres inférieurs ! Doucement, à pas feutrés, elle sortit de la chambre, puis de l’hôtel et se dirigea vers la plage. Ses jambes avançaient toujours toutes seules et se dirigeaient dangereusement vers la mer !

— Non, non, je suis allergique ! ! ! dit-elle complètement affolée, cette fois.

— Fais-moi confiance, entendit-elle.

Sans trop savoir pourquoi, elle décida de faire confiance à cette voix et entra tranquillement dans l’eau. Elle était chaude et douce. Son inquiétude précédente faisait maintenant place à une étrange sensation de plaisir et de bien-être. Elle fit quelques pas et, soudain, elle sentit un léger chatouillis sur ses jambes. Elle descendit la main le long de son corps et, avec un frisson de dégoût, elle palpa les écailles que provoquait son allergie. Au même moment, elle vit surgir de l’eau un visage qui lui était vaguement familier.

— D’où viens-tu ? demanda Marguerite, apeurée devant ce visage surgissant de nulle part.

— De l’océan, répondit l’inconnu.

Incrédule, Marguerite sentit son cœur battre la chamade et elle se demanda alors si elle était saine d’esprit.

— Qui es-tu ?

— Je m’appelle Gabriel Beaver, mais tu peux m’appeler Gab. Je suis un de tes gardiens.

Il semblait à Marguerite que ces paroles « Je suis un de tes gardiens » résonnaient sans cesse dans sa tête.

— Mon gardien ? demanda Marguerite, sceptique.

— Exactement. Je veille sur toi depuis ta naissance, et il est maintenant temps que tu rejoignes ton frère jumeau, répondit tout naturellement Gab, qui avait l’air aussi détendu que s’il faisait une banale remarque au sujet de la présence de la lune dans le ciel à la nuit tombée.

Frère jumeau… Frère jumeau…

— Mais je n’ai pas de frère jumeau ! s’exclama immédiatement Marguerite, de plus en plus surprise de ce qu’elle entendait.

— Bien sûr que tu en as un ! Vous avez été séparés à la naissance, comme le veut la tradition. C’est ce qui vous permettra de prendre la relève d’Usi, votre oncle, et d’Una, votre mère.

Votre mère… Votre mère…

Marguerite, assommée, avait encore la bouche grande ouverte lorsque Gab continua :

— J’avais vraiment hâte que le moment soit venu. Ton frère et toi avez beaucoup de travail avant le début des épreuves.

Épreuves… Épreuves…

— Es-tu prête ? Tu dois, tout d’abord, apprendre à te servir de ta queue.

Queue… Queue…

De quoi parle-t-il ? Je n’ai pas de queue. Tout à coup, elle prit conscience du fait qu’elle ne marchait plus dans l’eau. En réalité, elle ne touchait même plus le sol ! Comment, alors, arrivait-elle à se tenir ainsi à la verticale ? Pour couronner le tout, il faisait noir et elle n’y voyait rien.

— Pouvons-nous aller nous asseoir sur la plage ? réclama-t-elle, l’air égaré.

À cette question, Gab, les yeux brillants d’espièglerie, éclata de rire. Marguerite n’en fut pas froissée, même si elle ne comprenait pas pourquoi il riait. Elle s’attarda plutôt à écouter son doux rire, à la fois franc et mélodieux.

— Il n’est pas nécessaire d’aller sur la plage lorsqu’on est une sirène, lui fit remarquer Gab.

— Ben voyons, tout le monde sait que les sirènes n’existent pas et puis, tu ne peux pas être une sirène, tu es un garçon, rétorqua-t-elle spontanément.

— Tu sais, dans l’océan, il y a autant de sirènes mâles que de sirènes femelles. Seulement, les humains l’ignorent.

Complètement sidérée par le discours que Gab tenait depuis leur rencontre, Marguerite avait l’impression que son cerveau avait perdu plus des trois quarts de ses facultés et qu’il lui serait, à tout jamais, impossible de faire de nouveau des liens entre les événements. Et pourtant, la nature étant ce qu’elle est, tout doucement, Marguerite commença à saisir toute l’ampleur des paroles de son gardien. Elle rassembla tout son courage pour lui poser la question qui lui semblait être la plus idiote de sa vie, mais qui lui brûlait les lèvres malgré tout.

— Suis-je, moi aussi, une sirène ?

Au lieu de répondre à sa question, Gab plongea dans l’eau et saisit un des pieds de Marguerite. Il remonta à la surface en le tenant toujours entre ses mains. Heureusement pour la jeune fille, ses yeux s’étaient graduellement adaptés à la noirceur. C’est ainsi que, quoique légèrement déstabilisée, elle put distinguer, émergeant de l’eau, l’extrémité d’une grosse queue de poisson. Soudain, elle comprit qu’il s’agissait de… ses pieds ! Gab la fixa intensément dans les yeux et la peur première qui l’avait envahie se dissipa.

— Haaaa ! Mon allergie n’était donc pas vraiment une allergie ? s’exclama Marguerite, qui commençait à comprendre.

Gab, qui se souvenait parfaitement des critiques cinglantes que lui avait values cet épisode, ne jugea pas nécessaire de relever la remarque. Il avait failli perdre sa licence de gardien pour avoir laissé, une année plus tôt, Cynthia Duguay acheter du sel de mer. Voilà déjà quatorze ans qu’il occupait la fonction de gardien, et Marguerite était sa première protégée. Heureusement, malgré cette négligence, Madame de Bourgogne, la directrice des gardiens, avait pris sa défense, et tout s’était bien terminé. Elle avait su souligner son excellent travail auprès de Marguerite au cours des dernières années. En effet, cette dernière avait été une enfant particulièrement difficile à surveiller en raison des très nombreux incidents et accidents qui s’étaient, année après année, accumulés dans son dossier. Cependant, sans qu’on comprenne trop pourquoi, Ced, le gardien du cousin de Marguerite, avait paru déçu, voire amer, en voyant Gab s’en tirer à si bon compte.

Marguerite le ramena cependant rapidement en mer en lui demandant ce qu’elle devait faire maintenant.

— Tu dois apprendre à te servir de ta queue.
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Se réunir est un début, rester ensemble est un progrès, travailler ensemble est la réussite.

Henry Ford
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Pour ceux qu'il veulent un suspense à partir du début:

Marguerite, une jeune fille aux yeux d'un vert éclatant et à la chevelure de jaïs, venait de fêter son quatorzième anniversaire. Ses parents lui avaient demandé de choisir l'endroit où toute la famille prendrait ses vacances. Ils étaient certain qu'elle opterait pour la France et s'en faisait une joie à l'avance. Cependant,spontanément, Marguerite avait répondu qu'elle souhaitait plutôt aller au bord de la mère, sur la côte américaine. M. et Mme Duguay avaient été si surpris qu'ils avaient bien mis deux ou trois minutes avant de retrouver l'usage de la parole. Ils avaient longement observé leur fille aînée. Si Marguerite avait eu à définir leur regard, elle l'aurait qualifié de surpris, bien sur, et d'indécis mais aussi, chose étrange, de soupçonneux. Quoi qu'il en soit, elle avait malgré tout maintenu son idée pendant deux semaines, et ses parents avient finalement cédé.
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Pendant que certain dansaient en affichant un air assuré et que d'autres pleurait d'angoisse, Marguerite sentit la peur l'envahir insidieusement. S'il fallait qu'elle échoue! Elle décida de transmettre un message à Mobile par l'intermédiaire de son frère.

- si je meurs, lui dicta-t-elle, tu dois me promettre de dire au prince que j'avais considéré très sérieusement sa demande en mariage.

Hosh haussa un sourcil. sa jumelle ne lui avait pas encore parlé de ce léger détail.

- Assur-lui qu'il est l'homme de vie, ajouta Marguerite. Il est courageux, bon et généreux, il doit continuer sa vie avec le souvenir de mon amour.

Hosh grimaça. visiblement, il trouvait sa sœur un peu trop mélodramatique! Mais pour elle, il le ferait...
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Mai 1262

Dans son lit en suspension à vingt centimètres du sol, Benjamin dormait. Le dôme au-dessus de lui permettait de l’isoler du bruit. Il aidait aussi à contrôler la température et le niveau d’oxygène afin que son sommeil soit le plus réparateur possible. Ses parents avaient toujours accordé un soin particulier à cet aspect de son bien-être. « Le sommeil est essentiel à la santé », répétait sans cesse sa mère.

Comme tous les matins, l’adolescent de quatorze ans se réveilla à cinq heures trente. Il appuya sur un bouton orangé qui fit disparaître le dôme qui recouvrait son lit. Puis, il glissa ses jambes dans le vide, sauta au sol et demanda sa musique favorite à l’ordinateur de la maison.

–Ouverture des toiles, ordonna-t-il en s’étirant.
Aussitôt, les fenêtres laissèrent pénétrer dans la chambre les premiers rayons du soleil. Benjamin aimait les matins. L’idée que tout pouvait arriver dans la journée lui plaisait. D’une simple pression du doigt sur la tête du lit, il fit en sorte que ses oreillers s’intègrent au matelas comme si celui-ci les avait aspirés. Le meuble se rangea ensuite à la verticale dans le mur. L’adolescent sortit de sa chambre et se dirigea vers la salle de bain. Les paroles de sa chanson préférée le suivirent. Dès qu’il entra dans la pièce, il appuya le pouce sur la petite plaque noire en bas du miroir afin qu’une micro goutte de son sang soit prélevée. Puis, il retira son survêtement, qu’il plaça dans une case, et pénétra dans la douche. Un sourire de bien-être étira ses lèvres. Benjamin avait droit à dix minutes et il était bien décidé à rester sous le jet d’eau chaude jusqu’à la toute dernière seconde. Du coin de l’œil, il lut les informations que lui transmettait le miroir, directement sur le mur de la douche.
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Depuis quelques jours, une petite inquiétude avait réussi à faire son chemin dans son esprit, même si son rapport était toujours bon. Sa compétition était dans deux semaines et ça faisait plus d’un an qu’il s’y préparait. Jamais les juges ne le laisseraient participer sans un bilan sanguin parfait.Lorsque le jet de la douche se fut arrêté et que le séchoir eut fait son travail, Benjamin sortit de la cabine et enfila ses vêtements de la journée. Il posa son techno com sur son poignet gauche. Ce faisant, il vit que Tristan, son meilleur ami, était déjà en ligne. Il ouvrit l’application de sa caméra.
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L’adolescent s’approcha de l’écran du salon et entra le nombre de crédits ainsi que le nombre de personnes pour chacun des repas de la semaine. Aussitôt, un choix de menus apparut en fonction des réserves contenues dans le garde-manger et du montant alloué pour l’achat de nouveaux aliments. Benjamin parcourut la liste des yeux en sélectionnant au fur et à mesure les repas qu’il souhaitait. Comme d’habitude, Jacob y alla de ses suggestions.
–Un macaroni aux lentilles... un couscous aux poivrons... Oh, Ben, choisis les sushis... s’il te pllaaaîîîîttttt !
–Oui pour le couscous et les sushis, mais pas le macaroni aux lentilles. Yark ! Si tu le veux, tu le choisiras quand ce sera ta semaine. L’adolescent voulait bien faire plaisir à son frère, mais il y avait des limites ! Il attendit que la liste des ingrédients manquants fût affichée, puis il envoya la commande au supermarché.
–Et voilà ! L’accusé de réception de l’épicerie apparut à l’écran avec un choix d’heures pour la livraison. Ben sélectionna dix-huit heures, car il était certain d’être là. Puis, d’un mouvement du doigt, il projeta les renseignements sur le mur-écran du salon afin d’en informer sa mère, qui était déjà partie travailler.
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